1/ Croissance et types de croissance de 1945 au début des années 70

Bretton Woods  1944

1/ L’après Seconde guerre mondiale : une internationalisation des économies pour une nouvelle étape de la mondialisation ?


A la fin de la Seconde guerre mondiale, il s'agit pour les états de reconstruire les économies. La reconstruction économique est une des priorités des différents Etats dans un contexte pour certains difficiles comme c’est le cas pour le Japon, l’Allemagne, la Pologne, l’URSS qui sont parmi les Etats les plus affectés par les destructions matérielles. 
Dans ce contexte, les E.-U initient un nouvel ordre mondial et ce dès juillet 1944 avec les accords de Bretton Woods. 
Dans certains états, notamment en Europe, se met en place assez rapidement un nouveau type d'état : l'état providence qui doit apporter aux individus une réelle protection en particulier une protection sociale. Les états deviennent aussi plus interventionnistes y compris sur le plan économique et pas seulement sur le plan social. 
Dans la relance économique de l'après guerre, les E.-U vont jour un rôle important (impact du plan Marshall) mais la croissance des années 1950-60 est aussi liée à la diffusion de progrès techniques, à la généralisation d'une autre organisation du travail (Organisation scientifique du travail ) déjà en place aux E.- U avec le taylorisme et le système fordiste. Les années 1945-1973 sont caractérisées par une très forte croissance économique que certains spécialistes ont qualifié d'inédite et donc d'exceptionnelle. Effectivement, pendant cette période les taux de croissance du PIB sont hors normes avec une moyenne de 4,6% par an pour les états d'Europe de l'Ouest entre 1950 et 1973, de plus de 9% pour le Japon et de 3,9 % pour les E-U. Les taux de croissance lors de la Première mondialisation au 19e siècle n'ont jamais dépassé 3,9% en l'occurrence pour les E-U. Cette phase de croissance et de prospérité méritait selon Jean Fourastié l'appellation de « trente glorieuses ». C'est également à partir de 1945 une nouvelle étape du processus de mondialisation : une étape marquée par une internationalisation des différentes économies. 
Les années 1945-1975 sont ainsi marquées par d’importants changements tant économiques que sociaux. 

 A/ Une économie mondiale et des échanges dominés par la puissance américaine 

 Il faut insister sur la situation globalement désastreuse de nombreuses économies notamment de l'Europe et du Japon en 1945 : des zones géographiques partiellement détruites par la Seconde guerre mondiale avec des difficultés économiques et sociales considérables. En effet, les états concernés sont endettés, subissent inflation, chômage, monnaies affaiblies sans compter une reconstruction nécessaire. C'est pourtant dans ce cadre qu'une période de croissance va assez rapidement démarrer favorisée par plusieurs facteurs que nous allons analyser. Dans ce cadre particulier, les E.-U sont en position de force avec une hégémonie économique impressionnante. 

a/ Des accords et négociations favorisant la reconstruction et le commerce international 

 -L’hégémonie des E.-U à la sortie de la guerre 

  •  Les E.-U sont les grands vainqueurs du conflit et sont notamment sur le plan économique en position de force. Ils ont la monnaie internationale, plus de 70% du stock d'or de la planétaire et 50% du PIB mondial est le résultat de la puissance économique des E-U. Les américains ont les moyens économiques d'aider à la reconstruction et ils ont intérêt à une relance de l'économie puisque une partie de leur économie est dépendante du commerce mondial et des exportations sur les marchés extérieurs : ils craignent notamment une crise de surproduction en 1945-46. Les économies européennes sont de ce fait un débouché pour l'économie des E-U. Parallèlement, pour les Américains, la paix, la prospérité économique et la démocratie et ses valeurs sont liées. 
  • Ils veulent un nouvel ordre économique mondial et leur hégémonie leur permet d’envisager ce nouvel ordre mondial. 
  • Ils ont dans cette optique organisé en 1944 la conférence de Bretton Woods qui décide de mettre en place après la guerre un nouveau système monétaire international fondé sur des taux de change plus ou moins fixes et un dollar comme monnaie internationale. Il s’agit de favoriser la convertibilité de toutes les monnaies avec un dollar devenant la devise clé du système. Ce dollar devient convertible en or.
  •  Au niveau des monnaies, le système de Bretton Woods est fondé aussi sur un régime de parités fixes entre les monnaies qui doivent peu fluctuer entre elles. Lors des accords de Bretton Woods est créé le Fonds monétaire international pour veiller au bon fonctionnement du nouveau système et à la stabilité du système monétaire. Les pays membres du FMI verse chacun un quota composé d’une partie en or et d’une autre dans leur monnaie nationale, un quota correspondant au poids économique des pays. Le FMI aide également les pays par des prêts.
  •  Est aussi crée la Banque Internationale pour la Reconstruction et le développement (BIRD) qui devient ultérieurement la Banque mondiale chargée d’aider à la reconstruction des pays impactés par la Seconde guerre mondiale. Le FMI et la BIRD ont leurs sièges à Washington ce qui montre bien que cet ordre économique mondial est piloté par les Etats-Unis. Ce nouveau système monétaire devait garantir, et ce fut le cas jusqu'au début des années 1970, la stabilité monétaire mondiale devant favorisé de ce fait la croissance des économies. Les E.-U ont d'abord procédé à une aide d'urgence entre 1944 et 1947 par l'intermédiaire de l' UNRRA (United Nations Recovery and Relief Administration. En 1945, le secrétaire d'état américain Byrnes promeut une campagne en faveur de la libéralisation des échanges et le président Roosevelt souhaite la création d'une organisation internationale du commerce (OIC) dont les objectifs seraient de favoriser le commerce et de régler les litiges commerciaux entre les états. Les E-U décident d'ouvrir des négociations : une série de négociations à Genève visant à réduire les droits de douane dont l'optique de favoriser les échanges et une autre négociation en 1946 à Londres pour créer une organisation internationale du commerce sur laquelle nous reviendrons. Les plans Marshall pour les états européens (1947) et Dodge (1949) pour le Japon participent de la logique américaine devant contribuer au retour de la croissance. 

-Un choix pour les économies capitalistes : la libéralisation des échanges et du commerce 

  •  A la sortie du conflit, les E.-U entendent aussi favoriser les échanges mondiaux en les libéralisant avec l’idée que la libéralisation des échanges favorisent la croissance économique. Les négociations de Genève aboutissent à la signature le 30 octobre 1947 du General Agreement on Tariffs and Trade (GATT) à savoir Accord général sur les tarifs et le commerce. Cet accord est signé par 23 états : Afrique du Sud, Australie, Belgique, Birmanie, Brésil, Canada, Ceylan, Chili, Chine (la Chine nationaliste), Cuba, Etats- Unis, Inde, France, Liban, Luxembourg, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pakistan, Pays-Bas, Rhodésie du Sud, Royaume-Uni, Syrie et Tchécoslovaquie et entre en vigueur en janvier 1948. Ces états signataires représentent à l'époque 80% du commerce mondial. 
  • Une conférence réunie à Cuba, à la Havane en mars 1948 permet la création de l' OIC, un accord visant à stabiliser les prix des produits de base. Or, le Congrès (à majorité républicaine alors que Truman est démocrate) des E.-U refuse de ratifier cet accord : l' OIC ne voit pas le jour. L'accord du GATT (35 articles) a comme objectif la liberté des échanges par l'abaissement progressif des droits de douane et la diminution des restrictions dites quantitatives (quotas).Il fixe dans ce cadre un certain nombre de règles : la liberté des échanges par la baisse des droits de douane ; la règle dite de la consolidation signifiant que les droits de douane une fois abaissés ne peuvent plus être relevés sauf compensations auprès des partenaires ; le principe de non discrimination et de réciprocité sachant qu'il ne doit pas y avoir de discriminations entre les entreprises exportatrices étrangères et les entreprises locales d'où la naissance de la clause de la nation la plus favorisée signifiant qu'un pays qui accorde un avantage à un autre doit l'accorder à tous et la clause du traitement national avec des règles identiques (règles commerciales, normes sanitaires et techniques) devant s'appliquer tant aux entreprises locales qu'étrangères ; sont interdits les quotas et toute forme de contingentement ; le dumping est aussi interdit et les différends commerciaux doivent être réglés par une procédure à l'amiable. Cet accord prévoit toutefois des exceptions : les pays en voie de développement peuvent avoir des droits de douane plus élevés pour protéger leurs industries en formation ; des zones de libre échange et des unions douanières peuvent être créées et il faut remarquer que les services tout comme l'agriculture ne sont pas concernés par cet accord. Le GATT a un secrétariat permanent dont le siège est à Genève.
  • En 1965 la fonction de directeur général est créée bien qu'il existait déjà un secrétaire général. La libéralisation des échanges est donc le fruit de négociations régulières par l'intermédiaire de cycles de négociations : huit cycles ont eu lieu entre 1947 et 1994 et le GATT est passé de 23 membres à 120. Il s'agit des cycles ou rounds de Genève (1947), cycle d'Annecy (1949), cycle de Torquay (1951 au Royaume-Uni), cycle de Genève en 1956, Dillon round (1960-61), Kennedy round (64-67), Tokyo round (73-79) et Uruguay round (1986-1994). 
  • Les premiers cycles du GATT sont marqués par un nombre croissant de participants de 23 en 1947 à 99 en 1973, les droits de douane sont abaissés par trois entre 1947 et 1956. Le Dillon round permet d'accélérer une baisse des droits de douane alors que se sont créées la CEE en 1957 et l' AELE en 1959. Le Kennedy round rend possible une baisse de 35% des droits de douane entre 1968 et 1972 à un moment où la CEE devient le premier exportateur mondial devant les E.-U (25% des exportations mondiales en 1961 pour la CEE contre 19% pour les E.-U. Et le Canada). 
  • A la fin de ce cycle , les droits de douane sur les produits manufacturés sont tombés à 8% pour la CEE et 13,5% pour les E-U. Le commerce mondial s'accélère encore plus dans ces années là progressant de 9% par an entre 1963 et 1973. Le cycle de l'Uruguay round est le plus conséquent : il se conclut par les accords de Marrakech donnant naissance à l'OMC : l'organisation mondiale du commerce. Ce cycle a également traité de l'agriculture, des services, des télécommunications... 

 b/ L’explosion des flux et des échanges 

 La libéralisation des échanges, la formation des unions régionales (CEE...) tout comme les révolutions des transports et des communications ont permis une explosion des échanges. 

-une expansion exceptionnelle 

  •  Le commerce mondial en volume est multiplié par 6 tant au niveau des biens et des services entre 1948 et 1973 et il est même multiplié par 30 entre 1948 et 2007. Il passe de 124 milliards de dollars en 1950 à 260 milliards en 1960 à 600 milliards en 1973 (il est de plus de 18 300 milliard en 2013). 
  • En moyenne, le taux de croissance des échanges est de 7%. Parallèlement, les économies sont à la fois plus dépendantes et ouvertes : le taux d'ouverture des économies (part des productions exportées) passe de 6% en en 1945 à 15% en 1973 pour les états d'Europe occidentale soit d'ailleurs le même niveau qu'en 1913. La forte croissance des échanges est supérieure à la croissance du PNB (un PNB multiplié par 8 entre 1948 et 2007). Les échanges et leur développement sont donc un des moteurs de la croissance économique : celle-ci est liée au développement des échanges. 
  • Dans cette optique, les exportations jouent un rôle grandissant : en 1950, les exportations de marchandises représentent en France 10% du PNB et sont passées à environ 27% à la fin des années 2000. La structure des échanges repose sur une part importante des produits manufacturés : 80% des échanges mondiaux actuellement. Cette part est d'ailleurs passée de 40 à 78% entre 1950 et 2002. Par contre, la part des produits dits primaires diminuent (produits agricoles et miniers) alors la part des services ne cesse d'augmenter. Enfin, ces échanges obéissent à une division du travail spécifique. 
  • Les états développés (E.-U, Europe de l'Ouest, Australie, Canada...) produisent et exportent des produits manufacturés et importent des matières premières (minerais, hydrocarbures). Les pays en développement exportent des matières premières (minérales ou agricoles) et importent des produits manufacturés des pays développés. Il faut signaler qu'à la fin des années 1960-début années 1970, des états asiatiques se développent fortement, le Japon en tête mais également la Corée du sud, Singapour... profitant d'avantages comparatifs comme un faible coût de la main d' œuvre et également en faisant appel à des capitaux étrangers. Quant aux états d'Europe de l'Est communistes et à l'URSS, ils participent très peu aux échanges internationaux. 

 -favorisée par la double révolution des transports et des communications 

  •  La double révolution des transports et des communications favorise également les échanges par un accroissement des volumes transportés et une vitesse accrue. Le transport maritime notamment est essentiel (1973 = 80% des échanges sont maritimes) : il a connu des évolutions notables. Tout d'abord, la taille des navires a augmenté comme en témoignent les pétroliers géants (supertankers) pouvant acheminer 500 000 tonnes de pétrole. 
  • Autre changement très important : les conteneurs et les porte-conteneurs. Le conteneur est inventé en 1956 par Malcolm McLean, un transporteur routier américain et se développe fortement dans le milieu des années 1960. ces boîtes métalliques ont deux avantages : elles sont standardisées et uniformes et peuvent donc être superposées les unes sur les autres avec un stockage aisé ( deux types de containers : EVP 20 pieds (6,058 m) et EVP 40 pieds (12,199 m). Des navires ont été imaginés pour les transporter : les porte-conteneurs dont les capacités ne cessent d'augmenter ( ils sont passés de 3000 EVP dans les années 70 à 9 000 EVP à la fin des années 2000. l’un des plus grands est actuellement le Bougainville inauguré en 2014 avec la possibilité d'embarquer 18 000 conteneurs, 400 mètres de long, 54 de large et 240 000 tonnes). 
  • Ces éléments ont permis d'abaisser le coût du fret de marchandises favorisant les échanges : un coût d'autant plus faible que l'énergie est à cette époque bon marché. 
  • La révolution des communications avec dans les années 1960 la télécopie permet d'accélérer les services, les informations et les commandes. Les informations circulent plus rapidement avec par exemple des prix des communications téléphoniques internationales en forte diminution (5 fois moins cher dans les années 1960 que dans les années 1930). En 1964, la firme Xerox met au point le premier télécopieur de bureau : progressivement le fax se développe. La mise au point et le développement d'Internet sont une autre étape importante. En 1971, 23 ordinateurs sont reliés par le système ARPANET et cette année correspond à l'envoi du premier courriel : depuis, Internet n' a cessé de s'améliorer devenant un outil favorisant lui aussi les échanges d'informations et de services. 

 B/ Un développement des flux financier sous leadership américain 

 La période de croissance est marquée par une forte croissance des flux financiers sans qu'on puisse encore parler de globalisation financière, une globalisation financière qui se produit dans les années 1980-1990. 

 a/ Des flux financiers massifs : le rôle des E.-U. -des dollars pour éviter une catastrophe: l'année 1945 

  •  Les E.-U jouent un rôle important dès 1945 : ils injectent dès la fin du conflit des dollars pour éviter une catastrophe économique et financière et aider un certain nombre de pays ayant des difficultés financières. Il faut rappeler qu'ils disposent des deux tiers des réserves mondiales d'or et qu'entre 1945 et 1951, les excédents commerciaux américains sont évalués à 36 milliards de dollars.
  • Ils savent que les états impactés par la guerre sont dans des situations difficiles, ont conscience que le manque de capitaux et de liquidités de ces états ne peut leur permettre d'acheter. Dès le mois de décembre 1945, ils fournissent une aide au Royaume-Uni dont la dette est évaluée à 17 milliards de dollars. 
  • Cette dette est en grande partie annulée alors qu'un prêt de plus de 3,7 milliards de dollars est accordé (sur 50 ans). En 1946, un accord est signé entre la France et les E.-U : ce sont les accords Blum-Byrnes annulant 70% de la dette française en plus d'un prêt d'un milliard de dollars. 
  • Enfin, les E.-U apportent des aides d'urgence à plusieurs pays dont l'Allemagne. Entre 1945 et 1948, les E.-U ont fourni une aide estimée à 8 milliards de dollars. 

-l'aide américaine : le plan Marshall et le plan Dodge 

  •  Dans un second temps, les E.-U lancent deux plans d'aide : le plan Marshall à destination de l'Europe et le plan Dodge pour le Japon. Entre 1948 et 1951, le plan Marshall distribue 12,8 milliards de dollars aux états européens bénéficiaires (90% de cette aide relève de dons). La France, le Royaume-Uni reçoivent chacun 20% de cette aide, 12% pour l'Allemagne de l'Ouest, 10% pour l'Italie... 
  • Cette aide permet aux états européens de financer la reconstruction notamment par l'achat de produits manufacturés américains (biens d'équipement). Cette aide a comme résultat une reprise de la production industrielle qui en 1950 retrouve son niveau de 1938. le Japon reçoit aussi une aide par le plan Dodge : ce dernier est un plan financier et monétaire devant lutter contre l'inflation. Dans ce cadre, la monnaie japonaise, le Yen est fortement dévaluée par rapport au dollar (de 50%) afin de relancer les exportations. Il attribue une aide estimée à un milliard de dollar. 

 b/Des investissements massifs dynamisant les économies 

 Les IDE, faibles dans les années 1945-1950 (moins de 100 millions de dollars) s'intensifient jusqu'au milieu des années 1950 (de l'ordre de 700 millions de dollars par an en moyenne) pour s'accélérer par la suite : 2 milliards de dollars en 1956, 3,5 milliards en 1965, 13 milliards de dollars en 1973. Dans un premier temps, ces investissements sont plutôt à destination du Canada, du Moyen-Orient (secteur des hydrocarbures) et de l'Amérique latine ; Dans un second temps, à la fin des années 1950, ils sont plus à destination de l'Europe de l'Ouest. 

 -le rôle des FTN américaines 

  • Les firmes américaines investissent de façon assez importante donc notamment dans des secteurs comme l'industrie automobile, les industries de pointe. Elles optent pour l'Europe mais aussi pour des états asiatiques connaissant une réelle croissance. Les firmes américaines qui sont les plus puissantes choisissent, à partir des années 1960, des stratégies de marché avec l'implantation de filiales dans les états développés pour bénéficier d'un pouvoir d'achat de plus en plus important des consommateurs de ces pays. En 1973, 15 des 30 premières firmes multinationales mondiales sont américaines dont 7 des 10 premières avec en particulier Exxon, General Motors, Ford, Texaco, Mobil, Standard Oil of California et Gulf Oil soit une dominante de firmes liées aux hydrocarbures. 

 -A qui profite ces changements ? 

  •  Les firmes multinationales américaines ont tiré profit de la puissance des E.-U dès la sortie de de la guerre pour s'affirmer à l'échelle planétaire. Elles ont longtemps exercé une domination presque sans partage jusqu'aux années 1980 avant de voir émerger et s'affirmer des firmes européennes et japonaises. Elles ont également permis l'affirmation et la diffusion du modèle américain. Dès les années 1960, elles sont d'ailleurs contestées notamment en France mais aussi dans les états du tiers-monde car elles sont synonymes de perte de souveraineté. Or ces firmes en s'implantant à l'étranger sont aussi créatrices d'emplois.
Berlin en 1955

2/ Le temps d’une croissance exceptionnelle pour les pays occidentaux : un miracle ?


La croissance remarquable des années 1950-70 s'expliquent par une combinaison de facteurs dont certains viennent d'être abordés comme la libéralisation des échanges, la révolution des transports et des communications, le rôle des E.-U. D'autres facteurs se greffent à ceux déjà vus en particulier le rôle des Etats, la croissance démographique ou encore le dynamisme des entreprises. Les années 1945-1975 peuvent apparaître comme une « parenthèse enchantée » (Sabine Effose) ayant bénéficié aux PDEM. 

 A/ La croissance : une combinaison de facteurs

 Après la Seconde guerre mondiale, les états vont s'impliquer beaucoup plus fortement dans la vie économique comme nous l'avons déjà suggéré. Ces Etats s’inspirent de l’économiste anglais Keynes et vont mettre en œuvre des « politiques keynésiennes. » 

 a/ Le rôle de l'état : des états interventionnistes et moteurs de la croissance 

 Les Etats ont incontestablement joué un rôle important dans la croissance qu'ils ont contribué à faciliter. Ces Etats deviennent des régulateurs des économies s'inspirant donc des théories économiques alors « à la mode » de J.M Keynes. 

 -Etats investisseurs et « développeurs » 

  •  Tout d'abord, les états ont procédé dès les années d'après guerre à des investissements importants que permettaient en partie d'ailleurs l'aide américaine. Les états augmentent donc les dépenses publiques qui passent atteignent entre 30 et 40% du PIB. Ils deviennent des acteurs économiques importants de plusieurs façons. Dans plusieurs pays, un important secteur public s'est développé par le biais de nationalisations comme en France en 1945 avec entre autres des nationalisation dans les secteurs de l'énergie et des banques. La nationalisation de banques facilite pour les Etats les investissements qu'ils peuvent ainsi ciblés et programmés. En France sont ainsi nationalisés les Houillères du Nord et du Pas-de-Calais, la firme Renault (16 janvier 1945), la Banque de France (décembre 1945), l'électricité et le gaz (en 1946)... Au Royaume-Uni, sont nationalisés la Banque d'Angleterre en 1945, les Charbonnages en 1946, l'électricité en 1947...
  • Pour certains gouvernements, le contexte d'après-guerre explique la nécessité d'états qui agissent et redressent l'économie par le contrôle d'entreprises. De plus, il ne faut pas oublier que les politiques libérales d'avant guerre ont été jugées responsables ou/et incapables d'anticiper puis de réguler la crise de 1929. Les nationalisations en France visent non seulement à reconstruire mais surtout à moderniser le pays. 
  • L'Etat français a pu conduire une véritable politique industrielle favorisant le développement de groupes industriels comme Pechiney ou Saint-Gobain. En Italie est créée en 1953 l'ENI (Ente Nazionale Idrocarburi) avec pour objectif de fournir aux Italiens de l'énergie : cette firme puissante a contribué au dynamisme économique de l'Italie (elle est privatisée dans les années 1990). Même aux Etats-Unis, l' état fédéral, dans le cadre de la guerre froide, joue un rôle important par ses commandes et ses dépenses militaires. 

 -Etats planificateurs 

  •  Les Etats sont aussi des états planificateurs donc des états qui tentent d'organiser les économies et d'améliorer l'efficacité des politiques économiques. La planification doit permettre aux états de dynamiser les économies, de coordonner les activités économiques pour plus d'efficacité. A la différences des économies socialistes d'Europe de l'Est et soviétique, la planification est indicative et non impérative. En 1946 est crée en France le Commissariat général au plan (sous l'impulsion de Jean Monnet) qui initie une planification « à la française » avec des plans quinquennaux incitatifs fixant des objectifs à atteindre. Le premier plan (1946-1952) avait pour objectifs de moderniser les industries dites de base, d'améliorer le niveau de vie ... Au Japon, le MITI, ministère de l'Industrie et du commerce extérieur dont la création remonte à 1949 joue un rôle similaire. Il avait pour buts de définir les stratégies économiques, de rechercher pour les entreprises nippones des informations sur les marchés extérieurs... On peut ajouter à cet aspect le fait que l'état peut aussi être un état aménageur. Ainsi, en France, c'est EDF qui termine dans les années 1945-50 l'électrification des territoires. Sont modernisés également les réseaux ferroviaires (eux aussi électrifiés progressivement) : un des symboles de cette modernisation est au Japon la création en 1964 d'un train à grande vitesse : le Shinkansen qui relie Tokyo à Osaka (sur 515 km) et c'est en 1965 que la SNCF imagine le même type de ligne entre Paris et Lyon qui est finalement décidé en 1974 et conçu et mis en service en 1981 avec le TGV. 

-Etats protecteurs

  •  Enfin, de nombreux états vont mettre en place le système de l' état-providence ce qui permet aux états d'avoir et de conduire des politiques de protection sociale. L'idée d'un état socialement protecteur est à relier à l'idée de développer les droits humains, une volonté forte de l'après guerre , des droits humains bafoués par les régimes totalitaires. En décembre 1948, l'ONU est d'ailleurs à l'initiative de la déclaration universelle des droits de l'homme qui affirme notamment que « toute personne en tant que membre de la société, a droit à la sécurité sociale ; elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité (...). ». 
  • L'idée de l'état- providence émane du rapport Beveridge élaboré au Royaume-uni en 1942 à la demande de Churchill. Ce rapport proposait la mise en place d'aides aux familles, une réelle politique de santé... 
  • Par l'intermédiaire de différents types d'allocations (familiales, chômage...) , les individus voient leur pouvoir d'achat s'accroître. Il s'agit également de réduire les inégalités et de renforcer la cohésion des nations. La création également de salaires minimaux comme le SMIG (salaire minimum interprofessionnel garanti) en France en 1950 (depuis 1970, le SMIC = salaire minimum interprofessionnel de croissance) entre dans la logique de soutien à la demande et à la consommation. Il faut insister sur le fait que plusieurs états inscrivent dans leurs constitutions l'idée de droits économique et sociaux que ce soit la constitution de la IVe République française, la Constitution italienne de 1946, la loi fondamentale de la RFA en 1949...
  • L'après guerre est difficile sur les plans économique et matériel ce qui conduit les états à prendre en charge le ravitaillement, à gérer les situations de pénurie. 
  • En Angleterre, se met en place entre 1946 et 1948, un système de protection sociale avec le gouvernement d'Attlee, un gouvernement travailliste : un système reposant sur des cotisations sociales finançant des assurances nationales de retraite et de chômage avec un système de santé nationalisé dont l'une des caractéristiques est sa gratuité (gratuité des soins et des médicaments).
  •  En France, le GPRF du général de Gaulle est à l'origine de la création de la sécurité sociale Le système français est fondé sur des prestations sociales concernant la santé, les retraites ainsi qu'une politique de la famille avec la création d'allocations familiales déjà élaborée en 1932 (gouvernement Tardieu), allocations généralisées par le code de la famille du 29 juillet 1939 qui sont en fait complétées en 1945 avec la création du quotient familial, une allocation logement (créée en 1948). La mise en place de ces états protecteurs est fondamentale mais provoque un accroissement des dépenses publiques. 
  • Ces dernières vont augmenter parallèlement à la croissance. Ainsi, au Royaume-Uni, les dépenses publiques passent de 30,1% du PIB en 1950 à 48,8% en 1977 ; en France, elle passe pour la même période de 26,7% à 40,9% et aux E.-U, la hausse, certes plus faible, est aussi effective passant de 20% à 32,6%. L' accroissement des dépenses publiques se traduit par une hausse des prélèvements sur la richesse nationale ce qui permet la redistribution entre les ménages et individus. Bilan Les états ont pris conscience de la nécessité d'une régulation des économies et l'économie devient un aspect essentiel des politiques publiques. Les états utilisent les politiques budgétaires pour des trouver des ressources afin de mettre en œuvre leurs politiques. En 1954 est créée, en France, la TVA (taxe à la valeur ajoutée) qui est ensuite adopté en RFA, en Belgique, aux Pays-Bas...
  • Les Etats ont participé non seulement à la reconstruction mais aussi à la croissance. 

 b/ Le rôle de la démographie 

 La croissance démographique est une autre dimension à prendre en compte comme facteur de la croissance économique. 

 -un phénomène clé : le « baby boom »... 

  •  Dès les années 1943-44, on note une reprise de la natalité, une reprise importante appelée baby boom : cette croissance se poursuit jusque à la fin des années 1960. Les taux de natalité annuels sont en moyenne de 20 pour mille alors que dans le même temps la mortalité recule pour atteindre les 10 pour mille. Ce taux de natalité s'explique par les mesures liées aux politiques familiales des états providence, les progrès de la médecine, une confiance retrouvée en l'avenir. 
  • Le différentiel entre la natalité et la mortalité rend possible une croissance naturelle importante faisant passer la population de 2,5 milliards d'habitants à 3,7 milliards entre 1950 et 1970 à l'échelle planétaire. Bien entendu, la croissance démographique des pays développés tout en étant notable reste moins importante que pour les états en voie de développement. 
  • Néanmoins, la population des E.-U est de 150 millions d'habitants en 1950, de près de 180 millions en 1960, de 203 millions en 1970 soit 50 millions d'habitants en plus en 20 ans ; la population du Japon passe de 83 millions en 1950 à 104 millions en 1970 ; la France voit sa population croître entre 1950 et 1970 de 41 à 51 millions d'habitants... 

 -...un vecteur de croissance

  •  Cet essor démographique est un vecteur de croissance économique dynamisant la demande, augmentant le nombre de consommateurs. Le dynamisme démographique est synonyme de rajeunissement des populations nécessitant des infrastructures nouvelles à savoir logements, écoles...
  •  L'accroissement de la population s'inscrit en plus dans des sociétés et économies qui ont besoin de main d' œuvre : une main d' œuvre qui ne sera d'ailleurs pas toujours suffisante d'où un appel à l'immigration. 

c/ Des entreprises motrices et innovatrices 

 Dans des économies de marché où les entreprises sont un acteur important du système, elles jouent un rôle moteur par leurs investissements, leurs innovations... 

 -des entreprises qui innovent 

  •  Les entreprises innovent en particulier dans leur organisation avec le fordisme (et le taylorisme) se généralisant et n'étant plus spécifique aux entreprises américaines. Le travail à la chaîne se développe avec une productivité qui augmente. Les salaires sont aussi en hausse ce qui dynamise la consommation. Les entreprises sont passées à la production de masse permettant de satisfaire une consommation de masse.
  • Les innovations sont également technologiques : des inventions comme la fibre optique en 1955, les boîtes en aluminium en 1959, les circuits intégrés en 1964...sont à l'origine du développement de nouvelles industries comme les industries électroniques puis informatiques. La recherche-développement (2 à 3% du PNB) est un élément très important de la croissance. Pour certains économistes comme Robert Solow (américain) ou Edmond Malinvaud (France), les progrès techniques ainsi que une plus grande productivité sont les éléments essentiels de cette croissance. 

 -des entreprises qui investissent 

  •  Ces innovations sont possibles par les très importants investissements opérés par les entreprises. Le taux moyen d'investissement en pourcentage du PIB est de près de 30% pour le Japon, de 23% pour la RFA, de 21% pour la France...Ces investissements favorisent l'achat et le renouvellement des machines (croissance intensive) mais aussi la création de nouvelles usines (croissance intensive) Ces investissements et les innovations permettent aux entreprises de faire plus de profits, accélèrent le phénomène de concentration. Certaines firmes multinationales sont en forte croissance, achètent d'autres firmes afin de devenir plus puissantes. L'exemple de la firme américaine ITT est exemplaire, une firme créée en 1920 opérant dans le domaine des télécommunications. 
  • Dans les années 1960, elle devient un immense conglomérat en insistant sur la diversification des activités en achetant des firmes aussi bien dans le domaine de la climatisation que dans le secteur des assurances et de la finance mais aussi dans l'hôtellerie. Parallèlement, ce type d'entreprises s'internationalisent de plus en plus avec l'implantation de filiales à l'étranger. 

 Bilan

 La productivité et sa forte hausse est un des moteurs essentiels de la croissance des années 1950-70. Cette hausse de la productivité provient des progrès techniques, d'une organisation scientifique du travail qui se généralise. Entre 1950 et 1973, cette productivité est multipliée par trois en France, par quatre en RFA et par cinq au Japon. Il faut ajouter l'impact des investissements avec des taux d'investissement en % du PIB pouvant être importants. Ainsi, ce taux d'investissement en % du PIB par an entre 1950 et 1971 est de 17,8% aux E.-U, de 22% en France, 25% en RFA et de 29,6% au Japon. 
Les progrès techniques sont fondamentaux comme on peut en juger dans le domaine de l'agriculture. En France, la production de blé passe de 7,6 millions de tonnes en 1948 à 14 en 1962 et 19 en 1974 pour une surface cultivée identique alors que dans le même temps le nombre d'actifs agricoles est lui passé de 4,9 millions en 1954 à 2,2 millions en 1974. Les rendements ont fortement augmenté (doublement entre 1948 et 1968) par la mécanisation, une hausse de la consommation d'engrais (53 kg par hectare en 1950 et 275 kg en 1975)... 

 B/ Comment se manifeste cette croissance ? 

 La forte croissance de ces années 50-70 se traduit par un très fort développement industriel, un nouveau phénomène qui est la tertiarisation des économies, des agricultures en mutations profondes ainsi que de nombreuses manifestations et effets sociaux comme l’urbanisation, la métropolisation.... 

a/ Des manifestations économiques fondamentales 

 -un développement industriel très important : une 3e Révolution industrielle

  •  Les E.-U, le Japon et l'Europe connaissent un cycle de croissance unique en lien avec ce que Jeremy Rifkin l'économiste américain a nommé la 3e révolution industrielle. Cette révolution industrielle repose sur les nouvelles technologies de l'information et de la communication. Il y a incontestablement dès les années 1950-60, des mutations scientifiques et industrielles qui s'opèrent reposant sur de nouvelles sources d'énergie comme l'énergie nucléaire, sur l'émergence et le développement de l'électronique et de l'informatique, sur de nouveaux procédés chimiques permettant la production de produits synthétiques. Les premières centrales nucléaires apparaissent dès les années 1950 avec une première centrale mise au point aux E.-U dans l'Idaho.
  • La première centrale française est développée en 1956 à Marcoule. La première machine à calculer électronique est mise au point en 1961 et en 1963 23 000 calculettes électroniques fonctionnaient sur la planète ... En 1969 est inventé le premier microprocesseur dans l'entreprise américaine Intel créée en 1968 et le premier qui est commercialisé l'est en 1971. Ces mutations scientifiques ont permis à de nouvelles industries de se développer comme les industries électroniques et informatiques. Ainsi, les premiers ordinateurs commerciaux sont vendus en 1951. 
  • Parallèlement, de grandes entreprises vont faire le choix de l'informatique en l'occurrence des firmes issues de l'électronique et des biens d'équipement électriques comme General Electric (une firme fondée en 1892), Honeywell (firme créée en 1906) , Hewlett-Packard (firme créée à Palo Alto en 1939) ou IBM (International Business Machine, une entreprise fondée en 1911) des firmes américaines ou Fujitsu au Japon, une entreprise dont la création remonte à 1935. 

 -des économies de plus en plus « tertiarisées » 

  •  Cette période voit l'essor du secteur des services donc du secteur tertiaire (transports, commerce, banques et assurances, services commerciaux des entreprises...). Cet essor est lié à la révolution des transport, au développement des commerces notamment des super et hypermarchés...Les premiers supermarchés furent créés aux Etats-Unis dans les années 1930 (Michael Cullen en est considéré comme l'initiateur quand il ouvre à New York son magasin : « King Cullen »). Le premier ouvre au Canada en 1934 puis à Londres en 1948. 
  • Le premier véritable supermarché français s'ouvre en 1958 dans la banlieue parisienne à Rueil- Malmaison. En 1946, on comptait aux Etats-Unis plus de 10 000 supermarchés. 
  • Puis vont apparaître des hypermarchés qui ne sont rien d'autres que des supermarchés mais d'une plus grande dimension (2500 m carré) : le premier ouvre en Belgique en 1961 puis un Carrefour ouvre ses portes en 1963 toujours en région parisienne (Sainte-Geneviève-des-Bois). 
  • Cette croissance des services s'expliquent également par les besoins des individus en matière de tourisme : l'allongement des congés et la hausse du pouvoir d'achat facilite l'expansion de ce secteur d'activités. Le développement des systèmes de protection sociale (sécurité sociale créée en France en 1945), la massification de l'enseignement , le développement des médias sont d'autres éléments explicatifs importants auquel on peut ajouter le développement du secteur public en lien avec le Welfare State. 
  • Cette tertiarisation se traduit par une croissance de catégories socioprofessionnelles comme les employés et les cadres ceux qu'on nomme les cols blancs. La croissance a favorisé la tertiarisation des économies. 

 -et des agricultures en voie de mutations 

  •  La croissance des « trente glorieuses » a modifié les agricultures avec une véritable « révolution agricole ». La situation en 1945 en Europe, avec une importante pénurie et le rationnement, nécessite une agriculture performante, moderne et productive. Les états européens ont donc la volonté de moderniser l'agriculture afin qu'elle soit plus productive. Des mutations importantes ont lieu avec une mécanisation accrue, l'utilisation importante d'engrais et de produits chimiques. La politique agricole commune (PAC en 1962) mise en place par les états membres de la CEE entre dans cette logique. La modernisation de l'agriculture a pour effets d'augmenter les rendements (les gains de productivité dans l'agriculture sont en moyenne de 7% par an dans les années 50-60) et les productions de céréales ont augmenté fortement passant de 800 millions de tonnes en 1961 à près de 2000 millions de tonnes dans les années 1995-98. 
  • Mais ces performances induisent des effets importants: la mécanisation et la hausse de la productivité (une hausse impactant les prix à la baisse) poussent à l'exode rural et à un nombre d'agriculteurs en baisse constante justifiant le livre d' Henri Mendras de 1970:La fin des paysans. 
  • En parallèle, certaines régions rurales connaissent le processus de désertification. S'ajoutent d'importants écarts de revenus entre des agriculteurs ayant des exploitations importantes et modernes et des agriculteurs aux exploitations plus modestes. La part de l'agriculture dans les PIB ne vont cesser de diminuer comme le montre le cas de la France : 8,9% en 1965, 7,5% en 1970, 2,6% en 1993 ou de l'Allemagne avec une part de 3,7% en 1970 et de 1% en 1993. 

 b/Des manifestations sociales reflets des transformations des sociétés 

 La croissance exceptionnelle se manifeste au niveau social par des changements importants signes de sociétés en mutations. 

 -des progrès sociaux considérables 

  •  Les progrès sociaux sont indéniables grâce à une hausse régulière du pouvoir d'achat (un pouvoir d'achat multiplié en moyenne par 3 pendant cette période) des individus et des revenus, à des taux de chômage faibles ( 5% aux E.-U dans la période 1960-67 ; 1,5% en France pour la même époque ; 1,3% pour le Japon et 0,8% en Allemagne). Les états développés sont riches avec des revenus moyens annuels supérieurs à 9000 dollars. L'état-providence a rendu possible également ces progrès par le biais de revenus garantis ou d'allocations diverses. Le niveau et les conditions de vie des individus s’améliorent. 

-pour une société de consommation de plus en plus présente 

  •  La société de consommation devient une norme avec en particulier une demande accrue en biens que ce soit des biens ménagers (réfrigérateurs, équipements électroménagers), téléviseurs, radios, téléphones... 
  • Le développement des supermarchés et hypermarchés évoqués plus haut sont des symboles de cette société de consommation. L'American way of life devient une norme et un modèle. 

c/ Des sociétés en transformations 

 -des sociétés qui mutent : essor des classes moyennes, « fin annoncée des paysans », urbanisation accélérée... 

  • Les sociétés sont donc en mutations avec des structures sociales évolutives. La croissance et la production de masse ont permis un taux d'activité important qui rend possible l'absorption des nombreux jeunes du baby boom entrant sur le marché du travail et de femmes de plus en plus nombreuse sur ce même marché. Les « classes moyennes » sont devenues majoritaires bien que ce terme recouvre des réalités et des activités différentes : professions libérales, enseignants, commerçants... 
  • Ces classes moyennes ont vu leurs revenus s'accroître facilitant l'accès à la propriété, le développement des banlieues dites pavillonnaires. Néanmoins, elles ne peuvent rivaliser avec les catégories sociales les plus favorisées à savoir la haute bourgeoisie. Une autre mutation déjà évoquée est la moindre présence des agriculteurs avec un monde agricole et rural de moins en moins prégnant. 
  • Une autre catégorie encore très présente pendant cette phase de croissance est la catégorie des ouvriers. Leur situation reste assez difficile mais la croissance a permis d'améliorer leurs conditions de vie. L'urbanisation avec l'essor des banlieues sont d'autres dimensions de la croissance. Les années 1960-70 sont marquées par un processus d'urbanisation accélérée : les villes sont attractives et sont des bassins d'emplois. 
  • La massification de l'enseignement avec un accès de plus en plus élargi à l'enseignement secondaire et supérieur est également un effet d'une croissance générant d'autres perspectives. Enfin, on remarque un ralentissement démographique certain pour les états développés ne représentant plus que 15% de la population mondiale en 1980. 
  • Les années 60 sont des années de changements démographiques avec des taux de natalité en baisse constante descendant sous les 15 pour mille. 

-des effets économiques inégaux : des territoires inégalement impactés, des catégories sociales plus ou moins écartés... 

  •  Les effets de la croissance sont inégaux tant au niveau des territoires que des catégories sociales. Ce sont les villes, les littoraux et les territoires industriels qui bénéficient le plus de la croissance : les emplois et les activités se concentrent sur ce type de territoires. La croissance renforce les logiques centres-périphéries avec des territoires en retrait (territoires ruraux notamment). Toutes les catégories sociales ne profitent pas de la croissance produisant des laissés-pour-compte. Les petits agriculteurs, certains artisans et petits commerçants souffrent des mutations des sociétés. 
  • C'est aussi le cas de certaines catégories d'ouvriers comme les mineurs, les ouvriers du textile. Il faut également souligner les difficultés des travailleurs immigrés, de populations qui restent encore à l'écart comme les populations noires aux Etats-Unis. Bilan : la croissance dans 4 états : les E.-U, le Royaume-Uni, le Japon et l'Allemagne. Les Etats-Unis n'ont pas connu pendant la phase des 30 glorieuses la croissance la plus soutenue des états développées. La fin de la guerre, avec la nécessaire reconversion de l'économie américaine devant passer d'une économie de guerre à une économie civile, a même conduit temporairement à une régression du PIB. 
  • Le plan Marshall et la reconstruction de l'Europe vont dynamiser l'économie des E.-U. Tout comme la guerre de Corée (1950-53). Il faut d'ailleurs faire remarquer que la guerre froide et la course aux armements génèrent de la croissance par le développement des industries d'armement qui, elles-mêmes, sont actrices de nombreuses innovations technologiques. Les années 1950-51 voient une croissance forte de 10% par an mais par la suite, entre 1953 et 1960, la croissance ralentit tombant à) environ 2,5% par an en moyenne. Les années 1960 sont des années plus dynamiques : un dynamisme s'expliquant par la mise en application du programme de John Kennedy avec une hausse des dépenses publiques ayant deux buts : la lutte contre la misère et la conquête spatiale. La guerre du Vietnam implique également des dépenses supplémentaires bénéficiant à certaines industries. 
  • La croissance des E.-U bien que moins importante que d'autres états reste satisfaisante : l'accroissement démographique l'explique partiellement également. 
  • Il faut préciser que les E.- U à l'inverse des états européens avaient dès les années 20-30 développé un système fordiste avec des niveaux de productivité notables : sa croissance ne pouvait de ce fait atteindre les mêmes niveaux que ceux des autres états développés. Le Royaume-Uni connaît aussi une croissance plutôt faible à l'inverse du Japon, de la France ou de l'Allemagne. Les années de l'immédiat après guerre sont difficiles avec un endettement élevé, une monnaie en difficulté.... 
  • Les gouvernements mènent donc des politiques d'austérité dont les objectifs sont de freiner l'inflation. Et de lutter contre le déficit commercial. Comme la France, le Royaume-Uni procède à des nationalisations dans plusieurs domaines (transports, gaz, électricité...) et met en place l'état-providence. Néanmoins, la croissance britannique est en moyenne de 3% par an entre 1950 et 1973 : les gains de productivité ne sont pas assez importants avec un système productif plutôt vieillissant et des investissements pas assez importants. Le Japon est dans une autre perspective étant dans une situation très délicate en 1945. Il bénéficie du plan Dodge mais pas uniquement. Les Japonais décident de réorganiser l'état et l'économie. 
  • En 1949, le MITI est créé (Ministry of International Trade and Industry) : il joue un rôle considérable dans le développement économique du pays en coordonnant les stratégies et politiques économiques et industrielles. En 1950, le Japon met aussi en place une planification indicative pour que l'économie japonaise soit structurée efficacement. Les grands groupes, les Keiretsu, vont avoir un rôle moteur tout comme les élites dirigeantes. Ces Keiretsu sont de véritables conglomérats composé de plusieurs entreprises aux activités diverses et ayant pour certains une banque comme pivot du groupe (Mitsubishi bank, Sumitomo Mitsui Financial Group). Ils ont une organisation très particulière s'appuyant sur des sociétés de commerce, les sogo sosha prospectant les marchés à conquérir et promouvant les politiques d'exportation et sur tout un réseau de PME. 
  • Les plus importants sont Sumitomo, Mitsui, Mitsubishi, Sanwa. L'absence ou presque de dépenses militaires permet au Japon d'investir dans des infrastructures modernes dont la ligne à grande vitesse, le shinkansen est le symbole (1964). La croissance démographique est un autre élément expliquant des taux de croissance exceptionnels en moyenne de 9% par an. 
  • Enfin, une nouvelle organisation du travail dite toyotisme (organisation due à un ingénieur de chez Toyota Taïchi Ohno et appliquée à partir de 1962) accroît l'efficacité et la productivité des entreprises nippones. Il s'agit d'éviter tout gaspillage, de produire des biens de qualité, de diminuer les stocks... Toyota met au point ce système avec le développement du juste-à -temps, le système dit du Kaizen où les équipes de production sont autonomes, la politique du zéro défaut, zéro stock... 
  • La RFA est dans la même situation que le Japon. Elle bénéficie dans le cadre de la guerre froide d'une importante aide américaine. De plus, une partie des industries allemandes n'avait pas été détruite pendant la guerre (usines enterrées). Comme le Japon, la RFA a des dépenses militaires limitées et une croissance démographique importante. De plus, l'économie de la RFA est relativement ouverte avec l'accent mis sur les exportations : les Allemands ont une tradition industrielle forte avec des entreprises performantes. La RFA tout comme le Japon vont assez rapidement refaire surface et devenir respectivement les 3e et 4e puissances économiques mondiales en 1975. 
  •  Une phase d'internationalisation Les années 1945-1970 sont donc une phase d'internationalisation avec un commerce international qui se développe, des états plus ouverts aux échanges et moins protectionnistes. Le rôle des E.-U dans cette internationalisation est crucial : ils l'ont favorisé par la création du GATT, la mise en place d'un système monétaire international plutôt stable. La décolonisation et l'arrivée de nouveaux états permet une diversification des échanges : les anciennes métropoles coloniales ne peuvent plus contrôler ces territoires et la rente dite coloniale disparaît (au moins en partie). 
  • Les états ont également intérêt à cette ouverture : les E.- U pour écouler des productions excédentaires, le Japon et l'Allemagne (RFA) parce qu'ils fondent leur développement économiques sur les exportations et la construction d'économies extraverties. L'internationalisation est facilitée par les progrès des moyens de transport et de communication : la vitesse des transports et communications est plus grande, les quantités transportées plus importantes... 
  • Ces progrès diminuent les coûts de transport accélérant les échanges. Les entreprises profitent de cette internationalisation notamment les firmes multinationales avec en plus un phénomène de concentration des firmes devenant de plus en plus importantes.
Staline en 1945

3/ Quelle croissance pour le bloc soviétique et communiste ?


Pour le bloc soviétique et communiste, la logique de croissance ne peut être la même que pour les pays à économique de marché vu qu'ils ne sont pas dans la même logique. Les états communistes ne sont pas des économies de marché, le libre échange n'existe pas et l'ouverture aux autres économies est pour le moins limité. La croissance de l'URSS n'est pas celle des PDEM ce dont les dirigeants soviétiques sont d'ailleurs conscients d'où des tentatives de réformes partielles notamment avec Khrouchtchev). 

 A/ Un bloc communiste auto-centré 

a/ Le repli sur soi et le refus de l'aide américaine 

-une aide américaine rejetée 

  •  L'aide américaine par le intermédiaire du plan Marshall proposée aux pays d'Europe de l'Est est rejetée : l'URSS et Staline voient dans cette proposition une forme de l'impérialisme américain. Certes l'URSS est sortie politiquement renforcée de la guerre mais sa situation économique n'est pas bonne. Avant la seconde guerre mondiale, Staline avait mis l'accent sur le développement industriel en l'occurrence les industries lourdes. 
  • Une planification économique s'est aussi mise en place (plans quinquennaux) avec un rôle important joué par un organisme : le Gosplan. En 1945, la production agricole soviétique a baissé d'au moins 40%, des milliers de fermes coopératives, les kolkhozes, ont été détruites (90 000 kolkhozes), plus de 30 000 usines sont détruites, Il en est de même pour de nombreuses villes (1710 villes à reconstruire) et villages, pour les infrastructures de communication dont plus de 5000 kms de voies ferrées à remettre en fonctionnement. 
  • Le seul point fort de l'URSS est le fait d avoir déplacé de nombreuses usines et industries en Asie centrale et en Sibérie dès 1941 afin de pouvoir continuer la guerre contre l'Allemagne nazie ; Une région comme l'Oural est de ce fait devenue essentielle ( plus de 50% de l'acier produit en URSS en 1945). L'URSS connaît aussi une baisse notable de sa population qui passe de 196 millions d'habitants en 1940 à 174 millions en 1946. Le PIB est quant à lui inférieur de 22,6% en 1946 à celui de 1939. 

 -conduisant au repli et la création du CAEM (COMECON) 

  •  Dans le contexte de guerre froide avec la formation de deux blocs antagonistes, l'URSS mène une politique de repli sur soi et de fermeture de son « glacis protecteur » à savoir les états d'Europe de l'Est devenus communistes. Néanmoins une structure est créée en 1949 : le Conseil d'Assistance économique mutuelle visant à coordonner les politiques et stratégies économiques du bloc de l'Est. Le CAEM est aussi une réponse à la création en 1948 de l'Organisation européenne de coopération économique visant à répartir l'aide Marshall en Europe de l'Ouest. 
  • L'objectif du CAEM est notamment que le bloc soviétique puisse fonctionner sans aide extérieure. Il est destiné à développer les échanges entre les états du bloc communiste mais il est essentiellement fondé sur des accords bilatéraux entre les états, souvent sous forme de troc. Il n'est pas de ce fait une zone de libre échange mais une organisation des échanges contrôlée par l'URSS. En 1959, des institutions communes au CAEM apparaissent et les dirigeants du bloc communiste décident à partir de 1962 d'organiser une « division internationale socialiste du travail » devant aboutir à une spécialisation des différents états en fonction de leurs atouts et points forts. On applique la théorie des avantages comparatifs (David Ricardo) dans le cadre d'économies étatisées.
  •  Mais c'est toujours l'URSS qui définit qui se spécialise dans quoi : la Pologne doit développer son industrie de la construction navale (Chantiers navals de Gdansk) et son exploitation des gisements de charbon, la RDA met l'accent sur l'industrie chimique et l'optique... 
  • Le CAEM abouti à une progression des échanges entre pays membres : en 1970, la part des échanges entre membres du CAEM dans leur commerce atteint 60%. Le CAEM se compose de l'ensemble des pays d'Europe de l'Est communiste à l'exception de la Yougoslavie de Tito. La Mongolie en 1962 et Cuba en 1972 rejoignent le CAEM. 

b/ Un modèle soviétique imposé 

-un modèle stalinien étatisé et collectivisé 

  •  Le modèle stalinien de l'économie repose sur l'étatisation avec des entreprises d'état, la planification et une collectivisation notamment des terres par les Sovkhozes et les Kolkhozes. A la sortie de la guerre, le IVe plan (45-50) met encore en avant les industries lourdes et le secteur énergétique. Il est prévu dans ces domaines de doubler les productions: 88% des investissements prévus sont destinés à l'industrie et aux transports.. 
  • Est aussi privilégiée l'industrie d'armement dans le cadre de la guerre froide. Ce plan décide également le développement de la Sibérie et de ses ressources. 
  • La zone du gisement pétrolier dit Bakou II doit être exploitée. Est également prévu le développement d'infrastructures nouvelles comme la ligne ferroviaire devant relier sur 3000 kms le lac Baïkal au fleuve Amour en Sibérie. L'agriculture fait également l'objet d'une planification avec une volonté de collectiviser les exploitations et les terres des territoires annexés par l'URSS en 1945 (pays baltes, Bessarabie...).
  • Staline décide de diminuer les lopins de terre privés que pouvaient exploiter les paysans : il est obsédé par la collectivisation certes mais aussi par la volonté de faire plier un monde paysans encore rétif à une agriculture étatisée. D'ailleurs, en 1950, les kolkhozes sont regroupés en unités plus importantes (logique de concentration) : on passe de 225 000 kolkhozes en 1950 à 94 000 en 1953. Staline pense qu'avec ce plan le rattrapage des pays capitaliste sera possible. 
  • Mais les objectifs fixés sont bien trop élevés et ne peuvent être atteints. Le Ve Plan de 1950 à 1955 prévoit une accélération de la croissance industrielle (80%) mais aussi une stratégie visant à dominer la nature en particulier par la mise en valeur de nouvelles zones agricoles en Asie centrale, la plantation d'arbres sur une longueur de 5 300 km et une largeur de 30 à 60 km des frontières de l'Ouest jusqu'à l'Oural. D'autres infrastructures se développement comme le canal liant le don à la Volga, un canal inauguré en 1952. 
  • Le Ve plan accentue les objectifs du plan précédent. Ces plans permettent à l'URSS de s'affirmer au niveau industriel mais au prix d'une agriculture en partie sacrifiée, d'un niveau de vie peu élevé des citoyens et d'une politique répressive très dure pour les récalcitrants. 

 -imposé au pays du bloc de l'Est 

  •  Dans les nouvelles démocraties populaires, le modèle soviétique s'impose avec le processus d'étatisation et de collectivisation. Par contre, la collectivisation des terres s'avère problématique et se fait progressivement : elle nécessite des réformes agraires devant mettre fin aux grands domaines et exploitations agricoles. Dans un premier temps, on procède à une réforme agraire visant à démanteler les grandes exploitations et domaines dont les terres sont répartis entre les paysans notamment les plus défavorisés. 
  • Des terres sont toutefois gardées par les états pour développer des fermes d'état sur le modèle des sovkhozes soviétiques. 
  • La redistribution des terres conduit à une multiplication des exploitations de petite dimension. Dans un second temps sont créés des « stations de machines et de tracteurs » par lesquels les machines peuvent être utilisées de façon collective : il faut préparer les agriculteurs au travail collectif et en coopératives. 
  • Ces stations s'inspirent des MTS soviétiques (stations de machines et de tracteurs) créées en URSS dès 1929. Le passage par des coopératives n'est qu'une étape vers une réelle collectivisation. Celle-ci se termine à la fin des années 1950. Dans certains pays comme la Pologne, les agriculteurs s'opposent à cette collectivisation : d'ailleurs dans ce pays, la propriété privée des terres n'est pas supprimée devant l'hostilité des populations. S'impose la planification à la soviétique avec des objectifs similaires à ceux de l'URSS dont cette priorité à l'industrie lourde. Les entreprises sont nationalisées progressivement : dans les états communistes on commence par nationaliser les entreprises liées aux industries lourdes en laissant même un secteur privé en place bien que contrôler par l'état. Le bloc de l'Est est donc à la fois autocentré et dans la logique économique soviétique. 

 B/ L'après Staline : quels changements et évolutions ? 

a/ La déstalinisation : quelles conséquences ? 

-une volonté de changements 

  •  La mort de Staline et la déstalinisation apportent une volonté partielle de changements. Khrouchtchev est conscient qu'une partie des difficultés économiques est liée à la politique de Staline. Il sait que l'agriculture souffre de problèmes et de handicaps comme le manque de matériel, des infrastructures pas assez performantes notamment en matière de communications, des difficultés à produire suffisamment et à stocker ce qui est produit... Mais il ne s'agit pas de remettre fondamentalement en question le modèle soviétique : il faut remédier aux dysfonctionnements du système. 

 -mais des changements partiels ne remettant pas en question le système 

  •  Des décisions sont donc prises mais elles ne remettent pas en question le système en lui-même. Des changements économiques et sociaux s'opèrent avec des en particulier la possibilité pour les ouvriers de changer d'usines ce qui n'était pas possible du temps de Staline. Les prix de nombreux produits sont abaissés afin d'améliorer le niveau de vie , les salaires quelque peu augmentés. Au niveau de l'agriculture, les prix à la production sont relevés pour donner aux agriculteurs plus de moyens financiers les livraisons obligatoires des kolkhozes sont supprimées ; pour régler l'insuffisance des productions, de grands projets sont lancés comme l'opération « terres vierges » consistant à développer une zone de 40 millions d'hectares de terres au Kazakhstan. 
  • On procède également à une concentration de sovkhozes qui deviennent de plus en plus grands. Les changements ne modifient pas néanmoins les structures de l'économie soviétique qui reste étatisée, collectivisée et planifiée. La planification demeure même si en mai 1957, Khrouchtchev décide d'abandonner en cours le VI e plan pour en mettre en œuvre un autre le 7e plan, allongé dans la durée (1959-1965) prévoyant de moderniser l'économie, de développer encore davantage les régions à l'Est qui ont des atouts en ressources énergétiques et minérales très importantes, de développer les industries de biens de consommation pour, là aussi, que le niveau de vie des soviétiques progresse. 
  • Pour Khrouchtchev , il faut « rattraper et dépasser les pays capitalistes les plus évolués .» 

b/ Des réformes économiques s'inscrivant toujours dans un cadre défini d'une économie dirigée et planifiée 

 -produire plus ? 

  •  La logique soviétique est donc de produire toujours plus par la conquête de nouvelles terres, l'utilisation plus massives d'engrais et de produits chimiques, par une plus grande mécanisation. Cette logique productive se fait bien entendu dans le cadre d'un état toujours organisateur et planificateur. 
  • Dans le domaine agricole pour produire plus, les kolkhozes peuvent se gérer de manière plus autonome. L'opération « terres vierges « entre dans cette logique productiviste avec la mise en culture de nouvelles terres pour produire plus de blé mais aussi produire du maïs. 

 -produire mieux ?

  •  Produire plus ne signifie pas produire mieux : certains problèmes ne sont pas réglés comme les problèmes d'acheminement des productions d'où des productions perdues. Le gaspillage est devenu un problème important par le déficit des infrastructures et les problèmes de stockage. Pour produire mieux, Khrouchtchev avait décidé d'améliorer le système de la planification en allégeant un système trop bureaucratique (l'industrie était répartie en 27 secteurs et 250 branches et pour chaque secteur et branche le Gosplan définit des objectifs à atteindre et accordent les moyens pour atteindre ces objectifs.) Mais, il ne parvient pas à réellement transformer une structure trop lourde et pesante. 

 c/ Des économies et des structures peu performantes... 

 -des résultats insuffisants 

  •  Les réformes initiées par Khrouchtchev sont limitées et donnent des résultats insuffisants. Les productions agricoles n' augmentent pas nécessairement (en 1963, la production a même diminué). Quant aux productions industrielles, elles ne permettent pas d'améliorer le niveau et les conditions de vie des Soviétiques. La priorité donnée aux industries lourdes se fait au détriment des industries de biens d'équipement et de consommation. 
  • Khrouchtchev est écarté du pouvoir en 1964 : les nouveaux dirigeants, avec à leur tête Brejnev, tentent de trouver des solutions. Pour améliorer les productions agricoles, les prix des produits sont à nouveau rectifiés à la hausse, des primes sont accordées lorsque les productions dépassent les quotas prévus, des lopins de terre privés peuvent se développer davantage... 
  • En ce qui concerne les entreprises industrielles, la réforme de 1965 permet à ces entreprises de gagner un peu plus d'autonomie : les directeurs des entreprises peuvent désormais fixer les prix de revient des produits fabriqués (prix de revient jusque là déterminés par le Gosplan), peut garder une partie des bénéfices réalisés pour financer son développement, acheter de nouvelles machines... Sur ces bénéfices, les directeurs sont même autorisés à distribuer des primes aux ouvriers performants. 

 -pour une société bloquée et affectée par des maux économiques et sociaux profonds 

  •  Mais quelque soit les réformes, la société reste bloquée. Les dirigeants soviétiques n'ont pas voulu touché aux fondements de l'organisation de l'économie : des fondements qui sont des freins au développement. La centralisation, la planification sont trop pesantes ne libérant pas le sens de l'initiative. Les difficultés de l'URSS perdurent : productions insuffisantes, gaspillage, manque de motivation des ouvriers, niveau de vie qui progresse de façon insuffisante... 
  • Dans les années 70, on constate une baisse des taux de croissance, une productivité trop faible. Les infrastructures ne sont pas assez performantes et le coût d'entretien est très élevé. Certes, l' URSS est devenue un état industrialisé mais handicapé par des maux importants. 

 d/ ... et pénalisé par sa politique extérieure 

-une politique au coût élevé 

  •  La guerre froide et la course aux armements ont des effets importants sur l'économie soviétique. L'URSS est obligée de consacrer une part importante de son budget aux dépenses d'armement, au financement de sa politique extérieure. La course aux armements a en particulier un coût qui pénalise le développement économique. L'industrie de la défense absorbait en moyenne 20% du revenu national et près de 50% des dépenses publiques étaient à destination de l'armée. 

 -reposant sur un complexe militaro-industriel trop présent

  • Le complexe militaro-industriel c'est-à-dire les secteurs industriels liés à l'armée et donc à la production d'armements a un impact très important sur l'économie soviétique. 
  • Ce complexe fait travailler les individus les plus compétents et les mieux formés. En 1985, 7,6 millions d'individus travaillaient pour le complexe militaro-industriel : un complexe représentant environ 14% du PNB soviétique. Conclusion : le cas de la Chine communiste. L'adoption du modèle soviétique En octobre 1949, la Chine devient communiste avec la République populaire chinoise et Mao à sa tête. Dans les premières années du régime, la Chine de Mao calque le modèle soviétique après une brève phase de reconstruction entre 1949 et 1953. A partir de 1953, les dirigeants chinois décident de mettre en application un programme de « transition vers le socialisme » dans un contexte bien particulier. 
  • En juin 1953, un premier recensement de la population est opéré se terminant en 1955. 
  • Le Bureau officiel des statistiques dénombre 582 millions d'habitants avec 41% de moins de 18 ans et seulement 14% de plus de 50 ans. S'ajoute un déséquilibre démographique au profit des hommes : 108 hommes pour 100 femmes. La Chine du début des années 1950 est très rurale : les ruraux représente 90% de la population et sont globalement pauvres avec de nombreux paysans sans terre. Il s'agit donc pour les dirigeants chinois de procéder à des changements profonds dans un pays où la population est nombreuse, rurale et pauvre. Dès 1949- 1952, la Chine a mis en œuvre une réforme agraire de grande importance avec redistribution des terres des paysans les plus riches vers les plus miséreux (40% des terres sont concernées) sachant que de nombreux paysans supposés riches sont éliminés. 
  • Comme les soviétiques l'ont fait, une collectivisation des terres est en théorie décidée et terminée en 1956 où quasiment tous les paysans sont regroupés en coopératives. 
  • Toutefois la tâche s'avère complexe : 14 000 coopératives en 1953, 400 000 en 1954 mais ne regroupant que 7% des familles rurales. Mao décide donc de passer à la vitesse supérieure par une « campagne de masse » forcée et violente aboutissant à la création en 1955 de 1,9 million de coopératives faisant travailler plus de 70 millions de familles. 
  • A la fin 1956, le processus est achevé. Comme l'URSS, la Chine met en place un système d'économie planifiée avec des plans quinquennaux. Le premier plan (1953-1957) donne une priorité au secteur industriel (une industrie à laquelle sont destinés plus de 58% des investissements). La Chine accorde à la priorité à l'industrie lourde et la construction de grands projets devant symbolisés le dynamisme du pays. 
  • L'URSS apporte une aide important tant technique que financière. Les effets de ce plan selon les chiffres officiels plutôt douteux font apparaître une croissance importante au niveau industriel mais plus ténue en ce qui concerne l'agriculture. Les productions agricoles augmentent peu alors que la Chine est en croissance démographique. La Chine décide en parallèle d'étatiser l'économie non seulement en collectivisant l'agriculture mais en mettant en place des entreprises nationalisées. Les entreprises deviennent rapidement des entreprises d'état : le processus de nationalisations est clos en 1956. Il en est de même pour le commerce quasiment entièrement contrôlé par l'état. Mais à partir de 1957-58, la Chine va opérer un changement en promouvant une voie spécifiquement chinoise vers le socialisme se différenciant ainsi du modèle soviétique et d'une URSS avec qui elle va rompre. 
  • Ce changement se traduit par la politique du Grand bond en avant décidée lors du VIIIe congrès du parti communiste chinois. Cette nouvelle politique a comme objectifs d'augmenter les productions et même de « rattraper l'Angleterre en quinze ans ». 
  • La collectivisation est accélérée avec des villages ruraux transformés en « brigades de production » réparties en « équipes de production » à savoir des coopératives agricoles.
  •  Les cantons sont remplacés par des « communes populaires » composées de 2 000 à 20 000 familles. Ces communes populaires doivent fonctionner de manière autonome que ce soit au niveau économique tant pour la production agricole qu'industrielle que pour la santé. Ces communes populaires ont donc en charge les soins et doivent gérer un hôpital (un par commune populaire) mais aussi l'éducation (un collège par commune populaire)...Elles doivent bien entendu appliquer les consignes du parti communiste. 
  • Cette politique s'avère un terrible échec : les communes populaires ne parviennent pas à fonctionner en autonomie, l'économie est désorganisée. 
  • La désorganisation est renforcée par la mobilisation des paysans dans de grands travaux : création de hauts fourneaux pour produire de l'acier... 
  • Pour imposer ce modèle, la terreur est imposée. Le bilan est désastreux : les productions agricoles chutent, les productions industrielles ne sont pas à la hauteur. Les difficultés sont accentuées par la fin de l'aide soviétique à laquelle s'ajoutent deux années de sécheresse. Se déclenche une famine de très grande ampleur avec la mort d'environ 30 millions d'individus voire 40 millions. (13 millions selon les chiffres officiels chinois). 
  • Des villages ont de fait disparu, des faits de cannibalisme sont avérés. Les villages ont été dans l'obligation de livrer des récoltes déjà insuffisantes pour montrer que les objectifs fixés par l'état étaient atteints. 
  • Il s'agissait également pour le gouvernement d'approvisionner les villes où la situation est un peu plus facile mais avec un rationnement alimentaire imposé. Le grand bond en avant est un formidable échec mais un échec meurtrier. Dès 1961, des mesures sont prises devant la catastrophe comme la dissolution des communes populaires les plus importantes, les paysans retrouvent une certaine liberté de production afin de relancer l'agriculture avec en particulier l'autorisation de lopins de terre privés, l'autorisation de vendre ses productions sur des marchés libres... 
  • La priorité est donnée à l'agriculture pour lutter contre la famine et les manques notamment en envoyant des citadins travailler dans les campagnes pour produire plus. La Révolution culturelle lancée en 1965 (elle dure jusqu'en 1969) renforce le mouvement des citadins devant travailler dans les campagnes : entre 68 et 70, environ 17 millions de jeunes citadins sont envoyés dans les campagnes. Les années 1950-1970 ne sont donc pas pour la Chine des années de croissance « glorieuse » mais plutôt des années de régression et de malheurs.
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4/ Les tiers-mondes : quelle croissance pour quel développement ?


Les états nouvellement indépendants ont notamment comme objectif général de réussir le développement économique. 

 A/ Des tiers-mondes marginalisés 

a/ Des problèmes et fragilités nombreux 

 Les états dits du « tiers-monde », pour reprendre l'expression d'Alfred Sauvy, ont des problèmes et des fragilités notables qu'il faut tenter de surmonter. 

 -des freins économiques pénalisant 

  •  Certains problèmes sont d'ordre économiques. Dans de nombreux états, les infrastructures de communication et de transport sont insuffisantes ; les anciennes puissances ont bien construit des infrastructures mais elles sont limitées, souvent présentes au niveau des littoraux ou/et des villes majeures mais ne desservant pas de façon équilibrée les territoires. Les agricultures de ces pays sont peu productives car peu modernes et mécanisées ce qui explique l'importance dans les années 1950-70 du secteur primaire dans ces états : entre 45 et 80% des individus travaillent dans le secteur agricole.
  • L'agriculture représente souvent une part importante du PIB jusqu'à 40 % pour les états les plus en retard.
  •  On observe également la présence d'exploitations pouvant être assez performantes mais une majorité d'exploitations sont de taille réduite. Le secteur industriel est également peu développé et plusieurs états vivent d'une économie de rente liée à des richesses en hydrocarbures ou en productions agricoles. L'économie de rente est un héritage de la période coloniale que les dirigeants des états indépendants ont gardé. Ces économies ne sont donc pas diversifiées. 
  • Ces états sont de plus peu insérés dans les échanges internationaux : d'ailleurs le poids des états du Tiers-monde dans le commerce mondial n'a cessé de décliner entre les années 1950 et 1970 passant de 21,5% en 1960 en prenant en compte les états producteurs de pétrole à 18% en 1970.S'ajoutent une double dépendance à la fois technologique et financière. Les états indépendants vont très rapidement procéder à des emprunts se retrouvant endettés ce d'autant plus que de nombreux états ont un déficit public important s'expliquant en partie par la volonté de bâtir des projets de développement. 

 -de fortes contraintes démographiques et sociales 

  •  Les états du Tiers-monde ont aussi des contraintes fortes en matière de démographie. Ils connaissent une explosion démographique avec une population en forte augmentation : une hausse de 58% entre 1960 et 1980 (avec la Chine). Certes ces états sont entrés dans la phase de la transition démographique mais ils sont nombreux à être dans la première phase avec une mortalité qui baisse et une natalité restant élevé (entre 35 et 40 naissances pour mille habitants) d'où un accroissement naturel important avec des taux autour de 3% par an. 
  • Le problème de cette croissance démographique est qu'il faut nourrir une population toujours plus nombreuse mais aussi l'éduquer, la soigner...
  •  Les freins sociaux au développement sont importants : fort analphabétisme, malnutrition voire sous nutrition, insuffisance des infrastructures sanitaires (hôpitaux, médecins...). Ainsi en 1970, 940 millions de personnes étaient considérées comme en sous alimentation sur 3,6 milliards d'habitants (36% de la population mondiale environ). Dans les années 1970, l'écart de richesse entre les PDEM et les états du tiers-monde est de 1 à 20. Il ne faut pas oublier les freins politiques avec nombre d'états aux élites corrompues sans compter les états fragilisés par des guerres civiles ou différentes tensions internes. Néanmoins, les états du tiers- monde ne sont pas tous sur le même plan . Dans les années 1970, on distingue les états à faibles revenus avec une moyenne de 240 dollars par habitants. Dans cette catégorie se trouve la Bangladesh avec 90 dollars, des états comme la Chine et l'Inde avec des revenus autour de 230 dollars.. . 
  • Ces états ont été classés par la CNUCED comme étant des PMA : les pays les moins avancés. Ces PMA se caractérisent par des revenus par habitant faibles, un taux d'alphabétisation également faible (inférieur à 20% des adultes) ainsi qu'une industrie ayant une part peu conséquente dans l'économie domestique. 
  • Ces PMA se localisent surtout en Afrique mais aussi en Asie. Se différencient des PMA, les pays dits à revenus intermédiaires avec une moyenne de 1450 dollars par habitant . On retrouve dans cette catégorie des états comme Hong Kong et Singapour dont le développement s'accélère fortement devenant des NPI (Nouveaux pays industrialisés) mais aussi un état comme le Brésil pas encore émergent ou le Mexique. On retrouve aussi les états comme l'Arabie saoudite ou le Koweït qui profitent de la rente pétrolière. Ces états à revenus intermédiaires se localisent en Amérique du Sud et dans la partie de l'Asie qui se développe notablement. 

 b/ Un monde à l'écart qui tente de s'organiser 

 Ce tiers-monde à l'écart de la richesse et loin en termes de performances économiques et sociales des PDEM tente de se structurer. 

 -une volonté d'être solidaire : mouvement des non-alignés et tiers-mondisme 

  •  La conférence de Bandoung a initié en 1955 un rapprochement entre états récemment indépendants. Cette conférence marque l'affirmation du tiers-monde voulant échapper à la logique bipolaire et promouvoir le développement économique. En 1955, les états présents à cette conférence ne représentait que 8% de la production mondiale alors qu'ils pesaient pour plus de 50% de la population mondiale. 
  • Le mouvement des non alignés qui se structure lors de la conférence de Belgrade en 1961 confirme cette volonté. Certes, ce mouvement finit par échouer notamment par les rivalités entre dirigeants des pays concernés. Néanmoins, ces états revendiquent un ordre économique plus juste et équilibré. Un groupe de 77 pays de l'ONU et tous du tiers-monde se regroupent pour militer pour le développement. 
  • Ils obtiennent la création de la CNUCED (Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement) en 1964 et du programme des Nations Unies pour le développement de 1965 entrent dans cette logique. Il s'agit de remédier à la dégradation des termes de l'échange c'est-à-dire de la différence entre exportations et importations (des termes de l'échange de plus en plus en défaveur des états du tiers-monde). Le but est que les états du tiers-monde puissent exporter et avoir des recettes devant permettre le développement. Les états du tiers-monde souhaitent donc pouvoir accéder aux marchés des PDEM notamment par l'abaissement des barrières douanières. 

 -pour quels choix et stratégies de développement ? 

  •  Parallèlement, les états du tiers-monde optent pour des stratégies de développement dont certaines ne sont toujours judicieuses. Un de ces stratégies est la stratégie dite autocentrée fondée sur la volonté de ne pas dépendre des pays riches en bâtissant une économie basée sur l'édification d'une industrie nationale. Il s'agit donc d'accéder à une réelle autonomie : cette stratégie est fortement inspirée par le modèle soviétique. 
  • Tout en développant une industrie nationale, il convient de protéger son marché de la concurrence internationale et d'un marché mondial dominé par les PDEM. L' Inde avec son « socialisme indien » a opté dans les années 50-60 pour cette stratégie comme l'Algérie avec sa stratégie d'industries « industrialisantes ». L' Algérie comptait sur ses ressources en hydrocarbures et en gaz pour bâtir une industrie lourde performante qui aurait un effet d'enchaînement sur d'autres industries. 
  • D'autres états ont fait le choix de stratégies dites d'extraversion. Le développement est basé sur les exportations (produits agricoles ou autres) et donc l'insertion dans l'économie mondiale. 
  • Cette insertion et ces exportations doivent générer des capitaux devant rendre possible le développement. Cette stratégie peut se faire sur l'exportation de produits bruts par exemple des produits agricoles comme a tenté de le faire la Côte d'Ivoire avec le cacao et le café ou des ressources énergétiques et minières comme le Nigeria avec le pétrole. L'autre possibilité est d'exporter des produits manufacturés vers les PDEM comme des produits textiles en jouant sur une main d' œuvre à bas coût. C'est cette option qui est retenue par les Nouveaux pays industrialisés d'Asie. Ce choix s'associe à un protectionnisme et à un état interventionniste (développement de la formation...) et repose sur la volonté de s'insérer dans la division internationale du travail en profitant de ses atouts (main d' œuvre). 

 B/ Une progressive prise de conscience internationale 

a/ La nécessité de la coopération 

-la volonté de l'ONU 

  • L'ONU par la création de la CNUCED participe à la volonté de coopérer avec les états du Tiers-monde. La CNUCED a réellement la volonté d'intégrer les états du tiers-monde dans l'économie mondiale. 
  • Il faut bâtir un nouvel ordre économique mondial (NOEI). La seconde conférence de la CNUCED en 1968 à New Delhi permet aux états du tiers-monde d'obtenir des états de l'OCDE une préférence pour leurs produits exportés avec un système généralisé de préférence (SGP) douanières afin qu'ils puissent exporter plus facilement. 
  • Ce système est d'ailleurs une exception aux règles fixées par le GATT puisque les états du tiers -monde ne sont pas tenus à la réciproque concernant les produits des PDEM. En 1972, la CNUCED propose aux pays riches d'accroître l'aide publique au développement avec un objectif chiffré de 0,7% du PNB 

-et d'institutions internationales aux rôles cruciaux 

  • D'autres institutions jouent un rôle important dont la Banque mondiale ou le FMI bien que l'action de ce dernier soit dans nombre de cas contestable. De même, la Banque mondiale a contribué à l'endettement. En effet, surtout entre 1968 et 1973, elle a accordé un nombre très importants de prêts tout en poussant les états du Tiers-monde à emprunter pour se moderniser. Une partie de ces prêts étaient destinés à financer des projets coûteux et pas toujours nécessaires .

b/ comment aider au développement ? 

-des politiques d'aides ambiguës : politiques humanitaires, politiques de transfert... 

  • Les PDEM ont participé à des politiques d'aide au développement par plusieurs biais dont l'aide publique au développement sous forme de dons ou de prêts avantageux. 
  • Comme nous l'avons vu la CNUCED a incité à ce type d'aides par l'objectif de 0,7 % du PNB, un objectif rarement atteint. Cette aide dans les années 60- 70 ne dépassait guère 0,3%. La Suède est le premier à atteindre l'objectif en 1975 (C'est une exception avec la Norvège et le Danemark en 1978 ainsi que le Luxembourg. Une autre forme d'aide qui se développement dans les années 1960-70 est l'aide humanitaire : une aide généralement liée à des conflits.
  •  Il existe également les politiques de transfert technologique. 

-avec quelles conséquences réelles ?

  • L'un des problèmes des états du tiers-monde est le poids important dans les échanges des produits bruts : 92% des exportations de ces pays en 1950 et encore 85% en 1973. Ils n'ont donc pas pu ou voulu diversifier leurs activités afin d'être moins dépendants de ces produits bruts exportés. 
  • Certains états ont en plus des situations peu avantageuses puisqu'ils exportent seulement un ou deux produits comme le cuivre pour le Chili (75% des exportations chiliennes) ou le sucre pour l'île Maurice (92% des exportations). Or, ces produits sont liés à des cours fixés à l'échelle mondiale : si ces cours baissent, les recettes d'exportation baissent. Les stratégies de développement tout comme les actions entreprises tant par les états du tiers-monde que les PDEM n'ont pas permis un réel développement dans les années 1960-70 à quelques rares exceptions. 

Bilan 

-Des croissances différentes pour les pays occidentaux : du miracle japonais au recul américain 

  • La croissance économique des PDEM est exceptionnelle dans les années 1950-1970 mais on peut parler de croissances au pluriel avec des états dont la croissance est particulièrement importante comme le Japon et des états ayant une croissance plus faible comme les Etats-Unis. 

-Un bloc communiste clivé : une économie soviétique peu efficace, une voie chinoise tortueuse

  • Le monde communiste ne connaît pas une croissance du même type, est beaucoup moins impliqué pour des raisons idéologiques dans le processus d'internationalisation. Il s'est aussi clivé avec deux vois opposées : la voie soviétique et la voie chinoise, deux voies qui ne conduisent pas toutefois à une réelle croissance. 

-« Un tiers- monde » clivé : des pays qui émergent, des pays qui s'enfoncent... 

  • Le tiers- monde est lui aussi clivé avec quelques états notamment en Asie (NPIA) qui commencent à se développer et s'affirmer alors que de nombreux PMA sont confrontés à de multiples problèmes et à un développement trop limité.
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