1/ Les acteurs : hommes, entreprises, Etats, organisations régionales, organisations internationales, organisations non gouvernementales

Introduction

La mondialisation et le processus de mondialisation sont le résultat du jeu de différents acteurs notamment les états, les firmes transnationales, les organisations régionales qui se sont multipliées, les organisations dites non gouvernementales et, il ne faudrait pas oublier les individus en tant que consommateurs, touristes, utilisateurs des NTIC... On met de plus en plus l’accent sur les acteurs non étatiques (Non State Actors en anglais). 
Rappelons que d’une manière générale qu’un acteur dans les relations internationales est un « agent qui prend une part active à un certain nombre d’affaires qui affectent, par-delà les frontières, directement ou non, les relations politiques, économiques et sociales. »comme le souligne Guillaume Devin (Revue Questions internationales : Ils dirigent le monde, 2013). Comme nous le verrons les acteurs non étatiques jouent des rôles importants que ce soit les firmes, les ONG mais aussi les organisations criminelles, les médias, les réseaux sociaux... dans le cadre de ce que l’américain James Rosenau nomme un « monde multicentré » par opposition à un « monde stato-centré ».
Frontères E-U

A/ Les états dans la mondialisation


a/ L'état : fonctions et rôles sur une planète globalisée 

 Présentation : Comme nous l’avons signalé, le monde est vu par certains comme multicentré avec des Etats qui n’ont plus « les mains libres et ne contrôle plus les événements » comme l’écrit Samy Cohen. Joseph Nye évoque quant à lui la métaphore sur « troisième échiquier » dans lequel le pouvoir sur le monde relève d’un jeu d’échecs à trois dimensions : l’échiquier supérieur qui est celui des forces armées et dominé par les E.-U. ; l’échiquier intermédiaire qui est celui des rapports de force économique (E.-U., Europe, Japon...) et enfin le 3e échiquier qui est des relations transnationales et des acteurs non étatiques. 
Cette perception renvoie au fait que les Etats jouent toujours un rôle important (voir le 1e échiquier) mais sont confrontés à d’autres acteurs (3e échiquier). Mais pour les tenants de l’école réaliste de géopolitique, le monde reste fondamentalement stato-centré (c’est-à-dire centré sur les Etats) avec un ordre international reposant toujours sur les Etats. 

 -Qu’est-ce que l’état ? 

  •  Selon Charles-Albert Michalet, « la capacité d'intervention des gouvernements dans l'économie se réduit... sur un arrière-fond de mesures libérales : déréglementation des activités, privatisation des entreprises publiques. » 
  • Cette réflexion pose le problème du poids des gouvernements et des états dans un monde globalisé comme nous le verrons plus loin. Les états ont-ils encore les moyens d’intervenir, d’agir dans ce monde global ? Certains évoquent une mondialisation qui irait contre l’État avec une « dénationalisation partielle » (Saskia Sassen) avec des activités publiques qui deviennent liées au marché. 
  • On distingue globalement les hypermondialistes qui pensent que les Etats ne peuvent que s’affaiblir voir disparaître et ceux qu’on peut nommer les « transformationnistes » affirmant que les Etats ne vont pas disparaître mais se transformer dans le cadre de cette économie mondialisée. Il faut insister sur le fait que la mondialisation est un système reposant sur plusieurs acteurs qui ont des relations : parmi ces acteurs les FTN, les différentes institutions internationales, les ONG, les différentes diasporas, les réseaux illégaux et les états. 
  • Ces derniers sont des acteurs importants de la mondialisation au même titre que les firmes ou les autres acteurs avec lesquels ils ont d’ailleurs des relations. Un rappel sur la notion d' état s'impose : il est une organisation et une structure politique artificielle dirigée par un gouvernement qui s'appuie sur des administrations. 
  • Un état est une personne morale souveraine, en principe légitime mais plus ou moins démocratique. 
  • La souveraineté est fondamentale et s'exerce sur un territoire délimité par des frontières (des frontières reconnues sur le plan juridique et international). La souveraineté est un attribut essentiel de l’État, une souveraineté impliquant l’indépendance L'état, par l'intermédiaire de ses gouvernants et des administrations produit des normes qui vont organiser la société et déterminer les relations entre individus. Les états ont, en théorie, des pouvoirs limités par le droit (droit constitutionnel) sauf s'il s'agit d'états autoritaires ou totalitaires : on parle dans ce cas d’état de droit, le droit étant un régulateur des relations entre individus mais aussi entre l’état et les individus. Rappelons que l’État est un sujet de droit international en tant qu’entité juridique. 
  • Au niveau international, les Etats peuvent donc établir des relations diplomatiques, produire des actes juridiques internationaux, devenir membre d’une institution internationale... Un état est une construction historique et juridique ce qui ne l'empêche pas d'être une réalité. 
  • C'est donc un mode d'organisation de la société sur un territoire avec un système d'institutions. 
  • Comme l'affirmait Max Weber, l'état dispose du « monopole de la contrainte physique légitime ». On peut affirmer qu'un état repose sur 4 éléments : « un territoire, c'est-à-dire un espace borné par des frontières à l'intérieur desquelles s'exercent, théoriquement les compétences de l'état de manière pleine et exclusive (principe de souveraineté) ; une population, rattachée par un lien juridique, la nationalité, et le sentiment d'appartenir à une même collectivité ; l'existence d'un gouvernement dotés de capacités administratives lui permettant de contrôler son territoire et d'y assurer un monopole de violence légitime ; la reconnaissance par les autres états de son existence, se traduisant généralement par son organisation aux organisations internationales. » pour reprendre la définition de L'Espace mondial : L' Atlas 2018 : SciencesPo, les Presses, 2018. 

 -l’état et ses évolutions 

  •  Il est important de rappeler que l'état moderne est d'essence européenne, un état qu'on fait remonter traditionnellement aux traités de Westphalie de 1648. Ces traités mirent fin à la guerre dite de Trente ans et ont réorganisé l'espace d'une partie de l'Europe avec la mise en évidence du principe de souveraineté où les états sont souverains dans le cadre de leurs frontières respectives. 
  • Ce modèle européen de l'état s'est diffusé à l'échelle mondiale surtout avec le processus de décolonisation. C’est à partir du 17e siècle que se dessine un monde dit westphalien. Le processus de mondialisation a remis en question l'état et ses différents monopoles que ce soit au niveau international ou au niveau national. Pour certains, la mondialisation provoque le déclin de l'état et de ses fonctions. Pour d'autres, l'état est encore bien présent et actif comme la crise de 2008 le montre. En réalité, les différents états sont confrontés à la logique de la mondialisation mais également à la logique de formation des unions régionales et à une logique de fragmentation des états qui se sont multipliés depuis 1945. On peut donc s'interroger si l'état est encore adapté à un monde où les flux ses sont multipliés et où les mobilités sont de plus en plus importantes. 
  • Il peut être fort intéressant de s'appuyer sur une thèse forgée en 2011 par l'économiste Dani Rodrik (Livre : Globalization Paradox. Democracy and the future of the World Economy) : pour ce dernier, il y a incompatibilité entre l'hypermondialisation, l'état et la démocratie (triangle d'incompatibilité). Si on accepte l'hypermondialisation, cela conduit à mettre en difficulté l'état et sa souveraineté. Par contre, si on maintient le cadre de l'état souverain tout en préservant la démocratie, cela va à l'encontre de la mondialisation. 
  • Pourtant, on constate une multiplication des états, le monde est passé de 51 états membres de l'ONU en 1945 à 125 en 1970 puis 193 en 2013. Plusieurs états sont même de création récente comme le Timor oriental en 2002, le Monténégro en 2006 ou encore plus récemment le Soudan du Sud en 2011. Ce processus de prolifération des états est lié à la décolonisation (ne pas oublier les nombreux états des Caraïbes et du Pacifique devenus indépendants dans les années 1980), à l'éclatement de l'URSS, de la Yougoslavie... Ce processus n'est pas terminé puisque plusieurs peuples revendiquent un état comme les Kurdes, les populations touarègues au Sahel et notamment au Mali... 
  • Un état comme la Somalie est en voie d'éclatement avec le Somaliland et le Puntland : le Somaliland a proclamé son indépendance en 1991 (un territoire de 137 000 km carré et de 3,5 millions d'habitants ayant comme « capitale » Hargeisa.) mais cette indépendance (et sa Constitution de l'année 2000) n'est pas reconnue par la communauté internationale. 
  • Le Somaliland s'est détaché de la Somalie suite à une guerre ayant commencé en 1979.
  •  En 1998, la région du Pount ou Puntland s'est également déclarée autonome par rapport à la Somalie mais elle ne s'est pas définie comme indépendante. De façon plus générale, on peut s'interroger sur le modèle de l'état-nation, un modèle en grande partie européen comme nous l'avons signalé, pour savoir si il est universel. Il faut rappeler que pendant très longtemps, les grands ensembles étatiques constitués par les Empires ne s'inscrivaient pas dans une logique nationale : ils étaient multiethniques y compris des Empires comme l'Empire ottoman ou l'Empire austro-hongrois. 
  • Les états nations se sont formés en Europe avec notamment les exemples français et anglais mais aussi en Asie où les royaumes du Vietnam, du Cambodge, de la Thaïlande mais aussi le Japon). Le processus de constitution des états nations s'est développé en Europe au 19e siècle, s'est poursuivi au 20e siècle y compris dans le cadre de la décolonisation. On s'aperçoit donc que l'état-nation est un modèle largement dominant bien que se constitue une société que l'on dit globalisée et mondiale ce qui peut être perçu comme un paradoxe. Deuxième aspect non négligeable, celui des Unions régionales comme l'Union européenne mais également les organisations internationales. Dans le cadre des unions régionales, les états ont accepté de transférer des compétences dont ils n'ont de ce fait plus la maîtrise. Ainsi, au sein de l'Union européenne, il faut insister sur le fait que le droit européen est supérieur au droit national ; de plus, avec la création de l'euro (et de la zone euro) et de la Banque centrale européenne (BCE), les états de cette zone euro n'ont plus ce droit dit régalien de la monnaie. Des organisations internationales comme l'OMC (Organisation mondiale du commerce) peuvent sanctionner des états. Il faut insister sur le fait que ces sont les Etats qui vont créer des unions régionales : ils en sont à l’initiative. 
  • Troisième aspect, le processus de mondialisation et en particulier l'impact des FTN. Ces dernières ont une puissance considérable, une puissance qu'il est difficile de maîtriser pour les états notamment les états faibles. Les nouvelles technologies dont Internet pose également des difficultés aux états en particulier qui ont des difficultés à les contrôler. De façon plus générale, certains considèrent que l'état-nation n'est pas adapté à la mondialisation avec des flux économiques et financiers mondialisés, des économies de plus en plus ouvertes et connectées... 
  • Le monde est passé d'une configuration dite internationale des années 1945 aux années 1970 à une configuration plus globale où les états deviennent moins prégnants. De plus la mondialisation libérale des années 1980 a rendu l'action de l'état plus compliqué avec notamment la remise en question de l'état providence et de l'idée d'un état régulateur de l'économie.
  •  Les états ont même moins de prise sur leurs frontières : la circulation des capitaux en est une illustration. Les FTN les plus importantes peuvent être aussi plus puissantes que bien des états mais on peut aussi ajouter qu'il existe toujours un capitalisme d'état : les plus grandes firmes pétrolières sont des firmes d'état tout comme les plus grandes firmes chinoises toujours contrôlées par l'état chinois. 

 b/ L'état : quelles stratégies dans le monde globalisé ? 

  • Pourtant, ce sont les états qui ont élaboré et sont à l'origine de l'accélération de la mondialisation. Ce sont les états, en particulier les Etats-Unis et le Royaume-Uni, qui ont procédé à la dérégulation de la finance dans les années 1980 contribuant à l'accélération de la globalisation financière. 
  • Les états ont décidé de cette stratégie libérale. En ce qui concerne les unions régionales, ce sont les états qui les conçoivent et les organisent : les états ont donc accepté les transferts de compétences et peuvent d'ailleurs les limiter. Les états ont opté pour la stratégie de constitutions de blocs régionaux. 
  • Les états ont également accepté et contribué à la mise en place des processus de dérégulation commerciale et financière. De plus, les états ont délégué des compétences à des organisations comme le FMI. L'état est, en réalité, en transformations. Il est probablement moins interventionniste notamment dans les PDEM : les nationalisations n'ont plus cours, la planification est moins présente mais les états se veulent toujours et se pensent comme des états stratèges pouvant définir des orientations ce que fait le METI au Japon, Ministry of Economy, Trade and Industry en concertation avec les grands groupes industriels. 
  • Les états restent toujours des régulateurs des économies par les normes juridiques qu'ils définissent et imposent (normes techniques, sanitaires...) : le libre marché total n'existe pas. 
  • Ce sont souvent les états qui assurent et financent l'éducation et la formation mais aussi le développement des infrastructures de transport et de communication. Enfin, les états ont toujours des fonctions régaliennes fortes comme la défense et la sécurité comme le montre en France l'imposition de l'état d'urgence dans le cadre des attentats terroristes de 2015. 
  • Les états ont des stratégies dans le cadre de la mondialisation : ils ne sont pas passifs. 
  • Ce sont les états qui tentent d'adapter les territoires à la mondialisation. En France, l'état a ainsi décidé des pôles de compétitivité (2005) auxquels sont apportées des aides. L'état japonais avant lancé au début des années 1980 le plan Technopolis (1983). Un état peut favoriser les IDE par la création de zones franches ce qu'a fait la Chine à partir de 1979 avec la création des zones économiques spéciales. 
  • Un état peut être à l'initiative de reconversions de territoires ou comme cela a été signalé avec le Japon, un état peut dynamiser des secteurs économiques. Le METI a notamment comme fonctions d'identifier les secteurs porteurs et de promouvoir la recherche et la coopération entre entreprises et laboratoires de recherche et universités. Les états ont encore la possibilité d'utiliser des barrières tarifaires et donc d' être protectionnistes même si cela se fait souvent dans le cadre d'Unions régionales. Ainsi dans le domaine agricole, les droits de douane s'élèvent encore en moyenne à 20%. 
  • Même un état jugé peu interventionniste comme les E.-U agit : une loi de 1933, le Buy American Act conserve toujours une part des marchés publics américains aux firmes étatsuniennes. 
  • Cette loi avait été votée dans le cadre de la crise de 1929 et de la politique du New Deal de Roosevelt : elle a été complétée en 1982 et en 2009. L'article 1605 du Recovery Act de 2009, 100% du fer, de l'acier utilisés dans un projet de construction, de rénovation d'un immeuble ou d'un ouvrage public doit être produit aux E.-U. Le Small Business Act de 1953, dans la même logique, réserve certains marchés publics aux PME américaines (entre 23 et 40% de ces marchés). 
  • Enfin, les états peuvent toujours contrôler leurs frontières comme le montrent les états européens avec la crise des migrants actuelle : les accords de Schengen,signés dans le cadre de l'Union européenne, sont même remis en question avec des états qui ferment leurs frontières. 

 c/ Analyse : 

  •  Les Etats modernes sont les « piliers de l’ordre international » comme le souligne Yves Déloye. 
  • Parallèlement, les Etats gardent des fonctions essentielles dont les fonctions régaliennes (police, justice, défense...). Comme l’écrit Alain Dejammet : « l’état toujours » avec un « dépérissement apparent de l’état. » Il est bien une « charpente résistante » avec un « cadre étatique prédominante », un fort attachement à l’état-nation. 
  • Le « retour des nationalismes » prouve l’attachement à l’État et à la nation qui en est le support. Pourtant l’ état apparaît comme « démuni face aux acteurs transnationaux qui se multiplient. » (Espace mondial, Atlas 2018) et peine à réguler un certain nombre de phénomènes comme la globalisation financière... « Le pouvoir de régulation des états a été affaibli » affirme Dominique Plihon. Mais les états restent fondamentalement impliqués dans la mondialisation à laquelle ils participent et contribuent. 
  • On peut aussi considérer que « l’état résiste à la mondialisation » (Jean- Claude Ruano-Borbalan) et la mondialisation « redéfinit les contours de l’état » comme le signale Jean-Marc Siroën , un « état qui reste compétent et peu contesté. » 
  • Avec la pandémie et la crise sanitaire, « l’état est de retour » (Journal Le nouvel économiste, 2020) y compris l’état providence (comme il l’avait été lors de la crise économique des subprimes de 2008). Ce sont les Etats qui sont à l’origine des plans de relance des économies notamment. 
 
Bilan 
 
Nous vivons une situation paradoxale avec des états qui sont de plus en plus nombreux avec parallèlement des états paraissant être affaiblis par le processus de mondialisation. 
Les acteurs transnationaux sont devenus importants à savoir les firmes transnationales, les unions régionales ou encore certaines organisations internationales mais les Etats demeurent et semblent incontournables notamment en période de crise.
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B/ Des firmes au cœur de la globalisation et de la nouvelle division internationale du travail : les FTN


a/ Les FTN : acteurs essentiels de la mondialisation

  • Les FTN sont devenues des acteurs majeurs de la mondialisation : elles ont un poids économique et financier de grande importance comme le prouvent des chiffres d'affaires phénoménaux. Ainsi, la firme Walmart a un CA en 2019 de 514 milliards de dollars, Sinopec group de 414 milliards de $, Royal Dutch Shell de 396 milliards de $ ... 
  • Les 30 premières FTN en 2019 ont des CA supérieurs à 160 milliards de $. Le nombre de FTN, selon la CNUCED, est d'environ 100 000 en 2015 avec près d'un million de filiales. 
  • En 2015, les FTN réalisent le tiers de la production mondiale et 70% du commerce mondial. Les sociétés mères sont passées de 6 000 à 80 000 entre 1967 et 2012 et les filiales étrangères de 27 000 à plus de 750 000 lors de la même période. Elles réalisent plus de 25% du PIB mondial contre 10% en 1980 et ses 30 dernières années, les ventes ont été multipliées par 5. Ce poids des FTN est intéressant à comparer avec les PIB des états. 
  • Ainsi en 2019, les chiffres d'affaires de Walmart, Sinopec et Royal Dutch Shell respectivement de 514, 414 et 396 milliards de $ peuvent être rapprochés de certains PIB : l’Argentine a un PIB en 2018 de 516 milliards de $ (25e rang mondial), la Thaïlande de 487 milliards de $ (26e rang mondial), le Nigeria de 367 milliards de $ (31e rang mondial). Elles sont donc des acteurs incontournables pas seulement par leur poids économique mais aussi par leurs influences sur les états et les politiques que les états peuvent conduire.. Historiquement, on peut faire remonter ces firmes au 16e et 17e siècle avec les firmes néerlandaises et anglaises à savoir les Compagnies des Indes. : la Compagnie des Indes néerlandaises née en 1602 peut être perçue comme la 1e firme multinationale de l'histoire. Les FTN sont des entreprises spécifiques. Les entreprises sont des structures à la fois juridiques et économiques mais ne sont pas toutes de la même dimension.
  • Les petites et moyennes entreprises (PME) comme le nom l'indique sont de dimension réduite et elles concentrent souvent leurs activités et leurs fonctions sur un site géographique unique alors que les entreprises de plus grande dimension ont non seulement des milliers de salariés travaillant sur des sites géographiques différents dont certains sont localisés à l'étranger. Certaines de ces firmes sont donc qualifiées de firmes transnationales c'est-à-dire des firmes ayant une société-mère et plusieurs filiales. La multinationalisation est un processus par lequel une firme se développe en implantant des filiales hors de son territoire d'origine.
  • Les FTN ont développé des activités à une échelle internationale et pour qu'elles soient considérées comme telles il faut qu'elles soient implantées dans 6 états différents selon le Bureau international du Travail. 
  • Le mot multinational doit être employé avec circonspection car il désignerait une firme dont les activités tout comme son terrain d'action serait réellement mondial or ce type de firme est particulièrement rare (mythe de la World Company). Le terme transnational (e) est plus judicieux car il désigne des firmes certes très internationalisées mais gardant un ancrage national certain. Il faut rappeler qu'il existe ce qu'on nomme un indice de transnationalité : il est calculé selon trois ratios : le premier sont les actifs détenus à l'étranger par rapport aux actifs totaux ; le second, le chiffre d'affaires réalisé à l'étranger par rapport au chiffre d'affaires total et le troisième les emplois à l'étranger par rapport aux emplois totaux de la firme.
  •  Il faut rappeler que les premières firmes transnationales modernes sont nées dans la deuxième moitié du 19e siècle en lien avec l'accélération du processus de mondialisation. En 1914, la moitié des 60 plus grands groupes mondiaux sont des groupes « multinationalisés » notamment les firmes liées à la Seconde révolution industrielle comme les firmes automobiles, chimiques... mais les grandes firmes sont encore dans une logique nationale. 
  • Un second temps d'internationalisation commence à partir des années 1950-60 avec notamment le rôle des FTN américaines qui se lancent dans le processus d'internationalisation mais ces firmes produisent souvent des biens adaptés aux marchés nationaux dans lesquelles elles sont présentes avec un territoire national restant encore prioritaire. 
  • A cette internationalisation s'ajoute une logique de conglomérats avec des firmes qui acquièrent des sociétés dans des secteurs divers avec comme objectif d'accroître la puissance économique du groupe. Les firmes de ces années 1960 restent dans une logique fordiste. Les années 1970-80, en particulier la crise économique, vont changer la donne et vont contraindre les firmes à s'internationaliser davantage encore. 
  • La concurrence mondiale devient de plus en plus intense contraignant les firmes à s'adapter avec en plus des marchés américain et européen partiellement saturés. Les firmes se doivent d' être plus compétitives notamment par l'innovation. La concurrence, la nécessaire compétitivité obligent les firmes à changer de stratégies et à abandonner le système fordiste qui va laisser place au Toyotisme initié par la firme Toyota (une production fondée sur des principes comme zéro stock, une production à flux tendus et le « juste à temps »). Parallèlement, la révolution des transports et des communications, la libéralisation progressive des échanges impactent aussi les FTN. 
  • Depuis plusieurs années, on constate donc une internationalisation croissante de nombreuses firmes mais l'ancrage national reste important. Prenons l'exemple de Siemens, une firme allemande présente dans plusieurs secteurs comme l'énergie, l'industrie et la santé, une firme ancienne fondée en 1847. C'est une firme de plus de 368 000 salariés dont 119 000 en Allemagne. La firme allemande Siemens s'est notablement internationalisée puisque le marché national allemand ne représente plus que 14% des ventes en 2012 contre 51% encore en 1975. En 2018, son CA en milliards d'euros était de 83 milliards d’euros. 
  • Toutefois, un tiers des emplois de la firme sont encore en Allemagne tout comme une partie importante de la recherche. 
  • Dans la stratégie d'internationalisation, Siemens a défini trois zones géographiques : l'Europe occidentale et centrale avec 28% des emplois et 37% des ventes, le continent américain avec des Etats-Unis et le Brésil qui cumulent 81% des ventes de Siemens et l'Asie avec en particulier l'Inde et la Chine auxquelles correspondent plus de 50% des ventes de Siemens en Asie. 
  • En fait, le degré d'internationalisation est très variable selon les firmes. On peut résumer les étapes ainsi : les années 1850-1914 sont des années de spécialisation des firmes avec un contrôle des matières premières que facilite le processus de colonisation avec des filiales et une concentration dite verticale. 
  • Les années 1950-1980 sont des années de multinationalisation avec un accès aux marchés nationaux de certaines firmes et l'implantation de filiales dites relais Enfin, les années 1980 vont voir se développer une phase « intégrative » où les firmes utilisent les avantages comparatifs des différents territoires avec des filiales ou l'appel à la sous traitance. Pendant cette dernière phase, les FTN ont délocalisé leurs productions dans des zones géographiques et des états avec des coûts de main d' œuvre faibles, en particulier des états asiatiques. Ce processus a produit un éclatement de la chaîne de production avec des unités de production dans des pays à bas coût de main d' œuvre alors que les fonctions de recherche, de marketing étaient maintenues dans les PDEM Ces FTN ont une organisation et des structures ayant des fonctions spécifiques obéissant à une certaine logique avec un siège social s'occupant de l'administration et de la gestion, des centres de recherche, des usines de production, des bureaux commerciaux et de vente et des entrepôts de logistique. 
  • Les FTN ont leurs sièges sociaux dans le pays d'origine, des sièges sociaux se situant généralement dans les quartiers d'affaires des métropoles ; les centres de recherche se localisent généralement dans le pays d'origine également et plus précisément dans les périphéries des grandes métropoles (technopoles, pôles de compétitivité...). Les usines de production peuvent se situer dans le pays d'origine mais selon les secteurs d'activités sont de plus en plus présentes dans des pays extérieurs. Quant aux bureaux commerciaux et aux entrepôts de stockage, ils se localisent à la périphérie des villes, dans les zones portuaires et aéroportuaires... 
  • Un autre élément important est ce qu' on nomme la financiarisation des entreprises. Un des secteurs qui a le plus changé est le secteur financier : la libéralisation des capitaux a accru pour les entreprises l'accès aux marchés financiers et la possibilité de se financer. Certaines firmes, non liées à l'origine au domaine de la finance, se sont lancées dans ce secteur. Les firmes automobiles sont aussi des organismes de crédit (crédits automobiles). On s'aperçoit néanmoins que les actionnaires des grands groupes ont pris une place considérable à tel point qu'on parle désormais de capitalisme actionnarial. De plus, des investisseurs ont pris une importance considérable à savoir les fonds d'investissements privés comme les hedge funds qui sont des fonds d'investissements à but spéculatif (Canyon, Landsdowne...) ou les fonds dits souverains (des fonds d'investissements créés par des états). Le premier fonds souverain a été créé au Koweït en 1953 (Koweït Investment Board) et gère actuellement l'équivalent de 250 milliards de dollars. 
  • Les Emirats arabes unis ont 8 fonds souverains comme Abu Dhabi Investment Authority, Investment Corporation of Dubaï...La Chine possède aussi ses fonds souverains comme China Investment Corporation fondé en 2007 gérant environ 940 milliards de dollars en 2017. 
  • Les fonds d'investissement au départ ciblaient le monde de la finance puis se sont diversifiés vers d'autres secteurs comme l'industrie. Entre 1996 et 2007, les fonds d'investissements privés sont à l'origine de nombreuses fusions-acquisitions d'entreprises : fusions passées de 42 milliards de dollars à 555 milliards. On retrouve également comme fonds d'investissement des fonds de pensions comme CalPERS, Quantum... 
  • Le premier cité, California Public Employees Retirement Systemest en fait une agence américaine membre de l'administration publique de Californie : elle gère le fonds de retraite de plus de 1,6 million de Californiens (fonctionnaires...) et gère 300 milliards de dollars de capitaux (Quant à Quantum, il s'agit d'un fonds allemand). Les compagnie d'assurances sont également partie prenante de ce type de fonds d'investissement au même titre que des groupes privés comme J.P Morgan Partners créé en 1984 ou Blackstone, une banque d'investissement fondée en 1985. De façon plus générale, les fusions-acquisitions (pas seulement celles initiées par les fonds d'investissement) ont atteint un chiffre record en 2015 avec 4 600 milliards de dollars relevant de fusions-acquisitions : le rapprochement entre les firmes pharmaceutiques américaines Pfizer (une offre dePfizer) et Allergan en est un exemple pour la somme de 160 milliards de dollars.
  • Il faut préciser que le siège d' Allergan se trouvait en Irlande et le nouveau groupe aura son siège opérationnel à New York mais son siège administratif en Irlande. Deux autres exemples peuvent être cités : le « mariage » entre les firmes américaines DuPont et Dow Chemical pour 68 milliards de dollars ce qui permettra au nouveau groupe d'être le second groupe mondial de la chimie derrière la firme allemande BASF ou encore le « mariage » entre les deux grands brasseurs que sont AB Inbev (une firme belgo-brésilienne détenant 20% du marché) et SABMiller (9,5 % du marché), un groupe britannique pour 120 milliards. On peut aussi citer en 2014 le rapprochement entre les cimentiers Lafarge et Holcim, un groupe français et un groupe suisse qui ont fusionné en 2014 pour former le plus grand groupe mondial au niveau de la construction.
  • Le siège social de la firme se trouve à Jona en Suisse. Enfin, on peut mettre l'accent sur le classement des FTN, un classement révélateur de la puissance des FTN, de certains états... 
  • Le classement Fortune Global 500 en 2019 met en évidence le poids croissant des FTN chinoises, la toujours forte présence des firmes américaines, européennes et japonaises. 
  • Selon le CA, la 1e est Walmart avec donc la première avec 514 milliards de $, la 2e est une firme chinoise Sinopec group (414 milliards de $), la 4e est aussi chinoise avec 392 milliards de $ à savoir la CNPC (China National Petroleum). La première européenne se classe en 3e position : Royal Dutch Shell avec 396 milliards de $. Ensuite nous trouvons à la 6e place la Saudi Aramco avec 355 milliards de $ ; la 7e est BP avec 303 milliards de $, .... 
  • La firme Apple avec 265 milliards de $ se trouve au 11 e rang mondial et Amazon.com au 13e rang avec 232 milliards de $. Il est intéressant de signaler la présence d'autres FTN chinoises dans le top 50 comme au 21e rang mondial China State Construction Engineering (181 milliards de $ de CA), Ping An Insurance au 29e rang mondial avec 163 milliards de $... 
  • La première FTN française est Total au 20e rang mondial avec un CA de 184 milliards de $. 
  • En 2020, Walmart est toujours au 1er rang mondial avec un CA de 523 milliards de $ devant trois firmes chinoises à savoir Sinopec avec 407 milliards de $ de CA, State Grid avec un CA de 383 milliards de $, China National Petroleum avec un CA de 379 milliards de $.
  •  En 2020, Amazon est au 9e rang mondial avec un CA de 280 milliards de $ Le classement met aussi en évidence les FTN qui progressent le plus dans le top 500 : figurent des firmes à nouveau chinoises dans le domaine des hautes technologies comme Alibaba désormais au 182 e rang mondial avec 56 milliards de $ en 2019 ou encore Tencent au 237 e rang mondial avec 47 milliards de $ soit des firmes hautes technologies symboles de l'essor de ces dernières en Chine, ces firmes chinoises qui souhaitent à terme concurrencer Google, Amazon, Microsoft (soit les GAFAM américains). 

 b/ Les FTN : quelles stratégies ? Avec quels effets ? 

  • Les FTN ont utilisé et utilisent plusieurs stratégies. La stratégie d'approvisionnement consiste à s'implanter à proximité des ressources minérales ou autres ; une autre stratégie est la stratégie de marché consistant à s'implanter sur les marchés locaux et nationaux par des filiales ce qui permet d'avoir directement aux marchés en question et enfin, une dernière stratégie est la stratégie de rationalisation consistant à s'implanter en fonction des avantages comparatifs de chaque territoire. De manière générale, de nombreuses firmes ont opté pour l'internationalisation pour trouver et conquérir de nouveaux marchés, pour contourner les contraintes des taxes à l'importation avec des filiales implantées à l'étranger ce qui évite les protections diverses tarifaires ou non... 
  • Les FTN les plus importantes se structurent à l'échelle mondiale par deux biais : des IDE que ce soit par la création de filiales, l'achat d'entreprises locales (fusions-acquisitions) ou encore la création d'une entreprises commune avec une entreprise locale (une joint venture). L'autre biais est la sous traitance comme le fait la firme américaine Nike. L'essor des FTN est incontestablement lié à cette internationalisation. 
  • L'ancrage national demeure puisque les fonctions dites stratégiques à savoir le siège social, les centres de recherche... restent localisées dans le pays d'origine mais elles n'ont cessé de s'implanter à l'étranger afin d'accroître leur puissance. 
  • En 2015, les 200 premières FTN réalisaient ainsi 62% de leur chiffre d'affaires à l'étranger (12 500 milliards) et 53% des 24 millions de salariés travaillant pour elles sont également des salariés étrangers.. 
  • Comme on le verra ci dessous ce degré d'internationalisation est néanmoins variable selon les FTN et les états auxquels elles appartiennent. Certaines entreprises contrôlant leurs marchés nationaux ne pouvaient que s'ouvrir davantage afin de trouver de nouveaux clients et de nouveaux marchés. Parmi les stratégies, les fusions déjà évoquées. Une première vague de « méga-fusions » avait eu lieu dans les années 1990 comme les fusions entre Exxon et Mobil, Total et Elf, Vivendi et Universal... 
  • La crise de 2008 a freiné ces opérations qui viennent de reprendre depuis 2013.
  • La stratégie des fusions consiste à former des groupes de plus en plus grands et puissants en partant de l'idée que la taille procure des avantages (économies d'échelle, productivité, capacité à se financer...). 
  • On est donc dans une logique oligopolistique et dans une internationalisation de plus en plus importante.
  •  Nous sommes entrés dans une nouvelle phase de concentration des firmes. Dans les années 1980, les investisseurs et actionnaires ont poussé les firmes à cibler sur leur activité initiale (downsizing) ce qui était une façon de lutter contre les effets de la crise. Avec la relance de la croissance des années 1990, par contre, les FTN ont vu leurs CA et bénéfices s'accroître ce qui a provoqué un mouvement de concentration par des fusions nombreuses déjà évoquées auparavant. En 1997, on assiste à ce que les spécialistes nomment une méga-fusion entre Exxon et Mobil. Toujours en 1997, la firme Total achète Elf, en 2000 Vivendi achète la firme américaine Universal.... 
  • Nous sommes dans une logique où les responsables pensent que plus une firme est grande, plus elle sera dynamique. Ce phénomène de concentration se poursuit comme nous l'avons déjà vu. Cette internationalisation grandissante peut être analysée en fonction d'un indice de transnationalisation (il reprend la part de l'étranger dans les actifs, les ventes et les employés) : l'indice de transnationalisation est passé pour les 100 plus grandes firmes de 45,9% en 1995 à 66% en 2011. Néanmoins comme nous l'avons déjà dit, on ne peut parler de firmes réellement globales. 
  • On s'aperçoit que les deux firmes les plus internationalisées sont deux firmes suisses à savoir Nestlé et ABB, une internationalisation liée à la faible dimension du marché intérieur suisse. Les firmes américaines, japonaises ou même celles des états émergents sont moins transnationalisées.( pour les 100 plus grandes FTN en 2011, l'ancrage national est encore important avec 40% des salariés travaillant dans les pays d'origine et 35% des ventes). 
  • La « World Company » est un mythe, peu de firmes peuvent être considérées comme globales. De nombreuses FTN ont adopté la décomposition internationale du travail du processus de production (DIPP) à partir des années 1980 notamment. Les FTN ont ainsi abandonné ce qu'on nomme l'intégration verticale de la production consistant à contrôler l'ensemble du processus de production. Elles préfèrent que les composants du produits soient fabriqués par des sous-traitants comme Nike l'a fait très tôt ; il en est de même pour certains services (comptabilité, centres d'appel...). 
  • Elles ont donc fait le choix délibéré d'externaliser certaines activités afin d'être plus compétitives par des économies d'échelle, des réductions de coûts. Ce type de choix permet également une plus grande flexibilité et en cas de difficultés les entreprises sous-traitantes servent d'amortisseurs. Dès lors, la fabrication et la production d'un produit relève d'un système complexe comme le montre la fabrication par exemple de l'iPhone. On s'aperçoit également que cette DIPP conduit à la spécialisation dans des tâches particulières et non plus dans un produit conçu et fabriqué dans sa totalité. On peut également considérer que cette façon de procéder aboutit à des logiques productives plus globales : les FTN disposent de filiales relais pour des marchés locaux, font appel à des sous-traitants pour produire les composants... 
  • Cette DIPP s'inscrit parfaitement dans le processus d'internationalisation. On peut aussi mettre l'accent sur le fait que de nombreuses FTN ont des stratégies avant tout régionales s'attachant surtout à des marchés régionaux à savoir l'Union européenne pour les firmes européennes, l'Asie pour les firmes japonaises... ou ont des logiques visant deux blocs régionaux comme les firmes automobiles américaines qui s'intéressent surtout à l'Amérique et à l'Europe. On note des évolutions avec l'affirmation des FTN des pays dits du Sud en particulier des états émergents. Les états du Nord à savoir l'Amérique du Nord, le Japon et l'Europe ne contrôlent plus que 48% des 200 premières FTN. Néanmoins, les 97 FTN de ce qu'on appelait la triade représentent 77% des ventes et 62 % des salariés ce qui montre qu'elles restent puissantes. Ces FTN ont par leur poids un incontestable pouvoir. 
  • On peut prendre comme exemple la banque d'affaires américaine Goldman Sachs dont les liens avec le monde politique américain ne sont un secret pour personne. Plusieurs secrétaires d'état avant de le devenir avaient travaillé pour cette banque comme Robert Rubin (secrétaire d'état au Trésor pendant la période Clinton), Henry Paulson ancien président de Goldman Sachs et secrétaire au Trésor de 2006 à 2008 et qui est à l' origine du plan de sauvetage des banques américaines de 2008 (un plan de 700 milliards de dollars d'aide qui sera géré par Neel Kashkari un homme de Goldman Sachs également, Joshua Bolten, chef de cabinet de Georges Bush Junior entre 2006 et 2008 et ancien directeur des affaires juridiques de Goldman Sachs à Londres entre 1994 et 1999... 
  • De façon plus générale, les FTN ont une place centrale dans le processus de mondialisation qu'elle contribue à configurer. Si on définit la mondialisation selon les « cinq composantes : les flux commerciaux de biens et de services entre les filiales des firmes ou entre firmes (...), les investissements directs étrangers (IDE) et les délocalisations (...) ; les flux de capitaux financiers ; les flux de connaissances et de technologies ; les migrations internationales de travaillers » comme le fait l’économiste El Mouhoub Mouhoub les FRTn participent à ces 5 dimensions. Si on prend la dimension des IDE , ces derniers sont en plein essor et les FTN sont des investisseurs majeurs. 
  • Dans certains domaines parce qu'elles sont en situation d'oligopole(s), elles décident des prix qui n'obéissent plus à la loi de l'offre et de la demande. Il faut aussi rappeler qu'elles ont un pouvoir d'influence sur les dirigeants politiques comme le montre le Forum de Davos organisé chaque année, un Forum qui existe depuis 1971 et est organisé par une association d'entreprises. Cette association, World Economic Forum, a été créée par un économiste allemand Klaus Schwab et on trouve dans cette association des firmes comme Google, Facebook, ArcelorMittal, Total... (le budget de l'organisation est d'environ 200 millions d'euros). Le lobbying est, bien entendu, une autre façon d'influer. 
  • On peut citer la European Roundtable of Industrialists ,une organisation créée en 1983 par le président de Volvo de l'époque (Pehr Gyllenhammar et qui rassemble parmi les firmes les plus puissantes d'Europe:BASF, Nestlé, Vodafone, Total, Inditex (Zara), Fiat, Nokia... 
  • On peut aussi faire référence à BusinessEurope une organisation rassemblant 40 organisations nationales d'entreprises. Aux Etats-Unis, des firmes de hautes technologies comme Microsoft ont créé The Americans for Technology Leadership pour promouvoir les intérêts des firmes de ce domaine auprès de l'état fédéral. Ces groupes de pression sont en capacité d'influer sur les décisions prises par les états et/ou les Unions régionales. 

c/ Des firmes au cœur de la globalisation et de la nouvelle division internationale du travail 

  • Avant d'aborder la nouvelle division internationale du travail, il faut insister sur l'importance des IDE qui sont une marque de l'interdépendance des économie et de l'internationalisation des FTN. Il faut néanmoins souligner que ces IDE sont particulièrement polarisés puisque 8 états concentrent 50% du stock d' IDE et 40 états 90% et cette polarisation concerne avant tout les états développés qui concentrent près de 65% des IDE. La nouveauté est que de plus en plus d' IDE sont à destination d'états émergents comme la Chine et les NPIA. 
  • Ainsi, les firmes américaines ont une préférence pour investir en Europe (55% des IDE étasuniens) . 
  • Des territoires sont donc en marge des IDE : il s'agit des états les plus en retrait économiquement comme les PMA. Ces différences à l'échelle mondiale se retrouve à l'échelle nationale : en France, la plus grande part des IDE se concentrent en région parisienne et ce sont surtout à une autre échelle, les métropoles qui sont concernées par ces IDE. A partir des années 1970, les firmes vont s'internationaliser encore plus notamment dans le cadre d'une crise qui pose problème.
  •  Il s'agit d'investir plus sur les marchés internationaux afin de trouver de nouveaux clients, de nouveaux marchés et accroître les profits. 
  • Cette internationalisation peut permettre aussi d'avoir accès directement aux marchés locaux par le biais de filiales : lorsque des filiales sont implantées à l'étranger cela permet de contourner les taxes douanières, d 'éviter les risques liés aux taux de change des monnaies qui sont variables... 
  • Les firmes ont donc développé leurs activités à l'étranger avec un degré toujours plus important d'internationalisation : en 1994, la part de l'étranger dans les actifs, les ventes et les emplois était de 45,9% pour les 100 FTN les plus importantes et cette part est passée à 65,5% en 2015. Cela n'empêche pas que la plupart des firmes gardent un important ancrage national. Progressivement, en lien avec l'européanisation du monde et la colonisation s'était mise en place une division internationale du travail dans laquelle les territoires sous dépendance coloniale fournissait les matières premières aux états dominants qui les transformaient ou les utilisaient pour leurs industries. 
  • Cette division internationale du travail a changé. Il faut savoir que les firmes ont géographiquement deux logiques entre lesquelles il faut choisir : une logique de marché et une logique d'utilisation des avantages comparatifs. La logique de marché consiste à tenter de s'adapter à la demande nationale et locale alors que la seconde logique est de « jouer » sur la division internationale du travail en s'appuyant sur les avantages comparatifs. Dans cette dernière configuration, on a assiste depuis plusieurs années à des délocalisations. Il faut savoir qu'il existe en fait deux choix pour les firmes soit transférer des activités hors du pays c'est ce phénomène qui correspond aux délocalisations soit créer de nouvelles unités de production qui ne sont donc pas des délocalisation. 
  • Ces façons de procéder peuvent répondre à plusieurs objectifs : rationaliser la production, être plus compétitif en économisant sur les coûts de production (sachant que la recherche d'un coût de main d' œuvre moins cher n'est pas toujours systématique : ce coût étant évalué à 10 à 12% du coût final d'un produit), être directement présent sur un marché donné... Il faut également souligner que le niveau de productivité est plus important pour les PDEM ( un actif américain, en une heure produit autant de richesses que cinq actifs roumains ou six actifs chinois et autant que 100 actifs malgaches. 
  • Ce qu'on nomme les différentiels de productivité peuvent d'ailleurs justifier de ne pas avoir systématiquement recours aux délocalisations. On assiste ces dernières année à un phénomène inverse celui des relocalisations. Les firmes américaines Dell et General Electric qui avaient installé leurs centres d'appel en Inde ont réimplanté ces centres aux E-U. La firme française de ski Rossignol avait délocalisé une partie de sa production à Taïwan a réinstallé des sites de production en France... 
  • Toutefois ces relocalisations ne compensent pas les multiples délocalisations. De façon générale, les FTN ont procédé à un redéploiement géographique de leurs activités avec transferts d'activités et recherchent de nouveaux débouchés (les pays émergents). Il faut vraiment mettre l'accent sur la diversité des stratégies utilisées par les firmes dans le cadre de la mondialisation. De grandes FTN délocalisent et maintiennent des sites de production dans leur pays d'origine. Dans un même domaine, deux firmes peuvent agir différemment : Apple utilise la firme de Taïwan Foxconn pour produire son iPhone en utilisant d'ailleurs des composants japonais, coréens, allemands ou autres. 
  • Inversement Samsung contrôle sa production et reste une firme dite intégrée. 
  • Dans la nouvelle division internationale du travail où une nouvelle répartition des tâches s'est effectuée, les FTN ont maintenu les fonctions de commandement, de recherche dans le pays d'origine et les fonctions de production (en grande partie) dans des états émergents ou autres là où le coût de main d'œuvre est plus faible : certains états sont donc devenus des pays dits ateliers.
  •  Plusieurs firmes comme Nike ont même systématiquement choisi la sous-traitance à telle enseigne qu'on parle de firme sans usine. Cette NDIT a provoqué la « désindustrialisation » des états développés . 
  • Depuis les années 2000, on repère des évolutions avec des délocalisations a priori surprenantes de centres de recherche vers des états émergents comme l'Inde, un état ayant de bons ingénieurs et capable d'innovations. L'autre nouveauté est ces états émergents qui sont à leur tour devenus par leurs FTN des acteurs puissants de la mondialisation. Ces FTN chinoises, brésiliennes, indiennes procèdent à des délocalisations vers d'autres états en développement comme les « bébés tigres » (Thaïlande, Philippines...) et sont capables d'acheter des firmes occidentales . 
  • En 2005, le groupe indien Tata a acheté aux Britanniques Land Rover et Jaguar ; la firme chinoise Lenovo, premier fabricant mondial de micro-ordinateurs, a acheté en 2014 la division serveurs du groupe américain IBM (pour 2,3 milliards de dollars) et avait déjà acheté la branche PC d' IBM en 2004 et a également acheté Motorola Mobility vendu par Google pour 2,9 milliards de dollars (Google avait acheté Motorola en 2011 pour 12,5 milliards de dollars). Nous sommes entrés dans une logique d'affrontement et de concurrence entre les FTN occidentales et les FTN des états émergents. Parmi les FTN les plus actives, les FTN chinoises comme Sinopec et CNPC (pétrole), Baosteel (acier), Geely (automobile),Lenovo (informatique), TCL (électronique), Huawei (télécommunications)... qui ont la spécificité d'être des groupes publics (29 des 30 plus importantes FTN chinoises sont des firmes d'état). Il faut signaler que ces FTN ont un quasi monopole de leur marché intérieur. Ces FTN ont plusieurs stratégies : s'implanter dans d'autres états émergents ou dans des états en développement (y compris en Afrique), acheter des firmes étrangères... 
  • En achetant des firmes américaines ou autres (TCL a ainsi acheté en 2004 le groupe français Thomson multimédia) veulent monter en gamme. La NDIT a de fait profité aux états émergents. La division internationale du travail est ainsi devenue de plus en plus complexe. 
  • Mais quelque soit sa complexité, elle abouti à un espace mondial reconfiguré et hiérarchisé avec une mise en réseau inégale des territoires. Les états développées sont toujours au cœur de la NDIT avec des FTN américaines, européennes ou japonaises toujours dominantes. Mais cette domination est désormais contestée par les états émergents et leurs firmes. Certains états sont des « périphéries intégrées » qui fournissent des matières premières qu'elles soient agricoles, minérales ou énergétiques ou sont des pays ateliers. Enfin il existe des états et des territoires vraiment en retrait qui sont donc des « marges », des états instables, pénalisés par les guerres civiles...
  • A une autre échelle, les stratégies des FTN profitent aux métropoles, aux façades maritimes et à des zones spécifiques à savoir les zones franches. Ces zones sont créées pour attirer des firmes et ces firmes qui s'y implantent bénéficient d'avantages fiscaux, dans certains cas et pays de lois sociales inexistantes. 
  • Ces zones réalisent tout de même à l'échelle mondiale, 20% des exportations industrielles mondiales et sont fondamentales pour plusieurs états comme la Chine où elles représentent 55% des exportations mais aussi dans des états comme le Honduras et le Costa-Rica (56% des exportations de ces pays) ou encore les Philippines (45%), le Maroc (27%...)Ces zones sont apparues après la seconde guerre mondiale notamment à Panama en 19478 avec la zone franche de Colon puis celle de Shannon en Irlande en 1958. Elles se sont par la suite développées dans de nombreux états comme à Taïwan avec Kaoshing en 1966, Djebel Ali dans les émirats arabes unis en 1985... 
  • Pour mieux saisir cette NDIT, on peut s'appuyer sur plusieurs exemples. Dans le domaine de l'électronique, on note des reconfigurations avec l'émergence de l'Asie et des états comme le Japon qui a donné le ton puis des NPIA (Corée du Sud, Taïwan), de la Chine et depuis peu d'états comme la Thaïlande et la Malaisie. 
  • Les secteurs de l'électronique, de l'informatique et des télécommunications représente une production atteignant plus de 1100 milliards d'euros et 60% de la production est réalisée en Asie (dont Chine = 30%, Japon = 15%...) alors que l'Europe et les E.- U. Ne représentent plus que 20 et 17%. 
  • Les firmes japonaises de ce secteur ne réalisent plus que 35% de leur production au Japon et 65% hors du Japon dont la majeure partie dans d'autres états asiatiques. Les FTN japonaises sont très présentes dans les semi-conducteurs ou les équipements médicaux. Par contre, la Chine s'est spécialisée dans l'assemblage de produits comme les lecteurs disques laser (85% de la production mondiale), des téléphones mobiles (50%)... Ce sont les provinces du littoral chinois qui bénéficient de cette dynamique (province du Guandong notamment). L' Asie et en particulier le Japon occupe une place essentielle au niveau des semi-conducteurs : un Japon qui produit et fournit 40% des mémoires Flash des téléphones portables par exemple. L'industrie des semi-conducteurs représente un potentiel de 300 milliards de dollars : un potentiel que l'état japonais et les FTN nippones ont compris. 
  • Toujours dans le domaine de l'électronique, les FTN que sont IBM, Hewlett-Packard, Cisco, Dell... ont opté pour que la production soit externalisée par l'appel à des sous-traitants comme la firme de Taïwan Foxconn fondée en 1974 ( de son vrai nom Hon Hai Precision) qui emploie plus d' 1 million de travailleurs, une firme travaillant pour Sony, Apple, Dell, Motorola, Microsoft, Samsung, Lenovo, Nokia... ou encore la firme de Singapour Flextronics créée en 1990 travaillant pour des firmes comme Alcatel, Motorola... Autre exemple, une FTN comme Rio Tinto (fondation en 1872) qui est un groupe minier anglo- australien (deux sièges sociaux à Melbourne et à Londres). 
  • Ses actifs sont estimés à plus de 80 milliards de dollars et il se situe au 3e rang mondial derrière les firmes BHP-Billiton, une firme également anglo-australienne et la firme Vale (Companhia Vale do Rio Doce), une firme brésilienne. Rio Tinto est un véritable conglomérat qui s'est diversifié dans la chimie, les ciments... 
  • C'est un groupe de plus de 70 000 salariés présents sur tous les continents (dans 40 états) et a procédé à plusieurs acquisitions comme celle d' Alcan en 2007 un groupe canadien producteur d'aluminium pour plus de 38 milliards de dollars. La firme japonaise Toyota, quant à elle, été créée en tant que firme automobile en 1937. En fait à la fin du 19e siècle, Sakichi Toyoda met au point le premier métier à tisser mécabique n Japon ce qui révolutionne l'industrie textile de ce pays. En janvier 1918, il fonde avec son fils Kiichiro, Toyoda Spinning and Weaving Company puis en 1920 Toyoda Automatic Loom Works. Kiichiro s'intéresse particulièrement à l'automobile et va fonder en 1937 Toyota Motors Corporation : La famille Toyoda est donc passée de l'industrie textile à l'industrie automobile. Plus tard, Kiichiro est à l'origine du système de production toyota ( SPT) fondé sur plusieurs principes (principe de Jidoka) : produire à flux tendus , améliorer continuellement les productions (système du Kaizen : un système dans lequel chaque travailleur a la possibilité de proposer des améliorations pour produire mieux). 
  • Le siège du groupe est localisé dans la ville de Toyota (à proximité de Nagoya). Elle s'est imposée dans le domaine de l'automobile pour devenir une firme majeure à la fois dans ce secteur mais une des 20 FTN les plus puissantes tous secteurs confondus. 
  • Cette firme emploie plus de 326 000 salariés et a vendu en 2013 8,4 millions de véhicules dans le monde et ses ventes ont même atteint en 2014 10,23 millions de véhicules vendus dans 160 pays. Toyota, c'est 163 sites de production dans le monde dont un implanté en France en l'occurrence à Valenciennes- Onnaing. On peut rappeler que le secteur automobile est un des secteurs qui s'est internationalisé rapidement avec une forte segmentation technique et territoriale. C'est aujourd'hui un domaine qui tend vers l'oligopole avec quelques grandes firmes (une dizaine) contrôlant 80% du marché mondial. 
  • Toyota est un exemple intéressant à plusieurs niveaux. C'est d'abord une firme qui a symbolisé l'émergence du Japon, et ce dès la fin 19e et le début 20e dans le cadre de la modernisation du pays (ère Meiji). C'est aussi comme souvent pour les grands groupes japonais une firme liée à une famille qui a su faire preuve d'initiatives.
  • Il faut savoir qu'au milieu des années 1930, la famille Toyoda a bénéficié de l'aide d'un autre groupe nippon : Mitsui avec comme objectif de créer un groupe national dans le domaine de l'automobile. La firme Toyota a également bénéficié des commandes de l'armée japonaise lors de la Seconde guerre mondiale puis de l'armée américaine avec la guerre froide. Toyota s'est imposé d'abord sur son propre marché, un marché protégé dans les années 1950 par des barrières tarifaires importantes. Toyota a constitué une technopole d'envergure : Toyota City donc près de Nagoya avec son siège social, ses centres de recherche... (ce site concentre d'ailleurs 87% des salariés de Toyota au Japon. Il faut mettre également l'accent sur les caractéristiques de ce groupe unique. Il est fondé sur un important réseau de sous-traitants (système pyramidal) ; qui servent d'amortisseurs en cas de difficultés. C'est aussi un groupe qui n'a jamais tenté de racheter d'autres firmes refusant ce qu'on nomme la croissance externe. Toyota a mis l'accent sur la participation de ses salariés par l'importance accordée au travail en équipes, la création des cercles de qualité... 
  • Stratégiquement, Toyota garde une base nationale forte avec notamment 62% de ses 326 000 salariés travaillant au Japon. Sa présence sur de nombreux marchés nationaux marque la volonté d'être près des consommateurs avec des centres continentaux de coordination des activités se localisant à Singapour pour le continent asiatique, aux E.-U pour l' ALENA et en Belgique pour le marché européen. Toyota a également fortement ciblé sur les marchés émergents représentés par le Brésil, l'Inde... (45% de ses ventes actuelles) en diversifiant sa gamme d'automobiles (la Toyota Etios a été conçu spécifiquement pour les marchés brésilien, chinois et thaïlandais avec un prix variant de 10 000 à 15 000 dollars. Une firme française est également intéressante à analyser: la firme Michelin. Elle est l'un des leaders (2e derrière Bridgestone, une firme japonaise) des pneumatiques en 2015 avec 13,7% du marché, des ventes dans 170 pays, 68 sites industriels implantés dans 17 pays différents (178 millions de pneus produits en 2014) et 112 300 salariés. C'est une firme ancienne créée par André et Edouard Michelin en 1889 à Clermont-Ferrand : le siège social est toujours dans cette ville. 
  • Elle est dans un domaine lui aussi concentré avec seulement 5 grandes firmes mondiales : Bridgestone, Goodyear (Etats-Unis), Pirelli (Italie) et Continental (Allemagne). C'est une firme qui a su se maintenir grâce à l'importance accordée à l'innovation (3,5% du CA est destiné à la recherche). 
  • Il faut savoir que Michelin s'appuie sur plusieurs marques avec une marque mondiale qui est Michelin et des marques plus régionales comme Uniroyal pour l'Amérique du Nord, Kleber pour l'Europe ou Warrior pour le marché chinois. Michelin a la particularité d'être toujours contrôlée par la famille, une famille dont l'un des fondements de sa stratégie est la qualité. Michelin a longtemps eu une intégration dite verticale contrôlant des plantations de caoutchouc, ayant ses propres machines outils, fabriquant son acier... Elle a également longtemps opté pour une croissance interne (bien qu'elle ait contrôlé la firme automobile Citroën entre 1936 et 1976). 
  • Elle a également longtemps eu un fort ancrage national (le marché français ne représente plus que 10% de ses ventes. Depuis plusieurs années, Michelin a changé de stratégie : elle a acheté en 1997 un fabricant de roues allemand Kronprinz au groupe Mannesmann, a développé une joint-venture avec la firme allemande Wocco (systèmes antivibratoires), a pris le contrôle de distributeurs comme Euromaster ou Tyre Center (une firme américaine). La distribution et les services du groupe sont ainsi présents dans 27 pays avec 3 300 centres. 
  • La firme Michelin s'est lancée dans la conquête de nouveaux marchés très tôt : elle s'implante à Turin (berceau de FIAT) en 1906, au Royaume-Uni en 1927... Pour être présent sur le marché américain, Michelin rachète Uniroyal- Goodrich en 1990 (ALENA = un tiers des ventes de Michelin). Depuis plusieurs années, la firme Michelin s'est tournée vers les marchés émergents et même l'Afrique. La firme s'est ainsi implantée en Chine en 1996 et a signé un accord avec le groupe chinois Shanghai Tyre en 2001. Walmart est une firme américaine fondée en 1962 par Sam Walton à Bentonville dans l'Arkansas (aujourd'hui elle est dirigée par un de ses fils Sam Robson Walton depuis 1992). Walmart est devenu le géant de mondial de la grande distribution avec un CA atteignant, en 2015, 485 milliards de dollars (500 milliards en 2018). 
  • Cette firme emploie 2,2 millions de salariés dans plus de 11 000 super et hypermarchés répartis dans 27 pays.
  • Depuis 1991, cette firme a décidé de s'internationaliser notamment en Europe et en particulier au Royaume-Uni sous l'enseigne Asda devenue la seconde enseigne au Royaume-Uni derrière Tesco un groupe britannique. Asda réalise même près de 50% des ventes de Walmart à l'étranger. Walmart s'est aussi installé en Chine depuis 1996 et au Japon (enseigne Seyiu :une enseigne japonaise acquise par Wal-mart). Bien entendu, Wal-mart est aussi implanté au Canada et au Mexique (Walmex). Au Mexique, Wal-mart a commencé par acheter un groupe : Cifra devenant Walmex en 2000 (plus de 2600 magasins actuellement au Mexique et 150 000 salariés). Sam Walton avait déjà créé des Walton's stores lorsqu'il décida en 1962 de créer une vraie chaîne de grande distribution sous le nom de Walmart dans l'Arkansas dont le siège est à Bentonville. 
  • En 1967, on dénombrait 27 magasins dans cet état et en 1968, un premier magasin ouvre hors de l'Arkansas, en l'occurrence dans le Missouri. La firme commence donc à se développer aux E.-U entrant même en bourse en 1970 et cette même année est présente dans 5 états du Sud du pays : Walmart a profité d'une main d' œuvre bon marché dans des états du Sud où le syndicalisme est quasi inexistant. En 1987, Walmart disposait de près de 1200 magasins pour 200 000 employés (et un CA de près de 16 milliards de dollars. Les années 1990 sont marquées par un fort développement tant à l'échelle des E.-U qu'en dehors puisqu'en 1991 Wal-mart s'implante au Mexique puis en 1994 au Canada. 
  • En 1995, la firme s'installe aussi au Brésil et en Argentine. C'est en 1999 que Walmart achète Asda un groupe britannique ce qui marque une internationalisation encore accrue hors du contient américain. La firme Wal-mart a une structure spécifique avec trois réseaux de distribution : Walmart Stores Division US, Sam's club et Walmart International et de plus cette firme fonctionne avec 9 tailles différentes de magasins. Walmart Stores Division U.S a intégré depuis 2007 un service de vente en ligne. 
  • Les Sam's Club sont des structures où il faut être membres. Walmart's International gère près de 3000 magasins dans le monde. Il faut insister sur le fait que Walmart avant de s'internationaliser a voulu contrôler le marché américain qui représente toujours 70% des ventes et 60% des emplois. Sur ce marché, la firme avait en premier fait le choix de s'implanter dans des villes moyennes d'états américains auxquelles les autres firmes de la grande distribution ne s'intéressait guère. 
  • Pour réussir, Walmart a joué sur de faibles marges, les flux tendus donc des stocks peu importants et des achats en grande quantité afin de gagner sur les coûts. Walmart, par sa puissance, exerce une très forte pression sur ses fournisseurs avec des salariés mal payés. Enfin, à partir des années 1990, Walmart a fait le choix d'importer des produits et de délocaliser ses achats en se fournissant notamment en Asie ou en Amérique latine... 

 d/ Les FTN contrôlent-elles le monde ? 

  •  Pour certains, les FTN « prennent le pouvoir » (Ivan du Roy) avec les plus importantes qui « rivalisent désormais avec les états. » Ivan du Roy rappelle également que Walmart emploie 2,2 millions de salariés soit environ l’équivalent de la population parisienne (intra-muros), que le bilan bancaire de la banque française BNP Paribas est d’environ 2000 milliards d’euros ce qui n’est pas si loin que cela du PIB français... 
  • Les FTN, du moins certaines, ont une réelle influence sur les états, les sociétés et nous-mêmes. C’est le cas notamment des GAFAM. D’ailleurs Céline Antonin dans un article de la revue Alternatives économiques se demande si on peut « encore maîtriser les GAFA ? ». 
  • Ces dernières ont un pouvoir important par le biais des réseaux qu’elles génèrent sans oublier leur politique d’évasion fiscale leur permettant d’échapper en partie à l’impôt. Les cinq GAFAM au niveau de la capitalisation boursière en février 2020 représentent 1 216 milliards de $ pour Apple, 1198 milliards de $ pour Microsoft , 919 milliards de $ pour Google, 901 milliards de $ pour Amazon et 523 milliards de $ pour Facebook. A titre de comparaison, les entre prises du CAC 40 en France ont une capitalisation boursière au même moment de 1775 milliards de $. 

 Bilan

Les FTN sont bien des acteurs majeurs et dominants de l'économie internationale. Elles ont une influence importante notamment par des moyens comme des structures telle le Forum économique de Davos (Suisse) fondé en 1971 par une association d'entreprises internationales : le Forum de Davos est un lieu de rencontres entre chefs d'entreprises, d'hommes politiques et de financiers. Bien entendu, les FTN forment aussi des lobbies comme l' European Round Table of Industrialists réunissant les représentants de 45 grandes FTN européennes. Même les entreprises américaines implantées en Europe ont créé l' American Chamber of Commerce to the European Union... (voir plus haut). 
Il faut insister sur le fait que les FTN sont liées à des territoires. En effet, elles s'inscrivent dans des territoires spécifiques notamment pour produire mais aussi pour investir. Ce sont les pays développés qui concentrent le plus les investissements des FTN suivis par les pays émergents dont les BRICS. Les FTN ont avant tout des logiques régionales avec des firmes européennes privilégiant l'Europe, les firmes asiatiques l'Asie...
 A l'échelle nationale, les FTN concentrent leurs activités dans les métropoles, sur les littoraux, les zones franches, les technopôles... En fait, les firmes sélectionnent les territoires en fonction de ce qu'ils apportent. Enfin, on peut s'interroger sur « une impossible régulation » (Espace mondial : L' Atlas 2018) de ces FTN. Comment notamment pour les états réguler ces firmes ?
UE

C/ Les organisations régionales, internationales et les ONG : quels rôles dans la globalisation ?


a/ Des organisations régionales, vectrices du commerce et des échanges

  •  Les organisations régionales sont des éléments importants du commerce, de la libéralisation des échanges et donc de la mondialisation. On utilise le terme de régionalisme (s) pour désigner le processus conduisant plusieurs états à créer des institutions et organisations régionales. 
  • Le terme régionalisation renvoie à l'intensification des échanges et des flux à l'échelle d'une région, un processus qui ne correspond pas toujours au régionalisme. 
  • On peut mettre en évidence la multiplication des unions régionales à partir des années 1990 à telle enseigne qu'on peut parler d'enchevêtrements (Espace mondial : L' Atlas 2018).
  •  Le « régionalisme est une tendance profonde du XXe siècle » (Espace mondial : L' Atlas 2018). Les organisations régionales avec leurs institutions font partie intégrante des relations internationales et de la géopolitique mondiale. Pour Tanja Börzel et Thomas Risse, le régionalisme est « un processus principalement étatique de création et de maintien d’institutions et d’organisations régionales entre au moins trois états. » La coopération et la concertation que ce soit sur le plan politique, économique, militaire sont des pratiques devenues courantes. On met souvent l’accent sur le régionalisme économique car il est devenu fondamental et il est présent sur tous les continents. Nous mettrons donc l’accent sur ces unions régionales à vocation économique. 
  • Le régionalisme économique est un processus qui met en avant la coopération à ce niveau entre les Etats avec des intérêts et objectifs communs. Le régionalisme économique remontre au 19e siècle en particulier avec la création du Zollverein, une union douanière entre les principautés allemandes de l’époque. 
  • Mais il faut rappeler que le régionalisme se développe véritablement après la Seconde guerre mondiale et notamment dans le contexte de la guerre froide. 
  • La Communauté européenne du Charbon et de l’Acier qui est créée en 1951 pour devenir en 1957 la Communauté économique Européenne (CEE) est une illustration de ce processus de régionalisation économique post-seconde guerre mondiale. 
  • Mais on peut aussi rappeler que dès 1948 la CEPAL (Commission Economique Pour l’Amérique Latine) avait mis en évidence l’importance pour les pays d’Amérique latine de se rapprocher économiquement. D’ailleurs en 1960 est fondée l’Association latino-américaine de libre échange (ALALE) avec le traité de Montevideo). Le régionalisme économique ne se limite donc pas à l’Europe.
  • C’est également en 1960 qu’est créé le Marché Commun Centraméricain (MCCA). Plus tard, toujours en Amérique latine sont fondés le Pacte andin en 1969...On peut ainsi parler d’une régionalisme de première génération qui est celui des années 1950-1970. Les années 1980-1990 sont des années où la création d’unions régionales se multiplient d’où l’idée d’un régionalisme de seconde génération. 
  • Yann Echinard et Laetitia Guilhot évoquent un « nouveau régionalisme » avec deux décennies importantes qui sont celles des années 1980-1990. Ces décennies sont marquées par de multiples accords économiques (177 accords économiques signés entre 1980 et 2006, accords souvent bilatéraux). Ces organisations régionales sont présentes sur tous les continents et ces structures renforcent indéniablement les liens entre les états membres. 
  • Elles sont donc synonymes d'interdépendances. Ces Unions se constituent dans le cadre de la globalisation, comme une réponse à ce processus mais dans un cadre régional (continental). L'OMC a ainsi identifié plus de 200 accords commerciaux et 280 organisations intergouvernementales. 
  • Il faut préciser que les états, c'est une règle, commercent avant tout avec les états à proximité et depuis plusieurs années ont constitué des unions qui polarisent des aires géographiques régionales ou continentales. Ces unions sont de fait des structures intermédiaires entre les états et le monde. On peut différencier plusieurs types d'unions régionales notamment les unions à faible intégration (shallow integration) fondées sur de simples accords de libre échange ou des unions à forte intégration (deep integration) beaucoup plus intégrées comme l'Union européenne. 
  • Cette régionalisation peut se faire entre des états ayant peu de différences économiques comme la CEE à ses débuts ou au contraire des états ayant de fortes écarts comme l' ALENA entre les E.-U et le Canada. Même les états en développement sont intégrés dans ce processus de régionalisation mais quelque soit le processus d'intégration, le niveau d'institutionnalisation des différentes unions est différent. Bela Balassa, un économiste hongrois, dans un livre intitulé : The theory of economic integration a défini le processus d'intégration régionale en plusieurs étapes : la première étape est la zone de libre échange avec suppression des entraves au commerce ; la seconde, l'union douanière se caractérisant par la mise en place d'un tarif extérieur commun ; la troisième un marché commun reposant sur la libre circulation des hommes et des capitaux ; la quatrième une union économique avec harmonisation des politiques économiques et mise en œuvre de politiques communes et la dernière étape est celle d'une intégration économique totale avec une politique économique unifiée sous le contrôle d'une autorité supranationale avec une institution de gouvernance économique commune. L'intégration régionale a plusieurs dimensions : commerciale, financière, monétaire, économique... 
  • L'ALENA a ainsi libéralisé la circulation du capital mais pas la circulation des hommes ; ces unions comme l' UEMOA (l'Union économique et monétaire ouest africaine créée en 1994 par 7 pays : Bénin, Burkina-Faso, Côte d'Ivoire, Mali, Niger, Sénégal et Togo) qui utilise une monnaie commune à savoir le Franc CFA ou la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale regroupant le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, le Tchad et la république centrafricaine et créée en 1994) utilisant le franc CFA, ont donc unifié leur politique monétaire sans avoir unifié leurs marchés... 
  • Cette intégration est aussi révélatrice de ce qui a été évoqué à savoir le rôle de l'état-nation. Avec l'intégration régionale, les états abandonnent une part de leur souveraineté et ces intégrations peuvent répondre à plusieurs objectifs : assurer des relations pacifiques entre les états, favoriser le développement économique et les échanges, mieux résister à la mondialisation... 
  • La zone de libre échange est souvent la première étape avec l'abaissement des droits de douane comme c'est le cas avec l' ALENA. Une autre étape est l'union douanière avec libre échange et un tarif extérieur commun comme c'est le cas pour le Mercosur. On peut aussi passer à un marché commun qui est une union douanière comprenant la libre circulation des capitaux et des hommes en plus de celle des marchandise : la CEE en est une bonne illustration. L' Union économique est un plus apportant des politiques économiques et monétaires communes ce que le traité de Maastricht et l'Union européenne ont mis au point à partir de 1992. L' Asie se compose de neuf organisations et accords économiques et géopolitiques soit à base régionale comme l' ASEAN, La SAARC, le Forum des îles pacifique, soit à vocation élargie comme l'APEC. 
  • L' ASEAN, Association des états d'Asie du Sud Est (620 millions d'habitants), est créée en 1967 dans le cadre de la guerre froide par les Philippines, l'Indonésie, la Thaïlande, la Malaisie et Singapour. 
  • Le sultanat du Brunei a rejoint l' ASEAN en 1984 comme le Vietnam en 1995 puis le Laos et la Birmanie en 1997, le Cambodge en 1999 (le Timor oriental a déposé sa candidature). 
  • Le but d'origine de cette organisation est de favoriser la croissance et la coopération dans plusieurs domaines (économie, culture...).
  •  A été instaurée une zone de libre échange (ASEAN free trade area) officialisée en 2002. Cette organisation est composée d'une présidence tournante, un sommet réunissant les chefs d'état et de gouvernement..., un secrétariat général... (le dernier somment s'est tenu en 2015 en novembre en Malaisie. L' Association sud-asiatique pour la coopération régionale (SAARC en anglais, une association de plus de 1,4 milliard d'habitants) est fondée en 1985 réunissant le Bangladesh, les Maldives, le Sri Lanka, le Bouthan, le Népal, l'Inde, le Pakistan et l'Afghanistan (depuis 2007). Elle promeut la coopération dans plusieurs domaines comme l'agriculture, les sciences...
  • En 1993, ils ont signé un accord visant à abaisser progressivement les droits de douane et en 2002 est signé un véritable accord de libre échange. Le Forum des îles Pacifique est créé en 1971 et rassemble actuellement de 16 états indépendants du Pacifique dont l'Australie, la Nouvelle-Zélande, Les Fidji, les Tuvalu, les îles Cook... L' ASEAN a un niveau d'intégration supérieur à la SAARC, une association peu intégrée au niveau institutionnelle (rivalité Inde/Pakistan...). 
  • L'APEC (Asia-Pacific Economic Cooperation,1989) est un forum économique intergouvernemental afin de promouvoir les échanges et la croissance réunissant des états asiatiques et américains ayant une ouverture sur le Pacifique : Australie, Canada, Brunei, Corée du Sud, Etats-Unis, Indonésie, Japon, Malaisie, Nouvelle-Zélande, Philippines, Singapour, Thaïlande, Chine, Hong Kong, Taïwan, Mexique, Papouasie-Nouvelle- Guinée, Chili, Pérou, Russie, Vietnam. 
  • Les E.-U ont lancé récemment un partenariat transpacifique (Trans-Pacific Partnership Agreement ou TPP), un traité de libre échange signé en février 2016 réunissant E.-U., Canada, Chili, Australie, Brunei, Japon, Malaisie, Mexique, Nouvelle-Zélande, Pérou, Singapour, Vietnam. En Amérique latine, le Mercosur (82% du PIB de l'Amérique du Sud), une union douanière fondée en 1991, joue un rôle important : il associe le Brésil, l'Argentine, le Paraguay, l' Uruguay et le Venezuela (la Bolivie a signé son acte d'adhésion en 2012 devant être ratifié par le Brésil notamment). 
  • Le traité d'Asuncion créant ce Mercosur a institué la libéralisation des biens et des services mais aussi des individus. En 2008, l' Unasur est fondé regroupant les membres du Mercosur plus les membres du Pacte andin à savoir le Pérou, la Bolivie, l' Equateur, la Colombie (ces états forment une union douanière sous le nom de Communauté andine) mais aussi le Chili, le Suriname et le Guyana. L' Unasur souhaite s'inspirer de l'Union européenne voulant former à terme un marché unique et promouvoir une citoyenneté commune... 
  • Elle se veut un contrepoids à l'ALENA. Il faut d'ailleurs signaler le refus par les états sud-américains du projet de Zone de libre échange nord américaine initiée par les Etats-Unis en 2005 (ZLEA). 
  • L'Amérique centrale a aussi ses structures comme le marché commun d'Amérique centrale ou Caricom. Enfin, il existe plusieurs organisations en Afrique comme celles évoquées plus haut ou la SADC, Communauté de développement d'Afrique australe (Southern African Development Community) fondée en 1992 réunissant Angola, Botswana, Lesotho, Malawi, Mozambique, Swaziland, Tanzanie,Zambie, Zimbabwe, Namibie, Afrique du Sud, île Maurice, Madagascar, îles Seychelles et République démocratique du Congo, une organisation dont le but est le développement. 
  • En 2001, le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique est né par la volonté d'états africains puissants comme l'Afrique du Sud, l'Algérie, l' Egypte et le Sénégal : le NEPAD a comme objectifs la prévention des conflits, améliorer les structures régionales déjà existantes ou favoriser les IDE. Bilan Les organisations régionales sont donc particulièrement nombreuses, n'ont pas nécessairement les mêmes objectifs ni les mêmes structures. Actuellement, les régionalismes semblent en crise comme le montrent le Brexit pour l'Union européenne ou encore les difficiles renégociations imposées par les E.-U au Mexique et au Canada dans le cadre de l'ALENA. Néanmoins, les unions régionales de nature économique ont comme intérêt de développer les échanges entre états membres et donc d’être un vecteur de développement et de croissance. 

b/ Des organisations internationales régulatrices de la mondialisation ?

  • Il existe aussi des organisations internationales (ou organisations intergouvernementales : OIG) qui sont des associations d'états basées sur le droit international (elles sont des sujets de droit international). Elles ont donc une personnalité juridique propre avec un budget, un personnel, des compétences dans certains domaines. Ces organisations ont des objectifs pouvant être politiques, économiques, culturels... devant faciliter la coopération entre les états. L'exemple type d'organisation internationale est l'ONU. 
  • L' Organisation des Nations Unies a été créée en 1945 avec comme objectif majeur l'établissement de la paix. 
  • Elle repose sur une charte basée sur plusieurs objectifs : le maintien de la paix, le développement de relations entre les états, la coopération internationale fondée sur le respect des droits de l'homme. 
  • Elle doit favoriser la coopération, le développement économique, le progrès social et culturel et des valeurs se retrouvant dans la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948. L' ONU comprend actuellement 193 états : plusieurs « états » ne sont pas reconnus comme la République arabe sahraouie démocratique, une République néanmoins membre de l'OUA et reconnue par 47 états (Sahara occidental annexé par le Maroc en 1975), Taïwan (seulement reconnue par 22 états et le Vatican), le Somaliland.... 
  • Le Vatican et la Palestine sont présents en tant qu'observateurs. 
  • L'ONU comprend plusieurs organes dont le Conseil de sécurité, l'Assemblée générale, le Conseil économique et social, le secrétariat... l' ONU a créé également plusieurs agences fondamentales comme l'OMS, l'UNESCO (Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, l'UNICEF (fonds des Nations Unies pour l'enfance), l'Organisation internationale du travail (OIT), le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR)... L'ONU a une vocation réellement mondiale. 
  • Elle dispose de 44 000 salariés avec un budget de 5 milliards de dollars et de plus de 8 milliards de dollars pour les opérations de maintien de la paix.. D'autres organisations ont un rôle important comme le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et l'OMC, un rôle particulièrement notable dans le cadre de la mondialisation. Elles sont « sollicitées pour réguler la mondialisation » (Guillaume Devin ; Les organisations internationales, 2016). 
  • Dans cette optique, le FMI, la Banque mondiale jouent (en théorie )ce rôle de régulation. L'organisation mondiale du commerce a été créée en 1994 suite à la conférence de Marrakech et en remplacement du GATT (Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce). Elle est une organisation de 162 membres s'occupant des règles internationales du commerce s'appuyant sur des mécanismes d'arbitrage en cas de différends commerciaux et peut décider de sanctions (son siège est à Genève). 
  • L'OMC a des sommets appelés conférences ministérielles qui permettent des cycles de négociations (conférences de Doha en 2001, Cancun en 2003, Hong Kong en 2005...). l'OMC a un directeur général qui est actuellement un brésilien, Roberto Azevedo, un organe de règlement des différends (ORD)... Le FMI réunit quant à lui 188 états et avait pour objectif initial de garantir la stabilité du système monétaire international. Comme l’écrit Guillaume Devin on note une « ascension du FMI et de la Banque mondiale » au fil des années notamment avec la crise de la dette des années 1980 en Amérique latine en particulier. Le FMI a été sollicité pour aider les pays endettés ce qui est une forme d’intervention économique importante devenant le « pompier appelé au secours des pays en voie de développement » (Guillaume Devin). 
  • Les interventions du FMI ont pris de l’ampleur en particulier dans le cadre du Consensus de Washington (1989) et des plans d’ajustement structurel. Rappelons que le Consensus de Washington a été forgé par un économiste américain John Williamson, un Consensus appliquée par le FMI. 
  • La politique menée par le FMI avec ce consensus consiste en un programme très libéral avec discipline budgétaire exigé, privations d’entreprises, ouverture des marchés... en contrepartie d’une aide du FMI. On peut aussi signaler qu’au moment de la crise des subprimes de 2007-2008, plusieurs états européens ont demandé une aide au FMI : Hongrie, Lettonie, Roumanie, Grèce, Irlande, Portugal, Chypre. 
  • L’OMC avait quant à elle comme mission initiale de « parachever la libéralisation du commerce international » (Guillaume Devin). Mais cet objectif n’est pas encore atteint avec de nombreux blocages sur la libéralisation de services par exemple ou de l’agriculture. L’OMC est néanmoins un forum de négociations même si il ne parvient pas à conclure des négociations d’envergure. Toutefois, l’organe de règlement des différends (ORD) fait que l’OMC joue un rôle dans l’application des règles et principes devant régir le commerce international. Entre 1995 et 2015, l’OMC a été saisie pour 488 plaintes, avec d’ailleurs une majorité de plaintes contre les Etats-Unis (122) et l’Union européenne (la Chine a fait l’objet de 17 plaintes). L’idée est à chaque fois que les règles de concurrence dans ce monde globalisé soient respectées. Difficiles à classer sont les « groupes » comme le G 8, le G 20... 
  • Ces groupes sont partiels et non réellement institutionnalisés. Le premier de ces groupes est le G4 avec la France, la RFA, les E.-U., le Royaume-Uni lancé dans le cadre de la crise de 1973 : un groupe devant trouver des solutions à la crise. Ce G4 s'est transformé en G6 avec le Japon et l'Italie en 1975, en G 7 avec le Canada en 1976 et G8 en 1998 avec la Russie. Le G8 regroupe de fait les plus grandes puissances (ou presque de la planète). En 1999, un nouveau groupe est lancé : le G 20 réunissant les membres du G8 et les états émergents : Afrique du Sud, E.-U., Mexique, Canada, Argentine, Brésil, Chine, Corée du Sud, Inde, Indonésie, Arabie saoudite, Japon, France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Russie, Turquie, Australie, Turquie et Union européenne. 
  • Face à ce G8 et ce G 20 se sont constitués des structures composées d'états en développement comme le G77 lancé dès 1964 avec la déclaration commune des 77 pays à la conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED). 
  • Le G 77 se veut une réponse aux états les plus développés. Ce groupe s'est élargi à 90 membres en 1972 et a 134 membres en 2015. 

c/ Les ONG : des actrices importantes d'un monde dérégulé

  • Il existe des organisations non gouvernementales sont des acteurs de la mondialisation : elles sont très nombreuses et sont le plus souvent associées à la défense de droits, à l'humanitaire et la solidarité internationale. Il faut mettre l'accent sur le fait qu'elles sont plus ou moins indépendantes. On peut ainsi évoquer la notion de government-organized non-government organization (GONGOs) pour désigner des ONG créées par des états pour favoriser leur influence et leur poids comme l'organisation russe World without nazism fondée en 2010 ou de quasi-autonomous non- governmental organisations c'est-à-dire des organisations financées par un acteur important ce qui questionne l'autonomie de l'organisation. L'ONG américaine Care créée en 1945 dont le budget est de 700 millions d'euros est financée à plus de 60% par l'état fédéral américain. 
  • Ces organisations, du moins certaines, fonctionnent en réseaux et peuvent avoir une influence internationale réelle. Les ONG sont en fait des associations (à but non lucratif gérées par des personnes privées n'ayant pas nécessairement la même nationalité) ayant des activités internationales mais sont de puissance et d'influence inégales. En 1975, il existe 200 ONG, 600 en 1993 et plus de 3 700 aujourd'hui (environ 3400 sont liées au Conseil économique et social des Nations unies) . Elles se sont développées corrélativement à l'affaiblissement de certains acteurs comme les états, les administrations... Les états peuvent même s'appuyer sur les ONG pour qu'elles réalisent des missions comme lutter contre l'analphabétisme, la pauvreté...
  • Les ONG ont obtenu une reconnaissance de leur fonction opérationnelle en 1968 par l'ONU par la résolution 1296. 
  • Les associations les plus réputées sont organisées en réseaux multinationaux et on peut les différencier en associations à but humanitaire comme la Croix rouge, l'association Oxfam, Amnesty International ou Médecins du monde. La Croix rouge a été fondée en 1864 par Henri Dunant, un homme d'affaires et protestant, pour la prise en charge des blessés de guerre (Dunant a été marqué par les effets de la bataille de Solférino en 1859) : sa mission est toujours de soulager les souffrances. 
  • Oxfam international est une association composée de 17 organisations indépendantes devant lutter contre la pauvreté. Le Oxford Committee for Famine Relief a été créé en 1942 puis est devenu une structure plus globale avec la Oxfam international en 1995. 
  • Amnesty International est une organisation défendant les droits de l'homme créée en 1961 dont le siège est à Londres et ayant près de 3 millions de membres et a des sections locales dans plus de 80 états. Quant à Médecins du monde, il s'agit d'une organisation qui œuvre pour la santé et composée de bénévoles issus du monde de la santé. Elle a été créée en 1980, son siège est à Paris. 
  • D'autres ONG sont liées à la défense de l'environnement comme Greenpeace, le World Wild Fund ou WWF, les Amis de la Terre ; d'autres sont liées au développement à savoir Action contre la faim ou le Comité catholique contre la faim et pour le développement... 
  • Greenpeace est une association pour la protection de l'environnement fondée en 1971 par deux américains : Jim Bohlen et Irving Stowe. Elle est présente dans environ 40 pays, emploie 1 500 salariés et compte plus de 3 millions d'adhérents. 
  • Le WWF dont la création remonte à 1961 est une organisation pour la protection de la nature et la promotion du développement durable. Les Amis de la Terre est une ONG créée en 1969 présente dans plus de 70 pays. Action contre la faim est fondée en 1979 par plusieurs intellectuels comme Jacques Attali, Françoise Giroud... 
  • L'association ATTAC (Association pour une taxation des transactions financières pour l'aide aux citoyens), créée en 1998 en France (implantation dans 38 états), est une association altermondialiste dont souhaitant une autre mondialisation. Elle est à l'origine du premier Forum social en 2001 à Porto Alegre (Brésil) avec le parti des travailleurs de Lula rassemblant des élus, des associations, des ONG environnementales... 
  • Par la suite, plusieurs Forums sociaux se sont tenus : à Mumbai en 2004, à Nairobi en 2007, à Tunis en 2013... 
  • Ces ONG sont des acteurs de la mondialisation par leurs actions et leur présence mais aussi par leur poids médiatique pouvant être très important. Elles sont de véritables groupes de pression sur les états, les FTN... Elles ont un poids économique important avec plusieurs millions de salariés...
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