2/ Crises et ruptures des années 1970 au début des années 90

Crise de 1973

1/ Les années 1970 : un cycle de croissance qui s'achève ?


Les années 1970 sont des années de changements au niveau économique avec la fin du cycle de croissance pour les pays développés à économie de marché. Ces derniers entrent dans un cycle de crise. 

 A/ Les années 1970 : des années de ruptures 

 A la fin des années 1960, des signes laissent penser à des difficultés à venir comme une hausse, bien que légère, du chômage. Un autre élément inquiétant est la hausse des prix : l'inflation est de plus en plus importante commençant à atteindre puis dépasser les 5% par an. Mais ce sont les défaillances du système monétaire qui marquent cette rupture. 

 a/ L’effondrement du système monétaire international 

 Les années 1950 avaient été des années d' une inflation plutôt basse. La fin des années 60 voient au contraire une hausse des prix ce qui pousse les salariés à revendiquer des hausses de salaires afin de compenser. Parallèlement, la monnaie internationale, le dollar, s'affaiblit et le système monétaire international est impacté. 

 -la faillite du système de Bretton Woods 

  • A la fin des années 1950, la balance des paiements des E.-U devient déficitaire (la balance des paiements recense l'ensemble des transactions économiques internationales réalisées avec l'extérieur à savoir les transactions commerciales, monétaires...). Le déficit budgétaire américain est également de plus en plus important : les E.-U et l'état fédéral financent une guerre au coût élevé, la guerre du Vietnam, se sont lancés dans la conquête de l'espace et les projets sociaux de Kennedy et de Johnson ont aussi un coût. 
  • Pour financer ces déficits, les E.-U émettent donc des dollars qui se diffusent massivement à l'échelle mondiale notamment sur le marché européen (euro-marché) où des dollars sont émis pour être ensuite empruntés. 
  • En 1971, ces dollars représentent 5 fois le stock d'or des E.-U. (50 milliards de dollars contre 10 milliards). Le système monétaire international commence à se dérégler à partir de 1967, une dérégulation dont la dévaluation de la livre sterling est un signe. Ces éléments renforcent le processus inflationniste qui a des effets y compris sur les états en voie de développement qui voient le cours des matières premières agricoles ou minérales baisser. 
  • Ces derniers ont donc des rentrées de capitaux moindres ce qui pénalise leur développement. Les E.-U sont également confrontés à une baisse de leurs excédents commerciaux voyant progressivement les importations prendre le dessus sur leurs exportations notamment par le biais des importations japonaises. Les E.-U accusent le Japon de concurrence déloyale notamment par l'intermédiaire d'une monnaie, le yen, jugée sous- évaluée ce qui favorise les exportations du Japon. Ils aimeraient également que la CEE ouvre son marché agricole, un marché protégé par la politique agricole commune (PAC). 

-une crise monétaire d'ampleur mondiale 

  •  Dans ce contexte, le déficit américain croît fortement et le dollar est affaibli. La dévaluation de la livre sterling favorise la spéculation avec notamment des conversions monétaires de dollars en or : le stock d'or des E.-U passe ainsi de 23 milliards de dollars en 1957 et 12 milliards en 1968. Pour enrayer les difficultés, le président Johnson pousse les FTN américaines à moins investir en Europe afin d'éviter des sorties de dollars. En 1971, son successeur, le président Nixon va plus loin en annonçant le 15 août 1971 la fin de la convertibilité du dollar en or et la mise en place d'une taxe de 10% sur les importations américaines. En décembre 1971, les accords de Washington aboutissent à une dévaluation du dollar (le dollar est à nouveau dévalué en 1973) et la fin de la convertibilité du dollar en or est confirmée. La seconde dévaluation du dollar de 1973 renforce l'instabilité des monnaies dont le flottement (des valeurs) se généralise. 
  • Ces années 1971- 73 marque la fin du système de Bretton Woods avec un FMI devenu impuissant sur ces questions monétaires. L'instabilité monétaire dessert l'économie en accentuant l'inflation et les désordres monétaires. Les monnaies deviennent de plus en plus fluctuantes mais aussi l'or devenant un produit obéissant à la loi de l'offre et de la demande. Cet or n'est plus la référence servant à définir la valeur d'une monnaie (conférence de la Jamaïque en 1976). 
  • Les taux de change des monnaies deviennent également fluctuants même si les membres de la CEE ont tenté de limiter ces fluctuations en créant en 1972 ce qu'on a appelé le « serpent monétaire » c'est-à-dire un système devant limiter la fluctuation des monnaies à plus ou moins 1,25% (ce système n'a jamais fonctionné). 

 b/ La fin de la croissance forte 

 Les difficultés monétaires associées au premier choc pétrolier et la fin d'une énergie à bas prix engendrent une crise profonde et une rupture de la croissance. - 

 -les chocs pétroliers, un révélateur de la crise 

  •  Longtemps, le pétrole a été contrôlé par des firmes occidentales qui avaient même organisé en 1928 un Cartel international du pétrole (accords d'Achnacarry) composé de 5 sociétés américaines et de deux sociétés européennes afin de contrôler ce marché. (Standard Oil of New Jersey devenu ensuite Exxon, Royal Dutch Shell, une compagnie anglo-néerlandaise, l'Anglo-Persian Oil Company devenue BP et à capitaux anglais, Standard Oil California devenue Chevron, la Standard Oil of New York devenue Mobil ainsi que Gulf Oil et Texaco rachetées par Chevron plus tard). Ce sont ces firmes qui imposent aux états pétroliers les contrats de concession. Dans les années 1950, le prix du pétrole est particulièrement bas : deux dollars le baril (il tombe même à 1,7 dollar en 1959). Ces prix très bas ont favorisé la croissance, conduit à un certain abandon d'une autre énergie à savoir le charbon et donc à une consommation de pétrole de plus en plus importante. Des secteurs d'activités ont bénéficié de cette énergie à bas coût comme l'industrie chimique et pétrochimique, l'industrie automobile, la construction navale...
  • Or en consommant de plus en plus de pétrole, les PDEM sont aussi devenus de plus en plus dépendants de cette énergie. Un état comme le Japon en 1973 importe ainsi 90% des 270 millions de tonnes de pétrole qu'il consomme. Les membres de la CEE consomme en 1973 560 millions de tonnes (elle en produit seulement 15 millions de tonnes. 
  • Certains états ont des taux de dépendance très importants : 85% pour l'Italie, 75% pour la France...Un pays comme les E.-U qui dispose de pétrole mais en consomme plus qu'il n'en produit est aussi en situation de dépendance.
  •  En 1973, les E.-U assurent seulement 18% de la production mondiale de pétrole contre 54% en 1950.Parallèlement, les états du Moyen-Orient exportent plus d'un milliard de tonnes de pétrole en 1973 soit les deux tiers du pétrole exporté. Or certains états exportateurs de pétrole se sont structurés et ont créé l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) en 1960 avec au départ 5 membres : l'Arabie saoudite, l'Iran, l'Irak, le Koweït et le Venezuela. Le Qatar rejoint cette organisation en 1961, la Libye en 1962, l'Algérie en 1969, les EAU en 1971, le Nigeria en 1971... Ils veulent changer la donne en contrôlant davantage une ressource de leur sous- sol. 
  • En 1973, l' OPEP est en position de force ayant les deux tiers des réserves mondiales et produisant plus de la moité du pétrole au monde. L' OPEP décide de négocier avec les grands groupes pétroliers au début des années 1970 avec une série de rencontres et de négociations à Caracas en 1970, à Téhéran en 1971... Ils obtiennent une revalorisation du prix du baril de 20% et surtout 55% des bénéfices tirés de l'exploitation de cette énergie (ils ont cassé la règle longtemps en cours du fifty-fifty). Parallèlement, ils n'hésitent pas à créer des compagnies pétrolières nationales afin de mieux contrôler le pétrole. Ainsi, les Saoudiens ont pris progressivement le contrôle de la Saudi Aramco (une société longtemps dominé par des firmes américaines) : 25% en 1973, 60% en 1974 et 100% en 1980. Il en est de même pour la Koweït Oil Company contrôlée par le Koweït en 1975 à 100%. 
  • Le prix du baril passe de 2 à 3 dollars. 
  • Mais surtout, dans le cadre de la guerre entre Israël et certains états arabes, en octobre 1973, l'OPEP décide de faire passer rapidement le prix du baril de 3 à 12 dollars en janvier 1974, le prix du pétrole a de ce fait quadruplé comme la note payée par les états importateurs. Il s'agit du premier choc pétrolier : un choc qui renchérit le prix de l'énergie et devient un des facteurs du ralentissement de la croissance. A ce premier choc pétrolier s'ajoute un second en 1979. Entre 1974 et 1979, les prix du pétrole bougent peu tournant autour de 12 dollars. Mais entre le mois de janvier 1979 et janvier 1981, les prix du pétrole augmentent à nouveau fortement. 
  • A la fin de l'année 1980, le baril atteint 32 dollars et monte même jusqu'à 39 dollars au début de 1981. Ce second choc s'explique par une baisse de l'offre de pétrole liée d'une part à la Révolution iranienne où la baisse des livraisons iraniennes induit une « panique » et donc une hausse des prix renforcée par la guerre qui se déclenche en 1980 entre l'Irak de Saddam Hussein et l'Iran de l'Ayatollah Khomeiny. Les états inquiets se sont rués sur le marché du pétrole afin de constituer notamment des réserves d'où une flambée des cours. 
  • La hausse du dollar vient de plus renchérir le coût de l'énergie. Pour un pays comme la France la facture pétrolière est passée 60 milliards de francs de l'époque entre 1974 et 1979 à plus de 190 milliards au début des années 1980. 
  • La croissance ralentit à nouveau fortement entre 1980 et 1982. A l'instabilité monétaire et au choc pétrolier, il convient d'ajouter d'autres facteurs à la crise qui se déclenche. A la fin des années 1960, les profits des entreprises diminuent (taux de profit) : une baisse s'expliquant en partie par les hausses de salaires. De ce fait, les entreprises investissent moins (taux d'investissement) ce qui pénalise la productivité qui elle aussi diminue. De plus, la concurrence internationale s'accroît avec la montée en puissance de nouveaux acteurs comme les NPI et surtout le poids de plus en plus notable du Japon. Dans ce cadre, certaines firmes commencent à délocaliser pour gagner sur les coûts de main d' œuvre. Le Japon implante à la fin des années 60 des usines d'assemblage en Thaïlande, en Malaisie ou à Taïwan dans les domaines de l'électronique ou de l'automobile. Le processus de désindustrialisation commence. La crise s'explique donc par plusieurs facteurs qui se croisent. 

 -montée du chômage, inflation... des symptômes d’une crise profonde

  •  La crise, à partir de 1975, se traduit par plusieurs phénomènes : une hausse constante du chômage liée au ralentissement de l'activité. L'année 1975 voit même un recul de 1% du PNB et les échanges commerciaux se rétractent de 5%. La croissance, après deux années difficiles, reprend mais à un rythme plus faible d'environ 2% pour les états de l'OCDE : une croissance ralentie en 1980-81. Dans ce cadre, la montée du chômage est irrésistible avec un taux de chômage passant de 4,9% en moyenne entre 1961-1973 aux Etats- Unis à 6,9% entre 1974-1980, de 2 à 4,8% pour la France... 
  • Cette hausse s'accentue dans les années 1981- 1990 avec un taux atteignant 7,1% pour les E.-U ou 9,3% pour la France. La crise a impacté de nombreux secteurs et entreprises d'où d'importants licenciements. Pourtant, on constate des créations d'emplois dans certains secteurs comme les hautes technologies mais elles ne permettent pas de compenser les pertes d'emplois dans des industries dites traditionnelles comme l'industrie textile ou sidérurgique. 
  • De plus pour faire face à cette crise, de nombreuses entreprises tentent de moderniser l'appareil productif ce qui se traduit aussi par des pertes d'emplois. Les pays de l'OCDE en 1975 avaient un total de 15 millions de chômeurs ; ce nombre passe à plus de 30 millions en 1982. S'ajoute le phénomène de l'inflation avec une hausse des prix importante supérieur à 10% dans plusieurs pays entre 1974 et 1980 : 11,1% pour la France, 15,9 % pour le Royaume-Uni, 17,2 % pour l'Italie... Cette inflation génère une augmentation des taux d'intérêt ce qui ralentit la consommation des ménages ou la volonté d'investissement des entreprises. 

 c/ Des conséquences importantes 

-une nouveauté : la stagflation 

  •  Une des conséquences de cette crise est le phénomène de stagflation c'est-à-dire la combinaison d'une inflation et d'un chômage élevés associés à une croissance limitée. Les hommes politiques sont confrontés à un phénomène unique dans l'histoire avec la conjugaison de ces phénomènes : la stagflation va à l'encontre des théories économiques de l'époque en particulier l'idée qu'une forte inflation ne génère pas un chômage important et réciproquement. 

-une crise économique et sociale de forte ampleur et la fin d'un modèle : Fordisme et Welfare state 

  • La crise économique et sociale est d'une forte ampleur. Il s'agit d'une crise industrielle qui s'annonçait dès la fin des années 1960 avec un rythme de la croissance des productions moindre et des marchés en partie saturés. Des secteurs clés comme l'automobile ou la sidérurgie sont particulièrement touchés tout comme l'industrie textile. 
  • Les nombreuses faillites témoignent d'une récession notable avec par exemple dans l'industrie textile plus 700 000 emplois perdus pour les 9 états membres de la CEE de l'époque. 
  • Le chômage est l'autre aspect de cette crise avec des taux de plus en plus importants marquant la fin du plein emploi des 30 glorieuses : un chômage qui devient durable. 

 -la fin d'un modèle ? Fordisme, Welfare State... 

  • Pour certains, la crise marque la fin d'un modèle qui n'est plus adapté à savoir le modèle fordiste et l'état- providence. Le système fordiste reposant sur un travail mécanisé permettant de produire plus et plus vite associé à des salaires relativement élevés grâce à la hausse de la productivité n'est plus vraiment de mise avec la crise alors qu'il fut un des fondements de la croissance. D'une part , le travail à la chaîne est remis en cause comme une source d'aliénation des travailleurs (thème du « travail en miettes »). 
  • De plus, ce système génère un fort turn-over ainsi qu'un absentéisme important. La concurrence internationale de plus en plus forte avec le Japon et les NPIA qui s'affirment durcit la compétition mondiale avec des firmes des pays européens ou des E.-U ayant plus de difficultés à être compétitifs. Le Japon a de plus mis en place un nouveau système de production appelé Toyotisme (rôle de l'ingénieur Ohno) s'avérant particulièrement efficient. Enfin, les hausses de salaires et du pouvoir d'achat n'ont pas été compensés par des hausses de productivité supérieures. Le modèle fordiste est donc contesté et pas nécessairement adapté à la nouvelle donne de l'économie mondiale avec une concurrence plus généralisée et de nouveaux acteurs. On s'interroge également sur l'état -providence et les rôles des états. L'état-providence a un coût de plus en plus prégnant et en partie financé par les taxes et impôts payés par les entreprises. 
  • Cette charge alourdit le coût du travail dans un contexte où se développent des états dont le coût de la main d' œuvre est peu important. La montée du chômage accroît les dépenses sociales alors que parallèlement le ralentissement de la croissance fait baisser le montant des prélèvements fiscaux. Des penseurs dits néo-libéraux commencent dès les années 1970 à remettre en question ce modèle de l'état- providence et sa fonction redistributive. En réalité, ce qui est en passe de changer est la division internationale du travail reposant depuis la seconde révolution industrielle sur des états développés contrôlant les secteurs industriels et ayant le monopole de la recherche et des capitaux et des états en retard de développement fournissant les matières premières qu'elles soient minérales ou agricoles. 
  • Certains états notamment asiatiques sont en phase d'industrialisation rapide comme les « dragons « que sont Hong Kong, la Corée du Sud, Taïwan ou Singapour. Ces états connaissent un fort développement d'abord fondé sur des industries nécessitant une main d' œuvre bon marché avant de se spécialiser dans d'autres industries comme la sidérurgie, la construction navale avant de se tourner vers les hautes technologies un peu plus tard. Parallèlement, des FTN des PDEM investissent plus dans ces états et commencent à délocaliser pour gagner sur les coûts. Une autre division internationale du travail s'amorce 
 d/ Quelles solutions et tentatives de remédiation ? 

-des politiques peu efficaces... 

  •  La gestion de la crise par les gouvernements est difficile et hésitante : ils ne savent pas comment réagir face au phénomène de stagflation. Pour certains, il s'agit d'une crise dite conjoncturelle donc passagère et ne voient pas, au contraire, que cette crise est structurelle. Ils vont donc hésiter entre deux types de politiques : des politiques de relance d'inspiration keynésienne avec une baisse des taux d'intérêt et le recours au déficit budgétaire pour relancer l'économie et la demande. A ces plans de relance succèdent des plans de rigueur comme en France à partir de 1976-1981 ou plus tard entre 1983-1986 c'est-à-dire une tentative de restreindre les déficits notamment commerciaux, de lutter contre l'inflation. Les politiques de relance creusent les déficits publics alors que les politiques de rigueur sont mal supportées par les populations et ne parviennent pas à juguler l'inflation. Tous les états développés alternent ce qu'on appelle les politiques de « stop and go » : relance et rigueur en alternance. Certes, on constate une reprise à partir de 1976 mais elle reste timide et ne permet pas de freiner la hausse continue du chômage. Le second choc pétrolier accentue cette crise au moins latente. 

 -...pour des situations différenciées 

  •  En fait, les situations ne sont pas exactement les mêmes selon les états. Certains ont bénéficier de la crise et des chocs pétroliers comme les états producteurs de pétrole. 
  • L'URSS , productrice de pétrole et de gaz n'est pas impacté par ces chocs pétroliers à l'inverse des états d'Europe de l'Est. Pour les états membres de l' OPEP, la hausse des cours a permis d'accumuler des capitaux ( des réserves estimées à 400 milliards de dollars en 1981 pour ces états). Certains états comme les NPI ont nettement amorcé un développement faisant d'eux des pays de plus en plus compétitifs avec des taux de croissance très élevés de l'ordre de 10% par an : pour eux, la crise n'existe pas. Ils sont performants non seulement dans les industries textile ou du jouet mais aussi dans la sidérurgie ou la construction navale comme c'est le cas pour la Corée du Sud. Ils ont également amorcé un développement dans l'électronique. 
  • Des états comme le Brésil, l'Inde connaissent un démarrage industriel certain à la fin des années 1970. Par contre pour les états les plus en retard de développement, les chocs pétroliers sont difficiles à encaisser surtout que les cours des produits qu'ils exportent ont tendance à baisser. Ils sont de ce fait contraints à s'endetter : la dette des pays du tiers-monde passe de moins de 100 milliards de dollars en 1973 à 626 milliards de dollars en 1982. 
  • Même la situation des pays industriels n'est pas homogène. Les E.-U parviennent à limiter les dégâts notamment avant le second choc pétrolier. Toutefois, le commerce extérieur américain est en difficulté et les déficits se creusent. L' Europe y compris la CEE est plus durement touchée notamment le Royaume-Uni avec une désindustrialisation importante ou la France dont les industries traditionnelles sont aussi très impactées. Par contre, la RFA résiste mieux grâce à des secteurs toujours performants comme le secteur des machines-outils ou de la chimie. Le pays qui s'en sort le mieux est le Japon. Les firmes japonaises semblent plus adaptées à la crise et le choix de l'innovation et des industries de pointe atténue la crise et ses effets. Ses capacités exportatrices sont aussi un atout : le Japon évite un chômage de masse.
Démission de Gorbatchev

2/ Les années 1980-1990 : une seconde rupture ?


Les années 1980-90 marque une seconde rupture avec le second choc pétrolier, le retour du libéralisme et de l'idéologie libérale. C'est également la phase de l'effondrement du bloc soviétique et le passage à une économie de marché, d'une nouvelle politique économique pratiquée en Chine. Enfin, pour les états du tiers- monde, les difficultés s'accroissent avec la mise en œuvre de politiques libérales ne résolvant pas leurs difficulté »s. 

 A/ Le retour du libéralisme 

 a/ Le libéralisme et les politiques libérales comme recours 

 L'arrêt de la croissance des « trente glorieuses » et la crise ont remis en question le modèle économique fordiste et keynésien ainsi que l'état -providence. Cette remise en cause se fait notamment par l'idéologie néo-libérale. 

-l'ère Reagan-Thatcher : la vague libérale 

  •  Dans les années 1970, se développe le néo-libéralisme, un courant idéologique critique vis-à-vis des politiques d'inspiration keynésienne utilisées pour résoudre la crise. 
  • Cette idéologie est notamment le fait de l'école de Chicago avec Milton Friedman ou Friedrich Hayek et des théoriciens dit de l'offre comme Georges Gilder. Ils souhaitent des politiques économiques fondée sur une moindre intervention de l'état avec une gestion efficace de la création monétaire et des dépenses publiques .Georges Gilder dans un livre intitulé : Richesse et pauvreté (parution en 1981) dénonce par exemple les politiques sociales des états-providence qui favoriserait le manque d'initiative des individus et encourageraient au parasitisme social. 
  • Il met l'accent sur le rôle majeur des entrepreneurs qui sont les créateurs de richesses. Parallèlement, il affirme que les pauvres ont surtout besoin d'une morale. Pour les néo-libéraux, li faut également alléger les taxes et impôts pour que les entreprises puissent continuer à créer des richesses et à être compétitives. Certains économiques comme Arthur Laffer affirme que « trop d'impôt tue l'impôt » d'où la nécessité des réduire ces impôts. Laffer préconise aussi la dérégulation économique notamment par en supprimant les contraintes sur les entreprises. Il faut de ce fait réduire les dépenses publiques, baisser les impôts, rendre le marché du travail plus flexible... L'école de Chicago, par l'intermédiaire de Friedman, dénonce le rôle pervers de l'inflation et prône une grande rigueur monétaire afin de lutter contre elle. 
  • Friedman pense qu'il faut redonner une plus grande liberté économique avec un état moins présent. Il fait d'ailleurs le lien entre liberté économique et liberté politique. Arthur Laffer et Milton Friedman vont fortement influence le président américain Ronald Reagan ainsi que Margaret Thatcher, premier ministre britannique entre 1979 et 1990. L'un des effets de ces politiques est le désengagement de l'état. Au Royaume-Uni, Margaret Thatcher et le parti conservateur vont mener ce type de politique, une politique de rupture avec ce qui s'était fait précédemment. 
  • Les dépenses publiques sont diminuées afin de réduire le déficit de l'état, plusieurs entreprises publiques sont privatisées domaines des transports, de l'énergie notamment comme British Telecom en 1983 puis British Airways, British Petroleum, British Gas... soit au total 29 entreprises employant plus de 800 000 salariés. Les impôts sont baisés notamment les impôts sur le revenu et ceux sur les bénéfices des entreprises. Est procédé aussi à un mouvement de dérégulation de la finance avec une libéralisation des mouvements de capitaux. Les syndicats sont également concernés : ils sont vus comme un frein au dynamisme économique. M. Thatcher souhaite une plus grande flexibilité du travail : plusieurs lois sont votées contre notamment le « closed shop » qui permettait aux syndicats de ne recruter que des travailleurs syndiqués. Elle ne cède pas sur la grève des mineurs entre 1984-1985. 
  • Une lutte contre l'inflation est menée et l'exploitation du pétrole de la mer du Nord comme les ventes des entreprises publiques ont permis d'améliorer les comptes publics. 
  • Cette politique permet aussi une remontée de la livre sterling ainsi qu'un renouveau de la City avec des marchés financiers plus attractifs. Le bilan de cette politique est à nuancer avec une désindustrialisation du pays renforcé (un tiers des emplois industriels britanniques ont disparu), le chômage n'est pas vaincu passant même de 5% des actifs en 1979 à 13% en 1990. Les inégalités sociales se sont nettement renforcées. Par contre, la monnaie britannique est renforcée, le secteur financier anglais dynamisé. Ronald Reagan aux E.-U mène une politique similaire entre 1980-1988. Les années Reagan sont des années de néo-libéralisme. Pour relancer l'économie américaine, les impôts sont diminués notamment les impôts payés par les plus aisés, les dépenses publiques également en particulier les dépenses sociales (comme le système Medicaid). Est lancée également une vague de déréglementation comme celle du domaine et du marché aérien ainsi qu'un démantèlement des lois sociales (gel du salaire minimum à 3,35 dollars, suppression des aides au logement pour les plus pauvres) . 
  • Le bilan est dans le cas américain mitigé : certes, l'activité économique repart, le chômage baisse avec 16 millions d'emplois créés en 8 ans. Mais se développent des emplois de plus en plus précaires ainsi que de fortes inégalités sociales. Cette reprise est également due à la relance de la course aux armements et aux commandes de l'état à destination du complexe militaro-industriel. Cette course aux armements aggrave le déficit budgétaire : les E.-U deviennent même le premier débiteur au monde avec une dette publique qui passe de 997 milliards de dollars à 2 850 milliards. De plus, la hausse du dollar freine les exportations américaines et accentue le déficit commercial. 

 -le retour de la croissance pour tous ? 

  •  Cette vague libérale ne concerne pas seulement les E.-U et le Royaume-Uni. Elle touche aussi l'Amérique latine. Les états sud-américains au début des années 1980 sont très endettés (40% de la dette des PVD) avec notamment une dette atteignant 120 milliards de dollars au Brésil (33% du PIB), 102 milliards au Mexique... 
  • Cette dette s'explique par les nombreux prêts faits par les pays en développement, des prêts facilités par les dollars du 1er choc pétrolier dont les pays producteurs ont bénéficié et ont voulu placer. De plus, les taux d'intérêts étaient plutôt faibles ce qui encouragent aux emprunts. Or au début des années 1980, la situation devient plus tendue pour ces états : le taux de change du dollar a augmenté, la baisse des cours de nombreuses matières premières agricoles ou minérales (à l'exception du pétrole) pénalise les états sud- américains. Ainsi, en 1982, le Mexique se déclare insolvable c'est-à-dire dans l'incapacité de rembourser ses dettes. 
  • Le Mexique appelle le FMI à l'aide qui en contrepartie lui impose une politique très libérale avec des prix libéralisés alors que les salaires doivent rester très cadrés, la privatisation d'entreprises publiques pour réduire les déficits publics. Le Mexique est contraint aussi d'abandonner ses politiques protectionnistes ce que renforce l'adhésion au GATT en 1986 et son adhésion en 1992 à l' ALENA. Ce type de politique est une politique dite d'ajustement structurel du FMI (PAS). Ce type de politique correspond à ce qu'on a appelé le consensus de Washington élaboré en 1989 avec l'application de plusieurs principes pour aider les états ayant des difficultés : équilibre du budget et donc un déficit public limité, des réformes fiscales visant à baisser la fiscalité, la libéralisation du commerce extérieur, la privatisation des entreprises publiques... 
  • La plupart des pays d'Amérique latine dans une situation proche du Mexique vont devoir adopter ces politiques d'ajustement structurel contre l'aide du FMI. Or ces politiques vont générer une accentuation des inégalités et le développement de la pauvreté : le chômage augmente. Le PIB sud-américain a même diminué dans cette période d'ajustement. 
  • Pour le FMI ou les E.-U, ce type de politique est un préalable pour dynamiser les états. Les années 1980 sont marquées par un endettement de plus en plus important de nombreux états et pas seulement sud-américains. En Europe, de nombreuses entreprises pour se moderniser et rester compétitives ont procédé à des emprunts. Une certaine reprise économique est notée à partir des 1983-84 en particulier aux E.-U où un programme de relance de l'activité a porté ses fruits. Ainsi, entre 1983 et 1984, le PNB augmente d'environ 6% ce qui permet la création de 6 millions d'emplois : le taux de chômage diminue donc tout comme l'inflation. Cette reprise est possible grâce à une baisse des taux d'intérêt ayant favorisé la reprise de la consommation et à un budget de la défense croissant (projet IDS).
  •  La croissance américaine se poursuit jusqu'en 1990 et a un effet d'(entraînement à l'échelle internationale. La demande américaine a notamment eu comme effet de faire progresser les importations. Le commerce mondial est de ce fait relancé atteignant les 3 000 milliards de dollars en 1989 contre 2000 en 1979. Cette relance bénéficie au Japon et à la Corée du Sud mais aussi à des états comme le Brésil ou même la Chine qui vient de s'ouvrir. Pour l'Europe et notamment la CEE, cette relance est bien plus timide. 
  • Il faut signaler que cette reprise est facilitée par le contre-choc pétrolier des années 1986-87 où les cours du pétrole baisse nettement passant de 25 dollars en 1985 à 10 dollars en 1987. Cette baisse favorise le phénomène de désinflation pour certains pays. 

b/ Mais des phases récessives et des crises financières 

-des phases récessives temporaires 

  •  Bien qu'il y ait eu reprise, la période est marquée par des phases récessives généralement liés à des problèmes financiers mais pas seulement. En 1989, une nouvelle récession s'annonce avec à nouveau un ralentissement de la croissance économique mondiale avec des taux de croissance inférieurs à 2% avec même des années de recul comme en 1993 pour les états de l'OCDE. 
  • Cette phase récessive s'explique par des investissements insuffisants, des productions qui stagnent à nouveau voire reculent comme au Japon (recul de 3% entre 1990 et 1995). cette récession se traduit par une nouvelle montée du chômage. 

-des crises financières régulières et dommageables 

  •  Les problèmes financiers ont une part dans cette nouvelle phase de récession. La reprise du commerce mondial, les emprunts importants des états pour financer cette relance ont dynamisé les transactions financières mais également la spéculation. La libéralisation des marchés financiers est aussi un vecteur de cette frénésie spéculative : les activités boursières sont déréglementée avec des taux d'intérêt qui ne sont plus fixés par les états, le contrôle des changes est supprimé tout comme le cloisonnement des activités financières, les nouvelles technologies permettent de se connecter sur les places financières 24h sur 24... 
  • Une véritable économie de la finance se développe formant ce qu'on nomme des bulles spéculatives. En 1987, a d'ailleurs lieu un krach boursier : en octobre 1987, l'indice boursier de la bourse de New York, le Dow Jones, perd plus de 500 points soit une perte de plus de 22% lors d'une seule séance, celle du 19 octobre. Les spéculateurs se sont rués vers des obligations émises par la Banque fédérale américaine (La Federal Reserve Bank) afin de trouver des capitaux supplémentaires pour lutter contre les déficits ; or, en se ruant sur ces obligations fédérales, les spéculateurs ont délaissé les actions dont les cours ont fortement chuté. Entre 1985 et 1989, les caisses d'épargne américaines (crise des Savings and loan) sont en crise pour avoir placé de façon malencontreuse dans l'immobilier. Environ 1600 institutions font faillite (le sommet de cette crise est atteint en 1987) et l'état a dû injecté près de 150 milliards de dollars. 
  • Sur le moyen terme, on estime que ces caisses d'épargne ont perdu l'équivalent de 1300 milliards de dollars (9 fois le déficit budgétaire des E.-U de 1988 à savoir 155 milliards ou encore une « trou » comparable à la dette des états du tiers-monde de l'époque d'environ 1300 milliards de dollars). 
  • La spéculation est aussi à l'origine de la crise financière du Japon entre 1990 et 1992. Certaines banques font même faillite comme la banque Daiwa. En Europe, la plus ancienne banque d'affaires, la Barings, fait faillite en 1995 suite à des placements hasardeux (rôle du trader Nick Leeson. Une banque comme le Crédit lyonnais est aussi en difficultés avec 130 milliards de francs de pertes dans ces années ou le Crédit foncier dont les pertes s'élèvent à plus de 10 milliards de francs en 1995. 

 B/ Un bloc soviétique qui s'effondre et une nouvelle voie chinoise 

a/ un bloc soviétique incapable de se réformer - 

 -un échec des réformes... 

  •  Les réformes proposées par Gorbatchev à savoir la glasnost et la perestroïka échouent. La perestroïka consiste à profondément restructurer l' économie soviétique par des mesures de libéralisation économiques même si elle a contribué à améliorer les conditions de vie des individus. 
  • La perestroïka vise aussi à redonner plus d'esprit d'initiative dans une société bloquée. Les terres sont louées pour une longue période aux agriculteurs, il est également possible de créer son entreprise artisanale, les grandes entreprises peuvent être plus autonomes dans leur gestion ... Or, les effets sur l'économie ne sont pas assez importants : l'économie soviétique reste sclérosée. 

 -...menant à l'effondrement 

  •  Le double échec de la perestroïka et de la glasnost conduit à l'effondrement de l'URSS. Gorbatchev s'est heurté aux résistances du Parti communiste notamment de l'aile conservatrice et à la nomenklatura, ces privilégiés qui refusaient tout changement de crainte de perdre leurs privilèges. Non seulement, l'URSS s'effondre mais également le bloc d'Europe de l'Est. S'annonce une période de transition vers l'économie de marché et le capitalisme : une transition plutôt difficile. En effet, passer d'une économie planifiée et étatisée n'est pas chose facile. Ce passage s'effectue par une série de privatisations d'entreprises et de banques, la libéralisation des prix... le début de cette transition est très délicat avec une récession importante à laquelle s'ajoute une très forte inflation (60% en Pologne en 1990 ou 2000% en Russie en 1992). 
  • Le chômage augmente créant une paupérisation des catégories les plus défavorisées. L'ancienne RDA s'en sort beaucoup mieux grâce aux aides et transferts très importants opérés par l'Allemagne. 
  • Ce qui facilite cette transition est notamment l'aide apportée par la CEE avec en particulier le programme appelé PHARE (Pologne,Hongrie, aide à la reconstruction économique). Ce programme était conçu comme un programme de pré-adhésion à la CEE. A partir de 1993, ce programme a pour objectif majeur de moderniser les infrastructures des pays de l'Est en vue précisément d'une future intégration. C'est un programme important sur plusieurs années complétée par d'autres programmes comme concernant l'agriculture par exemple. Parallèlement, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) voit le jour en 1991 afin d'aider le secteur privé en formation dans les PECO. La CEE signent aussi des accords d'association avec ces pays d'Europe centrale et orientale ce qui favorise les échanges. La CEE a joué incontestablement un rôle important : le sommet de Copenhague de 1993 qui définit les conditions d'adhésion à l'Union européenne définit le cadre d'adhésions qui se dessinent. 

 b/ Une nouvelle « voie chinoise » 

-la mort de Mao, la fin annoncé du modèle maoïste 

  •  A partir de 1971, les dirigeants chinois décident une remise en ordre d'un pays profondément troublé par la Révolution culturelle lancée en 1966. Cette remise en ordre se fait par le premier ministre Zhou Enlaï et Deng Xiaoping. Ce dernier avait été mis à l'écart en 1968 au moment de la Révolution culturelle et même exclu du parti communiste. 
  • Il réintègre le parti communiste en février 1973 après une lettre d'excuses sur ses attitudes « contre-révolutionnaires » envoyée à Mao : il est donc réhabilité. La politique dite de recentrage est néanmoins contestée par ce qu'on nomme le « groupe de Shanghai », un groupe très à gauche, composé notamment de Jiang Qing, l'épouse de Mao. Zhou Enlaï finit par imposer son point de vue en 1975 avec comme projet de moderniser l'agriculture et l'industrie. En janvier 1975, Deng Xiaoping devient secrétaire permanent du Politburo puis vice-président du parti communiste et vice-premier ministre En janvier 1976, Zhou Enlaï meurt puis c'est au tour de Mao en septembre de la même année. 
  • En février, est nommé comme Premier ministre par intérim un homme de peu d'envergure : Hua Guofeng. Ce dernier mène une campagne contre Deng Xiaoping accusé d'être un « déviationniste de droite » qui est destitué de ses fonctions en avril. Mais les radicaux du groupe de Shanghai à la mort de Mao tentent de prendre le contrôle du parti communiste et du pouvoir. Ils sont arrêtés en octobre. Hua Guofeng semble tenir les rênes du pouvoir se présentant comme l'héritier de Mao. Mais plusieurs dirigeants du parti ont une préférence pour Deng Xiaoping.
  • Lors du Congrès du PCC en juillet 1977, Deng Xiaoping revient au pouvoir comme vice-premier ministre. Progressivement, Hua Guofeng est marginalisé et Deng Xiaoping prend le contrôle du parti communiste : une prise de contrôle effective et confirmée en décembre 1978. C'est la fin de la période maoïste et la transition vers une autre politique. 

 -une nouvelle stratégie, une nouvelle politique pour un « capitalisme à la chinoise » ? 

  • Deng Xiaoping décide une nouvelle politique économique centrée sur la modernisation du pays, la politique des « quatre modernisations » : quatre domaines sont concernés à savoir l'agriculture, l'industrie, la science et les technologies et la défense. Dans le cadre de cette politique, les terres sont dé-collectivisées, la notion de profit est réhabilité notamment par le biais de la création de marchés libres , premier pas vers un véritable secteur privé, la planification est assouplie... dans les campagnes, les agriculteurs passent des contrats avec l'état afin de les responsabiliser et en décembre 1985, les communes populaires sont supprimées définitivement. Sont libéralisés progressivement le commerce, l'artisanat... 
  • Deng Xiaoping également décide d'ouvrir la Chine aux capitaux étrangers. Des zones économiques spéciales sont créées en 1979 en l'occurrence quatre zones dans les provinces du Guangdong (région de Shenzhen) et du Fujian (région de Xiamen). Ces ZES permettent aux entreprises étrangères de s'implanter avec des droits de douane très faibles et des impôts quasi-inexistants ; Ces ZES sont une réussite à tel point qu'on parle du « miracle de Shenzhen ». Les premières ZES permettent à des entreprises chinoises de se développer dans le secteur du textile, de la chaussure... En 1984, 14 villes du littoral sont ouvertes aux investisseurs étrangers dont Shanghai. La libéralisation de l'économie et la création des zones franches dynamisent l'économie chinoise. D'ailleurs en 1984, le PC décide de moderniser l'ensemble de l'économie chinoise. Se développe de ce fait une véritable économie de marché avec concurrence. 
  • Les productions augmentent tout comme le niveau de vie mais l'inflation est importante et surtout des déséquilibres régionaux apparaissent avec un littoral en pleine expansion alors que la Chine de l'intérieur reste marginalisée. Parallèlement à cette politique économique, est mis en place la politique de l'enfant unique : les dirigeants chinois ont pris conscience des problèmes posés par la croissance démographique. La Chine s'ouvre plus vers l'extérieur comme en témoigne un accord signé dès 1978 avec la CEE ou l'établissement de relations diplomatiques officielles avec les E.-U en décembre 1978. En avril 1980, la Chine entre même au FMI. 
  • En 1984 est signé un accord avec le Royaume-Uni concernant Hong Kong, une ville devenant officiellement chinoise en 1997. Hong Kong bénéficie néanmoins d'une loi fondamentale permettant de concilier un système basé sur : un pays, deux systèmes. Hong Kong conserve son système politique, son système judiciaire... cette ouverture se traduit par une hausse constante des investissements étrangers qui passent de 4 milliards de dollars en 1998 à 27,5 milliards en 1993. Par contre sur un plan politique, les réformes sont plus que limitées. 
  • Certes les victimes du maoïsme sont réhabilitées mais il est hors de question d'établir une démocratie. Les jeunes notamment les étudiants réclament plus de libertés et des manifestations allant dans ce sens se déroulent en 1986. Des manifestations de plus grande ampleur ont lieu en 1989 pendant plusieurs semaines. 
  • Une partie des dirigeants communistes dont Deng Xiaoping impose une ligne dure par rapport à ces manifestants. En juin 1989, l'armée intervient contre les manifestants place Tian Anmen à Beijing (au moins un millier de victimes). Une vaste répression se déclenche : il est hors de question de démocratiser le pays. Le secrétaire du PC jugé trop timoré, Zhao Ziyang est remplacé par un proche de Deng Xiaoping, Jiang Zemin. Ce dernier devient le successeur de Deng Xiaoping (qui décède en 1997). la Chine au début des années 1980 a donc pris un virage fondamental expliquant ce qu'elle est en passe de devenir : une grande puissance économique mondiale. 

 C/ Des tiers-mondes toujours dans l'impasse ? 

a/ Des situations toujours délicates 

 -des modèles globalement en échec et des situations inégales 

  •  La crise des années 1970 a impacté les états du Tiers-monde de façon différente. Certains ayant des atouts comme des matières premières ont réussi à maintenir une croissance alors que d'autres ont connu d'importantes difficultés surtout qu'ils ont été contraint de s'endetter à la fois pour réaliser leurs projets de développement et lutter contre la crise. Entre 1980-1990, la croissance des pays en développement est de l'ordre de 4,1% (contre 5,5% dans la décennie précédente. Elle est de 2,4% pour l'Afrique mais de 6,9 pour l'Asie. Dans les années 1970, les exportations des pays en développement est passée de 20 à 33%, une augmentation, il est vrai, liée à la hausse des cours du pétrole notamment. 
  • Par contre, le second choc pétrolier et la crise de l'endettement ont freiné cette croissance. La période des années 1980-1990 est même très délicate pour de nombreux états. Ont été frappés par cette crise, les pays dits à revenus intermédiaires dont les industries naissantes ont subi la hausse des cours des matières premières. De plus, les états du tiers- monde connaissent une très forte inflation liée à des déficits de plus en plus importants, à la hausse des hydrocarbures... 
  • Dans certains cas, on parle même d'hyperinflation. 
  • Entre 1980-1990, l'inflation est en moyenne de 41,8% pour les pays en développement avec en particulier une hyperinflation en Amérique latine où l'inflation est en moyenne de 151% (seulement 8% en Asie). De plus, ils sont affectés par la baisse des matières premières agricoles ou minérales à partir des années 1984-85 ce qui réduit leur part dans les échanges mondiaux. La crise de l'endettement est particulièrement importante. Cet endettement s'explique par une forte demande de financement des pays en développement afin de se développer. Pour les pays non producteurs de pétrole, les emprunts ont aussi servi à payer leurs importations de pétrole dont la facture s'élève à plus de 67 milliards de dollars en 1980. 
  • L'endettement est facilitée par des banques qui n'hésitant pas à prêter dans les années 1970 avec l'arrivée massive sur les marchés financiers des pétrodollars. 
  • La dette des PED passe ainsi de 72,8 milliards de dollars en 1970 à 618 milliards en 1980 et 626 milliards en 1982. Or, à partir de 1979, la hausse du dollar ainsi que la politique monétaire plus restrictive des E.-U avec une hausse des taux d'intérêt aggravent l'endettement. Les états endettés se trouvent en difficulté ce d'autant plus que leurs rentrées d'argent diminue car les prix de nombreux produits qu'ils exportent chutent. Parallèlement, devant les difficultés, les banques à partir de 1982-83 réduisent les prêts : pour les états en développement, la spirale de l'endettement est insoluble. 
  • Les 10 états les plus endettés cumulent à eux seuls 40% de la dette des pays en développement (Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Mexique, Maroc, Nigeria, Pérou, Philippines, Venezuela). Ces pays doivent notamment utiliser leurs recettes d'exportation seulement pour rembourser ce qu'on nomme le service de la dette (le remboursement des taux d'intérêt). Enfin, certaines stratégies de développement montrent leurs limites en particulier les stratégies reposant sur l'exportation d'un ou deux produits de base (matières premières agricoles). De plus, certains grands projets menés par les états en développement se sont avérés trop coûteux sans compter les dépenses militaires dans le cadre de plusieurs conflits. 

 - des solutions libérales : des solutions adaptées ? 

  • Pour résoudre les difficultés, ce sont des solutions libérales qui sont appliquées à l'initiative du FMI : les fameux plans d'ajustement structurel reposant sur le consensus de Washington de 1989. La montée en puissance de l'idéologie libérale et son affirmation vont s'appliquer aux pays en développement. De plus, les institutions internationales sont focalisées sur l'endettement et les crises sont analysées comme des crises essentiellement financières où les grands équilibres financiers n'ont pas été respectés (équilibre des finances publiques...).
  • Le FMI vient en aide aux états en difficultés à condition qu'ils prennent, en contrepartie, des mesures radicales et jugées efficaces comme la libéralisation des marchés intérieurs, la baisse des dépenses publiques ou encore la hausse des exportations et la baisse des importations. C'est dans ce cadre que les dettes peuvent être renégociées. 
  • Pourtant, on peut faire remarquer qu'en 1985, les pays en développement avaient versé 134 milliards de dollars de service de la dette et n'avaient reçu d'apports que 84 milliards de dollars. 
  • En moyenne, ils ont transféré entre 1983 et 1990 en moyenne 21,5 milliards de dollars par an à leurs différents créanciers des états riches. On peut donc considérer que les PED ont financer les états dits du Nord. 
  • Ces politiques libérales ont accentué les inégalités et la pauvreté. La solution la plus simple, à savoir l'annulation totale ou partielle de la dette finit par être évoquée lors d'une rencontre des pays les plus riches en 1988 au Canada, à Toronto. La France montre l'exemple en annulant la dette, en 1989, des PMA de l'Afrique subsaharienne soit un allègement de 20 milliards de francs de l'époque. Les véritables allègements des dettes se font plus tard (début des années 2000) alors que la dette des PED atteint environ 1500 milliards de dollars en 1990. 

 b/ Des états qui s'adaptent au monde qui change 

-une crise bénéficiant aux pays producteurs d'hydrocarbures 

  • La période de crise des années 1980-90 n' a pas eu les mêmes effets sur tous les états. Les états producteurs de pétrole du Proche et Moyen-Orient ont bénéficié des hausses des cours du pétrole même si ils ont subi temporairement le contre-choc pétrolier des années 1985. Ils ont accumulé des milliards de dollars : 2500 milliards à la fin des années 1990. Par contre, ces pétrodollars n'ont pas été utilisés à l'époque pour de véritables projets de développement : ils ont servi à financer des projets immobiliers ou des investissements à l'étranger comme des prises de participation dans des FTN. Par contre, des états notamment en Asie sont dans une voie de réussite comme les NPI (Taïwan, Hong Kong, Corée du Sud ou Singapour) à telle enseigne qu'on évoque un modèle de développement asiatique. Les NPI ont chois la stratégie du soutien aux exportations pour réussir leur développement. 
  • Il s'agit de favoriser les exportations afin d'augmenter les ressources financières. La stratégie de ces pays obéit à quatre axes à suivre : une réforme agraire, une industrialisation par la promotion des exportations, le rôle de l'Etat qui financent les infrastructures et protègent le marché intérieur, une généralisation de la scolarisation. 
  • Les politiques menées sont de plus intéressantes. Les états ont joué sur leurs atouts initiaux comme la présence de ports et de littoraux pour Singapour et Hong Kong ce qui permet de développer des activités maritimes. La Corée du Sud a bénéficié de l'aide américaine et a eu recours à des emprunts massifs ainsi que d'un état interventionniste pour mettre au point et développer des industries de base comme la sidérurgie et la construction navale. 
  • Parallèlement, dans les années 60, Singapour, Hong kong optent pour des industries où le coût faible de la main d' œuvre est un atout : industrie du jouet et industrie textile pour Hong Kong, industrie textile pour Singapour. Puis ces états passent au développement d'industries nécessitant plus de technologies : électronique et optique pour Singapour, électronique également pour Taïwan, la Corée du Sud ou Hong Kong. 
  • Singapour a aussi développé ses activités financières. Progressivement, ces états et leurs industries ont exporté des produits de plus en plus performants comme l'industrie automobile coréenne. 
  • L' Amérique latine a opéré un redressement qu'à partir de la fin des années 1980-début années 1990, période où la croissance reprend. Ces états prennent conscience de la nécessité de s'unir et vont créer en mars 1991 le MERCOSUR (Mercado Comun del Sur). Ce dernier regroupe l'Argentine, le Brésil, le Paraguay, l'Uruguay et le Venezuela afin de développer un marché commun. Des états comme le Chili, le Pérou ou l'Equateur sont des états associés au MERCOSUR. Quant au Mexique, il adhère en 1994 à l'ALENA. 

-des états devenus dynamiques et compétitifs : l’essor de l’Asie 

  • Le concept d’émergence apparaît au début des années 1980 dans le domaine de la finance afin de mettre en évidence des marchés jugés intéressants et dans lesquels il faudrait investir. Deux états commencent à émerger au début des années 1990 : la Chine et l'Inde. 
  • Ces deux pays se sont lancés dans un processus de développement économique accéléré. L' Inde a opté pour le libéralisme à partir de 1991 et peut compter sur des groupes industriels de plus en plus compétitifs (Mittal, Tata..) alors que la Chine a réussi une transition économique vers l’économie de marché (voir plus haut).
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