3/ La France à l'heure de la mondialisation

Introduction

La France comme tout état est ouvert sur le monde et participe activement à la mondialisation. Le processus de mondialisation impacte le territoire français, l'économie, les modes de vie... La France comme tous les états tente de s'adapter à la mondialisation et à ses effets dont certains peuvent être jugés comme négatifs (processus de désindustrialisation).Au niveau de sa puissance et des on influence, elle garde des atouts mais c’est une puissance affectée par la concurrence internationale : pour beaucoup, la France peine à s'adapter tant à la mondialisation qu’à la nouvelle donne géopolitique internationale. 
De ce fait, certains évoquent même le déclin de la puissance française (thèses déclinistes). Si il y a bien un recul et un déclassement de la France doit-on pour autant considérer que la France n’a plus les moyens de maintenir son rang ? En fait, il faut s’interroger sur le niveau de puissance de la France mais également se demander si elle n’est pas plus influente que puissante (il faut différencier influence et puissance même si on peut relier les deux). Comme le souligne Alexis Bautzmann dans la revue Diplomatie de 2015 dont le titre était Géopolitique et géostratégie de la France (juin 2015), « les Français sont aujourd’hui confrontés à une crise économique, sociale et identitaire majeure, qui heurte leur imaginaire collectif et leur fait craindre (...) la fin d’une « certaine France ». 
La perte d’influence de notre pays en Europe et dans le reste du monde, participe activement à ce sentiment de déclassement (...) ». 
De façon plus générale, on peut se demander quelle est désormais la place de la France dans le monde ? Dans le cadre de nouveaux rapports de force mondiaux où « la puissance de la Chine s’affirme chaque jour un peu plus, où l’ère du « nouvel ordre international » américain semble révolue, et où l’Union européenne (...) peine à peser de manière souveraine sur les affaires mondiales ? » (Alexis Bautzmann : Diplomatie : Géopolitique de la France, janvier 2021. Frédéric Charillon dans un ouvrage récent (La France dans le monde, CNRS éditions 2021) évoque « cette puissance devenue moyenne, qui aime à disserter sur son propre déclin, avec un penchant pour l’autodénigrement ou l’insatisfaction. » Il s’interroge également sur « qu’est-ce qu’être une puissance moyenne en ce XXIe siècle ? Les puissances européennes comme le Royaume-Uni ou la France sont « toujours structurantes sans plus être surplombantes » car elles « luttent pour maintenir leurs voix respectives. »

A/ La France : quelle puissance ?


Dans un monde de plus en plus concurrentiel avec des états qui depuis quelques années s'affirment tant sur le plan économique que politique (les états émergents), la France semble peiner à maintenir son rang de puissance, du moins de « grande puissance moyenne » pour reprendre l'expression de Valéry Giscard d' Estaing. Comme nous l’avons signalé dans l’introduction, la thématique du déclassement est très prégnante avec un déclassement de la puissance française. Pourtant La France est en Europe et au sein de l’Union européenne toujours un état important et moteur. Même à l’échelle mondiale la France est toujours un Etat qui compte même si il compte moins que dans un passé désormais révolu qui est celui de la première moitié du 20e siècle. Il faut avoir conscience que les temps ont changé avec l’affirmation ou la réaffirmation (dans le cas de la Chine) de puissances qui bousculent la France et plus généralement l’ordre planétaire. La France reste notamment influente (article de la revue Diplomatie : La France, une nation toujours influente, 2021). Il faut avoir à l’esprit « que la France d’Emmanuel Macron n’est plus celle de François Mitterrand (...) moins encore celle de Charles de Gaulle « comme le rappelle Alexis Bautzmann (revue Diplomatie : Géopolitique de la France, 2021). Historiquement, on peut rappeler que « la France contemporaine dut gérer deux traumatismes successifs (...) Un traumatisme allemand » (Frédéric Charillon : La France dans le monde, CNRS éditions 2021) avec notamment la Seconde guerre mondiale et la défaite de 1940 et « un second traumatisme, colonial cette fois » avec la perte de l’Empire colonial. 

a/ Une puissance encore active et influente 
 
  • D’abord rappelons quelques éléments intéressants: la France est en 2020 la septième puissance économique mondiale si on prend comme référence le PIB : elle oscille depuis quelques années entre la 5e et la 7e place et vient d’être dépassée par l’Union indienne. Le fait de dépasser par l’Inde est à relativiser car le PIB par habitant en France est de 41 761 $ pour 2172 $ à l’Inde. Les Français ont un niveau de vie nettement supérieur aux Indiens. La France est toujours une puissance militaire d‘envergure étant dans le top 5 de ces puissances ( les E.-U, la Chine, la Russie,Royaume-Uni et France) et puisque nous avons évoqué l’Inde, la puissance militaire de la France est supérieure à celle de l’Inde. La France a des atouts notables qu’ils soient géographiques, économiques, culturels ... La France a des atouts avec sa « puissance militaire (...) ,son siège « envié » au Conseil de sécurité (ONU), sa position géostratégique maritime (...), la francophonie, son attractivité économique, industrielle et culturelle (...) » (Philippe Clerc : Diplomatie, 2021)
  •  La France reste une puissance active et influente au niveau politique et militaire mais également au niveau économique et commercial. La France est incontestablement présente dans le monde et influente, disposant d'un certain nombre de vecteurs de puissance. Il faut en premier lieu rappeler une présence territoriale à l'échelle mondiale conférant à la France des atouts géographiques indéniables (qu’on a tendance à négliger) avec ce que certains ont appelé les « confettis de l'Empire » à savoir des territoires hérités de l'ancien Empire colonial que sont les DROM et les COM. Ils représentent 121 000 km carré et rendent possible une présence dans l'Atlantique (Saint-Pierre- et-Miquelon et les Caraïbes (Antilles), sur le continent américain avec la Guyane, dans l'océan Indien (La Réunion, Mayotte), dans l'océan Pacifique (Nouvelle-Calédonie, Polynésie). 
  • Ces territoires ultramarins confèrent à la France des avantages géostratégiques. Ainsi, en Guyane est implanté le Centre spatial guyanais (CSG) (base de Kourou), un site qui présente de nombreux atouts pour procéder à des lancements : une latitude favorable, un lieu protégé des cyclones et séismes, des terres disponibles importantes. Le centre s'est développé à partir des années 1977-78 avec le programme Ariane de l'Agence spatiale européenne. On peut rappeler que ces territoires ultramarins ont des statuts différents avec les départements et régions d'outre-mer (DROM) dont le statut administratif est identique aux départements et régions métropolitaines (Martinique, Guadeloupe, Guyane, Réunion, Mayotte) ; des collectivités d'outre- mer (COM) dont les statuts peuvent d'ailleurs varier : Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélémy et Saint-Martin (qui ont été détachés de la Guadeloupe en 2007), Wallis-et-Futuna, la Polynésie (dont l'autonomie est assez importante). Il existe également les Terres australes et antarctiques (TAAF) qui ont leur propre administration (basée à la Réunion) et la Nouvelle-Calédonie qui est une collectivité spécifique. On peut ajouter l'île de Clipperton, une propriété de l'état français. L'un des intérêts de ces territoires est qu'ils donnent à la France une zone économique exclusive très importante (96% de la ZEE française) de plus de 11 millions de km carré soit le second domaine maritime au monde après les E-U. Cette ZEE est une des dimensions de la puissance maritime de la France qui est une véritable puissance maritime. Cyrille Coutansais évoque même « l’empire maritime français ». Cette ZEE offre à la France en plus d’un positionnement stratégique des ressources dont certaines pourraient s’avérer fort utiles comme les ressources en minerais notamment en minerais rares nécessaires pour les hautes technologies. Toujours dans le domaine maritime, la France peut compter sur un des plus importants armateurs mondiaux avec la CMA- CGM (Compagnie maritime d’affrètement-Compagnie générale maritime) ,une firme qui est le 3e armateur mondial. Les ports du Havre, de Dunkerque sont actifs et sont intégrés à une façade maritime dynamique (la Northern range). Enfin, l’armée française peut s’appuyer sur une flotte de guerre performante qui est aussi dans le top 5 des flottes de guerre. 
  • La France est précisément dotée de capacités militaires et stratégiques certaines avec une force de dissuasion nucléaire et l'arme nucléaire. La France est une puissance militaire ayant des atouts certains. Elle dispose d'une armée professionnalisée : les effectifs (chiffres du ministère de la défense de 2016) sont de plus de 285 000 personnes travaillant pour la défense dont plus de 218 000 personnels militaires. Au niveau des forces terrestres, l'armée française peut projeter 66 000 hommes, s'appuie sur plus de 2 700 véhicules blindés, 140 hélicoptères d'attaque... En ce qui concerne les forces navales, la France a 4 sous-marins nucléaire lanceur d'engins (SNLE) et 6 sous-marins nucléaires d'assaut, 1 porte-avions... Enfin, les forces aériennes françaises, c'est 225 avions de chasse, 7 avions de détection et de surveillance aérienne... En 2015, plus de 9000 militaires étaient engagés dans sur des théâtres d'opérations extérieures (OPEX) et en comptant les militaires stationnés hors métropole (territoires ultramarins...), le nombre est de 30 000 soldats. Ces soldats participent à des opérations militaires comme les opérations Licorne (Côte d'Ivoire entre 2002 et 2011, opération Harmattan en Libye en 2011, opération Serval au Mali en 2013, opération Sangaris en République centrafricaine en 2014... mais aussi à des opérations de maintien de la paix dans le cadre de l'ONU notamment au Kosovo (KFOR), au Liban (FINUL)... L'opération Serval, par exemple, a été lancée en janvier 2013 (avec l'accord de l'ONU) au Mali : il s'agissait d'aider les forces maliennes à lutter contre les mouvements islamistes ou Touaregs du Nord Mali afin que le Mali retrouve son intégrité territoriale. Environ 4000 soldats français ont participé à cette opération sans compter les interventions des forces aériennes. On peut également rappeler que la France a réintégré en 2009 le commandement intégré de l'OTAN. Enfin, il ne faut pas négliger le poids économique du complexe militaro-industriel français avec une France qui est le 4e exportateur mondial d'armes de la planète et des FTN performantes dans ce domaine comme EADS, Thalès, Dassault...
  •  L'industrie de l'armement représente tout de même 80 000 emplois directs et plus de 85 000 emplois indirects. Ces capacités militaires sont au service d'une volonté d'être encore présent et influent sur la scène internationale. La France est précisément toujours présente dans les grandes institutions internationales : elle est un des 5 membres permanents de l'ONU ce qui lui donne un droit de veto et un pouvoir décisionnel et participe à hauteur de 6% au budget de l'ONU. Elle est aussi membre depuis le début du FMI, de la Banque mondiale,de l'OMC : plusieurs directeurs généraux du FMI ont été français dont Christine Lagarde l'actuelle directrice. On peut signaler que c'est un Français, Pascal Lamy, qui a dirigé l'OMC de 2005 à 2013 (son successeur est un Brésilien : Roberto Azvedo). Plusieurs institutions internationales ont leurs sièges à Paris comme l'UNESCO ou l'OCDE. La France est aussi membre du G8 : c'est d'ailleurs elle, par le biais de V. Giscard d'Estaing, en 1974 qui avait initié un G5 informel avec les E.-U., la RFA, le Japon, le Royaume-Uni (elle est membre du G 20 également). La France, parallèlement, dispose du second réseau diplomatique mondial après les E.-U (réseau d'ambassades et de consulats). Diplomatiquement, elle tente toujours de peser : elle a ainsi gardé en grande partie une sphère d'influence en Afrique même si elle est de plus en plus concurrencée sur ce continent par la Chine (on peut se demander si la Chinafrique ne se substitue pas à la françafrique). Elle participe tant bien que mal à plusieurs interventions comme en Syrie et veut peser sur le Moyen-Orient. Un autre élément important est la volonté de rayonner culturellement : la France a bien un Soft Power. 
  • Ce rayonnement se fait notamment par la langue et la francophonie. L'organisation internationale de la francophonie créée en 1970, réunit 77 états doit plus de 890 millions d'habitants (sur les 5 continents). Ce rayonnement culturel s'appuie sur un important réseau de lycées et d'écoles françaises notamment par le système de l'Alliance française dont la création remonte à 1883 : 480 établissements d'enseignement français à l'étranger (plus de 310 000 élèves accueillis). Il faut ajouter à cela 27 centres de recherche (Instituts français de recherche) implantés à l'étranger sans oublier les Centres culturels comme la Villa Médicis à Rome ou l'école d'Athènes. La France a toujours un rayonnement culturel planétaire par sa culture, ses musées, son legs littéraire, historique et plus généralement artistique. Yves Montenay dans un article de la revue diplomatie de 2018 rappelle que la France avec Emmanuel Macron semble redécouvrir « la francophonie et ses enjeux » avec une « croissance rapide de la francophonie au Sud (...) ». Il souligne également qu’au « Sud du Sahara, le français est une langue africaine. » L'économie française reste également une économie performante : elle se situe donc au 7e rang mondial en 2019 (E.-U., Chine, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, Inde et France) et au 6e rang en 2020. « Avec 1 % de la population de la planète sur moins de 0,5 % de sa superficie, la France est classée selon les années, au sixième ou septième rang des puissances économiques mondiales par la taille de son produit intérieur brut. » (Jean-Robert Jouanny : La France dans le monde, éditions du CNRS, 2021). Jean-Robert Jouanny souligne que « conformément à son statut, la France siège à la table des grandes puissances économiques (...). »
  •  Elle compte des FTN importantes (40 parmi les 500 premières mondiales) et certaines sont à la fois dynamiques et puissantes comme Total, Sanofi, Veolia, Carrefour, Renault, BSN Gervais Danone... des FTN qui sont de plus en plus internationalisées. C'est un pays qui reste attractif pour les IDE : les investisseurs étrangers n'hésitant pas à investir en France. Elle est et reste une grande puissance agricole notamment à l'exportation avec un secteur agroalimentaire performant. La filière agroalimentaire française est de plus un secteur excédentaire dans les échanges avec l’extérieur. 

 b/ Mais une France qui connaît des difficultés 
 
  • Néanmoins, la France connaît des difficultés qui font d'elle une puissance affaiblie ou en déclassement. Premier type de difficultés : les difficultés économiques. L'industrie française a connu et connaît le phénomène de désindustrialisation : le poids de l'industrie dans le PIB ne cesse de décliner étant désormais autour de 10 % du PIB ce qui est faible (plus de 20 % pour l’Allemagne). Plusieurs secteurs ont été en très grandes difficultés et ont plus que décliné comme les secteurs du textile, de la sidérurgie, de l'informatique... 
  • Une autre difficulté récurrente est un taux de chômage important avec un marché du travail plutôt atone mais on note ces derniers mais une baisse du chômage (il faut savoir si cette baisse est durable ou temporaire). A cela s'ajoutent une balance commerciale souvent déficitaire, des fortes inégalités ( les 20% des ménages les plus riches contrôlent 50% du patrimoine national et 40% du revenu disponible), et une dette publique élevée supérieure à 100 % du PIB en 2020. Dès lors, on peut s’interroger sur la nature de la puissance économique française.. 
  • Rappelons que l’économie française est fortement liée à l’UE (plus de 58 % des exportations françaises en 2019 sont à destination de l’UE (et 56 % de ses importations). Mais à l’échelle mondiale, il est particulièrement compliqué de rivaliser avec les puissances majeures ou au sein de l’UE avec un pays comme l’Allemagne .Sur un plan politique et géopolitique, la France n'a pas ou plus les moyens de ses ambitions et d'imposer ses points de vue. Au sein de l'Union européenne, elle est à la remorque de l'Allemagne et pèse beaucoup moins qu'avant n'exerçant plus un rôle moteur ; elle n'est pas parvenue à imposer sa stratégie en Syrie en 2011-2014 et la politique conduite en Libye s'est avérée être un échec... Son influence géopolitique est de ce fait de plus en plus réduite. Certaines estiment que l’armée n’ a pas assez de moyens pour assurer ses différentes missions ce qui est aussi un vecteur d’affaiblissement.
  •  Enfin, elle est fragilisée par des débats internes sur plusieurs questions jugées fondamentales : l'identité nationale, la volonté ou non de réformer le pays, le sentiment d'une classe politique incapable de résoudre les problèmes...
TGV

B/ Une insertion importante mais compliquée dans la globalisation


a/ L’intégration dans la mondialisation 

  • Jean-Robert Jouanny souligne « la douloureuse entrée de la France dans la mondialisation (1970- 2002) » en mettant notamment en évidence les « difficultés structurelles » françaises face à la mondialisation. La France, mais elle n’était pas la seule dans cette configuration, a fait face à la hausse du coût de l’énergie (chocs pétroliers) et donc une réelle dépendance énergétique, à une concurrence accrue en particulier de pays émergents qui a mis en difficulté les secteurs économiques les moins compétitifs (textile, sidérurgie...). Mais la France est comme la plupart des pays européens confrontée aux effets négatifs d’une économie mondialisée. Néanmoins, les gouvernements ne sont pas restés passifs avec depuis une dizaine d’années des choix qui s’opèrent avec la volonté de faire encore de la France un pays compétitif. Plusieurs orientations guident la politique économique française avec une volonté d’être plus compétitif (voir par exemple le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi en 2012 ou plus récemment en 2019 la loi PACTE : pacte d’action pour la croissance et la transformation des entreprises). 
  • La France entend conduire aussi une véritable diplomatie économique (création d’un dispositif public nommée Team France Export pour accompagner l’essor des firmes sur le plan international) sans oublier l’idée de rendre la France encore plus attractive (Sommets Choose France qui sont organisés depuis 2017 pour encourager les investissements étrangers en France). La France dispose d'atouts pour s'insérer assez efficacement dans la mondialisation : elle bénéficie d'un secteur tertiaire plutôt dynamique avec en particulier les activités touristiques, le système éducatif et la formation sont efficaces avec un niveau de formation tout à fait honorable, les infrastructures de transport et de communication sont de qualité, plusieurs firmes ont su s'adapter...La France est notamment un carrefour de communications important permettant des liens entre Europe du Nord et Europe du Sud. Les réseaux de transport : axes autoroutiers, lignes TGV, aéroports... fonctionnent avec efficience. La France a su développer des plateformes multimodales parfaitement insérées dans les échanges comme l'aéroport Roissy Charles de Gaulle Parmi les vecteurs de l'intégration à la mondialisation, l'insertion dans l'Union européenne et son économie joue un rôle essentiel : la France est bien intégrée à ce qu'on peut nommer l' « euromondialisation ». On peut rappeler que le commerce extérieur français de marchandises a été multiplié par 5 en valeur entre les années 1980 et les années 2010 (les échanges de services par 4 durant la même période). La France est ouverte sur l'Europe et le monde sachant, comme cela a déjà été signalé qu'elle est ouverte aux investissements étrangers (voir plus bas). 
  • Elle est un pays attractif pour les investisseurs internationaux (IDE importants).Il faut certes préciser que près de 60% des exportations françaises sont à destination de l'UE tout comme 58% de ses importations proviennent de cette même UE (ses principaux partenaires sont l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, le Royaume-Uni...). 13% de ses exportations sont à destination de l'Asie et 10% vers les Amériques (16% des importations sont asiatiques et 9% des américaines) : l'expression d' « euromondialisation » est donc bien justifiée. Ce qui peut être inquiétant est le peu d'exportations vers la zone la plus dynamique du monde à savoir la zone Asie-Pacifique. Un autre vecteur clé de cette insertion sont les investissements étrangers : la France est toujours attractive à ce niveau sachant qu'en parallèle la France investit elle-même à l'étranger (4e pays au monde émetteur d' IDE). 
  • Ces investissements étrangers concernent surtout les activités financières et d'assurance à hauteur de 44% des IDE entrants puis les industries manufacturières à hauteur de 20%. Les principaux investisseurs sont des pays européens (Pays-Bas, Allemagne...) et les Etats-Unis. Néanmoins depuis quelques années, de nouveaux investisseurs interviennent en France : investisseurs asiatiques, moyen-orientaux... Il faut savoir que 20 000 entreprises étrangères sont présentes en France (deux millions d'emplois) et représentent environ 40% des exportations du pays. Pour être plus précis, ces IDE concernent surtout les grandes métropoles françaises dont Paris en premier lieu avec une région parisienne qui est la principale bénéficiaire de ces investissements. Autre aspect non négligeable :l'internationalisation des firmes françaises. Cette internationalisation est de plus en plus importante pour les grands groupes français. 
  • Il existe en plus des FTN françaises, des firmes qui se sont constituées à l'échelle européenne comme le groupe EADS (European Aeronautic Defence and Space) dans le domaine de l'aéronautique ou l'Agence spatiale européenne. EADS est né en 2000 de la fusion d'Aérospatiale-Matra et de Daimler-Chrysler Aerospace : ce groupe comprend Airbus, Astrium (aérospatiale), Eurocopter... Plusieurs grandes FTN françaises ont opté pour une logique de plus en plus mondiale colle Renault. Renault s'est, dans cette optique, associé au groupe japonais Nissan et a plusieurs filiales d'importance comme Dacia. Renault-Nissan contrôle aussi 80% de la branche automobile du groupe coréen Samsung. Enfin, les FTN françaises sont performantes comme le montre le classement Fortune global 2019 avec 12FTN françaises dans le top 200 ce qui n’est si mal. L'insertion dans la mondialisation se fait également par les flux humains. La France n'est certes plus le pôle migratoire majeur de l'Union européenne : les pôles récepteurs principaux sont l'Allemagne et le Royaume-Uni mais elle accueille toujours des migrants. Elle est surtout un pôle touristique majeur à l'échelle mondiale : les flux touristiques sont considérables avec plus de 80 millions de touristes en 2015. ces flux génèrent des retombées économiques importantes évaluées à environ 8% du PIB. La France est « au défi de la nouvelle mondialisation » (Jean-Robert Jouanny). En particulier, elle doit tenter de préserver un modèle social tout en étant compétitive dans le processus de mondialisation. 
  • On peut rappeler que ce modèle repose sur une forte présence de l’État : en 2019, les dépenses publiques représente 54 % du PIB (le niveau le plus important de tous les pays membres de l’OCDE). Le modèle social repose notamment sur une protection sociale très importante avec des dépenses de santé élevées. Comme l’écrit Jean-Robert Jouanny, « la France a donc délibérément opté pour un modèle de société protecteur. » Cela se traduit par le niveau également élevé des prélèvements dits obligatoires (impôts...) : 45 % du PIB en 2018 et une prévision de 44 % pour 2020 (avant les effets de la crise sanitaire). Cette politique protectrice est intéressante pour les Français mais peut poser des problèmes de compétitivité économique face à certains pays concurrents. Si la France veut rester performante il faut également qu’elle se positionne davantage sur ce qu’on nomme « les gisements de croissance » notamment la transition numérique, l’intelligence artificielle... 
  • Enfin, il est intéressant en particulier dans le contexte de la crise sanitaire de repenser la souveraineté économique de la France. Anaïs Voy-Gillis dans un article de la revue Diplomatie (Géopolitique de la France 2021) met en avant l’idée de « renouer avec la souveraineté industrielle » et donc de mettre fin (au moins en partie) au cycle de désindustrialisation. Avec la crise sanitaire, « l’industrie est redevenue un sujet central dans le débat public. » Il s’agit désormais d’éviter « les ruptures dans les chaînes d’approvisionnement sur certains biens essentiels comme le cas s’est présenté au coeur de la pandémie (la Chine représente par exemple plus de 60 % des exportations d’antibiotiques ou de paracétamol). » (Jean-Robert Jouanny). Une autre dimension clé est la souveraineté numérique, une souveraineté qui peut d’ailleurs être pensée à l’échelle européenne. Comme le souligne Charles Thibout (revue Diplomatie), « la perte de souveraineté de la France dans le numérique est quasi-totale. » 

b/ Les effets sur les territoires

  •  La mondialisation a des effets sur les territoires. Pour reprendre une expression, la mondialisation « sélectionne les territoires » : autrement dit, la mondialisation va avoir des effets différents selon les territoires. Le processus de mondialisation a profondément impacté le système productif français et induit des recompositions territoriales importantes notamment concernant les territoires industriels. La concurrence internationale accrue a mené au déclin de certains territoires comme ceux liés aux industries lourdes ou textile (Lorraine, Nord-Pas-de-Calais...). Plusieurs territoires ont subi des mutations se tournant plus ou moins avec efficacité vers une économie plus tertiaire ou reposant sur des activités de conception et non plus de production. Les territoires productifs sont dans une dynamique à la fois de tertiairisation et de désindustrialisation. Bien entendu, la mondialisation participe à cette dynamique. De nombreuses activités productives sont délocalisées vers des zones géographiques où le coût de la main d' œuvre est faible ce qui a conduit au développement sur le territoire français d'activités à haute valeur ajoutée pour lesquelles il n'est pas encore intéressant de procéder à des délocalisations. Ainsi, dans des secteurs à haute valeur ajoutée comme l'aéronautique, l'aérospatiale, l'industrie nucléaire... la France a gardé ses entreprises. De façon générale, on constate un déclin des territoires liés à la « première industrialisation », celle du 19e siècle donc des territoires qu'on appelait avant les « pays noirs » : Nord, Lorraine... Inversement, des territoires ont bénéficié, à différentes échelles, de la recomposition industrielle comme les technopoles et les métropoles, certaines régions comme les régions Parisienne, Rhône-Alpes, des zones comme Toulouse, Montpellier, une partie de l'Ouest du territoire... 
  • En France, comme dans les autres états développés ou émergents, la mondialisation a renforcé le poids des métropoles et le phénomène de métropolisation. Les métropoles françaises concentrent les différentes fonctions de commandement, de recherche.... Une métropole a particulièrement bénéficié de cet état de fait, c'est Paris et sa région avec plus de 90% des transactions financières réalisées en France, 382 des 500 plus grandes firmes françaises ont leurs sièges sociaux en région parisienne, 55% de la recherche industrielle se fait dans cette région.... Autre type d'espaces profitant de la mondialisation sont les axes de transport et les interfaces. La France est, rappelons-le, un carrefour de communications au sein de l'Europe et les flux d'échanges se réalisent par certains axes qui dynamisent certains territoires. Un axe majeur est l'axe Lille-Paris-Lyon-Marseille, un axe à la fois routier, autoroutier et ligne à grande vitesse (LGV). Cet axe permet la connexion à l'Europe du Nord et au Royaume-Uni mais aussi à l'Europe du Sud (Italie, Espagne). 
  • On peut faire remarquer que les réseaux de transports les plus performantes comme les LGV ou les autoroutes ont accentué la métropolisation puisqu'ils desservent essentiellement des métropoles. Les littoraux bénéficient également de la mondialisation. Dès les années 1970, certaines activités se sont implantées sur les littoraux comme la Sidérurgie, la pétrochimie sur des lieux comme Fos-sur-Mer et l'étang de Berre, Saint- Nazaire... 
  • Les ports français ont un rôle à jour comme Le Havre ou Marseille même si ils ont pris avec un peu de retard le tournant de la conteneurisation. 7 ports concentrent plus de 80% du trafic : Le Havre, Marseille, Rouen, Nantes-Saint-Nazaire, la Rochelle, Bordeaux, Dunkerque. Les espaces frontaliers en tant qu'interfaces profitent aussi de la mondialisation. Certaines régions transfrontalières bénéficient de la mise en place de coopération transfrontalière et ce à différentes échelles : agglomérations transfrontalières comme Strasbourg-Kehl ou l'eurométropole franco- belge Lille-Courtrai-Tournai... ; eurorégions comme la région Sarlorlux réunissant la Sarre (Allemagne), la Lorraine (France) et le Luxembourg. Ces eurorégions s'inscrivent dans un programme européenn : le programme interreg (depuis 1984). Les régions frontalières ont des atouts, du moins certaines : elles sont pour quelques unes au cœur de la dorsale européenne, sont des lieux d'échanges... Enfin, profitent aussi de la mondialisation, les territoires de l'innovation que sont les systèmes productifs locaux (SPL), les technopôles et les pôles de compétitivité. Les SPL réunissent des industries et des entreprises de dimension réduite (PME) qui sont spécialisés dans un secteur d'activité comme Oyonnax et la plasturgie, la vallée de l' Arve et le décolletage, les télécommunications autour de Lannion en Bretagne, le district industriel de Cholet en Vendée... Les technopôles (parcs technologiques) sont des zones d'activités réunissant des entreprises liées aux hautes technologies : elles se localisent généralement à proximité des métropoles ce qui renforce la métropolisation. Enfin, les pôles de compétitivité ont été lancés à partir des années 2004-2005 et ont pour objectifs de rassembler des entreprises, des laboratoires de recherche... dans des secteurs jugés innovants. On compte environ 71 pôles de compétitivité dont 17 sont à vocation mondiale : un problème, néanmoins, la plupart d'entre eux se localisent dans les régions économiquement déjà les plus dynamiques : région parisienne (25% des pôles de compétitivité), Rhône-Alpes (15%)... 
  • Parmi les pôles à vocation mondiale, on trouve Cap Digital Paris Région, Medicen Paris Région, Alsace Biovalley, Minalogic à Grenoble, Aerospace Valley à Toulouse, Images et réseaux à Lannion... En résumé, on peut distinguer des territoires gagnants et des territoires perdants par rapport à cette mondialisation. Les territoires gagnants sont généralement les métropoles, les territoires frontaliers, les façades maritimes, les technopôles, certains territoires ruraux (territoires viticoles, céréaliers...) alors que les territoires perdants sont les territoires anciennement industrialisés, certaines zones rurales et agricoles (les plus enclavées)... Au niveau du territoire national, les territoires qui tirent profit de la mondialisation sont la région parisienne, Rhône-Alpes, l'Alsace mais aussi ce que les géographes nomment les « midis français » (la « revanche du Sud » pour reprendre une expression) à savoir les arcs Atlantique et méditerranéen. Sont concernés des pôles comme Toulouse (Airbus), Bayonne-Anglet où est implanté Dassault, Montpellier, Nantes, Rennes... Les territoires plutôt perdants sont les anciennes régions industrielles comme le Nord, la Lorraine ou des « isolats » comme Saint-Etienne, Le Creusot, Montluçon... et les régions peu peuplés et éloignées des grandes métropoles comme les Pyrénées, les Ardennes, les Alpes du Sud ou la Corse.

C/ Géopolitique et politique extérieure de la France


a/ Les cadres de la politique extérieure de la France 

-Des héritages et des déterminants 

  • L’une des constantes de la politique extérieure française sous la 5e République est cette volonté de demeurer présente et influente sur la scène internationale. Cette présence et cette influence sont bien sûr liées à son histoire et à la façon dont cette histoire est pensée. Louis XIV, Napoléon 1 er ont ainsi symbolisé le temps d’une France dominante et puissance majeure s’inscrivant d’ailleurs dans l’imaginaire collectif. Cet imaginaire a été renforcé au 19e siècle avec la formation d’un immense empire colonial. Même après la Seconde guerre mondiale, la France est restée une puissance notable capable d’interventions extérieures : elle est et reste une « puissance interventionniste. » (Frédéric Charillon : La France dans le monde, 2021). La France a fait depuis 1945 des choix qui demeurent et sont considérés à ce titre comme des héritages :choix de l’alliance atlantique, choix de la construction européenne (dès la 4e République), choix de la dissuasion nucléaire. Il y a en France des continuités dans la politique extérieure depuis la 4e République et le général de Gaulle. 
  • Ce dernier a marqué un temps particulier avec la volonté d’un retour à la grandeur de la France. Cette dernière est restée une alliée des Etats-Unis (même si de Gaulle avait pris durant ses mandats quelques distances avec les Américains) mais pour réutiliser une formule d’Hubert Védrine « amis, alliés, pas alignés » signifiant que la France ne calque pas de façon systématique sa politique sur celle des E.-U. Ce qui s’est maintenu depuis de Gaulle est l’interventionnisme récurrent en Afrique, une proximité avec le monde arabe... Avec Emmanuel Macron, il y a toujours la volonté de faire de la France une puissance influente avec un programme international classique (une puissance « indépendante, européenne, humaniste », une ligne claire (libérale, multilatérale, européenne. » (Frédéric Charillon). La France est (voir ultérieurement) confrontée à d’importants défis comme d’ailleurs d’autres pays européens : défi du Brexit, positionnement par rapport à la Russie,défi d’un ordre mondial bousculé,défi de la montée en puissance de la Chine, défi de la souveraineté...
  • Pour Thomas Gomart (article de la revue Diplomatie 2018), la France est confrontée à deux défis principaux : « le premier, c’est la crédibilité économique de la France. Il n’y a pas de politique étrangère durable sans solidité économique du pays (...). Le deuxième défi (...), c’est l’équilibre franco- allemand (...) de cet équilibre dépend tout simplement l’aptitude de l’Union européenne à faire face à différentes crises (...). »

 -des outils : défense et armée 

  •  Olivier Schmitt (La France dans le monde, éditions CNRS, 2021) souligne au sujet de la France que « l’outil militaire a souvent été mobilisé au profit des stratégies d’adaptation mises en place pour compenser le déclin relatif de l’importance géopolitique de la France. » Vincent Desportes (article revue Diplomatie mai 2018) qualifie la puissance militaire française comme étant « demi- teinte ». Il souligne toutefois qu’elle est « sans conteste aujourd’hui l’armée la plus opérationnelle d’Europe. »
  •  C’est aussi une armée en capacité d’autonomie notamment pour mener des opérations militaires mais qui manque de moyens financiers. L’un des aspects de la puissance militaire française est le déploiement de forces hors métropoles avec des bases militaires hors de France. Ces forces sont déployées selon une logique géographique de théâtre d’opérations : Caraïbes, Afrique, océan Indien, Pacifique. On peut différencier les forces de souveraineté présentes dans les territoires ultramarins (Guyane, Antilles, La Réunion, Mayotte... et les forces de présence (Sénégal, Côte d’Ivoire, Djibouti, EAU...). 
  • La France compte aussi des points d’appui permanent ou temporaire comme au Mali, au Tchad... Elle participe à des opérations extérieures (OPEX) : des opérations sous mandat français comme au Sahel avec l’opération Barkhane, sous mandat des Nations unies comme avec la MINUSMA au Mali ou la FINUL au Liban... 

 b/ Les défis et enjeux 

  • Nous mettrons l’accent sur certains défis et enjeux en lien avec des zones géographiques jugées clés : Europe, Etats-Unis, Asie et Chine mais aussi Afrique, Moyen-Orient. -La France et l’Europe Il est incontestable que l’Europe et l’Union européenne en particulier se trouvent confrontées à d’importants défis : crise migratoire, menaces terroristes, rapports difficiles avec la Russie, liens distendus avec les E.-U (en particulier sous la présidence Trump)... 
  • La France et l’Allemagne ont longtemps joué un rôle moteur mais entre Paris et Berlin le « moteur stratégique de l’Europe est en panne » (Barbara Kunz : La France dans le monde, 2021). Parallèlement, il faut mettre en exergue qu’Emmanuel Macron « a fait de la question européenne un marqueur politique de son action. » (Edouard Simon : revue Diplomatie, 2021). Le président français a pour ambition de refonder l’Union européenne avec un projet français pour l’Europe fondé sur l’idée d’une souveraineté européenne et de l’affirmation d’une Europe-puissance. Dans ce cadre, la relation avec l’Allemagne est toujours fondamentale. 
  • Macron souhaite également une véritable autonomie stratégique de l’UE (en particulier par rapport aux E.-U.) et dans cette optique il se heurte à certains pays comme la Pologne, la République tchèque, l’Estonie... pays pour lesquels l’important est l’OTAN. Il n’y a donc pas d’unanimité sur le projet français. De plus comme le souligne Barbara Kunz, entre la France et l’Allemagne , il n’y a pas une « vision commune sur l’avenir de l’Europe de la défense. La France a comme priorité stratégique notamment l’espace méditerranéen ce qui est moins vrai pour l’Allemagne. Il faut ajouter que la France n’hésite pas à se projeter militairement sur des théâtres d’opération ce que ne fait pas l’Allemagne, une Allemagne qui reste encore très centrée sur l’OTAN, une OTAN que le président français Emmanuel Macron a qualifié comme étant en « mort cérébrale. » (déclaration en mai 2019) 
  • De façon plus générale au sein de l’UE, certains pays accordent toujours une importance fondamentale à l’OTAN et donc aux Etats-Unis (Pologne, pays baltes...) et ne recherchent pas ce qu’on nomme l’autonomie stratégique européenne ce qui est le souhait de la France. Cette dernière ne parvient pas à attirer derrière un éventuel leadership la plupart des pays de l’UE et à mettre en œuvre à l’échelle européenne une réelle souveraineté européenne. 

 -La France et la Russie : des relations ambiguës


  •  Comme le signale Jean de Gliniasty (article revue Diplomatie : Géopolitique de la France 2021), « les sujets de mésentente étaient nombreux » entre la France et la Russie mais Emmanuel Macron a voulu renouer un dialogue stratégique avec la Russie de Poutine. Les relations s’étaient tendues avec la Russie dans les années 2014-2015 avec l’annexion de la Crimée par la Russie sans oublier le fait que la Russie apporte un soutien au régime de Bachar al-Assad en Syrie...Le rapprochement souhaité par Macron en 2017-2018 n’ a pas réellement abouti et a mécontenté une partie des partenaires européens (pays de l’Est notamment).
  •  Les relations se sont même détériorées lors de empoisonnement d’Alexei Navalny, l’un des opposants à Poutine. Parallèlement, plusieurs problèmes restent en suspens comme la crise ukrainienne. Le 9 décembre 2019 la réunion dite du « format Normandie » entre Angela Merkel, Emmanuel Macron, Poutine et Zelensky le chef d’état ukrainien n’a donné aucun résultat sur ce sujet. La Russie ne semble pas prête à faire des concessions sur la région conflictuelle du Donbass en Ukraine. Comme le suggère Jean de Gliniasty « de nouveaux contentieux potentiels » entre la France et la Russie pourraient émerger avec la présence russe qui s’accroît en Afrique notamment.

 -Les relations France-Etats-Unis 

  •  Ces relations se sont tendues lors de la présidence Trump mais ce n’est pas une spécificité française. La politique de Trump ne pouvait que susciter au minimum une méfiance non seulement de la France mais aussi plus généralement des Européens. Néanmoins, sur un certain nombre de sujets, la coopération franco-américaine s’est poursuivi y compris pendant la présidence Trump comme au niveau militaire en particulier le soutien des Américains dans le cadre de l’intervention française au Sahel. Ce qui a heurté les dirigeants français pendant la période Trump est non seulement le retrait des accords de Paris de 2015 (COP 21) mais également le retrait des troupes américaines du Nord de la Syrie sans aucune concertation avec les alliés à la fois français et kurdes. 
  • Se sont ajoutées les problèmes commerciaux liés au protectionnisme de Trump avec des produits français davantage taxés. L’élection de Joe Biden devrait changer la donne non seulement pour la France mais aussi pour les Européens. Il faut toutefois souligner que la principale préoccupation des E.-U devrait être sa rivalité avec la Chine et de façon générale, les E.-U ont compris depuis longtemps que le monde avait basculé de l’Atlantique vers l’aire Pacifique. 

-La France et l’Afrique : « le désamour » ? (Pierre Jacquemot : revue Diplomatie, géopolitique de la France janvier 2021)

  • Même si Emmanuel Macron avait affirmé en novembre 2017 : « il n’y a pas de politique africaine de la France », on sait très bien qu’il y a une telle politique qui remonte d’ailleurs aux indépendances africaines. Pernille Rieker (La France dans le monde, 2021) rappelle à juste titre que « l’engagement en Afrique est toujours au coeur de la politique étrangère française. » Depuis les années 1960, les relations entre la France et les pays africains étaient jugées primordiales avec des anciennes colonies perçues comme notre « pré carré » mais aussi comme apport de ressources et pouvant dynamiser l’économie française. Actuellement et les temps ont changé, l’Afrique ne représente plus que 3 % des exportations françaises. Des firmes françaises sont toujours bien présentes en Afrique comme Areva, Total, le groupe Bolloré... mais elles sont désormais concurrencées par des firmes chinoises, indiennes... Pourtant, l’Afrique reste au coeur des préoccupations géopolitiques françaises. « Les pays africains sont considérés comme une précieuse réserve de votes de soutien à l’ONU, et donc comme des alliées clés dans les négociations internationales » comme le souligne Pernille Rieker.
  •  Mais ces dernières années, l’Afrique est devenue un enjeu de sécurité nationale avec l’essor du djihadisme en particulier dans la zone sahélienne. Toutefois, les relations entre la France et l’Afrique ne sont pas simples que cela. Il existe des liens forts avec certains Etats et certains dirigeants africains à telle enseigne que l’expression de « françafrique » est toujours utilisées (un concept inventé en 1955 par le leader ivoirien Houphouët-Boigny). On peut dans cette optique rappeler que de nombreux africains parlent français et plusieurs états africains sont des piliers de la francophonie sans oublier que plus de 240 000 français sont présents sur le continent africain. 
  • Il faut mettre l’accent sur le fait que les relations sont fortes avec l’Afrique subsaharienne et plus inconstante avec l’Afrique du Nord en particulier avec l’Algérie. François Hollande puis Emmanuel Macron voulaient faire évoluer les relations avec l’Afrique (François Hollande avait déclaré en 2012 que le temps de la Françafrique était révolu). En décembre 2019, E.Macron a lui affirmé qu’il était nécessaire de tourner la page du franc CFA (colonies françaises d’Afrique est le sens de CFA), cette monnaie utilisée dans 8 pays africains et gérée par la Banque de France. La zone franc est vue comme une « perpétuation néocoloniale. » (Pierre Jacquemot). En mai 2020, était annoncé un changement de nom de la monnaie en question devant s’appeler désormais ECO. La nouvelle monnaie sera gérée par la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest qui disposera librement de ses réserves financières (sans le contrôle de la Banque de France comme auparavant). 
  • Ce qui est certain c’est que l’engagement militaire de la France au Sahel perdure avec 3 500 militaires français déployés au Sahel dans le cadre de l’opération Barkhane. Dans un article de la revue Diplomatie, Pierre Jacquemot évoque un éventuel « désamour » entre l’Afrique et la France. C’est notamment le cas au Mali où une partie de la population demande le départ des forces françaises du pays alors que l’armée française avait été accueilli en libératrice en 2013 dans le cadre de l’opération Serval. Pour certains africains, les pays africains doivent exercer pleinement leur souveraineté sans l’aide de la France. Les réseaux sociaux amplifient incontestablement ce « désamour » avec, en plus, le développement de fake news ciblant la France et sa politique. Pour certains, l’objectif de la France est surtout de s’accaparer des richesses. 

 -La France et l’Asie

  • Pierre Grosser dans un article de l’ouvrage La France dans le monde (éditions du CNRS, 2021) évoque « le retour de la « carte de visite » asiatique sous un autre nom : l’Indo-Pacifique. » Avant de revenir sur ce thème, on peut rappeler que la France est présente en Asie depuis longtemps et s’appuyait même au 19e siècle sur des colonies à savoir les colonies indochinoises. 
  • La perte de l’Indochine a scellé la « disparition territoriale de la France en Asie mais la France a toujours voulu rester présente dans cette partie du monde. La France a signé plusieurs partenariats stratégiques avec des Etats asiatiques : en 1995 avec le Japon, en 1997 avec la Chine avec même en 2004 un partenariat stratégique global sans oublier en 1998 un partenariat avec l’Union indienne.En ce qui concerne la Chine, la France a compris l’importance économique du pôle chinois mais la politique française ne se résume pas à ses relations avec la Chine.
  •  En 2011, un partenariat stratégique a été signé également avec l’Indonésie puis en 2012 avec Singapour, en 2013 avec le Vietnam. Les dirigeants français ont également pleinement conscience de la « nouvelle bipolarité » (Pierre Grosser) entre la Chine et les Etats-Unis. D’où notamment le rapprochement déjà évoqué avec le Japon mais aussi avec l’Union indienne avec une collaboration renforcée entre ces deux pays depuis 2018 (La France a accordé à l’Inde un accès aux bases françaises de la Réunion, de Djibouti et d’Abu Dhabi). On note également un rapprochement avec l’Australie avec un partenariat stratégique renforcé. La France s’inscrit peu à peu dans la stratégie imaginée par le Japon et à laquelle l’Union indienne, l’Australie ont adhéré à savoir l’Indo-Pacifique.
  •  Pour la France cette stratégie s’inscrit dans une logique car la France est présente dans l’océan Indien et dans le Pacifique (territoires ultramarins). Barthélémy Courmont (article revue Diplomatie 2021) souligne à juste titre que « la France est aujourd’hui le seul pays européen disposant d’une présence militaire conséquente dans l’espace Indopacifique.» Elle se sent à cet égard concernée par la montée des tensions dans cette partie du monde et en particulier par la sécurité maritime.
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