3/ De l'internationalisation à la mondialisation des productions et des échanges

1/ Vers un monde interdépendant et sans frontières ?


A/ Le développement d'un village planétaire et l’essor d’un monde en réseaux 

 a/ Une mise en réseau(x) de la planète 

 Les années 1980-1990 sont marquées par une mise en réseau de la planète. En effet, de nombreuses FTN se développent à l'échelle mondiale avec des délocalisations notables et la création de filiales. Ces FTN commencent à former ce qu'on appelle des firmes en réseaux avec le rôle décisionnaire de la maison mère et les filiales de production. Les réseaux commerciaux s'intensifient également avec le développement du commerce mondiale. Cette mise en réseau est facilité par le développement des transports : l'internationalisation et la mondialisation sont favorisés par les transformations liés à ce domaine. Il faut une véritable logistique pour que la planète se globalise. Un de ces transformations concerne le transport maritime. L'internationalisation du marché des matières premières et des hydrocarbures a dynamisé ce secteur. 

-une mise en réseau par la technologie 

  •  Cette mis en réseau de la planète s'opère également par les technologies. Les satellites (le premier est lancé en 1957), le processus de numérisation ont permis la mise en réseau technologique de la planète. Le réseau Internet apparaît réellement au début des années 1980 et se développe dans les années 1990 facilitant la circulation d'informations à l'échelle planétaire. Le Web est l'aspect le plus connu de ce développement Au début des années 1990 se diffusent aussi des appareils électroniques mobiles comme les téléphones, les consoles de jeux, les navigateurs GPS... 
  • Au début des années 1990, les NTIC deviennent un élément essentiel pour les entreprises et pour ,notamment, leur compétitivité facilitant l'externalisation des productions. C'est à partir des années 1980 que les entreprises adoptent l'informatique en particulier pour les tâches de gestion et de communication. En 1995, Internet permettait à 1,4 million d'ordinateurs des 80 000 FTN d'être connectées et reliées. 

 -vers une culture monde ?

  •  Les années 1980-1990 avec la fin du bloc communiste et l'ouverture de la Chine correspondent à une véritable diffusion d'une culture monde. Le 31 janvier 1990 est inauguré le premier Mc Donald's à Moscou ; le premier McDonald's ouvre en Chine aussi en 1990, à la fin de l'année (en octobre) en l'occurrence à Shenzhen. Dans cette logique de mondialisation, McDo ouvre son premier restaurant en Afrique du Sud en 1995 (le premier en France date de 1972). Cet exemple montre la formation d'une consommation qui se globalise : il en est de même pour la diffusion des séries, des films... 

b/ Une mise en réseau des capitaux 

 -des capitaux libérés : la globalisation financière comme changement majeur 

  • Les années 1980-90 sont surtout marquées par la globalisation financière : un véritable marché financier planétaire s'est constitué. La circulation des capitaux est facilitée par le processus de déréglementation des marchés financiers opéré par les E.-U et le Royaume-Uni au début des années 1980. Les contrôles sur les marchés des changes sont supprimés, les différents marchés de capitaux sont décloisonnés (marché à court terme, long terme), les activités des banques sont elles aussi décloisonnées avec la disparition de la différence entre banques dites de dépôts et banques d'affaires. Les banques deviennent à la fois des banques de dépôts et d'affaires pouvant spéculer sur les places financières. 
  • Ces dernières subissent également la déréglementation avec en plus la possibilité grâce au progrès en matière technologique d'être continuellement connecté aux places financières : les marchés financiers sont accessibles 24h sur 24. 
  • On peut donc dire que les places financières obéissent désormais à une unité de temps, de lieu et de produits : unité de temps car les marchés de capitaux fonctionnent 24h sur 24, unité de lieu puisque les places financières sont connectées les unes aux autres et unité de produits car ce sont les mêmes produits financiers qui se diffusent sur la planète. 
  • Cette libéralisation conduit à une spéculation accrue et à la création de fonds spéculatifs (Hedge funds) et de fonds dits de pension. Ces fonds cherchent des placements les plus rentables possibles à court terme. L'un des effets est l'explosion des transactions financières mondiales : elles passent de 250 milliards en 1985 à 1000 milliards en 1990 et 1300 milliards en 1995 par jour. Pour certains, c'est une économie financiarisée qui s'est mise en place avec des marchés financiers qui exercent une forte pression sur les états et les entreprises. 

 -et des IDE en fort essor 

  •  La globalisation financière a amplifié fortement les IDE c'est-à-dire l'achat d'actifs dans un pays tiers. Les flux d' IDE à l'échelle mondiale sont passés de 25 milliards de dollars dans les années 1970 puis 50 milliards à la fin de ces mêmes années 70 en moyenne à 200 milliards dans les années 1990 et même 800 milliards en 1999. La globalisation financière a facilité ces investissements tout comme les privatisations importantes décidées dans plusieurs pays. Le, phénomène des délocalisation contribue fortement à la montée des IDE afin de « jouer » sur une main d' œuvre à bas coût dans certains pays. 
  • Au sein de la CEE, le stock d' IDE est passé de 250 milliards de dollars en 1980 à 1000 milliards en 1990, les firmes américaines ont investi pour 450 milliards de dollars en 1990 (contre 220 en 1980)... Dans les années 1950-1970, les E.-U étaient à l'origine des principaux flux d' IDE mais à partir des années 1980, la géographie des IDE connaît des changements notables. Ces mêmes E.-U sont de plus en plus attractifs pour les investisseurs étrangers avec la reprise économique des années 1980 et de nombreuses firmes japonaises investissent aux E.-U. L' Europe est aussi une zone intéressante avec la création du marché unique à partir de 1993. Mais on note en parallèle des investissements de plus en plus importants vers l'Asie où l'attrait de la main d' œuvre avec des salaires très bas ainsi qu'un fort taux de croissance ne peuvent qu'attirer les investisseurs. Ces investissements concernent la Chine qui s'est ouverte, les NPIA mais également des pays comme l'Indonésie, les Philippines. Dans les années 1990, 40% des IDE sont à destination des pays en développement mais environ 30% sont destinés à la Chine, 30% aux économies asiatiques dynamiques comme les NPI ou vers certains pays d'Amérique latine comme le Brésil ou le Mexique (30% vont vers 135 états y compris les PMA où les IDE sont très peu important). 

 c/ Une nouvelle DIT, reflet de la mondialisation 

-les nouvelles stratégies des FTN 

  •  Les FTN deviennent de plus en plus puissantes à partir des années 1980. On comptait 11 000 Firmes de ce type à la fin des années 70 et elles sont plus de 37 500 en 1990 avec 250 000 filiales et contrôlant le tiers des échanges mondiaux. Les plus puissantes se structurent à l'échelle planétaires pour devenir ce que certains appellent des « firmes globales » c'est-à-dire des firmes aux liens plus distendus avec le pays d'origine et surtout à des actionnaires n 'étant pas systématiquement du pays d'origine. Cette « globalisation » des firme se mesure avec l'indice de transnationalité prenant en compte la part du chiffre d'affaires réalisé à l'étranger, la part des emplois à l'étranger ainsi que les actifs détenus à l' étranger. 
  • Dans certains secteurs comme l'automobile, l'électronique, les télécommunications, cet indice est élevé. Néanmoins, pour la plupart des firmes, il est de 30% indiquant que les FTN restent encore fortement lié à leur territoire d'origine. Mais, il est incontestable que ces firmes optent pour des stratégies plus globales avec notamment des délocalisations importantes à l'étranger. 

 -pour une autre DIT 

  •  Ces changements induisent des modifications de la division internationale du travail. En effet, les états des pays riches connaissent un processus de désindustrialisation au profit des pays en développement. Les usines sont délocalisées ou alors les firmes utilisent des entreprises sous traitantes dans des économies où le coût de la main d' œuvre est faible. On constate dès lors un processus d'éclatement de la production. Il s'agit notamment de répartir les étapes du processus de production en fonction du coût. Les composants d'un produit vont ainsi être fabriqués dans plusieurs pays et l'assemblage réalisé dans un pays tiers. 

 B/ L'explosion du commerce mondial et une globalisation financière pivot d’un monde nouveau 

a/ L'explosion du commerce 

-des économies de plus en plus ouvertes

  • Dans les années 1980-1990, les économies deviennent de plus en plus ouvertes par la libéralisation des échanges avec les différents accords du GATT puis la création en 1995 de l'Organisation mondiale du commerce.(OMC) mais aussi avec le développement des Unions régionales : Union européenne, ALENA (1992), Mercosur (1991)... A la fin des années 1980, les droits de douane sont de l'ordre de 6% (contre près de 50% en 1945). 
  • L'accord de Marrakech de 1994 est signé par 124 pays et vise à créer à terme un marché mondial. Cet accord qui donne naissance à l'OMC décide également d'intégrer le domaine de l'agriculture dans les négociations. Est même signé l'Accord général sur le commerce des services (AGCS) en 1994 prévoyant de négocier la libéralisation des domaines de télécommunications, des services financiers ou des transports. Ces économies sont de ce fait plus liées et interdépendantes. Les états et sociétés sont connectés à tous les niveaux à une ampleur considérable. 

 -et interdépendantes 

  •  Cette ouverture se traduit par une explosion des échanges : ces derniers ont une croissance plus rapide que la production. Entre 1970 et 1990, la valeur des échanges est multiplié par huit et atteint 5 000 milliards de dollars en 1995. Cette explosion des échanges se traduit par une meilleure insertion des pays en développement, le poids grandissant des NPIA. Mais, le commerce est néanmoins dominé par les E.-U, le Japon et l'UE soit la triade. 
  • On ne peut toutefois pas encore parler d'un commerce totalement globalisé avec des états restant encore en retrait comme l'Inde (1% du commerce mondial), l'Afrique subsaharienne (moins de 2% du commerce mondial). L'insertion de la Chine est encore relative 

b/ Une globalisation financière exceptionnelle et dangereuse 

-une finance dérégulée

  • La globalisation financière est exceptionnelle « grâce » à la dérégulation financière. Les marchés boursiers sont passés de près de 11 000 milliards de dollars au début des années 1990 à plus 19 150 milliards au début de l'année 1997. En 1995, la capitalisation boursière mondiale représente plus de 70% du PNB mondial soit 26 900 milliards de dollars. 

 -des conséquences négatives : bulles spéculatives, crises financières... 

  • La globalisation financière et la libéralisation des capitaux ont généré des « bulles spéculatives » et des crises financières importantes dans les années 1990 : crise en 1994 aux E.-U avec des pertes évaluées à 1500 milliards de dollars, crise financière en Asie en 1997... Cette crise commence avec l'éclatement d'une bulle financière en Thaïlande et se transmet aux autres places financières asiatiques.
Studiapedia

2/ Quel bilan pour cette nouvelle étape du processus de mondialisation ?


A/ Une mondialisation qui change partiellement la donne économique mondiale ? 

 a/ Des Etats qui tirent profit du processus 

-une mondialisation toujours au profit des pays dominants 

  •  Le processus de mondialisation a surtout bénéficié aux états l'ayant initié à savoir les E.-U., l'Europe mais aussi le Japon, ces états qualifiés de triade par l'économiste japonais Kénichi Ohmae en 1985.. 
  • Ce sont ces états qui ont favorisé la libéralisation des échanges dans le cadre du GATT puis de l'OMC, mis au point la NDIT... ce sont toujours des firmes de cette triade qui sont en position dominante bien que les firmes chinoises bousculent de plus en plus la hiérarchie. 

 -mais qui permet à d'autres de se développer et de devenir concurrentiels 

  • Justement, l'insertion dans la mondialisation a permis à plusieurs états de se développer et d'être compétitifs avec comme effet de modifier la hiérarchie économique des états. Ce sont d'abord les NPI (Nouveaux pays industrialisés) comme Singapour, la Corée du Sud et Taïwan qui se sont développés devenant de réelles puissances économiques. 
  • Depuis les années 1980 la Chine s'est ouverte aux échanges et ses progrès sont fulgurants : elle est devenue un pôle majeur de l'économie mondiale (2e PIB de la planète derrière les E.-U.), le créancier de nombreux états dont les E.-U. On peut ajouter d'autres états émergents pouvant parvenir à modifier la hiérarchie économique : Union indienne, Brésil... 

b/ Des effets territoriaux importants 

 - des métropoles renforcées : une métropolisation devenue fondamentale 

  • Le processus de mondialisation a renforcé le poids des métropoles : celles-ci concentrent les activités économiques, commerciales, financières mais aussi politiques et culturelles. Certaines sont ce que les géographes nomment des villes mondiales comme New York, Paris, Londres ou Tokyo. Ces villes sont des cœurs de l'économie globalisée formant un archipel mégalopolitain mondial par lesquels transitent de nombreux flux. 
  • D'autres villes se développement prétendant devenir elles aussi des villes mondiales : Shanghai, Hong Kong, Singapour... 

 - et une littoralisation des activités 

  • La mondialisation et les échanges ont également favorisé les littoraux : la plupart des échanges s'effectuant par les voies maritimes (à 80%). Les ports sont des plaques tournantes de l'économie mondiale : des ports comme Ningbo, Shanghai, Singapour ou encore Rotterdam jouent un rôle fondamental. De ce fait, les façades maritimes sont des espaces majeurs du monde globalisé : les façades d'Asie orientale, de la mer du Nord (Northern range), du Japon en sont de remarquables illustrations ; Ce poids des littoraux bénéficient bien sûr aux villes situées sur ces littoraux ou à proximité. 

 B/ Une mondialisation inégale et incomplète 

a/ Des Etats toujours à la marge 

-des états qui tentent de s'insérer mais avec difficultés 

  • Plusieurs états sont encore en périphérie de cette mondialisation. Ils essaient de suivre la voie des NPI et des états émergents mais ont encore des difficultés à s'insérer pleinement dans la mondialisation. Toutefois des états comme les « bébés tigres » asiatiques, Philippines, Malaisie, Indonésie, Vietnam ont des atouts et jouent sur la NDIT pour s'affirmer de plus en plus. 

 -des états très en retrait 

  •  Par contre, plusieurs états restent véritablement à la marge du processus comme les pays les moins avancés. Ils participent peu à la mondialisation devant surmonter des problèmes et défis compliqués dont les défis liés au développement. C'est le cas de plusieurs états africains dont ceux de la zone sahélienne mais également d'états comme Haïti, le Laos, l'Afghanistan... 

b/ Une mondialisation de fait inégale 

-une mondialisation accroissant clivages et inégalités

  • La mondialisation accroît les inégalités entre états mais également les inégalités à l'intérieur des états sans oublier les inégalités entre les catégories sociales. A l'intérieur des états, des régions bénéficient davantage que d'autres de l'insertion dans la mondialisation (villes, littoraux...). Les clivages et inégalités restent à toutes les échelles très présents. 

 -et provoquant des contestations d’une mondialisation jugée injuste 

  •  Ces inégalités génèrent une contestation de la mondialisation libérale avec le développement de l'altermondialisme. Plusieurs mouvements réclament une autre mondialisation, plus juste et équilibrée devant profiter à tous. En effet, à l'inverse de ce qu'affirmait l'économiste français Alain Minc, la mondialisation n'est pas heureuse pour tous.
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