Chapitre 2: Les enjeux du développement

1/ L'Afrique et les problèmes du développement


L'Afrique est un continent incontestablement en difficultés connaissant des problèmes économiques et sociaux importants même si ils doivent être nuancés selon les états. Le problème majeur du continent est donc celui du développement et corrélativement de son insertion dans la mondialisation. Il faut aussi mettre en évidence la thématique de l’émergence, une émergence contestée pour l’Afrique avec une émergence qui serait fictive et même une “fable” (François Giovalucchi). 

A/ La démographie : « atouts et fardeau » (P. Hugon et J-C Servant : Géopolitique de l’Afrique) 

Quels sont les enjeux liés à la démographie? En quoi la démographie est un frein au développement ? Peut-elle être un vecteur de développement ? En 2020, la population africaine s'élève à plus d'un milliard trois cent mille individus dont 250 millions en Afrique du Nord. Certains états sont particulièrement peuplés comme le Nigeria avec plus de 209 millions d'habitants en 2020 (le pays le plus peuplé du continent), l' Ethiopie avec 115 millions d'individus, l'Egypte a plus 104 millions,la RDC plus de 90 millions d'habitants. 
Le Nigeria devrait devenir en 2050 le 3e pays le plus peuplé de la planète derrière la Chine et l’Union indienne. Il faut néanmoins souligner que certains recensements ne sont guère fiables ou trop anciens mais incontestablement les états africains connaissent une augmentation forte de leurs populations. On peut parler d’explosion démographique et même de bombe démographique (idée d’une bombe à retardement). La part de l’Afrique dans la population mondiale ne cesse de croître passant de 9 % en 1950 à 17 % en 2020 devrait être en 2050 de 26 % et de 39 % en 2100. L'Afrique n'est pas surpeuplée bien au contraire avec une densité moyenne de 42 habitants par km carré (2019) mais elle est inégalement peuplée avec des densités très différentes selon les états et les zones géographiques. 
Il faut préciser qu'il existe sur ce continent des espaces pleins et des espaces vides et donc des contrastes de peuplement notables. Il faut d'ailleurs rappeler que ce continent a longtemps été peu peuplé et est encore un continent où la densité globale est moyenne: sa densité de 42 habitants au km carré est nettement inférieure à celle de l'Asie avec 140 habitants par km carré et relativement comparable à l'Amérique du Sud et l'Europe avec pour ces deux ensembles une densité de 33 habitants au km carré. L'occupation de l'Afrique est depuis très longtemps caractérisée par cette opposition entre espaces plutôt pleins et espaces vides. 
Trois foyers de peuplement importants sont repérables : ce qu'on nomme les hautes terres que ce soit les montagnes berbères en Afrique du Nord, la région des grands lacs, l'Ethiopie... avec des populations nombreuses et ce depuis longtemps ce qui s'explique par l'absence du paludisme tout en étant en plus des zones refuges ; certaines vallées comme la vallée du Niger, du Nil qui sont très anciennement occupées et enfin des régions dans lesquelles se sont concentrées des pôles urbains et commerciaux comme les littoraux du Maghreb, le golfe de Guinée... 
Inversement, les zones arides sont généralement peu peuplées: Sahara, Namib... mais aussi certaines régions de forêts avec des milieux difficiles (insalubrité). On peut actuellement différencier plusieurs ensembles: l'Afrique occidentale (entre le Sahel et le Golfe de Guinée) réunit plus de 330 millions d'habitants dont une partie notable pour le seul Nigeria (voir plus haut); un autre ensemble est celui de l'Afrique australe y compris Ethiopie et Erythrée qui rassemble également environ 330 millions d'individus.Entre le Soudan et le bassin du Congo, il existe une zone où la démographie est moins prégnante avec des espaces relativement vides en Afrique centrale. Quelques rares espaces perdent des habitants comme au Nord du sahel, zones de forêts de la république centrafricaine, montagnes de Kabylie. 

a/ Une démographie toujours dynamique bouleversant les équilibres démographiques mondiaux 

-Une explosion démographique : des évolutions démographiques fortes 

  • Le continent africain a connu une formidable explosion démographique passant de 100 millions d'habitants au début du 20e siècle à 640 millions en 1990 et à plus d'un milliard en 2014 et donc 1,3 milliard en 2020 (17% de la population mondiale) . En 2050, selon les prévisions, la population africaine devrait atteindre près de 2,4 milliards d’habitants. Ce continent est le dernier à s'être engagé dans la transition démographique d’où la croissance démographique importante. En 2050, les pays les plus peuplés du continent seront le Nigeria avec entre 440 et 450 millions d’habitants soit 18 % de la population africaine, l’Ethiopie avec 188 millions soit 8 % de la population africaine et la RDC avec 155 millions d’habitants soit 6 % de la population africaine. 
  • La Tanzanie, l’Egypte et l’Ouganda dépasseront également les 100 millions d’habitants. Comme l’écrivent Philippe Hugon et Jean-Christophe Servant (Géopolitique de l’Afrique, 2020), « l’Afrique connaît les plus grands bouleversements démographiques de la planète : sa population a décuplé en un siècle. » En 1900, la population du continent avait peu progressé du fait des conséquences des traites esclavagistes mais aussi de la colonisation. En 1950, l' Afrique représentait 7% de la population mondiale. Jusqu'au milieu du 20e siècle, la croissance démographique était plutôt faible avec un taux de mortalité important même si la natalité était élevée.Il faut préciser qu'en Afrique du Nord et australe, on constate une baisse de la mortalité avant la Seconde guerre mondiale. La population a été multipliée par quatre entre 1950 et 2005 et devrait se situer entre 1,4 et 1,5 milliard en 2030 avec des projections qui tablent surplus de deux milliards en 2050 (26 % de la population mondiale). Le Nigeria devrait avoir plus de 400 millions d'habitants en 2050 ce qui ferait de lui le 3e état le plus peuplé de la planète. Le taux de croissance maximum est atteint au début des années 1980 avec près de 3% de croissance par an. Puis, à partir de là, il va diminuer pour être de 2,6% en 2015. Ces projections sont certes aléatoires mais elles mettent en évidence cette forte croissance démographique. De plus les situations sont diverses avec notamment des taux de fécondité variables selon les états d’Afrique subsaharienne (chiffres 2019): 4,8 pour l'Angola, 5,4 pour le Burundi ou encore 6,9 pour le Niger qui est l’état africain où le taux de fécondité est le plus élevé....
  • Des Etats ont un taux de fécondité relativement bas comme l’Afrique du Sud avec 2,4, le Botswana avec 2,9, Maurice avec 1,4 (le taux le plus bas en Afrique), des taux révélateurs d’un niveau de développement plus important. Les chiffres publiés par le World population prospects (the 2008 revision) sont instructifs: entre 1960-65, la fécondité était en moyenne pour l'Afrique subsaharienne de 6,69 (4,91 pour le monde), de 5,08 entre 2005-2010 (2,56 pour le monde) et devrait être de l'ordre de 3,40 entre 2025 et 2030 (2,21 pour le monde). Un exemple est intéressant: il y a plus de naissances chaque année au Nigeria avec 6 millions de naissances que dans l'Union européenne (environ 5 millions de naissances pour l'UE à 27 sans la Croatie). 
  • Le taux de fécondité du Nigeria est de 5,4 en 2019 : pour ce pays le journal Le Monde évoquait en 2018 une « bombe à retardement démographique » Il faut préciser que les disparités sont notables au Nigeria entre les grandes villes et les zones rurales : dans ces dernières, il arrive que le taux de fécondité atteigne 8. Il faut insister sur le fait que les transitions démographiques sont inégales: elles sont achevées ou presque en Afrique du Nord et australe avec des indices de fécondité inférieur à 3 et des taux de croissance assez modérés de l'ordre de 1,5 à 2% par an. Par contre, ce n'est pas la même situation dans le reste de l'Afrique. La démographie africaine se caractérise donc par une certaine dichotomie entre natalité et mortalité: la baisse notable de la mortalité ne s'est pas toujours accompagnée d'une baisse aussi importante de la natalité d'où d'ailleurs la forte croissance démographique. La mortalité baisse donc généralement plus vite que la natalité expliquant de ce fait le fort accroissement démographique. La transition démographique est en cours et même si elle est dans sa seconde phase, elle n'est pas encore terminée. On peut s’appuyer sur les statistiques de l’INED pour 2019 (Institut national des études démographiques): le taux de natalité le plus bas est pour les états d’Afrique australe avec 20,9 naissances pour mille habitants alors qu’il est de 39,2 pour l’Afrique centrale. Maurice et les Seychelles sont les deux seuls états à être rentrés dans un régime démographique dit moderne avec des taux de mortalité et de natalité autour de 10 pour mille. La transition démographique est bien un défi pour les Etats africains avec une évolution démographique qui sera liée aux comportements des individus mais aussi aux politiques démographiques conduites par les Etats. 
  • Au sujet de la baisse de la mortalité, il faut préciser qu'elle ne débute qu'après la 2e guerre mondiale avec une relative amélioration des conditions de vie. Le taux de mortalité pour mille habitants est de 9,4 pour l’Afrique australe (chiffres INED 2019), de 5,7 pour l’Afrique du Nord... On retrouve des écarts notables au niveau de l’espérance de vie: 63,8 ans en Afrique australe, 57,9 en Afrique occidentale ou encore 72,6 ans en Afrique du Nord. Les écarts entre les différents états peuvent être importants notamment au niveau de l’espérance de vie (chiffres population Data pour 2019): elle est de 77 ans en Algérie, de 74 ans au Maroc, de 65 ans en Ethiopie, de 64 ans en Afrique du Sud et de seulement 60 ans au Niger, de 52 ans au Tchad ou de 50 ans en République centrafricaine. La baisse de la mortalité s'est accélérée depuis mais on note toujours une mortalité infantile importante en lien avec des problèmes liés à l'hygiène, au problème posé par une eau loin d'être toujours potable... 
  • A cela s'ajoute des systèmes de santé pas assez performants. Dans environ la moitié des états d'Afrique, on compte moins d'un médecin pour 20 000 habitants avec, en plus, de forts écarts entre monde urbain et monde rural. Le taux de variation annuelle de la population en pourcentage entre 2020 et 2025 donne une idée des situations africaines : il est compris entre 1 et 2 % en Afrique australe (Afrique du Sud, Botswana, Namibie) et en Afrique du Nord mais entre 2 et 3 % dans la majorité des Etats africains et même à plus de 3 % au Mali ou en RDC. Plusieurs facteurs sont à prendre en compte pour expliquer la croissance démographique. La fécondité reste élevée proche en moyenne de 5,5 (la moyenne mondiale est de 2,5) avec des taux atteignant 7 enfants par femme comme au Niger avec un contrôle des naissances généralement peu assuré. L'Afrique subsaharienne est une région de hautes fécondités. Les pratiques dites natalistes sont encore très fortes dans des populations encore rurales. De plus l'âge du premier enfant est précoce en lien avec une nuptialité elle même précoce. La régulation des naissances est loin d'être opérante: le poids du religieux, le rôle des hommes dans des sociétés qu'ils dominent, des moyens de contraception insuffisamment développés et de nombreuses femmes non alphabétisées expliquent cette fécondité sans oublier le poids des traditions culturelles notamment des religions. Dans de nombreuses sociétés africaines, la descendance est une source de prestige avec dans nombre de cas la pratique toujours avérée de la polygamie. Les enfants sont aussi à la fois une assurance retraite et une main d' oeuvre disponible. Il faut ajouter que le recours à la contraception est loin d'être généralisé. La baisse de la fécondité est souvent lié à un niveau d'instruction plus important et à une condition féminine améliorée. C'est pourquoi la fécondité est plus faible en milieu urbain qu'en milieu rural. De plus la mortalité bien qu'encore importante, est en baisse: les taux de mortalité sont souvent inférieurs à11 pour mille (moyenne de 13 pour mille en 2013), les espérances de vie certes toujours faibles: en Afrique subsaharienne, elle est en moyenne de 53 ans (contre 36 ans au début des années 1950) mais atteint pour plusieurs pays 58 à plus de 60 ans (Malawi, Gabon, Bénin, Kenya, Cameroun...). 
  • En fait, l'Afrique est dans une phase de transition démographique tardive avec donc un accroissement démographique conséquent.certains pays connaissent une baisse de la mortalité et un maintien d'une natalité élevée en particulier les pays du Sahel. On peut différencier quatre régimes démographiques: une régime marqué par une diminution de la mortalité avec un maintien de la fécondité concernant les pays du Sahel; un régime marqué par la transition démographique avec une baisse de la mortalité et de la fécondité: pays d'Afrique australe;un régime où la fécondité est élevée avec une hausse de la mortalité soit les pays de la corne de l'Afrique et enfin, un régime avec stagnation démographique où on note une baisse de la fécondité et une hausse de la mortalité avec certains pays d'Afrique australe (Lesotho...) notamment. On peut aussi distinguer des ensembles géographiques et quelques tendances. En Afrique du Nord, la transition démographique est en voie d'achèvement: les taux de fécondité sont en forte baisse avec en plus une mortalité faible (6 pour mille en moyenne). L' Afrique australe connaît aussi une baisse notable de la natalité mais la mortalité demeure importante (moyenne de 14 pour mille). On relève également un début de baisse de la fécondité dans les villes: la baisse de la fécondité urbaine devrait s'accélérer. De façon plus précise, en Afrique australe le taux de fécondité est de l'ordre de 2,43 (en 2013), de 5,54 en Afrique centrale, de 5,55 en Afrique occidentale et de 4,80 en Afrique orientale. Les disparités régionales en matière démographique sont réelles même si on relève un mouvement général de baisse de la fécondité. La démographie pose aux états d'Afrique subsaharienne un certain nombre de problèmes et de défis. L'un de ces défis est une mortalité infantile élevée liée à des infrastructures sanitaires insuffisantes, à des problèmes de nutrition (mal nutrition et sous nutrition)... Plusieurs états ont des taux de mortalité infantile autour de 100 pour mille (Somalie, RDC, République centrafricaine...). La fécondité importante ne peut que poser des problèmes comme dans les pays les plus pauvres comme le Mali ou le Niger où les populations devraient tripler d’ici 2050. Ce type de pays subit une démographie dynamique tout en étant confronté au réchauffement climatique, à l’insécurité voire à des conflits. 
  • Dans ces pays, on peut considérer que « l’explosion démographique n’est pas compatible avec un développement durable et inclusif » (P.Hugon et J-C Servant). - pour des populations exceptionnellement jeunes pouvant peut-être favoriser un dividende démographique La fécondité importante explique le fait de populations particulièrement jeunes en Afrique: en 2015, 41% des individus ont moins de 15 ans (4% en Europe et 27% dans le monde) et elle est même de 44% en 2015 en Afrique subsaharienne sans l'Afrique australe et les plus de 65 ans sont moins de 4%. En 2018, la part des moins de 15 ans est de 46,8 % en Angola ; de 44,9 % en Zambie, de 50 % au Niger ; de 47,1 % au Tchad ou encore de 46,9 % en Ouganda. En 2020, par rapport à la population mondiale ayant moins de 20 ans, plus d’un jeune de moins de 20 ans vit en Afrique et à l’échelle du continent plus d’un Africain sur deux a moins de 20 ans. L'Afrique est « le continent déjà le plus jeune au monde » comme le souligne l’Atlas de l’Afrique de l’AFD (2020). Si on prend comme âge 25 ans, 800 millions d’Africains ont moins de 25 ans (sur 1,3 milliard d’habitants) soit 60 % de la population. En 2050, plus d’un tiers des jeunes de 15 à 24 ans seront Africains. L'âge médian est de 20 ans et les 15 états les plus jeunes du monde sont africains: l'âge médian en 2020 est 15,1 ans au Niger, de 16,4 en Ouganda, de 16,4 ans au Mali, de 18,1 au Malawi...Ce nombre très important de jeunes est un défi redoutable à relever à la fois au niveau économique avec les emplois à fournir mais aussi au niveau social avec un niveau éducatif à assurer. Il faut lier à ce phénomène une faiblesse du taux de scolarisation. En 2015, on estime à 22 millions le nombre d'entrants sur le marché du travail sur l'ensemble du continent (32 millions sont prévus en 2030). 
  • Pour plusieurs états la situation est délicate avec des “états impuissants à endiguer la marée juvénile qui les submerge” comme l'affirme Roland Pourtier. Les difficultés à insérer cette jeunesse peut, en effet, être source de violences que ce soit de violences urbaines ou du recrutement des enfants-soldats. On peut aussi faire un lien entre les printemps arabes de 2001 et une jeunesse ayant peu d'opportunités notamment au niveau de l'emploi. Néanmoins la dynamique démographique peut « représenter une opportunité pour l’Afrique » (Atlas de l’Afrique, AFD 2020) puisque elle pourrait être synonyme de dividende démographique. Ce dernier correspond à une « accélération de la croissance économique qui peut résulter d’une baisse rapide de la fécondité d’un pays » (Population Reference Bureau) avec une phase démographique où les jeunes sont devenus adultes et actifs. L’Afrique devrait avoir bientôt une forte proportion d’actifs ce qui peut-être un atout pour la croissance et le développement. Bien entendu se pose le problème du lien entre la pression démographique et le développement économique puisque pour de nombreux spécialistes, le développement économique est possible lorsque la fécondité baisse. De plus, on peut mettre en exergue le problème du déséquilibre entre ressources et population croissante. Dans certaines régions comme celle du Sahel, les productions insuffisantes liées notamment au réchauffement climatique pose un problème à telle enseigne que la notion de “charge démographique” est utilisée avec un milieu surexploité alors que la démographie croît poussant en outre des populations à migrer. Dans quelques cas, on évoque aussi un surpeuplement comme dans des états comme le Rwanda ou le Burundi des états qui ont des difficultés à supporter la croissance démographique. 
  • Un pays comme le Rwanda a une densité de 447 habitants au km carré (11,8 millions d'habitants en 2017) et pour 2050 est prévu une population de 22 millions d'habitants (l'indice de fécondité est supérieur à 4) ce qui porterait la densité à plus de 850 habitants au km carré. On peut, pour ce type de pays surtout rural et agricole, s'interroger sur sa capacité à faire face à cette croissance. La démographie africaine est donc bien un défi avec des « atouts et un fardeau » (Philippe Hugon et J-C Servant : Géopolitique de l’Afrique 2020). Surtout, il faut relier ces défis démographiques aux défis économiques. Avec une population toujours croissante, il faut multiplier les rendements agricoles (et donc la productivité). Il faut également résoudre les tensions sur le marché du travail provoqué par l’afflux de jeunes cherchant un travail. S’ajoutent les liens entre démographie et environnement avec une pression démographique plus forte sur les terres. La croissance démographique et des populations jeunes nécessitent de plus de très importants investissements en particulier dans l’éducation. 

 b/ Une tendance à l’urbanisation: une révolution urbaine qui se dessine 

- D’une Afrique rurale à une Afrique de plus en plus urbaine 

  • L'Afrique est également de plus en plus urbanisée à telle enseigne qu'on peut parler de révolution urbaine: une révolution rapide voire trop brutale, tardive mais accélérée engendrant de ce fait de multiples problèmes. « L’urbanisation est une tendance forte du peuplement africain » comme le souligne l’Atlas de l’Afrique (AFD, 2020). L'urbanisation est ancienne notamment en Afrique du Nord mais pas seulement. Les villes de Zanzibar, Gao, Tombouctou, Djenné... existaient bien avant la colonisation. Celle-ci néanmoins rend possible la création de comptoirs commerciaux qui vont devenir des villes comme Saint-Louis au Sénégal, Luanda en Angola, Le Cap en Afrique du Sud... La colonisation et les colonisateurs vont aussi développer des villes portuaires pour leurs besoins économiques ou des villes minières (Johannesburg). Le continent africain a longtemps été à dominante rurale mais c'est de moins en moins vrai : en 2030 plus d'un Africain sur deux devrait résider en ville et d'ici 2030, les villes africaines devraient croître de 300 millions de personnes (d'ici 2050, l'évaluation porte sur plus de 900 millions d'urbains en plus). En 2018, le taux d’urbanisation en Afrique est de 43 % (contre 14 % en 1950).En 2015, on dénombre 472 millions d'urbains soit 15 fois plus qu'en 1950. 
  • On peut vraiment parler d'explosion urbaine sachant que globalement la population urbaine double tous les seize ans avec des taux de croissance annuels en moyenne de 3,7% par an. Entre 1950 et 2000, la population des villes africaines a été multipliée par 9 alors que dans le même temps la population totale avait triplé... Plus du tiers de la population d'Afrique subsaharienne est urbaine ce qui est peu par rapport aux PDEM mais comme le processus est rapide cela engendre des difficultés. On peut, à cet égard, rappeler qu'en 1950 il n' y avait aucune ville ne dépassant le million d'habitants en Afrique alors qu'en 2000 on comptait 25 villes de plus d'un million d'habitants et en 2017 elles sont près d'une cinquantaine (plus si on tient compte des agglomérations).
  • Le pourcentage d'urbains est toutefois encore modeste en Afrique subsaharienne de l'ordre de 37 % en moyenne et variable selon les états : 21% pour l'Ethiopie en 2019, 29% pour le Burkina- Faso, 66% pour l'Angola, 47% pour le Bénin, 50% pour le Nigeria, 89% pour le Gabon mais il est en constante progression. Rappelons qu’il est généralement plus élevé en Afrique du Nord: 73% en Algérie, 80% en Libye, 62% au Maroc, 69% en Tunisie (43% en Egypte ce qui est un niveau d’urbanisation faible). On compte également de plus en plus de villes dépassant 1 million d'habitants avec une multiplication des métropoles avec des villes particulièrement importantes comme Le Caire (plus de 24 millions), Lagos (22,8) Johannesburg (plus de 14 millions) ou encore Kinshasa (plus de 12,6 millions). Le Caire est la 13e ville au monde, Lagos est en 19e position sans l'agglomération... En 2050, la ville de Kinshasa devrait atteindre 35 millions d’habitants et se classer au 4e rang mondial ; Lagos devrait atteindre plus de 32 millions d’habitants. 
  • Par contre il faut souligner un fait important : l’urbanisation africaine se réalise surtout dans les zones rurales qui se densifient avec l’essor des petites villes et des villes moyennes. Les zones rurales ne se dépeuplent pas ou peu contrairement à une idée reçue. En 2010, aucune ville africaine n’était classée dans le top 10 mondial (ni en 2025 d’ailleurs selon les prospectives).
  •  Par contre, en 2050, Kinshasa devrait être la 5 e ville mondiale avec 35 millions d’habitants, Lagos la 7e avec 32 millions... et en 2100 Lagos et Kinshasa devraient être les deux villes les plus peuplées de la planète. Les disparités concernant l'urbanisation sont importantes sachant qu'il n'y a pas toujours de lien entre niveau de développement et urbanisation: un état comme le Nigeria n' a qu’un taux d’urbanisation de 50 % alors qu'il s'agit d'un état plutôt riche d'Afrique. Actuellement, la croissance urbaine est surtout liée à la croissance démographique et en partie aux migrations rurales. 

 -des métropoles attractives et en plein essor 

  • L' Afrique est également concernée par le phénomène de métropolisation. Plusieurs états se caractérisent par une macrocéphalie: ainsi 50% des Ivoiriens vivent à Abidjan, 25% des Ghanéens à Accra... Mais cette croissance profite également aux villes dites moyennes: depuis 1950, le nombre des villes de moins de 5000 habitants a été multiplié par quinze. Par contre, peu de villes sont véritablement ouvertes sur le monde. Selon J.F Troin trois villes entrent dans cette catégorie de villes vraiment internationales avec des connexions financières, commerciales, médiatiques... à savoir Lagos, Johannesburg et Kinshasa. 
  • Les villes sont devenues très attractives ce qui n'était pas le cas auparavant notamment au moment de la colonisation. Un ethnologue comme Jean Dresch dans un article publié en 1948 sur les villes du Congo faisait remarquer que “la ville, création de blancs se peuple de Noir” et ce n'est qu'après la 2e guerre mondiale que le basculement va s'opérer avec des villes devenant des symboles de modernité. L'urbanisation s'accélère en partie avec l'exode rural : ce dernier a longtemps été le moteur de la croissance des villes sachant que cet exode rural ne s'explique pas nécessairement par la fuite de la misère en zone rurale. Dans certains cas, comme au Sénégal, c'est la croissance démographique dans les zones rurales produisant une trop forte pression sur les terres disponibles qui pousse à l'exode rural. Dans la zone sahélienne, ce sont les périodes de sécheresse qui ont contraint dans nombre de cas à partir des zones rurales pour gagner les villes. 
  • C'est le cas pour une ville comme Nouakchott en Mauritanie où la fréquence des sécheresses à partir de la fin des années 60 a accéléré l'exode rural: la sécheresse de 1973 a ainsi fait passer la population de cette ville de 40 000 habitants à 100 000 (968 000 habitants en 2015). Le fait de pouvoir s'enrichir est un des éléments favorisant l'essor des villes: les villes représentent à tort ou à raison la possibilité de s'enrichir et de gagner de l'argent notamment par rapport à des zones rurales moins monétarisées.Cet exode rural en Afrique s'opère toujours en deux phases: une première phase où cet exode est d'abord le fait des hommes et une seconde où les femmes suivent. En fait il n’y a pas d’exode rural massif : dans plusieurs Etats africains les deux tiers de la croissance urbaine s’expliquent par la fécondité des urbains. 

 -générant des problèmes à plusieurs niveaux 

  • Cette urbanisation accélérée pose de nombreux problèmes. L’Atlas des Afriques évoque « des mégapoles africaines sous tension. » (Lagos, Kinshasa...) Les villes africaines sont ainsi fortement ségréguées avec des quartiers favorisés et sécurisés et des quartiers défavorisés notamment de multiples quartiers informels comme le bidonville de Kibera à Nairobi (plus d'un million de personnes). Les « mégapoles africaines sont sous tensions » (Atlas des Afriques, 2020) . Les bidonvilles se sont développés surtout à partir des années 2000 et pas seulement à cause de l’exode rural. Des réfugiés en lien avec les guerres se concentrent dans certaines villes ; les difficultés économiques (avec les effets des politiques d’ajustement structurel) ont généré un appauvrissement... 
  • S’ajoute dans certaines villes une hausse des prix du foncier qui pénalise les plus pauvres qui ne peuvent se loger décemment.En 2016, on estimait que 50 % des urbains en Afrique vivaient dans des bidonvilles. Dans un pays comme le Sénégal, environ 40 % des quartiers urbains sont des bidonvilles ; la métropole de Maputo au Mozambique concentre 75 % de sa population dans des bidonvilles. Ces derniers peuvent être perçus comme des « zones vulnérables aux épidémies » (P.Hugon et J-C Servant : Géopolitique de l’Afrique 2020). Surtout, ces quartiers sont souvent délaissés par l’État et les pouvoirs en place. Autre problème important: l'insécurité. Cette dernière est liée à la pauvreté et aux fortes inégalités sociales. Plusieurs villes comme Lagos, Kinshasa, Cape Town (Afrique du Sud)... sont des villes où la criminalité est très présente à la fois par des trafics en tout genre mais aussi par des assassinats. Cette insécurité se traduit notamment par une véritable psychose sécuritaire avec le développement de quartiers aisés fermés (Gated Communities). Les villes peuvent aussi être le cas de violences entre groupes armés comme à Brazzaville. Cette ville connaît de violents affrontements entre différentes milices, des milices à connotation ethnique. Les problèmes environnementaux sont des problèmes urgents à régler: gestion des déchets, pollutions diverses... tout comme les problèmes sanitaires notamment ceux en lien avec l'accès à l'eau potable. A Nairobi, au Kenya, la population est passée assez rapidement de moins d'un million d'habitants au début des années 1980 (1950 : 87 000 habitants) à plus de trois et il existe une seule décharge de 18 hectares: Dandora. Mais elle est saturée recevant chaque jour entre 950 et 1200 tonnes de déchets. Il faut savoir que Nairobi génère deux fois plus de déchets donc tous ne passe pas par Dandora. Dans cette décharge environ 6000 personnes y travaillent dont de nombreux enfants. Les villes peuvent aussi être source d'explosion sociale: elles sont composées aux deux tiers de quartiers informels avec d'importants ghettos. On peut utiliser pour ce type de quartiers l'expression de Mike Davis: “le pire des mondes possibles” titre d'un ouvrage écrit en 2006 dans lequel il met en garde contre le potentiel explosif des villes du Sud notamment des villes d'Afrique et subsaharienne. Cette situation est d'autant plus inquiétante que les états sont incapables de trouver des solutions aux problèmes urbains. Il faut ajouter que la ville est aussi le lieu de “contournement” des lois et normes fixés par les états avec un secteur informel dominant pouvant être vu comme une soupape de sécurité. La ville de Lagos est un exemple intéressant d’une ville millionnaire (plus de 21,5 millions d’habitants) avec des difficultés très importantes. Lagos est la ville majeure du Nigeria même si elle n'est plus la capitale du pays avec la création d'Abuja. 
  • Il s'agit d'une ville construite sur une lagune bâtie sur plusieurs îles. Elle s'est étendue vers l'intérieur des terres. C'est une ville qui attire des milliers de migrants avec un taux de croissance annuel hors norme d'environ 5% par an. Actuellement, l'agglomération de Lagos s'étale sur 1 700 km carré et la population de cette agglomération serait en 2015 selon la Banque mondiale de 22 à 23 millions d'habitants. En 2020, Lagos devrait concentrer 10% de la population du pays selon les estimations. C'est une ville réputée pour sa violence tout en étant le premier pôle économique du Nigeria. 
  • Elle est une plaque tournante de divers trafics dont le trafic de drogue. Lagos est l'exemple type de la ville portuaire: 70% du commerce du Nigeria passe par le port de Lagos. Cette dernière est fondamentalement une mégapole inégalitaire et surpeuplée avec des bidonvilles, des transports saturés... Autre cas intéressant: Kinshasa. En 2020, cette ville qui est la capitale de la République démocratique du Congo (RDC) compte plus de 14,7 millions d'habitants. C'est une ville dont l'espace urbanisé est d'environ 500 km carré (en 2015) fondée en 1881 sous le nom de Léopoldville. 
  • Elle est devenue la capitale du Congo belge en 1923 en lieu et place de Boma. Du temps de la colonisation s'est développé un quartier européen s'opposant à des quartiers “indigènes”. 
  • Après l'indépendance, cette ville connaît une forte croissance en lien avec la croissance démographique: elle rebaptisée Kinshasa en 1966. Elle est passée de 400 000 habitants en 1960 à 1,7 million en 1975 puis 7,5 millions en 2005 et devrait atteindre environ 18 millions d'habitants en 2030. Cette croissance s'est accompagnée d'un fort étalement urbain de 6,8 km carré en 1960, la ville devrait atteindre 860 km carré en 2030. L'explosion de Kinshasa n' a pas été suivie d'une politique suffisante au niveau des infrastructures avec, par exemple, 10% seulement des routes bitumées, une insuffisance en eau potable (60 litres d'eau par jour par habitant), des déchets mal collectés (dont le surnom de Kin-la poubelle) et un accès encore limité à l'électricité (taux de branchement de 40%)... néanmoins, cette ville est un marché important de consommation avec des produits manufacturés importés connectant Kinshasa au monde. 
  • Kinshasa est fortement clivée avec des quartiers résidentiels comme Sembao (Ouest de la ville) ou Ngaliema et des quartiers insalubres (quartier de Lingwala à proximité d'ailleurs du coeur administratif) sans oublier en périphérie de nombreux quartiers d'habitat précaire autour de la ville. 
  • On peut tout d'abord différencier et distinguer historiquement plusieurs types de villes africaines. Il existe des villes pré-coloniales (le fait urbain préexiste à la colonisation) comme les villes du Mali que sont Tombouctou (près de 100 000 habitants au 15e e siècle), Djenné ou même une ville comme Addis-Abeba en Ethiopie fondée en 1887 mais pas par des colonisateurs sans oublier Kano au Nigeria (une ville créée vers l'an 1000 après J-C); des villes coloniales donc créées par les états colonisateurs: de nombreuses villes notamment sur les littoraux mais aussi le long des fleuves sont des créations liées à la colonisation comme Saint-Louis au Sénégal, Luanda en Angola, Léopoldville devenue Kinshasa...; des villes nouvelles créées ou développées après les indépendances dont certaines capitales. C'est le cas d'Abuja capitale fédérale du Nigeria depuis 1991, de Yamoussoukro en Côte d'Ivoire, à l'initiative du président de l'époque Houphouët-Boigny, qui a remplacé comme capitale Abidjan en 1983 ou encore Dodoma en Tanzanie en lieu et place de Dar es-Salaam. Les espaces urbains des villes africaines ont des morphologies assez proches avec souvent une partie de la ville qui est un héritage colonial et sont des villes où la ségrégation est importante notamment la ségrégation sociale voir ethnique dans certains cas. 

c/ Un continent de migrations: des mobilités intra-continentales aux mobilités extra-continentales 

 -des migrations internes dominantes : une Afrique mobile 

  • Les populations africaines sont mobiles et ce depuis fort longtemps: les migrations des populations sont donc anciennes. On peut à cet égard faire référence aux grandes migrations bantoues depuis l'Antiquité en direction du sud de l'Afrique: des migrations lentes. Le phénomène migratoire perdure bien entendu depuis les indépendances. L'exode rural est une migration au même titre que les nombreuses migrations transfrontalières. 
  • Les migrations internes au continent africain sont très importantes qu'elles soient volontaires ou contraintes. Les mobilités africaines sont très majoritairement intracontinentales. On peut faire remarquer que la part des Africains vivant ailleurs que dans le pays d’origine est de 14,7 % de la population migrante à l’échelle mondiale en 2019 (source : AFD). Toujours en 2019, plus de la moitié des 40 millions de migrants internationaux originaires d’un pays d’Afrique ont émigré à l’intérieur du continent (21 millions de personnes). On constate des migrations des régions du Sahel vers les régions littorales, des états d'Afrique australe vers l'Afrique du Sud. Les principales régions d’accueil des migrants internes à l’Afrique sont l’Afrique de l’Est et l’Afrique de l’Ouest. Au niveau des Etats les pays accueillant le plus de migrants en 2019 sont l’Afrique du Sud avec 4,2 millions, la Côte d’Ivoire avec 2,5 millions, l’Ouganda avec 1,7 million, le Nigeria avec 1,2 millions, l’Ethiopie avec 1,2 million... Les Africains migrent en Afrique pour des raisons économiques et avoir de meilleurs conditions de vie dans des pays proches ; 20 % des migrants sont des réfugiés qui ont donc été contraints de migrer pour des raisons politiques (guerres civiles, persécutions...). 
  • Enfin, la plupart des migrants ont moins de 30 ans. Il faut préciser que l’un des déterminants majeurs de ces migrations internes est la proximité : les Africains migrent en Afrique et souvent dans des pays à proximité du leur. Philippe Hugon et Jean-Christophe Servant distinguent « trois catégories de migrants : celle de travailleurs non qualifiés (...) celle qualifiée (...) celle des déplacés, réfugiés et demandeurs d’asile. » Les migrations de travailleurs non qualifiés représentent 90 % des migrations de pays comme le Mali, la Guinée-Bissau... Selon le centre d’études stratégiques de l’Afrique le nombre de déplacés internes et de réfugiés en Afrique même est estimé en 2020 à environ 29 millions d'individus, un chiffre record pour 2020 (déplacés internes, réfugiés,demandeurs d’asile).Sur ces 29 millions, 72 % sont des déplacés internes : le Soudan du Sud a 35 % de personnes déplacées ; la République centrafricaine 28 %, la Somalie 22 %... En nombre d’individus, la RDC compte 5,5 millions de déplacés, le Soudan du Sud 1,6 million, la Somalie 2,6 millions...
  • Parallèlement, l’Afrique subsaharienne abrite plus de 26% des réfugiés dans le monde. On peut donc aussi parler d'une “Afrique des réfugiés” (Atlas de l'Afrique) avec 18 millions d'Africains qui relevaient du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés en 2019. Ces réfugiés se concentrent notamment dans la corne de l'Afrique et plus généralement en Afrique de l'Est avec plus de 6 millions de réfugiés mais aussi dans la région des grands lacs avec 5,8 millions de réfugiés. 
  • Parmi les états accueillant le plus de réfugiés, on trouve l’Ouganda avec 1,4 millions de réfugiés dont 880 000 viennent du Soudan du Sud, 415 000 de RDC ; Le Soudan compte 1,1 million de réfugiés dont 821 000 viennent du Soudan du Sud ; L’Ethiopie avec 763 000 réfugiés dont 342 000 venant du Soudan du Sud et 200 000 de Somalie ou encore la RDC avec 522 000 réfugiés dont 214 000 du Rwanda... 

-Des migrations externes au coeur de l’actualité 

  • Un rapport de l’OCDE de 2018 est particulièrement intéressant : il met en évidence plusieurs éléments : Les Africains migrent moins que les autres vers les pays de l’OCDE (les pays où les migrants vers les pays de l’OCDE sont les plus nombreux sont la Chine, la Roumanie, l’Inde, la Pologne, le Mexique, la Syrie, les Philippines...Le 1er africain est le Maroc à la 18e place (avec plus de 70 000 personnes qui sont partis vers un pays de l’OCDE);Les Africains s’installent en Europe dans des pays où sont généralement déjà installés leurs compatriotes ; ils ne sont pas non plus les premiers demandeurs d’asile... 
  • Pour les migrants africains arrivant en Europe, un rapport du PNUD signale que 67,5 % des migrants viennent d’Europe de l’Ouest ; 18,5 % d’Afrique de l’Est ; 8 % d’Afrique australe et 6 % d’Afrique du Nord. On peut distinguer plusieurs catégories de migrants: les migrations de travailleurs non qualifiés utilisant d'anciens réseaux migratoires comme les migrations partant du Mali, des Comores, de la Guinée-Bissau (voir plus haut)... vers les anciennes métropoles coloniales; il existe aussi une migration qualifiée (7% des migrants qualifiés de l'OCDE viennent d'Afrique) dont les médecins ghanéens sont un exemple puisque les trois quart des médecins formés dans ce pays exercent leur métier hors du Ghana; les migrations liées aux conflits ou à la fuite de dictatures dont certains tentent de gagner l'Europe. Rappelons que les Africains d’Afrique subsaharienne représente actuellement 1% de la population européenne pour peut-être 3 à 4% en 2050 mais pour l’ensemble des pays de l’OCDE. On peut reprendre un article du journal Le Monde de septembre 2019 permettant de dégager quelques “leçons” des migrations africaines: Les Africains migrent moins que les autres vers les pays de l’OCDE sachant que les principaux états sources de migrations vers l’OCDE sont la Chine, la Roumanie, l’Inde, le Mexique... 
  • Le 1er état africain n’arrive qu’en 18e position: il s’agit du Maroc. On peut noter le Maroc, le Nigeria, l’Algérie, l’Egypte et l’ Erythrée représentent à eux seuls 15% des entrants dans l’UE. De toute façon, 70 % des migrations africaines concernent d’autres états africains. Deuxième leçon: les Africains s’installent de façon contrastée en Europe s’installant dans des états où des compatriotes sont déjà installés. Troisième leçon: ils ne sont pas les principaux demandeurs d’asile en Europe: les principaux demandeurs d’asile sont Afghans, Albanais et Géorgiens. 
  • Trois facteurs majeurs expliquent les migrations hors d'Afrique: les forts écarts de revenus qui incitent au départ,les déséquilibres démographiques et l'existence de réseaux avec présence de diasporas d'accueil. Ces migrants ont tendance à opter pour les anciennes métropoles car les liens culturels facilitent, en théorie les migrations, et/ou pour des pays à économie attractive comme l'Allemagne. 

 B/ Des économies fondées sur des rentes: un frein au développement ? 

 En quoi les économies rentières sont pénalisantes pour réussir un développement équilibré? Les Etats africains peuvent-ils aller « au-delà de la rente » ?(P. Hugon et J-C Servant : Géopolitique de l’Afrique) Les économies africaines n'ont pas toutes le même profil, les mêmes atouts ou les mêmes problèmes mais elles sont des économies de pays en voie de développement ou pour certains de PMA. 
Plusieurs de ces économies sont des économies de rente quelque soit la nature de la rente en question c'est-à-dire des économies dont les revenus sont issu de rentrées financières dites externes par des exportations de produits primaires notamment. Le poids du secteur primaire persiste avec des économies insuffisamment développées. L’agriculture et les activités dites extractives (mines, hydrocarbures) représentent environ 40%du PIB du continent africain, un pourcentage pouvant être bien plus élevé dans certains Etats : plus de 60 % en Sierra Leone, au Tchad, au Gabon... 

 a/ Des économies africaines avant tout rentière 

L'Afrique et les états africains ont globalement des économies fondées sur une rente reposant sur un système productif pas assez dynamique et surtout pas assez diversifié. La plupart des Etats africains produisent et exportent des matières premières agricoles ou minérales (environ 80 % des exportations africaines en valeur relèvent des exportations de matières premières agricoles ou non). 

 -les rentes comme héritage (s) 

  • Ces économies de rente ne sont pas une nouveauté. Que ce soit la traite des esclaves ou le commerce de l'or, l'Afrique connaissait déjà ce type de fonctionnement économique profitant essentiellement à quelques individus ceux détenant le pouvoir. Elles ne sont donc pas uniquement le résultat de la colonisation. Cette dernière va néanmoins mettre en place une économie fondée sur l'exploitation au profit des métropoles des richesses qu'elles soient minières ou agricoles. Cette explosion était fondée sur le travail souvent forcé des Africains (cf le Congo de Léopold II). Afin d'exploiter ces richesses, les puissances coloniales construisent des infrastructures (voies ferrées, ports...): il ne s'agit pas d'aménager le territoire mais de promouvoir les exportations au profit des métropoles. 
  •  Parallèlement, les puissances coloniales vont développer certaines productions comme la Cacao en Côte d'Ivoire, la viticulture en Algérie, l'arachide au Sénégal, le coton en Egypte ou encore le café... L'exploitation des ressources minières est souvent plus tardive commençant à la fin du 19e siècle pour l'exploitation des diamants en Afrique du Sud par exemple. C'est surtout à partir des années 1950 que commence l'exploitation de ce type de ressources alors que le phénomène de décolonisation s'amorce. Des ressources néanmoins exploitées surtout par des firmes occidentales. 
  • Il faut insister sur le fait que les agricultures en Afrique ont été fortement modifiées par les cultures de rente au départ initiées par la colonisation puis reprises par les états indépendants. Ces cultures de rente sont destinées à l'exportation avec au départ une demande des Européens de produits tropicaux. C'est au 19e siècle que ce type de culture a réellement pris son essor même si Sao Tomé, une colonie portugaise avait initié la culture de la canne à sucre dès le 16e siècle. Les Britanniques et les Français dans leurs colonies africaines ont développé la culture du cacoyer (originaire des Amériques) notamment en Côte d'Ivoire et au Ghana puis la culture du café. Ce dernier était originaire d'Ethiopie avant d'être exploité en Amérique (Brésil, Equateur...) pour revenir sur le continent africain sous l'impulsion des colonisateurs. 
  • L'arachide a également été implanté en Afrique (originaire là aussi des Amériques) suite à une demande croissante des Européens notamment au Sénégal. Ces cultures d'exportation ont permis la mise en valeur de territoires et ont profondément transformé les agricultures locale. Au moment des indépendances, les états africains ont poursuivi dans cette voie pensant que ces cultures d'exportation favoriserait le développement économique. L'exportation de ces produits agricoles permet l'insertion dans les circuits commerciaux mondiaux: c'est une façon de s'insérer dans le processus de mondialisation. Ces cultures d'exportation sont perçues ou peuvent être perçues comme néfastes car elles concurrencent les cultures dites vivrières dans des états où les problèmes alimentaires ne sont pas toujours réglés. De plus, il existe une dépendance à l'égard des PDEM qui contrôlent les marchés par le biais notamment des places boursières: les cours de ces produits sont fixés hors d'Afrique. 

 - des économies rentières au profil différent 

  • La décolonisation ne modifie pas la donne: les états nouvellement indépendants maintiennent ces économies de rente. L'idée était que ces économies pourraient générer des capitaux favorables au développement des états. Dans un certain nombre de cas, ces économies ont été intégrées à un secteur d'état comme ce fut le cas en Côte d'Ivoire avec le café et le cacao. L'état ivoirien soutient ces productions par l'intermédiaire de la Caisse de stabilisation et de soutien des prix des productions agricoles (par des prix garantis aux producteurs) et contrôle les exportations. Les états procèdent à des nationalisations pour contrôler les richesses nationales. Plusieurs états vont ainsi opter pour la création de sociétés nationales afin de contrôler les ressources comme en Algérie avec la création en 1963 de la Sonatrach (Société nationale pour la recherche, la production, le transport, la transformation et la commercialisation des hydrocarbures). Cette société pour le nouvel état algérien devait permettre la mobilisation des ressources exploitées afin de favoriser le développement du pays (Chiffre d'affaires de plus de 67 milliards de dollars en 2013). 
  • Certains états ont des économies de rente agricoles en particulier en Afrique subsaharienne avec trois régions notamment: la région dite sahélo-soudanienne avec les cultures du coton et de l'arachide, la zone intertropicale du Golfe de Guinée (Côte d'Ivoire, Ghana...) avec les cultures de café, cacao, bananes.. et la zone des grands lacs jusqu'à l'océan Indien avec plusieurs cultures comme le thé (Kenya), l'huile de palme, le café... L'agriculture de rente représente 30% des recettes d'exportation de l'Afrique et est pour plusieurs états la principale source de recettes fiscales. Des états comme le Sénégal ou le Soudan ont développé les cultures du coton ou de l'arachide alors que la Côte d'Ivoire (le Cacao représente dans ce pays plus de 15% du PNB) ou le Ghana ont choisi le café, le cacao (60% du Cacao est produit en Afrique) ou plus récemment l'huile de palme. En Côte d'Ivoire, la culture du cacao fait travailler plus de 6 millions d'individus (15% du PNB Ivoirien).
  •  Dans la région des grands lacs, on retrouve des productions comme le thé, le café...: la culture du thé semble être porteuse d'avenir alors que le marché du café est fortement concurrentiel. On peut aussi évoquer le développement de rentes illégales résultant de la misère, de la corruption et des difficultés diverses de nombreuses populations. Le Maroc est ainsi le premier producteur mondial de cannabis (région du Rif), l'Afrique du Sud le second... D'autres ont des rentes minières comme le Maroc avec le phosphate, l'Algérie avec le pétrole et le gaz naturel.
  •  Il en est de même avec le pétrole pour le Gabon ou le Nigeria. D'ailleurs l'Afrique est de plus en plus un enjeu stratégique pour les secteurs minier et pétrolier. L'Afrique représente (Afrique du Nord comprise) 11% de la production de pétrole ce qui n'est pas négligeable et 10% des exportations mondiales (15% des exportations de gaz). On peut prendre l'exemple de la Zambie qui est devenue le premier producteur mondial de cuivre et le second producteur mondial de Cobalt. La “copperbelt” (au nord de la Zambie à la frontière de la RDC et de sa région du Katanga) est ainsi devenue une zone très attractive notamment pour les investisseurs internationaux. La Chine est d'ailleurs devenue un investisseur incontournable en Zambie. En théorie, ces richesses devraient permettre de développer le pays. Effectivement, la croissance de la Zambie est notable : 6,7% en 2013, 6,5% en 2014 mais de 3,4% en 2017 et surtout de1,5 % en 2019. La Zambie paraît de fait intégrée au moins partiellement dans le processus de mondialisation par le biais de ses ressources: la ligne aérienne Ndola (la ville au coeur de la copperbelt)-Johannesburg en Afrique du Sud en est un symbole. 
  • La copperbelt et la rente du cuivre apparaissent donc comme “le moteur économique de la Zambie (S. Bouillon). Toutefois, cette rente peut-elle contribuer à atténuer la pauvreté très présente dans ce pays ? Il faut rappeler que l'IDH est seulement de 0,58 en 2018 soit le 139 e rang mondial, le coefficient de Gini mesurant les inégalités est de 55,6 et plus de 64,4% de la population vit avec moins de 1,9 dollars par jour. La rente du cuivre ne permet donc pas (du moins pas encore) de régler les problèmes économiques et sociaux des 17 millions d'habitants du pays. Le continent africain apparaît également comme une nouvelle zone pétrolière (un “eldorado pétrolier”) que ce soit avec des états d'Afrique du Nord comme l'Algérie ou la Libye, les états du Golfe de Guinée (Angola, Guinée...). L'Algérie et la Libye détiennent 11 et 30% des réserves de pétrole de l'Afrique (2 et 2,7% environ de la production mondiale). Le golfe de Guinée joue un rôle de plus en plus important (le “deuxième golfe”) puisque la moitié des réserves de pétrole du continent se trouve dans ce golfe de Guinée avec un poids de plus en plus important de l'Angola. 
  • L'Angola, en 2019, est d'ailleurs au 16e rang mondial avec 64,3 millions de tonnes devant par exemple l'Algérie au 17e rang avec 66,6 millions de tonnes. Le Nigeria reste le principal producteur de pétrole africain en 2019 avec 101 millions de tonnes soit le 11e rang mondial. De nouveaux gisements off shore sont en voie d'être exploités notamment dans la ZEE de Sao Tomé où les premiers forages devraient avoir lieu à partir de 2018-2020. Des gisements ont été découverts et sont ou en phase d'exploration ou en début d'exploitation au Soudan (Soudan du Sud), Tchad... Pour certains, l'Afrique est peut être un nouvel “eldorado” pétrolier mais elle ne représente que 10% de la production mondiale et 7% des réserves. Toutefois, le pétrole de ces régions africaines est réputé comme étant de bonne qualité d'où l'intérêt qu'il suscite pour les grandes puissances que ce soit la Chine ou les Etats-Unis (en 2011, les E-U ont déclaré l'Afrique comme une “zone d'intérêt vitaux”). Il faut rappeler que les années 1950-1980 ont été marquées par un fort intérêt pour les activités minières, intérêt développé par de grandes firmes occidentales: on a d'ailleurs parler de “boom “ des matières premières. Ces économies de rente ont été affectées dans les années 1980-1990 par la baisse des prix des cours des matières premières agricoles ou énergétiques. Les cours notamment du pétrole sont repartis à la hausse dans les années 2000 et à nouveau à la baisse depuis quelques mois: l'oscillation des cours pose problème aux états producteurs. Les cours des matières premières sont donc fluctuants avec une alternance de hausses et de baisses. Elles sont aussi devenues attractives pour des investisseurs étrangers. Les états émergents comme la Chine ou l'Inde ont compris l'intérêt du marché africain: ils concurrencent les anciennes puissances coloniales et les Etats-Unis. Les échanges entre l'Afrique et la Chine sont passés de 10 milliards de dollars en 2000 à 200 milliards de dollars en 2012. La Chine s'intéresse particulièrement aux rentes minérales: nickel, uranium, pétrole... Certains évoquent la formation d'une Chine- Afrique pour traduire ces liens de plus en plus approfondis entre le continent africain et la Chine. 

 b/ Des économies rentières sources de difficultés 

Ce type d'économie fondée sur des rentes a des effets à plusieurs niveaux tant sur l'organisation spatiale que des effets sociaux. Les économies de rente expliquent en partie l'organisation de certains espaces puisque le développement des cultures d'exportation a attiré de la main d'oeuvre et des migrants. Des zones de plantations comme en Côte d'Ivoire, au Kenya sont attractives. 

 - Les effets négatifs sur les équilibres territoriaux 

  • Les territoires sont fortement impactés par les productions rentières générant des espaces de production comme la “nouvelle boucle du cacao” en Côte d'Ivoire dans le centre-est du pays ou les territoires de culture du thé dans l'est du Kenya à proximité du lac Victoria. Ces zones de plantations attirent des émigrants qu'ils soient locaux ou extérieurs aux pays.. Parallèlement, ces économies de rente sont liées à des infrastructures qui organisent le territoire comme les voies ferrées et sont à l'origine de différentes polarisations (autour de régions productrices et de ports). Ainsi, le transgabonais sert à l'exportation du manganèse, un réseau ferroviaire relie ce qu'on nomme la CopperBelt (Zambie et Katanga au Congo) aux ports d'Afrique du Sud.
  •  La Copperbelt profite surtout à la métropole zambienne de Lusaka et à la ceinture du cuivre. L'exploitation des richesses dans le sud algérien a permis à des territoires à l'écart de connaître un développement réel et d'être intégré à l'espace national. Enfin,l'exploitation de richesses a permis à des métropoles de s'affirmer comme Johannesburg en Afrique du Sud et à des ports de se développer devenant des centres urbains majeurs comme Accra, Abidjan ou Lagos. 

 -La rente : un obstacle au développement ? 

  • Mais ces économies génèrent des effets pervers. Les économies de rente permettent le développement de certaines régions alors que d'autres vont rester en retrait provoquant des inégalités territoriales à l'intérieur des états. L'économie de rente ne permet pas une véritable industrialisation et donc un développement équilibré. Les économies de rente sont génératrices “d'exclaves” c'est-à-dire de territoires exploités mais à l'écart du ou des territoires principaux notamment parce qu'ils sont situés en mer comme les gisements off shore. 
  • Peuvent aussi se former des enclaves soit des portions de territoires à l'intérieur d'un état qui sont davantage développées comme l'enclave de Harbel au Liberia qui est une immense plantation d'hévéas de 76 000 hectares et est une concession à l'origine du groupe américain Firestone, un groupe qui appartient depuis 1988 à la firme japonaise Bridgestone. Cette concession emploie environ 7000 salariés (le premier employeur du Liberia) et a été créée dès 1926 pour fournir les usines de pneus américaines se trouvant dans le Tennessee et l'Illinois. Les rentes sont également un “piège” car elles renforcent la dépendance : dépendance à l'égard des cours des produits, à l'égard des états acheteurs (généralement les pays développées), dépendance technologique dans certains cas (exploitation des hydrocarbures par des firmes et ingénieurs occidentaux).Certains états rentiers ont une balance commerciale déséquilibrée et pouvant être déficitaire. Pour un pays comme l'Algérie, les hydrocarbures représentent 97% des recettes d'exportation et généralement les rentes sont à l'origine de la plupart de ces recettes.
  •  On évoque dès lors le “piège de la rente”. Les économies dites rentières sont de fait fragiles, une fragilité renforcée si, en plus, les états font le choix d'une seule rente. On sait que ces états rentiers sont pénalisés par l'instabilité des termes de l'échange surtout que les mécanismes de compensation mis au point avec la Convention de Lomé en 1976 (système de préférence entre l'UE et les pays dits ACP soit Afrique-Caraïbes-Pacifique). Depuis quelques années, le système a été dérégulé sous l'influence des politiques libérales. Un bon exemple de l'instabilité sont les économies reposant sur le pétrole qui sont soumises aux aléas des cours. Certes, elles ont bénéficié des chocs pétroliers mais subissent la baisse actuelle des cours mondiaux. Cette baisse pénalisent les budgets nationaux et en particulier les recettes fiscales. Parallèlement, il ne faut pas oublier que plusieurs états, pour se développer, se sont endettés pensant que la dette serait remboursable par les exportations de matières premières. Or ce n'est généralement pas le cas avec un service de la dette qui souvent absorbe une part trop importante des budgets nationaux. Enfin, ces rentes sont l'objet de conflits pour leur contrôle entre acteurs locaux ou acteurs extérieurs car sources de convoitises. Les rentes sont souvent exploités et contrôlés par les états et leurs élites servant au clientélisme et à la corruption. Les profits de ces rentes sont également placés par ceux qui les contrôlent hors du pays d'origine: l'évasion financière est importante.
  •  Elles peuvent aussi servir au financement de l'achat d'armes favorisant des dépenses militaires trop importantes. La RDC et la région du Kivu en sont des parfaites illustrations.La région du Kivu se trouve à l'est de la RDC frontalière avec le Rwanda, le Burundi, l'Ouganda et la Tanzanie.C'est une région riches en ressources minières: or, pétrole, cassitérite... mais aussi au potentiel agricole certain. Parmi les acteurs du conflit, le M23 (mouvement du 23 mars) une force armée rebelle composée de Congolais d'origine Tutsis et soutenus par le Rwanda voisin. On prête au M 23 la volonté de fonder un “tutsiland” à l'intérieur de la RDC. Il existe également plusieurs autres groupes comme les Forces démocratiques de libération du Rwanda composées de Hutus, les milices locales Maï Maï composées de locaux (chefs de tribus et de villages) ou des groupes aux revendications plus que floues et qui sont surtout des pillards. L'armée officielle congolaise est également présente pour lutter contre les différents groupes.
  •  Dans ce conflit, tous les acteurs tentent de prendre le contrôle des ressources: rebelles, forces gouvernementales ou états voisins. Meme des FTN comme Nokia (pour la cassitérite) ont des intérêts importants dans la région: elles peuvent profiter du conflit pour obtenir les minerais à des prix très bas. Bilan: Pour certains économistes, une partie des états africains sont trop tributaires de leurs rentes et sont “prisonnières d'une économie primaire” (Roland Pourtier). Les pays rentiers se doivent d’aller « au-delà de la rente » comme le suggère P.Hugon et J-C Servant.
  •  Ces économies rentières peuvent même être considérées comme une nouvelle forme de domination des PDEM. Effectivement, pour les PDEM et les grands états émergents et leurs FTN, l'Afrique est perçue comme une source d'approvisionnement en matières premières. Il est incontestable, de plus, que les élites qui dirigent les états africains jouent le jeu des FTN. Parallèlement, la “politique du ventre” mis en valeur par J.F Bayart, est toujours prégnante. Fondamentalement, les relations entre PDEM, états émergents et états africains restent inégales. 

C/ Des Etats africains toujours confrontés à des problèmes sociaux considérables

 Quels sont les handicaps sociaux pénalisant le développement de l’Afrique? Comment sortir des trappes à pauvreté ? Les états africains sont confrontés à des problèmes sociaux très importants qui sont de façon incontestable des freins au développement. 

 a/ Des problèmes éducatifs au coeur de la question du développement

L'éducation et la formation des individus sont des éléments et des facteurs essentiels du développement: l'éducation est d'ailleurs affirmée systématiquement comme une priorité (cf Conférence d'Addis-Abeba en 1961, Objectifs du Millénaire du Développement en 2000). Or, en Afrique l'accès à l'éducation est difficile et inégal sachant en plus qu'un certain nombre d'Africains formés quittent leurs pays. Pourtant de nombreux Etats africains font des efforts importants pour scolariser les jeunes africains. 

 -l’ analphabétisme comme frein au développement 

  • 50% des Africains et 70% des femmes sont analphabètes. L'observatoire des inégalités constatait en 2018 qu'il y avait environ 781 millions d'analphabètes dans le monde dont 187 millions en Afrique subsaharienne bien que le taux d'alphabétisation ait progressé (il est passé de 57 à 59%). Il faut signaler que les niveaux de scolarisation varient d'un état à l'autre : 88,5% pour la Namibie, 88% pour l'Afrique du Sud, 73% pour le Malawi, 33% pour le Tchad, 27 % pour le Soudan du Sud , 26,2 % pour le Mali (chiffres de l'UNESCO). Le taux d'alphabétisation des adultes est donc différent selon les états (chiffres 2019): il est monté à 81% pour l'Algérie, à 79% pour le Ghana mais il est seulement de 38% pour la Guinée (2018) et 19% pour le Niger (2018). Les inégalités sont fortes entre les différentes catégories sociales mais aussi entre villes et campagnes. Les inégalités sont aussi très fortes entre filles et garçons: dans des états comme le Soudan du Sud ou l'Angola, les filles représentent moins de 40% des effectifs du primaire. En Afrique subsaharienne, 57% des jeunes analphabètes sont des femmes. Néanmoins, on note des progrès en termes quantitatifs: les effectifs scolarisés sont en constante augmentation à la fois dans le primaire et le secondaire. avec des progrès importants notamment en Afrique australe. 
  • L’Agence française pour le développement évoque une « révolution discrète » avec des Etats africains qui scolarisent de plus en plus d’individus. La proportion d’adultes africains pouvant lire et écrire est passée de 49 % en 1995 à 66 % en 2018. Ainsi le taux de scolarisation des filles dans le primaire est passé en Afrique subsaharienne de 57 % à 75% entre 2000 et 2013. En ce qui concerne l'enseignement secondaire, il est passé de 27% à 46% ce qui reste encore faible mais les progrès sont réels. A titre de comparaison, 53 % des garçons ont accès au secondaire en 2012-13 contre 33% en 2000. 
  • L'accès à l'Université progresse également concernant en moyenne 10% des jeunes du continent en 2013 (33% des jeunes égyptiens mais seulement 4,8% des jeunes Burkinabés). Les états africains se sont engagés lors du Forum mondial de l'éducation qui s'était tenu à Dakar en 2000 à développer leurs efforts dans le domaine de l'éducation. Il s’agit effectivement d’une priorité et il faut dire que l’éducation représente 18,5 % des dépenses publiques en Afrique (14 % dans le monde) et l’Afrique consacre en moyenne 4 % de son PIB à l’éducation (3,4 % pour l’Asie du Sud). 
  • Toutefois selon un rapport de l’ONG ONE de 2019, sur les 10 pays du monde où les filles ont le moins accès à l’éducation, 9 sont africains : Soudan du Sud, République centrafricaine,Niger, Tchad, Mali, Guinée, Burkina-Faso, Liberia et Ethiopie (le pays non africain dans ce top 10 étant l’Afghanistan). Les inégalités d’accès à l’éducation à plusieurs niveaux persistent : la durée moyenne de la scolarisation en nombre d’années est variable selon les Etats : plus de 8 ans dans des Etats comme l’Afrique du Sud, le Botswana, le Gabon ou encore le Zimbabwe mais seulement de 4 ans au Mali, au Soudan, au Tchad ou même inférieur à 2 ans comme au Niger ou au Burkina- Faso. -des efforts mais une insuffisance des infrastructures et des politiques éducatives. Comme le souligne Philippe Hugon, le problème n'est pas quantitatif mais qualitatif. Les systèmes éducatifs souffrent de plusieurs handicaps: manque de matériel, classes surchargées, enseignants insuffisamment formés... 
  • La qualité de l'enseignement laisse souvent à désirer y compris dans l'enseignement supérieur. Pour les pays du Sud du Sahara, on compte en moyenne 42 élèves par enseignant dans le primaire (moyenne mondiale = 24). De plus, les diplômés ne parviennent pas toujours, loin de là, à s'intégrer dans la vie professionnelle. Les écarts entre la formation et l'emploi sont importants: le chômage des diplômés peut être élevé (plus de 14% des diplômés de l'enseignement supérieur en Algérie sont au chômage) Ces difficultés ont permis le développement d'infrastructures privées qui tentent de compenser les défaillances des systèmes publics. 
  • Enfin, on peut ajouter que nombre d'étudiants africains ont accès et sont formés dans des universités américaines ou européennes (plus de 115 000 étudiants africains en France). Le problème est que certains d'entre eux ne reviennent pas dans leurs pays d'origine. Les états africains ont des difficultés à assurer et à développer un enseignement pour tous: des progrès sont notés mais il faudra encore du temps pour que les efforts portent leurs fruits. Or, l'éducation et la formation sont des facteurs essentiels du développement. 

b/ Des enjeux de santé persistants « L’accès aux soins pour tous est un idéal à atteindre » (Atlas des Afriques, 2020).

Dans les années 1960-1970, les états africains avaient connu des évolutions positives au niveau de la santé avec une amélioration des infrastructures, des campagnes de vaccination permettant de lutter contre certains problèmes (paludisme par exemple). Néanmoins, les années 1990-2000 ont vu se développer de nouveaux problèmes en particulier le développement du SIDA et le retour de maladies (le paludisme). Les indicateurs de santé sont d'excellents révélateurs du développement: ces indicateurs montrent que le continent africain est en transition avec toutefois de fortes disparités. Les taux de mortalité infantile reflètent les inégalités entre pays: en 2015, ce taux dépasse 90 pour mille dans un pays comme l'Angola ou la République centrafricaine mais il est seulement de 12 pour mille en Tunisie. Il faut savoir que l'Afrique connaît la transition épidémiologique: les maladies chroniques non transmissibles se substituent peu à peu aux maladies infectieuses. 

 -des problèmes sanitaires qui perdurent 

  • Tout d'abord, il est important de préciser que la plupart des états africains et des populations n'ont pas accès à des systèmes de santé. Il existe un critère intéressant qui est la couverture santé universelle qui permet de voir si un individu a accès aux services de santé essentiels sans avoir de difficultés financières. Il existe un indice de couverture des services de santé reposant sur 4 critères fondés sur plusieurs critères (soins prénataux, couverture vaccinale complète...) et allant de 0 % à 100 % sachant que la moyenne mondiale est de 66 % en 2017. Cette couverture est de moins 30 % au Niger, au Tchad, en Ethiopie, au Mali ce qui est très faible. 
  • Elle est supérieure à la moyenne mondiale dans seulement 3 Etats : Afrique du Sud, Namibie et Maurice. Le continent africain dépense en moyenne 5 % de son PIB pour la santé soit deux fois moins que la moyenne mondiale. Les infrastructures sanitaires sont souvent insuffisantes: hôpitaux, nombre de médecins...
  • Les Etats ont peu de moyens pour financer les dépenses de santé. Deux indicateurs peuvent être à cet égard intéressant: le nombre de médecins pour 1000 habitants et le pourcentage de médecins locaux travaillant à l'étranger. Ainsi, le nombre de médecins pour 1000 habitants est de 1,9 en Libye (avant la guerre), 1,2 en Algérie, de 0,8 en Afrique du Sud en 2013, de 0,2 en Angola, de 0,05 en République centrafricaine, de 0,03 en Ethiopie... (Allemagne: 4 médecins pour 1000 habitants, 3,1 en France, 4,1 en Norvège...) Le nombre de médecins nés dans le pays d'origine et travaillant à l'étranger est de 44% pour l'Algérie, de 21% pour l'Afrique du Sud, de 70% pour l'Angola, de 42% pour la République centrafricaine... 
  • Enfin, par manque de capitaux, les politiques de santé en particulier de prévention, ne sont pas suffisantes. Les états africains dépensent en moyenne 1 dollar par habitant pour la santé. De façon très significative, les dépenses de santé par habitant sont souvent inférieures à 50 dollars par an et par habitant : c’était le cas pour la moitié des Etats africains en 2018 (en Allemagne la moyenne de 5000 $ par an et par habitant ou encore 9 818 $ en Suisse. Pour la France, c’est 3000 euros en moyenne). En 2018, le pays africain qui dépense le plus par habitant est Maurice avec 506$ par habitant et le pays qui dépense le moins est la république centrafricaine avec 17$

 - des progrès mais infrastructures limitées, des politiques de santé peu efficaces...

  • Pourtant des progrès dans le domaine de la santé sont significatifs: l'espérance de vie (chiffres 2018) augmente progressivement atteignant 76,7 ans en Algérie et 76,5 ans au Maroc, 69,3 ans au Botswana, 66,2 ans au Gabon et 67,7 ans au Sénégal... Par contre, elle peut rester particulièrement faible pour certains états: 54 ans au Tchad et 58,9 ans au Mali, 57,1 ans en Somalie ou 54,3 ans en Sierra Leone... L'espérance de vie progresse donc. Les plus de 65 ans sont passés de 3,3 % en 2000 à 3,6% en 2010 (4,5 % en prévision en 2030). L'espérance de vie était, rappelons-le, de 52,7 ans en 1990: elle est de 56 ans en 2010. Il en est de même pour la mortalité infantile qui peut être élevée mais baisse: 12,5 pour mille au Botswana en 2009 à 8,9% en 2015, de 27 à 21 pour mille en Egypte... Là également, les chiffres peuvent être néanmoins particulièrement importants: 61 pour mille au Burundi, 88 pour mille au Tchad (98 pour mille en 2009)... 
  • Trois problèmes peuvent être vus comme symptomatiques des problèmes sanitaires africains: le paludisme, la maladie dite du sommeil et l'onchocercose. Le paludisme est tout simplement le problème sanitaire provoquant le plus de victimes, touchant particulièrement les enfants: le paludisme selon l'OMS aurait provoqué le décès de 272 000 personnes dans le monde et 94 % des décès sont en Afrique (24 % des décès sont au Nigeria, 11 % en RDC...). Un point positif: le nombre de décès entre 2000 et 2013 a baissé de 54%. Il est néanmoins toujours un fléau notamment pour les régions de l'Afrique équatoriale. Des efforts conséquents sont entrepris pour lutter contre ce fléau à la fois par les états africains et les organisations internationales (OMS...). Un des moyens de lutte est de détruire par des insecticides les zones où les moustiques porteurs sont présents mais cela pose d'autres problèmes comme les atteintes à l'environnement. Il n'existe pas encore de vaccins disponibles d'où la diffusion par l'OMS de moustiquaires de protection (300 millions entre 2008 et 2011). On constate dans le cas du paludisme qu'il y a bien un lien entre cette maladie et le développement. Les états pauvres ne disposent pas des moyens de lutte et sont dépendants de l'aide internationale. En plus, cette maladie ne bénéficie pas à l'inverse du SIDA d'une “publicité” mondiale pouvant permettre de mieux lutter contre elle. Toutefois, un Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme a été fondé en 2002 devant favoriser la lutte et la mise au point d'un vaccin. Autre maladie spécifique à l' Afrique: la maladie du sommeil (trypasonomiase) présente dans 36 pays d'Afrique subsaharienne. C'est une maladie liée à un parasite transmis par une mouche provoquant une perte du sommeil et conduisant à un coma. La particularité de cette maladie est qu'on pensait dans les années 1950-60 qu'elle avait disparu. 
  • Or, depuis plusieurs années, elle réapparaît en lien notamment avec les conflits. À la fin des années 2000, plus de 10 000 personnes décédaient en moyenne par an. Et selon l'OMS, elle menacerait environ 60 millions d'individus. Les états les plus touchés sont la RDC, le Soudan, l'Angola. Comme le problème semblait résolu, les différents états avaient dans les années 1970-1980 consacré moins de dépenses à la lutte contre cette maladie. Il faut donc relancer des politiques de lutte. Quant à l'onchocercose, elle est une maladie parasitaire endémique liée aux rivières et à l'eau, une maladie conduisant à la cécité (la cécité des rivières). 
  • Elle peut concerner 120 millions d'individus qui sont exposés à ce risque. L'OMS a lancé un programme de lutte en 1974 (programme de lutte contre l'onchocercose en Afrique de l'Ouest ), un programme couvrant une zone de 1 200 000 km carré afin de protéger environ 30 millions d'individus à la fois en utilisant des insecticides et un traitement à l'ivermectine. Ce programme ayant donné de bons résultats est arrêté depuis 2002 mais la vigilance s'impose toujours. Enfin, il est un fléau qui sévit particulièrement en Afrique c'est le SIDA: il s'agit du continent le plus touché par ce fléau. Près de 70% des individus sur la planète porteur du VIH à l'échelle mondiale) sont africains (25,7 millions d’Africains vivent avec le VIH) et près de 1300 enfants meurent chaque jour de cette infection. Les niveaux d'infection peuvent être très élevés comme en Afrique du Sud où près de de 6 millions d'individus sont porteurs du VIH, 3,6 millions au Nigeria ou encore 1,3 million au Zimbabwe. Dans des états comme le Lesotho (28% en 2006) ou le Swaziland la proportion de personnes porteuses du VIH dépasse les 20%. Dans 8 pays africains, 15 % des adultes sont infectés.. 
  • On note des infléchissements avec des décès liés au SIDA en baisse entre 2001 et 2012: 1,5 million en 2001 et 1,2 million en 2012. Les déplacements de population expliquent en partie l'expansion géographique du virus tout comme des comportements à risques (refus des préservatifs). Les pays les plus touchés par le SIDA ont vu leur croissance démographique ralentie et également une diminution de l'espérance de vie à la naissance. La pandémie du SIDA est vive en Afrique et là encore un lien peut être fait avec le niveau de développement. Les états d'Afrique n'ont pas les moyens de lutter efficacement surtout que les populations ne peuvent acheter les médicaments (trithérapies) même si l'Afrique du Sud a réussi contre les grands groupes pharmaceutiques mondiaux à imposer le droit de fabriquer des médicaments génériques au coût bien plus faible. Le coût des médicaments fabriqués par les groupes américains ou européens s'élève à 35 dollars par mois ce qui est trop élevé pour de nombreux africains. Les problèmes de santé sont le reflet des inégalités mondiales et des niveaux de développement différenciés. 
  • Ils sont aussi un défi supplémentaire à relever pour les Etats africains. Il est intéressant d’évoquer la crise sanitaire liée au COVID qui met en exergue les difficultés de l’Afrique notamment dans l’accès à la vaccination. 

c/ Un autre défi à relever: la condition des femmes

La situation des femmes en Afrique est difficile: les 410 millions de femmes africaines ont des conditions de vie et de travail éprouvantes et souffrent de fortes inégalités tant économiques que sociales ou culturelles. Pourtant le développement économique est lié à l'autonomisation des femmes: elles jouent un rôle fondamental dans les familles et les systèmes productifs. Bien qu'il y ait eu des conventions visant à améliorer la condition féminine comme la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (2007), les choses évoluent très lentement. Dans le cadre de cette convention signée par de nombreux états africains, seule l'Afrique du Sud a conçu des lois afin de réprimer les violences faites aux femmes. Pourtant c'est notamment par les femmes que les sociétés africaines peuvent changer 

 -une condition féminine qui reste problématique 

  • Pour reprendre une expression de Paul Du Chailu: “la femme est la bête de somme” de l'Afrique même si les situations peuvent être diverses selon les états et les sociétés. Les femmes souffrent socialement au niveau sanitaire: la surmortalité maternelle reste importante (1 femme sur 16 décède en Afrique subsaharienne suite à un accouchement), le SIDA déjà évoqué concernent à 58% des femmes... Autre problème essentiel: le problème éducatif. Elles sont globalement moins scolarisées notamment dans l'enseignement secondaire et le taux d'analphabétisme est plus important pour les femmes que pour les hommes. Les femmes sont également dominées et exploitées économiquement. Lorsqu'on évoque la femme qui porte en Afrique, c'est une réalité: elles travaillent durement dans les champs, portent le bois de chauffage, sont sujettes aux corvées d'eau. Enfin, il faut insister sur la domination sociologique. 
  • Les femmes sont dans des sociétés patriarcales reléguées aux fonctions d'entretien du foyer et de reproduction. Elles sont encore dans certaines sociétés un moyen d 'échange dans le cadre du mariage et pour certaines vivent dans des familles polygames. 
  • La situation des femmes s'expliquent par le poids des religions et des coutumes. Toutes les religions qu'elles soient traditionnelles ou monothéistes ont défini un statut des femmes à leur désavantage. Le mariage se fait dans des cadres bien précis (cadre coutumier) où les femmes ne choisissent pas leur époux: l'époux est le résultat du choix des parents suite à des arrangements entre familles. Certaines pratiques ont également toujours cours comme l'excision (Soudan, Mali...). Les situations de conflits dans de nombreux états ont accentué la difficile situation des femmes avec le viol utilisé comme arme de guerre comme en RDC, l'esclavage sexuel... 

 -mais quelques évolutions encourageantes 

  • Il faut dans ce cadre général souligner la diversité des situations selon les régions, les religions, les sociétés... La réalité est complexe. Ainsi, dans les états ou les sociétés où prédominent l'islam les situations sont variables: chez les Touaregs, les femmes ne portent pas le voile (à l'inverse des hommes) alors que dans certains états, elles doivent le porter (Soudan, Zanzibar...). Des états comme la Tunisie où dès 1956 une loi sur le statut personnel supprime la polygamie, instaure une procédure de divorce et permet seulement le mariage par consentement mutuel n'obéissent pas aux mêmes logiques que la Mauritanie ou le Soudan. Il en est de même au Maroc avec en 2003- 2004 les modifications apportées au code du statut personnel, la Moudawana: la famille est placée sous la co-responsabilité du mari et de son épouse, l'âge légal du mariage passe à 18 ans ( contre 15 ans auparavant), les femmes peuvent demander le divorce... 
  • Au Soudan, des châtiments corporels sont encore prévus pour les femmes pour certains délits, elles ne peuvent porter plainte en justice... Les villes sont un lieu où les femmes peuvent partiellement s'émanciper: il faut donc différencier la situation des femmes à la campagne ou en ville. On constate que les femmes notamment en villes peuvent exercer des emplois salariés dans le secteur tertiaire ou dans des entreprises. Les “mamas benz” illustrent ces évolutions. Il s'agit de femmes d'affaires d'états du golfe de Guinée qui ont réussi dans le commerce. On note aussi des progrès dans la vie politique où des femmes sont totalement impliquées comme Joyce Banda devenue présidente de la République du Malawi en 2012 jusqu’en 2014 ou Ellen Johson Sirleaf présidente du Liberia de 2006 à 2018 (première femme présidente en Afrique) et prix Nobel de la paix en 2011. En 2020, l’Ethiopie a une présidente : Sahle -Work Zehde tout comme la Namibie avec Saara Kuugongelwa. Bilan: A ces difficultés s'ajoutent les problèmes environnementaux. 
  • L'eau en est une illustration: l'Afrique a 9% des ressources mondiales en eau douce renouvelable pour 15% de la population mondiale. La démographie galopante, l'urbanisation... posent et vont poser des problèmes d'accès à cette ressource. Actuellement, c' est surtout l'agriculture qui est consommatrice d'eauà hauteur de 82%. par contre, les inégalités d'accès à l'eau potable sont fortes. Un bon exemple de ces problèmes environnementaux est le cas du lac Tchad, un lac partagé entre 4 états: cameroun, Niger, Nigeria et Tchad. Ce lac subit une forte évaporation liée à la présence proche du Sahara et sa surface est très variable, une surface qui pourrait être impactée par le réchauffement climatique. Sa surface est de 1350 km carré mais a été divisée par huit depuis 1973. Sa gestion est rendue délicate par l'environnement géopolitique qui est instable avec notamment la présence de Boko Haram. En 1963 a été créée une Commission du bassin du lac Tchad (CBLT) dont l'unn des objectifs est de réguler l'utilisation de l'eau du lac. Pour sauver ce lac, a été pensé un projet de transfert des eaux du bassin de l'Oubangui avec la construction d'un canal de plusieurs centaines de kilomètres mais son coût est évalué entre 7 et 14 milliards de $. 
  • Il faut ajouter que sur la zone du lac vivent 50 millions de personnes d'où la pression forte sur la ressource en eau et en 2050 on pourrait atteindre 130 millions d'habitants. Un autre enjeu est la déforestation qui est importante en Afrique: 14,2 millions d'hectares perdus entre 2010 et 2015. Parmi les états les plus concernés par la déforestation au monde, on trouve le Nigeria, la Tanzanie, la RDC et le Zimbabwe: ces états perdent entre 300 000 et 400 000 hectares de forêts chaque année. Les hommes sont les principaux responsables de cet état de fait par les défrichements pour des besoins agricoles, l'exploitation du bois, la consommation du bois (à lier avec la croissance démographique). Depuis quelques années, la forêt du bassin du Congo, longtemps préservée est menacée. C'est une forêt de 220 millions d'hectares sur 6 pays avec 100 millions d'habitants: RDC, Congo, Gabon, Cameroun, Guinée Equatoriale, République centrafricaine. 

 d/ De fortes inégalités 

 -des inégalités importantes à différentes échelles

  • Les inégalités sont importantes en Afrique avec la présence d’une extrême pauvreté. On note une baisse des taux de pauvreté à l’échelle de l’Afrique puisque la proportion de personnes vivant avec moins de 1,90$ par jour est passé de 47 % en 1985 à 39 % en 2017. En 2018, en Afrique subsaharienne, il y avait 413 millions d’individus vivant avec moins de 1,9 $ par jour. Plus de la moitié des pauvres dans le monde vit en Afrique. Incontestablement, l’extrême pauvreté se concentre sur le continent africain. Le taux d’extrême pauvreté est particulièrement important dans certains pays où il est supérieur à 70 % de la population : Madagascar, RDC, Congo, Mali, Guinée- Bissau... Par contre, il est inférieur à 20 % dans des pays comme la Namibie, le Botswana, l’Afrique du Sud...
  • La part d’Africains connaissant l’extrême pauvreté a sensiblement baissé sur le continent au cours des dernières décennies : il s’agit d’un certain progrès. Les inégalités sociales se creusent comme l’illustrent des pays comme l’Afrique du Sud, le Kenya... On peut mettre l’accent sur l’Afrique de l’Ouest où 30 % de la population vit avec moins de 1,9$ par jour. Surtout les 1 % les plus riches en Afrique de l’Ouest gagnent plus que le reste de la population. 
  • Au Nigeria, la richesse cumulée des 5 Nigérians les plus riches s’élève en 2018 à 29,9 milliards de $ plus que la totalité du budget du pays en 2017. Les inégalités sont assez prégnantes entre villes et zones rurales au profit des villes tout comme elles sont notables entre hommes et femmes au détriment de ces dernières.Enfin, se greffent les inégalités de développement que nous verrons ultérieurement. 

-une situation contrastée selon les Etats 

  • La pauvreté est plus ou moins forte selon les Etats. Le taux d’extrême pauvreté dépasse 70 % de la population en RDC, à Madagascar, au Congo ; dépasse 50 % au Mali, au Nigeria... La proportion est de moins de 20 % par contre dans des Etats comme le Botswana, la Namibie, la Mauritanie... L’indice de Gini mesurant les inégalités est un bon indicateur des situations en Afrique. Cet indice est supérieur à 50 (indice élevé) dans des Etats comme l’Afrique du Sud, la Namibie, la République centrafricaine.. Par contre, il est relativement faible (entre 30 et 35) dans des Etats comme le Tchad, le Mali...
  •  La part des revenus détenus par les 10 % les plus pauvres est de 3,3 % en Sierra Leone (2017), de 3,2 % au Niger, de 3 % en Guinée, de 2 % au Nigeria et même de 0,9 % au Lesotho. Inversement, la part des revenus détenus par les 10 % les plus riches est de 50,5 % en Afrique du Sud, de 47,3 % en Namibie, de 46,2 % en République centrafricaine, de 45,5 % au Mozambique...de 27 % au Liberia, de 27 % également au Niger...

2/ L'inégal développement: pourquoi?


L'une des préoccupations majeures de l'Afrique est le développement économique. En effet, lors des indépendances, les états africains sont dans une situation de retard, doivent faire face à des difficultés économiques et majeures. Encore aujourd'hui, ils sont confrontés à des défis économiques et sociaux dont celui du développement et de l'insertion dans le processus de globalisation. En 1962, Réné Dumont, un agronome, faisait paraître un ouvrage: L'Afrique noire est mal partie dans lequel il insistait notamment sur le fait qu'il était nécessaire de mettre l'accent sur l'agriculture vivrière afin de lutter contre le problème majeur de la faim. La notion même de développement pose problème: elle fut trop longtemps associée à des critères économiques comme le PIB ou le PNB. Charles Bettelheim (1913-2006) a notamment fortement interrogé la notion de sous-développement (il a été conseiller économique de dirigeants comme Nehru en Inde, Nasser en Egypte). 
Pour lui, ces états sont des “pays exploités, dominés et à l'économie déformée. Il pensait que les pays dits sous développés avaient évolué en même temps que les pays développés mais pas dans la même direction. Depuis, plusieurs années d'autres critères plus globaux et intégrants des aspects sociaux et culturels sont utilisés comme l'IDH ou l'IPH. Quoiqu'il en soit, le développement reste un élément essentiel des politiques économiques à mener. Dans les années 60, l'une des solutions envisagées est de créer des industries nationales dans les états africains. 
Plusieurs économistes pensaient que développer les exportations n'étaient pas nécessairement la solution notamment parce que les cours des produits exportés étaient souvent trop faibles. L'industrialisation paraissait la meilleure solution, une industrialisation fondée sur le rôle de l'état et un système de planification. 

 A/ Des stratégies de développement peu efficaces 

 Afin de réussir le développement, les différents états africains ont opté pour des stratégies dont peu se sont avérées réellement efficaces. Les états en développement ont plusieurs stratégies possibles: la stratégie consistant à privilégier les exportations en s'appuyant sur des avantages supposés (coût de la main d'oeuvre...); la stratégie dite des industries industrialisantes par laquelle on développe des industries en amont (généralement des industries lourdes) en comptant qu'elles aient des effets d'entraînement sur les autres industries (ce type de stratégie a été adoptée par l'Algérie) ou encore la stratégie de substitution aux importations où les états tentent de remplacer les produits importés par des productions réalisées localement. On peut aussi différencier des choix libéraux et une forme de socialisme à l'africaine. Certains états ont choisi une option libérale avec l'appel à des capitaux extérieurs et une ouverture de leurs économies aux entreprises étrangères comme l'a fait la Côte d'Ivoire. Mais même dans cette optique libérale, l'état avait son importance par la construction d'infrastructures notamment ou par des interventions dans le domaine agricole en essayant de soutenir les prix agricoles comme ce fut le cas en Côte d'Ivoire avec la Caisse de stabilisation et de soutien des prix à la production agricole créée dès 1960 (elle fixait les prix à la production). Le “socialisme à l'africaine” est une idée de Julius Nyerere mis en évidence dans sa déclaration d'Arusha en janvier 1967 (Tanzanie) voulant bâtir “un état socialiste”. La politique économique préconisée était fondée sur la priorité donnée à l'agriculture et sur une moindre dépendance à l'égard des aides extérieures. La société tanzanienne devait être réorganisée à partir d'une unité de base nommée ujamma c'est-à-dire des villages ruraux regroupés avec propriété collective des biens essentiels, priorité accordée aux cultures vivrières notamment. En 1975, 65% de la population était regroupée dans ces unités mais les résultats économiques ne furent pas à la hauteur. 

 a/ Des choix économiques peu probants

 Il faut rappeler que la colonisation et les puissances coloniales avaient imposé un système économique fondé sur l'exploitation de matières premières qu'elles soient minérales ou agricoles. Les états indépendants ont hérité de ce système. Ils ont aussi développé les ports et les zones portuaires sans forcément penser à développement équilibré des territoires. 

-des choix politiques internes contestables

  •  Les dirigeants et élites africaines ont maintenu les choix des puissances coloniales à savoir des économies fondées sur l'exploitation et les exportations de produits primaires. Ces exportations (Cacao, Café, Pétrole...) devaient, en théorie, apporter des capitaux afin de développer les infrastructures ( de communications notamment) et d'aménager les territoires. Ils ont maintenu des économies de rente: un maintien au profit des élites locales. Ces stratégies n'ont pas servi à développer un système productif diversifié. 

  • Dans ce cadre, les états ont tenté de jouer un rôle moteur en nationalisant des entreprises, en finançant des projets d'infrastructures afin de réaliser un maillage efficace des territoires. De plus dans les années 1960-70, dans le cadre d'une économie relativement favorable avec des cours des produits exportés intéressants, les états africains ont tenté de mettre en place des infrastructures porteuses de modernité et de croissance. Parallèlement, ces états ont également fait des emprunts pour financer de grands projets. Ils ont ainsi tenté de construire un secteur industriel mais sans penser à adapter ces industries aux besoins des populations ou en souhaitant des projets surdimensionnés et mal pensés. Parallèlement, de nombreuses entreprises nationalisées se sont retrouvées en déficit. 
  • Généralement, ces projets ont échoué: un échec qui est également liée à la concurrence des états asiatiques où les coûts de production étaient plus faibles. Ces politiques de grands travaux ont généré un accroissement de la dette alors que le développement était seulement en cours et que les économies n'étaient pas assez solides et structurées. La dette des états d'Afrique subsaharienne a fini par exploser: moins de 10 milliards de dollars en 1970, 45 milliards de dollars en 1980 puis 247 milliards de dollars en 2002. Une dette que les différents états ont des difficultés à rembourser.
  •  Il faut d'ailleurs savoir que le service de la dette (remboursements des intérêts) a conduit ces états dans des impasses: entre 1970 et 2002, les états d'Afrique subsaharienne ont remboursé et transféré vers les états développés l'équivalent de 268 milliards de dollars (pour la même période, ces états africains auraient reçu environ 294 milliards de dollars de prêts. La spirale de l'endettement a contraint les états africains à modifier leurs stratégies. 

 -des choix imposés de l'extérieur posant problème

  • Le poids des dettes a contraint les états africains à subir des choix imposés notamment par le FMI: c'est ce qu'on nomme les politiques d'ajustement structurel. Le FMI a imposé à de nombreux états des choix en contrepartie d'aides supplémentaire: libéralisation des économies, privatisations du secteur public, ouverture des marchés nationaux... Or ces choix imposés n'ont pas permis aux états de rétablir des situations difficiles: ils ont même accru les inégalités déjà fortes. 
  • Toutefois, ces dernières années devant l'ampleur des difficultés, les dettes ont été revues et allégées en particulier pour les états les plus pauvres. Le sommet du G8 de 2005 a ainsi permis d'annuler une partie des dettes afin qu'elles soient à des niveaux jugés plus supportables (25 % du PIB en 2010 contre plus de 85% en 2000) notamment pour les états les plus pauvres pour un montant de 40 milliards de dollars. Certains états sont encore très endettés comme l'Afrique du Sud (168 milliards de dollars en 2014), le Nigeria (54,8 milliards de dollars en 2014). 

 b/ Des politiques agricoles pas assez efficientes 

L'agriculture joue en Afrique un rôle considérable: environ 70% des populations vivent de revenus liés à celle-ci et 58% de la population active est agricole sachant que la part de la valeur ajoutée de l'agriculture dans le PIB n'est que de 14%. De plus, il faut nourrir des populations croissantes avec environ 218 millions d'Africains sous alimentés (55 millions d'enfants de moins de 5 ans souffrant de mal nutrition). Le nombre d'individus sous alimentés est estimé à 900 millions dans le monde: 25% sont africains. 

 -des systèmes agricoles à repenser ? 

  • Les systèmes agricoles africains ne sont pas assez efficaces. Le modèle agricole encore dominant en Afrique repose sur des exploitations familiales (souvent de moins de 5 hectares). Ce sont ces exploitations de dimension réduite qui assure les productions vivrières. Or, ces exploitations manquent de matériel et n'ont pas les moyens d'utiliser des intrants (machines,engrais...) afin d'améliorer la productivité. 
  • Parallèlement, les infrastructures notamment de transports sont insuffisantes lorsqu'il s'agit de transporter ce qui est produit. Dans certains cas, les conflits ou les effets du réchauffement climatique (processus de désertification) renforcent les difficultés. On peut aussi se demander si l’Afrique subsaharienne n’ a pas « manqué sa révolution verte » (Atlas de l’Afrique de l’AFD, 2020). Pourtant, entre 1990 et 2016 la production de nourriture par habitant a augmenté de 14,1 %. Les progrès sont liés à une extension des surfaces cultivées alors que l’agriculture africaine reste surtout une agriculture familiale plus qu’à une productivité supplémentaire 

 -des politiques agricoles aux résultats limités

  •  Au moment des indépendances, les états africains ont plutôt opté pour des politiques interventionnistes devant faire de l'agriculture un moteur de la croissance. Les états devaient être "producteurs, nourricier et promoteurs du développement agricole" (P.N Dieye). Puis avec les difficultés des années 1970 (baisse des cours), les états ont choisi des politiques d'ajustement libérales. Or quelque soit les politiques choisies, elles n'ont pas permis de régler les difficultés. L'agriculture est très présente dans les économies africaines faisant travailler une aprt importante des populations même si elle contribue de moins en moins au revenu africain brut (à hauteur de 15,6% en 2013). Les structures de production sont diverses avec des exploitations et enclaves capitalistes orientées vers l'exportation et une agriculture familiale dite de subsistance. Les politiques agricoles des différents états ne sont pas toujours efficaces.
  •  Il faudrait donner les moyens aux agriculteurs d'améliorer la productivité en particulier pour les 50% d'Africains vivant en zones rurales et ce dans le but d'assurer au moins l'autoconsommation. De plus, les cultures dites d'exportations peuvent poser des problèmes. Dans plusieurs états le choix a été fait de maintenir ce type d'agriculture soit dans le cadre de petites exploitations soit dans le cadre d'exploitations agro-industrielles. Or, ces cultures d'exportations (cacao, coton, arachide...) sont liées aux cours mondiaux: des cours en baisse depuis plusieurs années. De façon plus générale, ce sont les cultures de rente qui sont questionnées surtout avec des économies ouvertes sur les marchés mondiaux qui sont en concurrence avec des agricultures notamment des états développés ayant des subventions. Les producteurs africains dans cette configuration ont des difficultés à s'adapter. 
  • Les dirigeants africains n'ont pas toujours su mener des politiques efficientes souvent obnubilés par des projets d'envergure ne pouvant répondre aux besoins et aux exigences des populations. Les agricultures africaines sont confrontées à des changements importants: croissance démographique et urbaine, inadéquation entre une agriculture traditionnelle et une agriculture mondiale de plus en plus productive... 
  • Elles sont également confrontées à des enjeux internes qu'ils soient politiques ou économiques. Ainsi, en Afrique du Sud ou au Zimbabwe, se pose la difficulté de l'opposition entre les grandes exploitations des populations blanches et les petites propriétés des populations noires. Au Zimbabwe, la politique menée par le Président Robert Mugabe à partir de 2000 visant les fermiers blancs dont certains ont été expropriés a conduit à mettre le secteur agricole en difficultés. En Afrique du Sud où la logique entre grandes propriétés blanches et petites propriétés noires est la même, l'état a procédé à une réforme agraire sans résultat significatif mais qui accroît les tensions entre communautés. Il faut également insister sur le statut des terres: dans de nombreux états, la terre appartient à un lignage et non à des individus. Ce statut de la terre peut poser des difficultés puisque la terre ne peut être transmise par héritage ou vendue. Les paysans ont de ce fait des hésitations à investir et à moderniser des terres qu'ils ne possèdent pas. 
  • Il faut aussi évoquer le “land grabbing” ou accaparement des terres par lequel des terres sont cédées pour une longue durée (baux de 50 ans voire 100 ans) à des investisseurs étrangers (Chinois, Arabes...) au détriment des producteurs locaux . Ainsi, la firme indienne Ram Karuturi a loué 300 000 hectares de terre en Ethiopie (ouest de l'Ethiopie) pour produire de l'huile de palme et du riz. De plus, la libéralisation des marchés agricoles au niveau mondial ne favorise pas les états africains: ils ne peuvent rivaliser avec les agricultures productivistes des états développés ou des états émergents comme le Brésil. Il est nécessaire de mettre l'accent sur une situation problème: l'accaparement des terres ou land grabbing. 60% des transactions concernant l'achat de terres concernent l'Afrique. Ce land grabbing peut être perçu comme une façon de s'insérer dans la mondialisation mais aussi comme une nouvelle forme de colonisation.
  •  La forte hausse des prix de produits alimentaires en 2008 a conduit au renforcement de cet accaparement sachant que l'Afrique est vue à ce niveau comme la “dernière frontière”. Depuis une quinzaine d'années, les acquisitions de terres se sont développées par le biais d'achat et de baux de longue durée (jusqu'à 99 ans).Selon The Landmatrix partnership de 2000 à 2012 plus de 700 contrats d'achat ont été signés en Afrique subsaharienne pour une superficie correspondant à celle de la France. Il s'agit pour certains états non africains d'acquérir des terres pour satisfaire leurs propres besoins économiques ou alimentaires. L'achat de terres ou la course aux terres s'inscrit dans une logique particulière qui est l'insécurité alimentaire. 
  • Elle est également en lien avec les problèmes posés par les agro- carburants qui nécessitent des terres, avec la spéculation sur les matières premières agricoles. Il faut savoir que le coût est intéressant: en 2012 acheter un hectare en Sierra Leone coûte deux dollars, 6,75 dollars en Ethiopie contre 5 à 6 000 dollars au Brésil. Plusieurs états africains sont concernés: l'Ethiopie, Madagascar, le Soudan, le Mozambique mais aussi les deux Congo, le Mali... Les états acquéreurs sont principalement la Chine, l'Inde, l'Afrique du Sud, l'Arabie saoudite, les Emirats arabes unis donc des états émergents ou producteurs de pétrole. Il faut préciser que les terres vendues ou cédées ne sont pas systématiquement des terres libres de droits: certaines sont des terres collectives répondant à un usage défini par la coutume. Ces terres acquises sont destinées à différentes cultures: production d'agrocarburants, cultures florales destinées au marché européen, canne à sucre... soit des cultures non destinées au marché africain. Les acteurs du land grabbing sont des entreprises privées mais aussi des fonds souverains originaires d'Europe, d'Amérique du Nord, du Golfe persique et des états émergents comme la Chine, l'Inde, la Malaisie... sans oublier des groupes sud-africains présents dans 28 pays tout de même.
  •  Ce land grabbing pose de nombreux problèmes : le respect des droits des agriculteurs locaux, le choix des productions opérés parfois étonnant (fleurs), la perte de contrôle des Africains de leurs terres, une perte pouvant être vue comme une nouvelle forme de colonisation... Les terres achetées sont rarement libres contrairement à une idée reçue: elles sont le plus souvent des terres d'usage coutumier, servent comme espaces de pâtures ou de réserves forestières... De plus, on sait que 60% des terres achetées sont destinées aux agrocarburants (source Oxfam) dans des états qui souffrent de pénurie alimentaire. L'accaparement des terres n'est pas spécifique à l'Afrique et de façon globale il interroge sur les statégies des initiateurs de ce mouvement. Plusieurs facteurs expliquent la volonté d'acheter des terres: développer les biocarburants, avoir de nouveaux approvisionnements avec des terres vues comme des ressources stratégiques, spéculer sur des produits agricoles (de grands groupes comme Monsanto, Limagrain, le groupe financier américain Morgan Stanley... sont dans cette logique spéculative). 
  • Pour certains, le land grabbing est un mode particulier d'insertion dans la mondialisation. Ce land grabbing nécessite une sérieuse réflexion voire une autre gouvernance des terres. Certains réclament la sécurisation des droits traditionnels des agriculteurs: un état comme le Rwanda va dans ce sens. Plusieurs états cherchent des solutions plus pertinentes en soutenant leur agriculture comme le Malawi qui consacre 10% de son budget à l'agriculture ce qui a permis de la relancer. Il faut mettre l'accent sur le fait que le continent africain n'est qu'une “pièce du monopoly foncier” mondial où la terre est devenue une ressource stratégique clé. Les terres cultivables se raréfient: elles ont seulement augmenté de 3,2% entre 1980 et 2011 alors que la population mondiale a elle augmenté de 45% sur la même période. 
  • De plus, des terres deviennent inutilisables par l'érosion, la salinisation ou disparaissent sous l'effet de l'étalement urbain. L'achat de terres est complexe car il répond à plusieurs objectifs: répondre à la croissance de la population qu'il convient de nourrir, la volonté de plusieurs états de diversifier leurs approvisionnements comme la Chine, développer les agrocarburants devenus à la mode alors qu'ils sont contraires à la logique de produire pour nourrir les hommes, sécuriser pour certains états leurs approvisionnements comme les états du Golfe... 
  • C'est aussi un placement spéculatif pour des groupes financiers ou agroalimentaires. L'Afrique subsaharienne s'inscrit donc dans ce contexte mondial. On peut imaginer des révolutions agricoles en Afrique sachant que l’agriculture africaine joue un rôle important faisant travailler des millions d’individus qui dans d’autres pays par le biais de la modernisation et de la mécanisation ont été « absorbés » par l’industrie. Il faut des transformations certes mais progressives pour ne bousculer ce secteur fondamental avec une certaine mécanisation, la meilleure organisation des filières agricoles... 

 Bilan: 

  •  On peut prendre le Kenya comme une illustration de ce que peut-être l'agriculture africaine puisque l'agriculture représente 75% de la population active, contribue à 30% du PIB et plus de 50% des exportations du pays. On peut y différencier une agriculture exportatrice d'une agriculture vivrière classique. Dans cet état, les terres exploitées se concentrent dans le centre- ouest du pays là où les conditions sont favorables aux activités agricoles mais aussi sur le littoral. 
  •  Dans ce pays moins de 2% des terres sont irriguées ce qui est peu par rapport à d'autres états. C'est une agriculture de plantation (avec de grandes exploitations dans cerains cas) avec thé, café, canne à sucre, tabac héritière de la colonisation mais aussi une agriculture vivrière avec la production de maïs, riz, sorgho... et des exploitations de type familial. Il existe une agriculture d'élevage et se développe depuis quelques années l'horticulture (sous serre) en pleine expansion. Cette dernière occupe désormais 600 000 hectares soit 12% des terres cultivées faisant travailler de manière directe ou indirecte 8 millions de personnes. 
  • Cette horticulture est insérée dans la mondialisation (culture des roses): les entreprises horticoles sont pour certaines des entreprises hollandaises délocalisées (coûts de production faibles au Kenya). On a l'impression que l'agriculture kényane est performante mais la sécurité alimentaire n'est jamais garantie avec une multiplication des sécheresses, des difficultés politiques. La pauvreté dans le monde rural est importante car la moitié des ruraux vit avec moins de 1,25 $ par jour (contre 15% des urbains). 
  • Le Kenya illustre donc plusieurs aspects de l'agriculture africaine: une agriculture pouvant être insérée dans la mondialisation, une agriculture duale avec de nombreuses petites exploitations et quelques grandes exploitations dynamiques, une agriculture qui est une des bases fondamentales de l'économie du pays mais avec une pauvreté importante dans le monde rural... 

B/ La dépendance de l’ Afrique : un frein au développement 

 a/ Une dépendance alimentaire... 

 La question alimentaire reste donc fondamentale: elle est toujours l'un des problèmes majeurs du continent. L' Afrique connaît de façon régulière des crises alimentaires: elles ne sont pas une nouveauté. L'Afrique subsaharienne en particulier est concernée par la fragilité alimentaire pouvant apparaître comme chronique car d'origine structurelle. L'agriculture est donc bien au coeur des défis à relever si les états concernés veulent parvenir à nourrir leurs populations (des populations en croissance qui plus est). « La question alimentaire est stratégique en Afrique. » (P. Hugon et J-C Servant) 

 -la permanence de la fragilité alimentaire

  •  Dans le monde en 2015, 795 millions de personnes souffrent de la faim selon le programme alimentaire mondial (plus de deux milliards connaissent la sous nutrition et l'Afrique subsaharienne est la zone la plus touchée. En 2019, c’est encore près de 690 millions de personnes qui souffrent de la faim selon l’ONU. En Afrique subsaharienne, individu sur 4 (24%) est en sous alimentation chronique (environ 250 millions d'individus en 2019). 
  • Pour la FAO, la sous alimentation est une situation se prolongeant au moins une année pendant laquelle un individu ne peut satisfaire ses besoins quotidiens (pour la FAO, la faim est une sous alimentation chronique). En 2015, certains états ont une sous alimentation supérieure à 35% de la population ce qui est considéré comme un pourcentage très élevé: République centrafricaine (2,3 millions entre 2014-16), Namibie(1 million) ou entre 25 et 34,9 ce qui est considéré comme élevé par la FAO: Tchad (4,7 millions), Ethiopie (31,6 millions), Tanzanie (16,8 millions)...
  • La crise sanitaire actuelle liée au Covid devrait accroître les difficultés. Ainsi en Afrique centrale et de l’Ouest, on estime que 57,6 millions d’individus seront concernés d’ici la fin de l’année 2020 contre 36 millions avant le début de la crise sanitaire. On note de façon générale une dégradation de la situation alimentaire mondiale, une dégradation affectant notamment l’Afrique. Pourtant la récolte mondiale de grains (blé...) a été exceptionnelle à l’échelle mondiale. 
  • Les pays d’Afrique sont toujours les principales victimes de ce qu’on nomme « la sismicité alimentaire » en lien avec les conflits, les effets du réchauffement climatique. Le global Report on Food Crisis 2019 du Food Security Information Network mettait en évidence que sur les huit pays classés en situation de crise alimentaire 5 sont africains : RDC, Soudan, Soudan du Sud, Ethiopie, Nord du Nigeria. Ce rapport différencie les situations avec les crises alimentaires puis les situations d’urgence et enfin les situations les plus graves à savoir les famines. Le rapport de 2020 identifie 135 millions de personnes en situation de crise alimentaire ou pire dont 73 millions en Afrique. La RDC est le pays africain le plus touché avec 15,6 millions (les deux autres pays les plus touchés sont le Yémen et l’Afghanistan). 
  • Dans le top 10 des pays les plus affectés en plus de la RDC ,on retrouve l’Ethiopie, le Sud Soudan, le Soudan et le Nord du Nigeria comme en 2019. Dans l’Est de l’Afrique, 27 millions de personnes sont concernées par une crise alimentaire ou pire dont 8 millions en Ethiopie, 7 millions au Sud Soudan...en lien avec les conflits, la crise économique mais aussi les déplacements de populations (les déplacés souffrent particulièrement de l’insécurité alimentaire. Dans le sud de l’Afrique sont affectés 30 millions d’individus dont plus de 15 millions en RDC. En Afrique de l’Ouest, au Sahel et au Cameroun, ce sont 12 millions de personnes dont 5 millions au Nigeria. Certes, des progrès sont constatés puisque le nombre d'individus sous alimentés est passé de 33% en 1990-1992 à 25 % en 2011-2013. 
  • Toutefois, la sous alimentation reste trop élevée sans parler en plus de ce qu'on nomme la “faim silencieuse” à savoir la malnutrition et ses effets sur la santé. Cette faim concerne notamment les enfants où 21% des enfants de moins de 5 ans (32 millions) souffrent d'insuffisance pondérale provoquant des retards de croissance (58 millions d'enfants ont ce type de retard en 2015). Les problèmes sont donc bien présents avec des crises alimentaires apparaissant comme récurrentes. Ces crises ont des origines diverses pouvant se mêler: insuffisance des productions liées aux aléas climatiques,problèmes de logistique et d'acheminement des productions, hausse des cours mondiaux, guerres... (voir ci dessous) 

-...et une une insécurité alimentaire qui demeure dans certaines régions

  • On peut même parler dans de nombreuses zones d'insécurité alimentaire. De états souffrent de cette insécurité en cumulant des conflits, des problèmes climatiques et la pauvreté des agriculteurs qui manquent de moyens... De ce fait, plusieurs états sont sous “perfusion” et les populations sont dépendantes de l'aide internationale par l'intermédiaire d'ONG ou du programme alimentaire mondial. Des pays sont dans des situations très délicates comme le Tchad, la Somalie, le Soudan ou la RDC. Les crises alimentaires sont récurrentes en Afrique subsaharienne notamment dans la corne de l'Afrique (Ethiopie, Somalie...). 
  • Selon l'ONU la plus grave crise alimentaire de ces 20 dernières années est celle que connaît l'Afrique de l'Est (la corne de l'Afrique) provoquée par une conjugaison de facteurs: hausse des prix, aléas climatiques, pression démographique, guerres qui amplifient les difficultés... Cette situation s'explique donc par des guerres qui impactent les populations et l'agriculture mais aussi le processus de désertification et le poids d'une démographie galopante. 
  • Les augmentations des prix des produits alimentaires rendent la situation encore plus complexe d'où des émeutes de la faim comme à Madagascar en 2009. Les “émeutes du pain” sont de plus en plus fréquantes. Les états sont donc dépendants car ils n'ont pas les moyens de lutter contre ces crises surtout lorsqu'elles sont chroniques. L'ONU joue dans ce cadre un rôle important par le biais de son programme alimentaire mondial déjà évoqué (PAM). Mais des états comme les Etats-Unis (US aid + programme Food for development) ou l'Union européenne participent à des actions d'envergure. L' Afrique reçoit d'ailleurs le tiers de l'aide alimentaire mondiale. 
  • Cette dépendance alimentaire peut être instrumentalisée: on parle d'arme alimentaire (Food power) au profit des grandes puissances. Elle est aussi un enjeu interne: l'aide peut être détournée comme ce fut le cas au Tchad, au Zimbabwe ou en Ethiopie par les dirigeants locaux. Pour répondre aux difficultés, les états sont contraints d'importer ce qui est renforcé par la croissance démographique et la hausse de la demande. Dans les états d'Afrique subsaharienne mais aussi en Afrique du Nord, les hausses de production ne peuvent permettre de répondre à cette demande en hausse. Il faut savoir que les campagnes dans de nombreux cas ne peuvent plus répondre à la demande croissante des villes surtout avec une urbanisation croissante. Ces importations sont pénalisantes avec la hausse des prix alimentaires sur les marchés mondiaux (Aflation= inflation des produits alimentaires) : ainsi, en juin 2016, les produits alimentaires ont connu une hausse de 4,8% selon la FAO (de mai à juin = + 14% pour les cours du sucre). 
  • Entre 2005 et 2008, la hausse avait été de 75% (à l'origine des diverses émeutes de 2008-2009): une hausse s'expliquant par des déficits de productions de céréales dans certains états (Australie, Canada), une baisse des stocks mondiaux depuis les années 1990, la hausse du coût des engrais et carburants, la demande croissante pour les biocarburants, la hausse de la demande sans oublier la spéculation sur les produits alimentaires. Une partie des difficultés s'expliquent par les conditions naturelles (“dictature de l'aridité”) avec de trop fortes irrégularités pluviométriques renforcées par le réchauffement climatique sans oublier les effets négatifs du surpâturage, du déboisement... Parallèlement, la productivité agricole reste trop faible pour répondre aux besoins avec en Afrique subsaharienne un retard à la fois technologique et en matière d'irrigation. 
  • Les états d'Afrique subsaharienne mais aussi les états d'Afrique du Nord (et du PMO) sont donc dépendants au niveau agricole. L'Afrique du Nord et le PMO est notamment très dépendante du commerce et des importations de céréales. L'aide alimentaire est aussi une dépendance: les deux tiers de l'aide alimentaire mondiale sont destinées à l'Afrique avec un rôle important joué par l'ONU avec la mise en place de son programme alimentaire mondial (PAM créé en 1961). Actuellement, le PAM est très présent dans la corne de l'Afrique avec une importante aide alimentaire destinée au Soudan, à la Somalie... 

 b/ Une dépendance qui est aussi financière et technologique 

A la dépendance alimentaire s'ajoutent une dépendance financière et technologique qui accentuent les difficultés des états africains. 

 -l'endettement : un fardeau

  •  Comme nous l'avons vu, les états africains sont endettés: la dette est pour eux un fardeau qui freine le développement. En effet, le remboursement de la dette est une contrainte mais aussi une dépendance à l'égard des états et banques des pays développés. Les états africains sont obligés de suivre des politiques voulues par les créanciers (FMI): ils perdent de leur souveraineté. 
  • Les années 1980 ont vu la mise en place des programmes d'ajustement structurel (PAS) voulus par le FMI et la banque mondiale. Il s'agissait de changer la donne économique en réduisant la dette en promouvant des réformes notamment structurelles (libéralisation, privatisations...). Ces programmes en cas d'acceptation conditionnent de nouveaux prêts et l'aide publique au développement (APD). 
  • Or ces politiques d'ajustement structurel n'ont pas eu d'effets réellement positifs et n'ont pas alléger le fardeau de la dette. D'ailleurs les états développés ont fini par opter par une autre solution pour régler la dette: l'aide publique devenant une remise de dettes. Le G 20 de 2005 a permis une telle remise de dettes pour 14 états d'Afrique subsaharienne (Bénin, Burkina-Faso, Ethiopie, Ghana, Madagascar...). Ces remises de dettes soulignent précisément le fardeau qu'elle représente pour les pays en question. 

 -une dépendance technologique trop forte 

  • La dépendance est technologique: les états africains pour mener à bien leurs projets ont besoin des technologies occidentales et de leurs ingénieurs. L'Ethiopie a un projet déjà avancé de barrages dans le but d'accroître les surfaces irriguées et de produire de l'électricité. Ce projet est financé par des investisseurs chinois et mis en oeuvre par des ingénieurs chinois. Le développement des réseaux de communication est également le résultat de projets occidentaux: Le groupe Bolloré investit dans la mise en oeuvre d'une partie des réseaux ferrés. Au niveau de la téléphonie, les premiers opérateurs par manque d'intérêt des opérateurs des pays développés étaient africains comme Telecel une société congolaise (RDC) puis a été achetée par un groupe égyptien : Orascom. Actuellement, des groupes comme Orange ou Vodaphone se montrent intéressés. 
  • Dès lors, comme souvent, les états et les groupes africains risquent de se trouver sous la dépendance d'opérateurs extérieurs à l'Afrique. On peut également ajouter à cette dépendance technologique une dépendance culturelle liée aux technologies: les principaux programmes d'informations, de divertissement proviennent de télévisions américaines, européennes (France 24 pour les pays francophones ou la BBC pour les pays anglophones). 
  • La chaine al Jazeera est également présente. Le contrôle des satellites par les principales puissances économiques rend possible une telle dépendance. Ce qui est certain est que le continent africain se doit de « réduire le fossé numérique » (P.Hugon et J-C Servant) bien que des progrès soient constatés. En 2005, seulement 15 Etats africains avaient accès à Internet hors des capitales de pays en question. En 2019, 35,9 % des Africains ont accès à Internet (9,2 % des familles sont équipées d’un ordinateur). Le nombre de téléphones portables dont disposent les Africains augmente également avec 456 millions d’Africains ayant un téléphone portable (44 % des Africains donc) sachant que plus de 50 % des connexions Internet passe par le téléphone mobile. Mais les Etats africains restent parmi les moins connectés au monde : d’ailleurs 50 % des Internautes en Afrique de trouve en Afrique du Sud, au Nigeria et au Kenya. Dans plusieurs Etats, la part des utilisateurs d’Internet est inférieure à 10 % de la population : Tchad, Niger, République centrafricaine, Somalie... 
  • Les firmes étrangères s’intéressent à ce marché africain et les firmes chinoises Huawei et Transsion sont les vendeurs de smartphones les plus présents en Afrique avec plus de 73 % du marché. Transsion, une firme créée en 2006, est même le champion chinois du téléphone mobile sur le continent : il contrôle plus de 48 % du marché africain (pour les mobiles de base à moins de 10 euros et pour les smartphones d’entrée de gamme. Le développement des NTIC en Afrique devrait modifier les économies et sociétés africaines. Néanmoins comme l’écrivent P. Hugon et J-C Servant, il faut se méfier du « mirage numérique ». Les opérateurs des marchés de hautes technologies en Afrique sont des opérateurs étrangers notamment chinois et les firmes africaines sont à la marge tant au niveau du matériel que des logiciels même si des start-up africaines émergent. Une firme sud-africaine comme MTN est néanmoins présente dans le domaine des télécommunications avec une présence dans 22 pays africains. MTN est le 1er opérateur télécom en Afrique. Internet peut être perçu comme la nouvelle frontière technologique en Afrique et se pose comme enjeu pour les Etats africains « l’enjeu de la souveraineté numérique » (Atlas de l’Afrique, AFD 2020). Bilan : facteurs du mal développement. Pour expliquer le mal développement, on s’appuie sur plusieurs facteurs sur lesquels nous reviendrons. Certains mettent l’accent sur la démographie, les choix politiques et économiques de dirigeants africains...
  • Le mal développement de nombreux états africains s'expliquent en fait par des facteurs conjugués qu'ils soient économiques, sociaux ou politiques. Tout d'abord, il existe des facteurs politiques expliquant les difficultés de l'Afrique. L'instabilité, les crises multiples et les conflits ne favorisent pas le développement: certains cas sont même dramatiques comme la Somalie ou le Soudan. De plus, les élites sont souvent corrompues et captent une partie notable des rentes qui ne sont pas de ce fait redistribuées ou réinvesties. L'instabilité de nombreux états ne permet pas de donner confiance aux investisseurs locaux ou internationaux. 
  • A ces facteurs politiques se greffent des facteurs juridiques et institutionnels. L'état régulateur n'est pas toujours présent et loin d'être efficace, les normes juridiques ne sont pas toujours très claires et appliquées... Ce flou a permis le développement d'un secteur informel qui n'est pas pris en compte comme un élément de développement. Les facteurs sociaux comme l'analphabétisme, la démographie dynamique, le statut défavorisé des femmes ... renforcent le mal développement. Plusieurs facteurs économiques expliquent aussi ce développement difficile: les choix de développement notamment le choix de maintenir des économies de rente mais aussi un taux d'épargne faible ou des investissements peu utiles ce qu'on nomme les “éléphants blancs” comme la Cellucam, une entreprise du Cameroun créée en 1976 et qui devait fonctionner à partir de 1981 devant en théorie produire de la cellulose et qui n'a jamais marché ou encore le projet Big Inga en RDC , un projet géant de barrages hydroélectriques lancé en 2011 pour un coût évalué entre 80 et 100 miliards de dollars dont l'un des buts est d'exporter de l'électricité notamment vers l'Afrique du Sud alors que 90% des Congolais n'ont pas accès à l'électricité...
  • Les infrastructures de communication ne sont pas assez performantes et nombreuses, le cadre juridique pour les affaires est vague avec en plus un haut niveau de corruption qui n’incite pas toujours à investir en Afrique, la productivité est trop faible... Les économies africaines ont donc des faiblesses délicates à surmonter. P.Hugon et J-C Servant différencient les « déterminants internes et externes ». Ils soulignent que le modèle d’exportation des produits primaires (agricoles, minerais...) n’ a pas permis de diversifier les économies notamment sur le plan industriel (Maurice et le Botswana sont des exceptions).

3/ Comment réussir le développement et l'intégration au processus de mondialisation ?


Contrairement à une idée reçue, les états africains participent à la mondialisation. Néanmoins, l'intégration à la mondialisation est inégale selon les différents états. L'insertion dans la globalisation peut être un moyen de réussir le développement: elle peut être vue comme un vecteur de croissance. Comme l'écrivent G.Magrin, A.Dubresson et O.Ninot dans l'Atlas de l'Afrique, Un continent émergent ? : “L'Afrique occupe une place incertaine dans l'analyse actuelle des recompositions liées à la mondialisation, marquées par l'émergence de l'Asie et le déclin relatif de l'Europe et des Etats-Unis. Demeure-t-elle le continent de la pauvreté, marge instable en proie aux désastres sanitaires, aux crises environnementales et aux conflits? Ou bien est-elle la dernière frontière du capitalisme mondial, en cours de transformation grâce à ses ressources naturelles et à sa poussée démographique et urbaine?”. Pour P.Hugon et J-C Servant, « en Afrique, la mondialisation achève la colonisation. 
Elle crée de nouvelles opportunités et conduit à des interdépendances économiques. » Pour plusieurs spécialistes, les années 2000 marqueraient un décollage économique de l'Afrique (voir les rapports du FMI ou du Mc Kinsey Global institute). Les taux de croissance comme nous le verrons plus loin sont importants puisque supérieurs à 5% par entre 2000 et 2011. On constate également que les 500 plus grandes firmes africaines ont triplé leurs chiffres d'affaires depuis ces années 2000 (700 milliards de dollars en 2010) et en 2015, 21 firmes africaines figurent parmi les 2000 FTN les plus performantes au monde. Mais il faut se méfier de cette croissance.En effet, une partie de cette croissance était tirée par des cours de matières premières élevés et ce sont ces matières premières qui dynamisent notablement les économies africaines.Or depuis 2014, ces cours sont en baisse (pétrole notamment). De plus, ces taux de croissance cachent des situations diverses et n'ont guère permis d'atténuer les inégalités sociales. Un point positif néanmoins: le pourcentage de consommateurs ayant plus de 5000 dollars progresse (de 3,5 à 4,3%) ce qui montrerait le développement d'une classe moyenne. 
On peut déterminer quatre temps dans l'insertion de l'Afrique dans la mondialisation avec le passage d'économies protégées à des économies de plus en plus ouvertes. Le premier moment est le temps des politiques dites volontaristes avec un rôle important joué par l'état correspondant aux années 1960-1974. 
Lors de ces années post indépendances, il s'agit pour les dirigeants des états africains de construire l'état et la nation, de structurer les territoires (maillage du territoire) tout en promouvant le développement économique et sociale (efforts dans les domaines de l'éducation, de la santé...) tout en essayant de contrôler la croissance démographique. 
Pendant cette phase, l'état a un rôle moteur par les politiques qu'ils mènent qu'elles soient agricoles ou industrielles. Les états ont adopté des stratégies en particulier celle d'une politique de substitution des importations tout en procédant à des nationalisations d'entreprises. C'est une phase de dirigisme économique devant, en théorie, permettre le développement. 
La seconde phase est celle des années 1975-1985, une phase particulière avec un ralentissement économique mondial et surtout une période marquée par un endettement de plus en plus significatif. Durant cette période délicate, l'état reste présent mais la politique de substitution aux importations rencontre des difficultés. La troisième phase correspond au Consensus de Washington entre 1980 et 2000: une phase dite d'ajustement et de stabilisation. Il s'agit de réduire l'endettement tout en libéralisant les économies. Les monnaies sont dévaluées, les déficits publics doivent être atténués...
 Dans cette optique, les entreprises publiques sont privatisées, les marchés libéralisés avec notamment une baisse des droits de douane. Il s'agit d'ouvrir les économies tout en accordant moins de place à l'état. Cette politique n' a pas réellement permis de baisser le niveau d'endettement et de relancer une croissance importante. La quatrième phase, de 2000 à 2017, est une phase où on met l'accent sur la lutte contre la pauvreté et la “bonne gouvernance”. 
Il s'agit de privilégier plusieurs aspects en même temps: lutter contre la corruption, rendre le marché du travail plus flexible, respecter les règles fixées par l'OMC, mettre en oeuvre des politiques de lutte contre le fléau de la pauvreté... C'est aussi une période d'allègement de la dette voire de son annulation (au moins pour les PMA). Nous pouvons rappeler que le PIB de l’Afrique subsaharienne s’élève en 2018 à 1743 milliards de $ ce qui reste très modeste. En comparaison, ce PIB est de 3534 milliards de $ pour l’Afrique du Nord et le Moyen- Orient, de 3677milliards pour l’Asie du Sud (Inde, Bangladesh, Sri Lanka...). En 2019, la croissance en Afrique subsaharienne est de l’ordre de 3,2 %. 

 A/ Un début d'intégration à la mondialisation : un vecteur de développement 

 Certes, la participation de l'Afrique aux échanges mondiaux est encore faible: moins de 5% des échanges mondiaux mais elle est devenue assez attractive comme nous l'avons déjà souligné et s'insèrent peu à peu dans le processus de globalisation. L'insertion dans la mondialisation n'est pas récente: par l'intermédiaire du commerce triangulaire, des échanges avec le monde arabo- musulman ou encore les échanges avec le monde indien, l'Afrique participait déjà aux 15e-16e siècles aux échanges internationaux. Le continent africain entre 1990 et 2000 a vu sa part des échanges extérieurs passer de 51 à 65% de son PIB mais, parallèlement sa part dans le commerce mondial a diminué. 

a/ Des dynamiques d'intégration réelles à la mondialisation restant encore partielles

  • Actuellement, les dynamiques d'intégration sont incontestables bien qu'elles soient encore limitées. Mais progressivement, cette intégration se développe ce qui est une source d'espoirs pour un avenir proche. Il fallait d'abord sortir de l'engrenage de l'endettement pour des états fortement endettés et qui s'endettaient pour financer leurs dettes. 
  • La dette a baissé grâce aux mesures d'allègement des dettes (mesures initiatives d'allègement de la dette multilatérale et PPTE = pays pauvres très endettés). Néanmoins depuis deux ou trois ans, la dette de plusieurs pays augmente. La dette africaine en 2018 atteint environ en moyenne 58 % du PIB 

-une Afrique qui s'intègre progressivement à la mondialisation

  • Tout d'abord, il faut remarquer les taux de croissance des économies africaines qui sont en moyenne supérieurs à 5,1% entre 2013 et 2014 avec sur une période de dix ans, entre 2000 et 2010 de 5% (1,2% pour les états développés). En 2018, sur les 10 états ayant le plus fort taux de croissance dans le monde 6 sont Africains dont le Ghana avec 8,3%, l’Ethiopie avec 8,2% respectivement aux deux premières places devant l’Inde et ses 7,3%. La Côte d’Ivoire est au 4e rang mondial avec 7,2%, Djibouti au 5e rang avec 7%. En 2019, certains taux de croissance restent importants : 5,2 % à Madagascar, 6,6 % au Bénin, 7,5 % en Côte d’Ivoire, 7,5 % au Ghana ou encore 7,4 % en Ethiopie...Signalons que plusieurs Etats ont des croissances pouvant être limitées : 1,8 % pour le Mozambique, 0,4 % pour le Liberia voire négative pour la Guinée équatoriale avec moins 4,6 % ou encore moins 7,1 % pour le Zimbabwe. 
  • Ces taux de croissance forts pour plusieurs Etats indiquent que les états africains sont créateurs de plus en plus de richesses. Mais les fort taux de croissance ne signifient pas nécessairement un développement accentué ou encore une meilleure insertion dans la mondialisation : la réalité est plus complexe.. Néanmoins, ils sont inégaux: les pays bénéficiant des taux les plus importants étant les états producteurs de pétrole comme l'Angola ou des états ayant des ressources minières. D'autres ont une croissance qui reste faible comme les états en guerre ou ayant subi une longue période conflictuelle comme le Liberia, la Sierra Leone. De façon générale et à différentes échelles, la croissance est inégalitaire. Elle profite aux plus riches, un peu aux classes moyennes qui se développent mais pas ou très peu aux plus pauvres. Certes, selon les Nations unies, le taux d'extrême pauvreté (mois de 1,25 $ par jour) a baissé depuis les années 1990 passant de 56% à 41% en Afrique subsaharienne mais il reste important. 4 états concentrent 52% des pauvres: la RDC, le Nigeria, l'Ethiopie et la Tanzanie. 
  • Les écarts entre riches et pauvres sont très importants et en 2015 sur les 10 états au plus fort coefficient de Gini, 7 sont africains (Afrique du Sud, Angola,Namibie, république centrafricaine...) . La croissance a ainsi bénéficié aux plus aisés: les 160 000 africains les plus riches (New World Wealth) cumulaient en 2014 660 milliards de $. Le poids de l'Afrique dans le commerce mondial reste faible, autour de 3% de ce commerce, mais ce poids ne cesse de croître notamment en lien avec la demande de plus en plus importante de minerais et de produits énergétiques. L'Afrique est une région qui exporte des produits bruts ce qui est une façon de s'insérer dans les échanges mondiaux.
  •  L' Afrique subsaharienne dispose de seulement 5% des réserves mondiales de pétrole et assure 7% de la production mondiale mais son potentiel n'est pas encore totalement exploité ce qui laisse augurer un avenir intéressant. Les hydrocarbures et les produits miniers représentent 65% des exportations africaines ce qui est positif mais aussi un signe d'économies de rente peu diversifiées.Ces ressources sont exploitées par des FTN notamment des anciennes puissances coloniales comme Shell et BP au Nigeria ou Total au Gabon mais aussi américaines comme Chevron Texaco en Angola ou Mobil en Angola et au Tchad.
  •  L'intérêt de ces FTN pour l'Afrique, même si il est contestable, est également un signe de l'insertion dans la mondialisation. L'insertion dans la mondialisation se réalise par les technologies de l'information et de la communication. On constate un réel développement à ce niveau: c'est l'Afrique qui a ainsi connu le développement le plus rapide de la téléphonie mobile passant de 87 millions d'utilisateurs en 2005 à 687 millions en 2015 et en théorie le taux de pénétration du smartphone devrait atteindre 70% en 2024 (selon un rapport du groupe Ericsson). Environ 330 millions d’Africains possèdent un smartphone en 2016 et on devrait atteindre 660 millions fin 2020. Certes, l'Afrique subsaharienne est encore loin de l'équipement des pays les plus développés que ce soit au niveau des lignes téléphoniques, des ordinateurs et du réseau internet. Mais des progrès sont constatés en particulier au niveau de la téléphonie mobile.Internet progresse également: 50 millions d'internautes en 2007, plus de 400 millions en 2019. Les états les plus connectés sont le Maroc, les Seychelles, le Cap Vert et l’Afrique du Sud. En 2017, c’est l’ Afrique subsaharienne qui a connu le plus fort taux de croissance d’internautes au monde. 
  • Le processus n'en est qu'à ses débuts mais il est le signe d'une insertion dans la globalisation Le secteur des télécommunications aurait contribué à 5,7% du PIB en 2014 soit 102 milliards de $ (selon GSM Association) fournissant 4,4 millions d'emplois directs et indirects. L'essor des NTIC pousse les états à procéder à d'importants investissements pour augmenter les capacités de transmission et les zones couvertes. Plusieurs grands opérateurs mondiaux sont présents sur le marché africain comme Orange, Vodaphone, Aitrel, le groupe indien mais aussi les firmes sud- africaines MTN et Vodacom. 
  • Se sont développés des firmes spécialisées dans les services de ce type comme le service M-Pesa par Safaricom au Kenya (depuis 2007). On note la présence sur le continent de centres d'appel comme au Maroc ou en Afrique du Sud (coûts plus faibles). Mais il faut être clair: les économies africaines ne sont pas encore, loin de là, devenues des économies de services. Rappelons, à ce titre, que seulement 25% de la population africaine est vraiment connectée. De plus même si il existe des opérateurs africains dans le domaine des NTIC (Groupe Wari créé en 2008 au Sénégal), ils ne peuvent concurrencer les grands groupes mondiaux. L'Afrique participe également à la mondialisation par les flux illégaux et donc est un acteur de la mondialisation illicite: trafics d'armes, de stupéfiants, de médicaments... Elle est partie prenante des marchés criminels globaux. L'Afrique participe à la mondialisation par le biais des activités mafieuses: on peut à cet égard parler d'intégration par défaut. L'Afrique peut être vue comme un hub mondial du narcotrafic.
  •  Il existe en Afrique des zones grises qui favorisent le développement des activités illicites: les états faillis en sont un bon exemple. Ces trafics sont sources de revenus. Le continent africain est devenu un lieu de trafic de drogues (une plaque tournante en cours de construction). La cocaïne en provenance d'Amérique latine transite le plus souvent par l'Afrique tout comme l'héroïne en provenance d'Asie. L'Afrique est un des pivots du commerce de cannabis notamment par l'intermédiaire du Maroc qui produit plus du quart de la résine de cannabis (à l'échelle mondiale) faisant vivre plusieurs milliers de familles notamment dans le Rif marocain (47 000 hectares). Parmi les autres producteurs: l'Egypte, le Nigeria, la Tanzanie... 
  • Il faut ajouter le trafic d'armes, le trafic de diamants (les deux peuvent être liés) et plus généralement ce qu'on nomme les “minerais du sang” à savoir or, étain, coltan, tungstène, diamants..., la contrebande et la contrefaçon, le trafic de bois comme en RDC. L'Afrique est aussi concernée par des trafics humains: les migrations sont en grande partie organisées par des réseaux profitant du désespoir. Le trafic illégal de migrants (smuggling) est devenue une affaire rentable et l'Afrique est incontestablement au coeur des trafics migratoires avec des flux en provenance d'Afrique subsaharienne vers l'Afrique du Nord (Libye, Tunisie, Maroc). 
  • Il existe aussi une traite d'être humains notamment de jeunes femmes afin d'alimenter les réseaux de prostitution en Europe en particulier. Il ne faut pas oublier le phénomène de la piraterie à la fois dans la corne de l'Afrique et le golfe de Guinée.Enfin, l'Afrique tente de s'insérer dans le monde des transactions financières illicites par le biais des paradis fiscaux: plusieurs états africains utilisent ce registre comme les Seychelles, Maurice, le Liberia, le Botswana, le Kenya ou le Ghana. Les flux financiers illicites étaient estimés entre 2003 et 2012 à 60,3 milliards de dollars par an ce qui est supérieur à l'aide publique au développement eu aux IDE réunis. Enfin, cette insertion dans la mondialisation se fait également par les flux migratoires (plus de 270 millions de migrants internationaux en 2019 et sur 270 millions environ 25 millions viennent d’Afrique subsaharienne).
  •  Il faut préciser que la plupart de ces migrants vont dans un pays proche : les migrations vers l'Europe, l'Amérique ou l'Asie restent faibles. Il faut, dans ce cadre, évoquer l'existence des diasporas africaines. Environ 32,3 millions d'Africains, selon la Banque mondiale, seraient expatriés en 2013 (la moitié en Afrique même). Les premières diasporas se sont formées à partir des années 50-60 lors des 30 glorieuses en Europe notamment. Elles sont à l'origine d'importants transferts d'argent: 20,7 milliards de $ pour le Nigeria en 2015 soit 3,6% du PIB, environ 6,5 milliards de $ pour le Maroc (6,1% du PIB), 200 millions de $ pour un petit état comme la Gambie avec ses 2 millions d'habitants (23,5% du PIB). 

-attirant investisseurs et investissements

  • Le continent africain participe aux flux financiers mondiaux même si c'est en partie sous la forme de l'aide publique au développement ou des emprunts internationaux. L' Afrique attire de plus en plus d'investisseurs notamment ceux des pays émergents en quête de nouvelles ressources. Certains états ont de ce fait une réelle importance géostratégique. L' Afrique est perçue comme instable mais plusieurs états sont jugés attractifs. Les IDE connaissent une hausse: 2 milliards de dollars en 1990 à 46 milliards de dollars en 2018 mais ne représentent encore que 3% des IDE mondiaux. C’est l’Afrique du Sud en 2018 qui a reçu en Afrique subsaharienne le plus d’IDE pour 5,3 milliards de $ devant la RDC avec 4,3 milliards de $ d’IDE. Ces investissements concernent à vrai dire les secteurs de l'extraction minière et les hydrocarbures mais aussi un secteur comme celui des téléphones mobiles. Des pays comme l'Angola, le Nigeria, le Mozambique ou l'Afrique du Sud sont généralement les principaux bénéficiaires de ces IDE (L' Afrique du Sud et le Mozambique ont reçu d'ailleurs le tiers des IDE par exemple en 2013): les IDE sont donc sélectifs. En 2018, signalons que c’est l’Egypte si on prend en compte toute l’Afrique qui a reçu le plus d’IDE à hauteur de 6,8 milliards de $. 
  • Il faut souligner le fait que peu de grandes firmes délocalisent ou pratiquent la sous traitance en Afrique alors que des zones franches ont pourtant été créées comme sur l'île Maurice, en Ethiopie ou encore à Madagascar. La zone franche la plus développée en Afrique est celle de Djibouti. Par contre, les marchés financiers sont peu attractifs bien qu'il y ait une vingtaine de places boursières. La globalisation financière concerne certains états africains comme l'Afrique du Sud ou encore le Maroc. Mais la seule place boursière qui soit vraiment attractive est celle de Johannesburg avec un volume d'opérations se montant à 800 milliards de dollars (les 10 autres places boursières ont un volume de 700 milliards de dollars seulement. En 1993 a été créée une association des bourses africaines afin de rendre les places boursières justement plus attractives. 
  • Néanmoins, ces places ont des difficultés à mobiliser des épargnes faibles des citoyens et les difficultés politiques de plusieurs états dissuadent les investisseurs internationaux. Par contre, le fait d'être relativement peu connectée à la globalisation financière a permis à l'Afrique d'être très peu touchée par la crise de 2008. Toutefois, la capitalisation boursière des 10 premiers marchés africains a été multiplié par 10 entre 2000 et 2015. L' Afrique participe bien aux grands flux mondiaux même si cette participation est encore jugée faible. 
  • Les états africains ne sont pas exclus du processus de globalisation bien qu'encore à la marge. On constate également des liens entre croissance et développement, entre mondialisation et développement. Depuis, 2005 l'Afrique tire sa croissance davantage des IDE que de l'aide publique au développement. Le problème est que la croissance tout comme l'insertion dans la globalisation est inégale.En 2010, pour 20 des 28 pays les moins avancés d'Afrique, c'est l'aide au développement qui permet la croissance (Soudan, Djibouti...) Par contre, pour à la fois favoriser le développement et participer à la mondialisation, il est nécessaire de développer les infrastructures d'un “continent en chantier” (Atlas de l'Afrique). Le continent africain manque d'infrastructures: routes, réseau d'électricité....Les infrastructures de transport sont insuffisantes dans le cadre des liaisons intra-africaines. On peut rappeler que les axes de communication sont un héritage colonial en grande partie. La Banque mondiale estimait qu'il était nécessaire pour l'Afrique subsaharienne d'investir plus de 93 milliards de $ entre 2005- 2015 précisément pour répondre aux déficiences des infrastructures. Certains états ont initié et initient de grands projets que favorisent, en théorie, la croissance forte. Ainsi, le Programme for Infrastructure Development in Africa proposé par le NEPAD a comme objectif de financer 52 projets pour 2040 que ce soit des infrastructures de transport, la construction de barrages...: ces 52 projets sont évalués à 360 milliards de $. 
  • De très importants chantiers sont en cours avec deux axes : développer les liens entre pays africains et ceux devant favoriser les liens avec le monde. Plusieurs états ont ce type de projets comme le Nigeria qui souhaite construire 3 200 km de lignes de trains à grande vitesse. Dans cette optique, les transports sont un enjeu essentiel (près de 50% des investissements concerne ce domaine). La priorité est donnée aux ports et zones portuaires, aux axes routiers majeurs... Il s'agit également de renforcer ce qu'on nomme les corridors de développement comme le corridor devant relié le sud Soudan à l'Ethiopie (le Lamu port-South sudan-Ethiopia transport ou Lapsset). Il est en particulier prévu de développer le corridor reliant Port Elisabeth en Afrique du Sud à Windhoek en Namibie ou de façon encore plus large de lier l'Ethiopie à Port Elisabeth. Il faut signaler le projet de développer le réseau autoroutier avec une autoroute transafricaine de 60 000 kms de réseau. Le groupe français Vinci a dans ce cadre décroché un contrat de 1, 6 milliard de $ pour construire un axe autoroutier au Kenya. On peut également signaler que la route transaharienne Lagos-Alger-Tunis de 9 500 kms est presque achevée. D’autres projets sont importants comme le corridor logistique de Nacala-Mozambique- Malawi, un projet estimé à 4 milliards d’euros avec plus de 912 kms de ligne ferroviaire pour exporter notamment du charbon et inauguré en 2017 ou les terminaux portuaires d’Owendo au Gabon, un projet du singapourien Olam.
  •  Il est, dans la perspective de développer les échanges extérieures, important de construire et/ou d’aménager des ports et zones portuaires. Le Cameroun a dans cette optique inauguré en 2018 le port autonome de Kribi. La Tanzanie a débloqué pour 10 milliards de $ pour développer le port de Bagamoyo avec des travaux ayant commencé en 2018. Le Nigeria fait de même avec le port de Badagry où existe un projet de construire un port en eau profonde pour 2,6 milliards de $. Le Kenya a lancé la construction du port de Lamu construit par la Chine (China Communication Construction Company) avec un premier poste d’amarrage inaugué en 2020. Sont prévus pour ce port kényan 23 millions de tonnes de marchandises pour 2030. 

 Bilan: 

  •  Pour plusieurs spécialistes, l'Afrique devrait émerger industriellement sachant que pour le moment elle ne représente que 1,8% de la valeur ajoutée mondiale dans le domaine des produits manufacturés. De plus seuls 4 états peuvent être considérés comme des pays en partie industriels: l'Afrique du Sud, l'Egypte, le Maroc et le Nigeria qui concentrent près de 70% de la production manufacturière africaine. L'Afrique, dans ce domaine, part de loin sachant que peu d'efforts ont été faits pour développer de véritables industries: peu d'investissements, peu de transferts de technologies et des infrastructures de transport trop déficientes pour inciter aux implantations industrielles. 
  • Quelques états font toutefois des efforts comme le Maroc avec un état qui a voulu avoir une stratégie industrielle (plan industriel de 2014 par exemple) notamment en ciblant sur l'industrie textile. D'ici 2020, le Maroc voudrait créer 500 000 emplois dans le secteur industriel: cet objectif est possible surtout que le Maroc développe des zones franches afin d'attirer les investisseurs. Le groupe canadien Bombardier s'est implanté à Casablanca, Renault à Tanger et bientôt Peugeot (à Kenitra).
  •  Le Maroc a compris l'importance de la voie industrielle tout comme l'Afrique du Sud. Il n'est pas exclu que d'autres états empruntent un chemin qui pourrait accentuer l'insertion dans la mondialisation autrement qu'en exportant des produits primaires. 

b/ Un développement et une insertion dans la mondialisation facilités par des liens et partenariats extérieurs

Les états africains ont des liens avec l'Europe et les autres puissances: des liens qui doivent permettre de faciliter le développement. Les échanges de l’Afrique avec les autres régions du monde se sont modifiés depuis une vingtaine d’années notamment avec l’essor des échanges avec l’Asie dont la Chine. 

 -des liens forts avec l'Europe

  • Les états africains ont notamment des liens assez forts avec l'Union européenne. Dès 1963, avaient été signé la convention de Yaoundé entre les 6 états fondateurs de la CEE et 18 états d'Afrique subsaharienne. Cette convention reposait sur des tarifs douaniers préférentiels et sur une coopération à la fois technologique et financière. En 1975 est signée la convention de Lomé entre les états de la CEE et un certain nombre d'états dits ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) à laquelle vont succéder Lomé deux, Lomé trois et Lomé quatre. 
  • Ces accords doivent faciliter les exportations des états signataires vers les états européens et reposent sur la mise en place de systèmes visant à stabiliser des prix des produits exportés à des niveaux corrects (système STABEX pour les productions agricoles, SYSMIN pour les minerais). Ces accords ont le mérite d'apporter aux états africains une certaine stabilité économique puisque ces accords portent sur des durées assez longues. En 2000 sont signés, et ils sont d'une autre nature, les accords de Cotonou entre l'Union européenne et les pays ACP. Les systèmes de stabilisation des prix sont supprimés car jugés contraires aux règles fixées par l'OMC. De façon plus générale, ces accords reposent sur une volonté de libéralisation et d'ouverture des marchés dans la logique voulue par l'OMC. 
  • Suite à ces accords de Cotonou, des accords de partenariat économiques (APE) doivent être mis en oeuvre à partir de 2008: peu de ces accords ont été signés depuis car les états africains ont conscience d'être perdants avec des accords de ce type. Néanmoins, il est prévu que les pays les plus pauvres soient exemptés de ces accords. L' Union européenne est dans l'obligation d'améliorer ses relations avec l'Afrique afin de juguler les migrations. Seul un développement réussi des états africains peut permettre une telle régulation. De plus, l'Union européenne voit dans la montée de l'islam radical en Afrique un réel danger (AQMI, Boko aram ) d'où là aussi la nécessité de rapports équilibrés et justes. En décembre 2007, le sommet européen de Lisbonne promouvait un partenariat Europe-Afrique fondé sur plusieurs principes: paix et sécurité, promotion des droits de l'homme, migrations... mais ce partenariat est encore une simple esquisse. Enfin , on peut évoquer les liens avec les anciennes puissances coloniales dont la France et le Royaume-Uni en insistant sur le cas français. Suite aux indépendances, la France a tenu à conserver son “pré carré africain” ce qu'on a appelé la Françafrique. 
  • Par des accords militaires, la France a conservé des bases militaires mais elle a aussi développé des relations culturelles par l'intermédiaire de la francophonie. La France dans les années 60-70 joue incontestablement un rôle important, un rôle néocolonial en s'appuyant sur des intérêts économiques comme le pétrole au Gabon, l'uranium au Niger et des groupes français. Elles mènent des interventions armées comme les opérations épervier au Tchad en 1986 ou encore une opération au Zaïre (RDC) sur Kolwezi ou encore les opérations Noroît et Turquoise au Rwanda en 1990 et 1994. 
  • Or, les relations entre la France et l'Afrique aboutit à des actions peu claires comme le soutien à des dictateurs: Bokassa en République centrafricaine, Omar Bongo au Gabon ou Mobutu au Zaïre. Aujourd'hui, au niveau politique et culturel, la France conserve une réelle influence en Afrique mais aussi au niveau économique comme avec les groupes Total (Gabon), AREVA (Niger), Bouygues, Bolloré (17 % du chiffre d'affaires du groupe est réalisé en Afrique), Vivendi ou Orange. Le Royaume-Uni a conservé des positions économiques certaines dans plusieurs pays comme le Nigeria grâce à des groupes comme BP ou Shell. 
  • Mais en ce qui concerne la France, son poids économique en Afrique subsaharienne diminue.L'arrivée de nouveaux acteurs comme la Chine ou l'Inde bouleverse la donne.Les groupes français voient leurs parts de marché diminuer. La France est encore capable d'une présence politique et militaire comme en témoignent son soutien au Tchad en 2008 dans sa lutte contre une rébellion, l'intervention au Mali en 2013 (opération Serval) ou l'opération Sangaris en République centrafricaine. Elle possède encore des bases militaires à Dakar, Abidjan ou à Djibouti et 10 000 soldats français présents sur le sol africain. Mais les difficultés économiques et budgétaires de la France risquent de compliquer cette présence. D'ailleurs, la France compte de plus en plus sur des troupes de l'Union africaine pour maintenir la apix dans les zones de tensions. 

 -mais aussi avec les E-U et l'Asie

  • Les états africains entretiennent des relations avec les E-U et plusieurs états asiatiques.Pour les Etats-Unis, l'Afrique fut longtemps peu intéressante. Pendant la guerre froide, les E-U comptaient sur la France notamment pour contrôler une partie du continent: il fallait simplement sécuriser les approvisionnements de certains minerais comme le Cobalt. Mais avec la fin de la guerre froide et le développement de l'islam radical y compris en Afrique, les E-U changent d'orientation. Ils voient désormais les pays africains comme une nouvelle source d'approvisionnement en matières premières et comme des instruments dans la lutte contre l'islamisme. Ainsi, en 2000, les E-U ont proposé aux états africains l'American Growth and Opportunity Act (AGOA) consistant à exporter un certain nombre de produits vers les E-U sans qu'ils fassent l'objet de quotas. Il faut néanmoins préciser que dans le cadre de cet accord, les E-U se réservent le droit de le suspendre à tout moment. Les E-U souhaitent de ce fait créer un espace de libre échange. Les E-U ont également accentué leur aide économique tant publique que privée. 
  • Les échanges entre l'Afrique et les E-U ont progressé: les E-U sont même devenus le 1er partenaire commercial de l'Afrique (13%) sauf si on prend compte les états de l'Union européenne qui regroupés représentent 37% des échanges. Il s'agit pour les E-U non seulement de prendre pied sur un continent offrant des opportunités mais aussi de lutter contre l'islam radical: cette lutte passe par le développement économique. Mais c'est avec quelques états d'Asie que les choses ont le plus changé à tel enseigne qu'on évoque désormais la Chinafrique. Entre 2000 et 2010, le commerce entre la Chine et l'Afrique a été multiplié par 20 dépassant en 2010 les 100 milliards de dollars. 
  • Pour la Chine, l'Afrique est un continent d'opportunités surtout au niveau des matières premières (60% des importations chinoises sont des importations de pétrole. Mais, l'Afrique est aussi un marché pour les produits chinois à bas coût. La stratégie chinoise est intéressante: ils proposent des opérations de troc: contrats portant sur les minerais contre construction d'infrastructures comme ils l'ont fait en RDC en 2007 (6 milliards de dollars d'investissements routiers ou autres contre des contrats miniers. 
  • Mais la Chine n'est pas intéressée seulement par le pétrole et les minerais: l'entreprise Tencent qui contrôle la messagerie instantanée Wechat s'intéresse à l'Afrique (Tencent). Cette entreprise chinoise dont 34 % du capital est détenu par une firme sud-africaine: Naspers a pour projet de devenir le leader des smartphones sur le continent. L'application Wechat a déjà 580 millions d'abonnés dans le monde dont 5 millions en Afrique (plus de 12 millions d'utilisateurs de Facebook en Afrique). Ils se sont aussi substitués aux compagnies pétrolières américaines qui sont parties d'un Soudan très instable. 
  • De nombreux chinois partent travailler en Afrique soit avec des groupes industriels chinois ou à titre individuel (près de 800 000). Certains africains dénoncent une nouvelle forme de colonisation et de colonialisme comme avec les terres achetées. La présence chinoise est enfin culturelle signe de l'intérêt porté à l'Afrique avec le financement de bourses d'études pour des étudiants africains en Chine ou encore l'implantation de plusieurs centres culturels: les instituts Confucius. Autre état asiatique présent en Afrique: l'Inde. 
  • Ce pays s'appuie sur une importante diaspora indienne (2 millions d'indiens) en particulier en Afrique de l'Est (Afrique du Sud, Mozambique, Madagascar, Kenya...). Plusieurs groupes indiens investissent en Afrique comme la firme Tata déjà présente dans 13 pays et souhaitant l'être dans 20 d'ici 2017 dans les domaines des mines, des télécommunications..., le groupe pharmaceutique Ranbaxy (un groupe ayant fusionné avec Sun Pharmaceuticals donnant naissance au 5e groupe mondial de médicaments génériques) qui a notamment racheté en 2006 un groupe sud-africain Be-Tabs ou encore la firme Barthi Airtel implantée dans 17 pays africains dans le domaine de la téléphonie mobile (Burkina-Faso, RDC, Ghana, Gabon...). L'Inde a aussi procédé à l'acquisition de terres comme la firme Karaturi en Ethiopie pour les cultures florales et des cultures alimentaires notamment (300 000 hectares). Ce groupe est depuis quelques mois néanmoins en difficulté: il a été condamné pour fraude fiscale au Kenya et une de ses filiales aux Pays-Bas est en faillite. Par contre, le Japon n'est pas un acteur majeur bien qu'il apporte une aide non négligeable aux pays africains. L'intérêt économique ne peut que s'accentuer notamment par le biais de la rivalité avec la Chine. 

c/ Les logiques de partenariat et d'union internes à l'Afrique: une intégration économique qui progresse 

Les états africains sont également dans des logiques de partenariat et de constitutions d'unions afin de coordonner des politiques et de favoriser le développement. Ils ont crée de grands ensembles régionaux dont l'un des objectifs est précisément d'accélérer l'intégration régionale.Mais les organisations régionales sont multiples fragmentant l'espace économique. Or, l'intégration régionale est un facteur intéressant de développement. Il y a incontestablement un essor du commerce intra-africain qui ne peut être que bénéfique et être un vecteur de diversification des échanges. 

 -l’intégration économique et commerciale : des unions nombreuses 

  • Les états africains ont adopté des logiques de regroupement soit à l'échelle continentale soit à l'échelle régionale. Les premières institutions régionales sont liées à la colonisation avec par exemple la création en 1945 du franc CFA ayant abouti quelques années plus tard à la création de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UMOA puis UEMOA) en 1962 réunissant le Bénin, le Burkina-Faso, la Côte d'Ivoire, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo puis, en 1968, la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC) comprenant le Cameroun, la République centrafricaine, le Congo, le Gabon et le Tchad auxquels se sont joints plus tard la Guinée équatoriale et Sao Tomé. Pour ces états, le franc CFA est la monnaie commune (liée désormais à l'euro par une parité fixe). 
  •  Lors des accessions aux indépendances, l'idée panafricaine se développe à nouveau avec la thématique de l'unité africaine. Rappelons que la première conférence panafricaine s'était tenue à Londres en 1900 lancée par un afro-américain nommé William Burghard du Bois.L'idée d'une union continentale est développée lors de la première conférence des états africainsà Accra en 1958: Kwamé Nkrumah en est l'initiateur. Pour ce dernier, une union entre états africains est la solution pour sortir du sous développement. Deux tendances se sont affirmées autour de deux groupes. 
  • Le groupe dit de Casablanca formé en janvier 1961 avec des représentants du Ghana, de la Guinée, du Mali, du Maroc, de la République arabe unie et du gouvernement provisoire de la république algérienne veulent que la liberté s'impose en Afrique, une Afrique devant réaliser son unité. Ce groupe souhaitait la création d'un marché commun africain et même d'une citoyenneté africaine unique. Un autre groupe issu de la conférence de Monrovia, une conférence tenue en mai 1961 à l'initiative de sir Abubakar Tafawa Balewa le 1er ministre du Nigeria (le Cameroun, le Sénégal et une majorité d'états subsahariens y participent) souhaite le maintien d'états nationaux ce qui ne doit pas empêcher la coopération. Il n'y a pas de volonté de supranationalité à l'inverse des idées lancées par le groupe de Casablanca. Les logiques de regroupement doivent, en théorie permettre de mettre en commun des politiques de développement et de peser davantage dans les relations internationales. 
  • Ces logiques de regroupement ne sont pas une nouveauté puisque les puissances coloniales notamment la France avec l' AEF et l' AOF avaient déjà procédé à des regroupements. Certes, ces regroupements ont disparu avec les indépendances mais l'idée de se regrouper n' a pas été abandonnée pour autant. Dès 1963 est créée l' OUA (Organisation de l'unité africaine) regroupant l'ensemble des états africains remplacée par l'Union africaine en 2000 à Durban en Afrique du Sud. L'UA a son siège en Ethiopie à Addis-Abeba et chaque année la conférence des chefs d'état et de gouvernement désigne son président.
  •  L'union africaine est un approfondissement de l'OUA au moins sur le plan institutionnel. Elle a aussi comme objectifs la création d'une banque centrale et d'un fonds monétaire, d'une cour de justice (en 2004). L' Union africaine a des institutions: une commission, un parlement panafricain et des objectifs comme promouvoir la démocratie et favoriser le développement. L'Union africaine a mis en place des mécanismes visant à une diplomatie préventive sachant qu' a été signé en 2005 un Pacte de non-agression et de défense commune pour les états membres de l'Union africaine tout comme en 2004 a été créée une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples. 
  • Il faut ajouter que dans des cas précis comme une situation de génocide ou de crimes de guerre l'UA prévoit un droit d'intervention. Elle s'est d'ailleurs dotée d'un conseil de paix et de sécurité composé de 15 membres (3 par grandes régions: Nord, Ouest, Est, Centre et Sud). En 2010, l'UA a, par exemple suspendu le Niger de son organisation suite à un coup d'état (le Niger a été réintégré en mars 2011 suite à l'élection du président Issoufou). 
  • Pour plusieurs états aux dimensions restreintes et au poids économique très faible, la logique de regroupement s'impose. Le commerce intra-régional africain est de l'ordre de 61,4 milliards de dollars en 2015 ce qui est peu. De plus, sans compter l'Afrique du Sud, le commerce est très polarisé avec 5 états représentant les trois quart des exportations intra-africaines: la Côte d'Ivoire, le Nigeria, le Kenya, le Zimbabwe et le Ghana. Ce commerce intra-régional limité peut s'expliquer par plusieurs facteurs : des infrastructures connectant les états insuffisantes, des accords commerciaux trop restreints, des barrières douanières trop présentes... d'où la nécessité d'une régionalisation plus poussée. 

 - mais trop nombreuses et encore balbutiantes 

  • L' Afrique connaît donc un processus de régionalisation particulièrement intense avec la création de 21 organisations régionales depuis les indépendances: on peut même parler de prolifération. Ces structures sont encouragées par les organisations internationales comme le FMI ou l'ONU.L'intégration à l'échelle régionale peut être considérée comme une étape facilitant l'insertion dans la mondialisation. Cette prolifération a conduit à la naissance d'organisations continentales comme l' OUA et d'organisations régionales. L'Union africaine reconnaît 5 organisations majeures: la CEDEAO (Communauté économique des états d'Afrique de l'Ouest), la CEEAC (Communauté économique des états d'Afrique centrale), la SADC (Communauté pour le développement de l'Afrique australe), le COMESA (marché commun d'Afrique orientale et australe et l'UMA (Union du Maghreb). 
  • On peut distinguer les unions économiques et douanières (la zone franc) avec l'Union monétaire ouest-africaine (UMOA) mise en place à partir de 1959 avait regroupé les états de l'ancienne AOF (Afrique Occidentale française) dont des états francophones comme le Bénin, le Burkina-Faso, la Côte d'Ivoire,le Mali, le Sénégal, le Togo et le Niger) et un état lusophone: la Guinée-Bissau. Ils partagent une monnaie commune comme nous l'avons vu à savoir le franc CFA ( Franc de la Coopération financière en Afrique centrale). Depuis 1994, elle est devenue l' UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine). Les états de l'ancienne AEF ont quant à eux voulu créer une organisation l'UDEAC (Union douanière et économique d'Afrique centrale) qui s'est transformée en CEMAC (Communauté économique et monétaire en Afrique centrale) en 1994 avec comme objectif la formation d'un marché commun. Cette structure comprend le Cameroun, le Congo-Brazzaville, le Gabon, la Guinée équatoriale, la République centrafricaine et le Tchad. 
  • Un processus similaire a eu lieu pour les anciennes colonies britanniques. En 1967, la Tanzanie, le Kenya et l'Ouganda ont créé l'East African Community (EAC), une communauté élargie au Rwanda et au Burundi en 2007. A été créé aussi le marché commun de l'Afrique orientale et australe (COMESA: Common Market for Eastern and Southern Africa) regroupant 400 millions d'habitants et 20 états de l'Egypte à la Namibie. En Afrique australe, la régionalisation est assez ancienne avec la création en 1992 de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC ou Southern African Development Community) . Elle compte tout de même plus de 630 millions d'habitants avec en son sein une puissance majeure: l'Afrique du Sud et comprend l'ensemble des états d'Afrique australe plus la République démocratique du Congo et la Tanzanie. En Afrique de l'Ouest, est née en 1975 la CEDEAO réunissant aussi bien des états francophones, anglophones et lusophones dont le siège est à Abuja au Nigeria (Communauté économique des états d'Afrique de l'Ouest) est une zone de libre échange: c'est une organisation ayant, il faut le souligner, une force militaire. La CEDEAO englobent les états de l'UEMOA plus le Cap -Vert, la Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée -Bissau, le Liberia, le Nigeria et la Sierra Leone. 
  • La CEDEAO est intervenue dans des opérations de maintien de la paix au Liberia entre 1990-1999, en Sierra Leone entre 1997 et 2000 ou encore en Côte d'Ivoire en 2002. Il faut signaler que les états africains adhèrent à plusieurs structures pouvant être des structures de coopération sur un domaine donné (Comité régional des pêches du golfe de Guinée = CRPGG) tout en adhérant à des organisations régionales ou continentales comme l'OUA. Dans cet ensemble, la SDAC (Communauté de développement d'Afrique australe) correspond à 34% du total du commerce africain, le CEN-SAD (Communauté des états sahélo-sahariens) 26%, la CEDEAO (Communauté économique des états d'Afrique de l'Ouest) 15% et la COMESA (Marché commun de l'Afrique orientale et australe) 11%. Il faut préciser que ces organisations ne dépassent pour le moment pas l'étape de zone de libre échange. En 2001, plusieurs puissances africaines ont fondé le NEPAD ou Nouveau partenariat pour le Développement de l'Afrique qui réunit l'Afrique du Sud, l'Algérie, l'Egypte, le Nigeria, le Sénégal avec l'appui de l'ONU, de l'OCDE et de la banque mondiale. Le NEPAD a pour buts d'accélérer l'intégration régionale, développer les échanges entre états africains, améliorer les infrastructures continentales...
  •  Il est pour le moment plus un instrument qu'une institution participant au développement du continent notamment par le financement d'infrastructures et de grands projets régionaux comme l'autoroute Nouakchott (Mauritanie)-Lagos (Nigeria), l'autoroute Djamena-Dakar... En 2012, lors d'une réunion de l'UA en 2012 a été décidée la création d'une zone de libre échange continental panafricaine (ZLECAF) pour, en théorie 2017. Mais le projet a été officiellement lancé en 2019. Plusieurs Etats ont signé et ratifié l’accord créant cette zone : Mali, Tchad , Namibie, Afrique du Sud...D’autres l’ont signé mais pas encore ratifié comme le Nigeria, la RDC, le Soudan... 27 Etats ont pour l’instant procédé à la ratification de ce projet. 

 Bilan : 

  •  Les années 2015-2020 peuvent marquer un tournant au niveau de l'intégration régionale avec l'exemple donné par la Communauté économique des états de l'Afrique de l'Ouest et sa toute nouvelle union douanière. Les négociations pour une zone de libre échange entre 26 états appartenant à la SADC (Communauté de développement de l'Afrique australe), la COMESA (marché commun de l'Afrique orientale et australe) et l'EAC (Communauté de l'Afrique de l'Est) vont aussi dans ce sens.Si la zone de libre échange continental panafricaine devient une réalité, la donne changera pour le continent. Pour le moment, la CEDEAO créée en 1975 est une zone de libre échange et une union douanière (le marché commun et l'union monétaire sont planifiés); la CEEAC (Communauté économique des états d'Afrique centrale1983) a seulement planifié une zone de libre échange et une union douanière tout comme l'UMA (Union du Maghreb arabe: 1989); La SADC (Communauté de développement d'Afrique australe :1992) est une zone de libre échange: une union douanière, une union monétaire et un marché commun sont planifiés; la COMESA ((marché commun de l'Afrique australe et orientale): 1994) est une zone de libre échange et l'union douanière est en cours... 
  • On peut donc voir qu'il y a bien de nombreux projets d'intégration régionale mais ils sont loin d'être achevés. La multiplication des organisations est perçue comme inefficace. Pour certains, elle est un moyen pour les politiques d'exister sur la scène régionale en créant une organisation qu' ils pourront contrôler. On peut aussi considérer que les différentes structures entrent en concurrence alors qu'il y a besoin d'une synergie.
  •  L'efficacité des ces organisations n'est pas toujours prouvée. Un état comme la RDC adhère à au moins deux structures: la CEEAC et la SADC mais pour quelle réussite? Ces organisations multiples n'ont pas nécessairement les moyens (financiers) de leurs ambitions et projets. Néanmoins, la régionalisation est vue comme pouvant permettre le développement en créant des marchés régionaux plus larges que les étroits marchés nationaux, en finançant des infrastructures. La régionalisation porraît être un vecteur d'industrialisation. 

 d/ Des territoires inégaux et différenciés 

 Les territoires et états africains n'ont pas tous les mêmes atouts, les mêmes logiques. Ces territoires et états obéissent à une hiérarchie avec des états et des territoires moteurs et d'autres plus en retrait voire marginalisés. L' Afrique est à plusieurs vitesses avec des états et des territoires qui s'insèrent dans la mondialisation et d'autres qui restent en retard. 

-des territoires hiérarchisés et inégalement intégrés

  • Certains états sont en voie d'émergence: ce sont les “lions africains” comme le Nigeria ou l'Afrique du Sud. Sont considérés comme des lions hormis le Nigeria et l'Afrique du Sud, l'Algérie, l'Angola, l'Egypte, le Maroc. Ces deux états sont les plus puissants économiquement. Le Nigeria est la première puissance économique: son PIB est de 446,5 milliards de dollars (2019) soit le 29e rang mondial. Il est le pays le plus peuplé du continent avec plus de 212 millions d'habitants en 2019. Ce pays bénéficie d'un atout clé: le pétrole dont il est le 1er producteur en Afrique (26% du pétrole africain et 1,6 millions de barils par jour en 2019) et exportateur en Afrique (11e producteur mondial). Le pétrole, c'est un tiers du PIB du Nigeria et 95 % des exportations du pays. La firme publique NNPC (Nigerian National Petroleum Company) est une firme puissante qui assure 70% des recettes de l'état. et contrôle 50% du pétrole du pays. 
  • D'autres secteurs sont en essor comme les télécommunications (téléphonie mobile...), le cinéma... La croissance du Nigeria est de 2,3 % en 2019.. Avec ces richesses, une classe moyenne s'est constituée, l'état est peu endetté... Mais, le Nigeria est extrêmement dépendant du pétrole: il est une économie de rente. De plus, les inégalités sont très fortes: le PIB par habitant n'est que de 2 100 dollars en 2018 (5280$ en parité de pouvoir d’achat), le taux de chômage approche 6,1 % de la population active. L’IDH du pays est de 0,534 en 2019 (158e rang mondial). II existe “plusieurs Nigeria” avec un Nigeria du Sud dynamique et plus riche qu'un Nigeria du Nord en retrait. Pour reprendre l'expression de F.Bost, le Nigeria c'est “point de salut sans hydrocarbures” ce qui montre bien la dépendance déjà évoquée par rapport à ce pétrole. Il faut ajouter d'autres problèmes comme la forte insécurité dans la boucle du Niger, le développement de l'islam radical avec Boko Haram, le fait que 70% de la population active travaille dans l'agriculture... En ce qui concerne l'Afrique du Sud, elle est désormais considérée comme un état émergent et un “géant africain”: elle peut être effectivement vue comme le seul état réellement émergent en Afrique. 
  • Le PIB de l’Afrique du Sud en 2019 est de 358 milliards de$ mais le taux de chômage est élevé avec 27,3 % et l’IDH de 0,705 (113 e rang mondial). Comme le Nigeria, l'Afrique du Sud dispose d'atouts: des richesses minières (platine, or...). Ce qu'on nomme le complexe minéralo- énergétique fournit encore 9% du PIB et plus de 50% des exportations sud-africaines.C'est également un pays ayant des entreprises industrielles et de services performantes. Selon la revue Forbes, sur les 2000 FTN les plus performantes (CA + résultats d'exploitation + capitalisation boursière + les actifs), seules 21 sont africaines dont une partie est sud africaine comme Sasol (industrie chimique et mines) avec 21 milliards de dollars en 2016 (463e rang mondial), Bidvest (groupe de services) avec 8,4 milliards de dollars, Asper Pharmacar avec 10,1 milliards de dollars, MTN (télécommunications) avec 18,9 milliards de dollars ou encore Naspers (groupe de presse) avec 60 milliards de dollars... Ces groupes sud africains sont considérées comme des entreprises à croissance rapide. Le PIB par habitant est plus important qu'au Nigeria puisqu'il est de 6 300 dollars. Le taux de croissance est de 0,7 % seulement en 2019. 
  • L' Afrique du Sud est d'ailleurs intégrée dans les BRIC appelés BRICS. Toutefois, les problèmes demeurent avec un taux de chômage de plus 27% et de fortes inégalités avec des populations à l'écart du développement: 1 africain sur deux vit en dessous du seuil de pauvreté et au niveau de l' IDH, l'Afrique du Sud est au 113e rang mondial. Néanmoins, ce pays a été capable d'organiser une coupe du monde de football (2010) avec la perspective d'un grand prix de formule 1 en 2020. L' Afrique du Sud est aussi un état majeur des relations entre états africains. 
  • Il est le pays au rôle clé en Afrique australe, fondateur du NEPAD et de ce qu'on appelle la zone rand (rand = monnaie sud-africaine). Enfin l'Afrique du Sud avait accueilli le sommet de la terre à Johannesburg en 2002 ou le 17e sommet mondial sur le climat en 2001. Néanmoins, là aussi pour reprendre une expression de F. Bost, l'Afrique du Sud reste “un petit poucet à côté des mastodontes”, mastodontes qui sont notamment la Chine et l'Inde. La catégorie des “Lions africains” reste plutôt ouverte: certains y rangent l'Afrique du Sud, l'Egypte, le Maroc et la Tunisie auxquels sont ajoutés par un rapport du Mac Kinsey institute la Libye, l'Algérie, l'île Maurice et le Botswana car ces pays abritent 35 des 40 entreprises les plus puissantes d'Afrique. Actuellement, le Nigeria, l'Angola peuvent être considérés comme des “lions” (L'Afrique du Sud représente 23% du PIB africain, le Nigeria, l'Algérie, l'Egypte représentent entre 14 et 10% chacun du PIB de l'Afrique, 5% pour l'Angola et le Maroc). 
  • Quelques spécialistes inclut même l'Ethiopie dont le taux de croissance est élevé supérieur à 7% en 2019 ainsi que le Ghana (7,5% en 2019) et le Kenya (5,8% de croissance en 2019).Ces lions africains sont donc les états moteurs du continent ayant un dynamisme certain et relativement bien insérés dans la mondialisation. Ces états ont généralement une croissance forte entre 5 et 6% par an avec une richesse par habitant qui croît également de 3,5% par an depuis 10 ans et peuvent avoir des revenus par habitant atteignant plus de 10 000 dollars : 12 530 $ pour l’Afrique du Sud en 2018, 17 460 $ pour le Botswana, plus de 24 000$ pour Maurice... Ce sont des états ayant une balance commerciale généralement excédentaire et un endettement plutôt faible ( moins de 40% du PIB). Le continent africain comprend par opposition aux “lions africains” de nombreux états étant des PMA (Pays les moins avancés) même si certains peuvent avoir une croissance importante. 
  • Les PMA ont un niveau de revenu faible, un retard au niveau du développement humain... : ils sont de ce fait en marge du développement et de l'insertion dans la mondialisation. Le Bénin, le Burkina- Faso, le Burundi, le Lesotho, Madagascar, le Mali, le Niger ... sont autant de PMA. Mais l'Ethiopie et l'Angola que certains classent dans les “Lions “ sont des PMA selon les critères établis par l'ONU. L'IDH de l'Angola est ainsi de 0,574 en 2019 et en 2011 encore 27% de la population était sous alimentée, celui de l'Ethiopie est de 0,470 (173e rang mondial). Il existe donc une Afrique en “panne”. Les états les plus en difficultés sont les états en conflit comme le Soudan, la Somalie.

-la ville comme moteur du développement

  • Le développement et l'insertion dans la globalisation sont différenciés selon les territoires. Les villes et les “corridors” de développement sont les territoires les mieux insérés dans la mondialisation et les plus développés. Les corridors du développement sont des territoires bénéficiant d'infrastructures de communication (voies ferrées, routes...) qui ont permis le développement des zones concernées. Les réseaux de transport rendent possible le développement: la réussite de l'Afrique du Sud s'explique en partie par la densité de ses réseaux de transport (le plus dense en Afrique). De nouveaux aménagements ont permis à des états ou du moins à certaines régions comme le Katanga en RDC riche en ressources d'avoir un débouché maritime. Plusieurs corridors reliant les façades maritimes à l'hinterland jouent donc un rôle important. Les corridors Mombasa (Kenya)-Kampala (Ouganda), Dar-es-Salam (Tanzanie)-lac Tanganika ou encore Lusaka- dar es-Salam sont des corridors de développement. 
  • Les villes et les ports sont des lieux majeurs où le développement et la mondialisation ont le plus d'impact. Des villes portuaires comme Lagos, Dakar ou Abidjan sont des pôles majeurs dans leurs pays respectifs à savoir le Nigeria, le Sénégal et la Côte d'Ivoire. On peut noter que deux villes seulement dépassent les 10 millions d'habitants: Lagos et Kinshasa. Le phénomène de métropolisation et ses dynamiques est présent en Afrique et comme dans tous les zones géographiques de la planète ces métropoles par leurs infrastructures, la présence des entreprises... sont des territoires dynamiques. 
  • Les littoraux et les villes littorales peuvent être considérées comme des territoires ouverts à la mondialisation.Les deux façades les plus peuplées du continent sont les façades du Golfe de Guinée et la façade sur l'océan Indien. Ces littoraux sont à moderniser pour faciliter l'intégration dans la mondialisation. De plus, 95% des Africains vivent à moins de 1000 km d'un littoral. Plusieurs littoraux sont d'ailleurs en développement par la construction d'infrastructures devant faciliter les échanges que ce soit le développement et l'agrandissement de ports comme celui de Tanger au Maroc, la création de zones franches portuaires... Pour améliorer l'insertion dans la mondialisation, il s'agit pour les états de développer et surtout moderniser ces ports. En l'état actuel, les ports africains jouent encore un rôle mineur: quelques uns comme Durban ou Richard Bay (Afrique du Sud), Port Soudan, Dakar, port Harcourt au Nigeria... ont un rôle non négligeable mais à l'échelle internationale sont limités (ports à seulement 3 millions de tonnes de marchandises en moyenne). 
  • D'où des projets de modernisation comme le projet Tanger Méditerranée avec la construction d'un port pouvant accueillir des porte-conteneurs et en parallèle la mise en place d'une zone franche. Ces ports même si ils sont encore peu importants permettent des liens avec l'hinterland facilitant l'insertion dans la mondialisation de l'intérieur des terres. Il est possible de dresser une typologie avec quatre types d'espaces: les états insulaires comme les Comores, le Cap-Vert et de petits états côtiers comme Djibouti qui ne peuvent qu'être tournés vers la mer n'ayant pas d'hinterland (arrière pays) véritable; des états où les liens entre le littoral et l'hinterland sont assez équilibrés comme la Mauritanie avec son chemin de fer reliant les mines de fer de Zerouate au port de Nouadhibou par lequel le fer est exporté; des états n'ayant pas d'accès aux littoraux et devant compter sur des états proches comme l'Ouganda qui exporte ses productions et minerais par la Tanzanie et le port de Dar es Salam et des états ayant certes des ports mais peu dynamiques comme la République démocratique du Congo. Bilan et conclusion: Pour favoriser le développement et l'intégration au processus de mondialisation, les états africains ont de grands projets. De nombreux projets concernent la construction et le développement d'infrastructures de communications à même d'assurer le développement économique (routes, voies ferrées...).
  • Il faut savoir que plusieurs états sont de plus enclavés. Développer les infrastructures, c'est donc permettre le désenclavement, faciliter l'implantation éventuelle d'entreprises, attirer les IDE et investisseurs étrangers. L'Afrique part de loin avec des états et régions mal connectées entre elles, 85% des routes ne sont pas goudronnées et il faut en moyenne 1 heure pour parcourir 12 kms. Plusieurs projets considérés comme vitaux sont financés par la Banque mondiale ou d'autres structures (Banque africaine de développement). D'ici 2040, devraient être construites plus de 37 000 km de routes, 30 000 kms de voies ferrées... La Banque africaine de développement met aussi l'accent sur les ports et zones portuaires qui sont des éléments essentiels dans l'économie mondialisée: elle a accordé 1,3 milliard d'euros pour améliorer les infrastructures portuaires. Parmi les grands projets, on peut signaler la liaison entre l'Ethiopie et le Soudan pour faciliter l'exportation du pétrole du sud Soudan (projet Lapset évalué à 24 milliards de dollars). L'Afrique est toujours dans une situation défavorisée et asymétrique. 
  • Les économies africaines sont toujours liées aux économies européennes dont celles des anciennes puissances coloniales. La structure des produits exportés a peu évolué avec peu de produits manufacturés produits et exportés: la plus grande partie des exportations sont des produits primaires. Elle reste toujours très dépendante par rapport aux biens d'équipement, aux hautes technologies... A cela, il faut ajouter que les producteurs africains ne sont pas des faiseurs de prix (price maker) mais des preneurs de prix (price taker) car ils n'ont pas la possibilité et les moyens d'imposer des prix. Les états africains sont ainsi soumis aux aléas des prix des matières premières ou agricoles. Les pays africains sont confrontés à une forte concurrence internationale avec des états comme la Chine ou l'Inde ayant une main d' oeuvre à bon marché pouvant être bien formée tout en développant des technologies de plus en plus performantes. On peut s'interroger si il existe vraiment une émergence de l'Afrique sachant que l'Afrique a connu entre 2000 et 2014 une croissance importante liée à une conjoncture assez favorable ave cune hausse des cours des matières premières. 
  • Mais pour reprendre le titre d'un chapitre de l'Atlas de l'Afrique de Magrin Dubresson et Ninot, doit-on parler de permanence des économies primaires ou d'émergence? En effet, l'Afrique a connu et connaît encore une croissance importante pouvant être supérieure à 5% par an comme entre 2009 et 2013 pour des états comme l'Ethiopie, l'Angola, le Mozambique, la Mauritanie... Cette croissance est une nécessité dans un contexte de développement avec une pauvreté toujours très présente.. 
  • On estime qu'elle doit être supérieure à 3% en Afrique subsaharienne pour que le revenu par habitant puisse augmenter et 7% pour que la pauvreté baisse vraiment selon la Banque mondiale. Il faut signaler que la forte croissance constatée est à nuancer selon les états: certains états connaissent des phases de récession souvent liées à des conflits comme la Côte d'Ivoire dans les années 2000 ou la RDC. Mais cette croissance n'empêche pas un constat simple: les économies des états africains reposent avant tout sur les activités dites primaires qu'elles soient agricoles ou minérales soit 45% du PIB africain en 2013. pour plusieurs états la part des matières premières brutes dans le total de leurs exportations est supérieure à 75%: Angola, Zambie, Congo, Gabon, Nigeria, Algérie... En réalité, l'émergence est plus un objectif qu'une réalité: seuls des états comme l'afrique du Sud et peut-être le Maroc peuvent bénéficier de ce statut de pays émergent. Pour que l'émergence soit généralisée, il faudra diversifier les économies, procéder à une montée en gamme comme l'ont fait les états asiatiques...

4/ Géographie de la richesse et émergence


A/ Des Afriques économiques pour des trajectoires 

 Les Etats africains ne connaissent pas tous les mêmes trajectoires économiques avec des pays économiquement dynamiques alors que d’autres ont des difficultés importantes. 

-des pôles de développement et de richesse 

  •  Comme nous l’avons signalé plusieurs Etats africains ont une croissance annuelle forte comme l’Ethiopie, le Rwanda, la Côte d’Ivoire ou encore le Sénégal. Mais tous les Etats africains n’ont pas ce type de croissance. Les Lions africains symbolisent les pôles de développement du continent. 

 -mais des pôles en retard voire en grandes difficultés

  •  Il existe des pôles en retard de développement notamment les Pays les moins avancés.Sur les 47 pays identifiés comme PMA, la majorité sont africains : Bénin, Burkina-Faso,Burundi,Guinée, Liberia, Mali, Niger, Tchad, Soudan, Soudan du Sud...Rappelons que des pays africains ont quitté les PMA comme le Botswana en 1994 ou le Cap vert en 1997. 
  • Le FMI a identifié les 25 pays les plus pauvres de la planète : 21 sont Africains (les 4 autres sont l’Afghanistan, le Tadjikistan, Haïti et le Yémen). Le PIB par habitant en $ est de 236 $ au Soudan du sud, de 310$ au Burundi, de 367 $ au Malawi, de 441 $ en République centrafricaine... 

 B/ Les « géants africains » et les autres économies 

 -Les géants africains

  • On peut considérer que 10 pays africains en Afrique (y compris avec l’ Afrique du Nord) s’imposent par la taille de leur PIB : Nigeria, Afrique du Sud, Egypte, Algérie, Maroc, Angola, Ethiopie, Kenya, Ghana et Tanzanie. Ces 10 pays concentrent environ 70 % de la richesse du continent et peuvent être considérés comme les Etats économiquement moteurs du continent. 

 -Les « petites économies » 

  •  Inversement, le continent africain c’est de nombreuses « petites économies » : 23 pays ont un PIB cumulé de 79,2 milliards de $ seulement. Les 20 plus petites économies africaines ont un PIB correspondant à celui du Maroc. Parmi ces petites économies, le Lesotho avec un PIB de 2,7 milliards de $, le Malawi avec 7,5 milliards de $, la Gambie avec 1,8 milliard de $, le Liberia avec 3,2 milliards de $... 

 C/ Un continent émergent ? 

  •  La question de l’émergence est devenue importante pour les Etats africains avec de nombreux Etats ayant lancé un plan pour l’émergence. Ainsi, 27 Etats ont lancé ce type de plan : le Togo et le Tchad se sont fixés 2030 comme horizon de l’émergence, le Sénégal 2035. Il existe également un Observatoire pour l’émergence en Afrique qui a d’ailleurs créé un indice de l’émergence pour l’Afrique avec 23 critères regroupés en dimensions politique, économique, sociale et développement humain.La dimension politique couvre six sujets qui sont : la stabilité démocratique, le leadership ; l'intégrité de l'administration, la corruption, la gestion publique et l'appareil de sécurité. 
  • La dimension économique regroupe aussi 6 composantes : la croissance du PIB, les infrastructures, le climat des affaires, le secteur rural, la diversification de l'économie et le degré d'intégration régionale. La dimension développement humain repose sur 6 composantes : : l'indice d'éducation, la capacité du pays à retenir les personnes qualifiées, le ratio emploi- population, le taux de participation des femmes à la population active et le taux d'alphabétisation. 
  • La dimension sociale couvre six composantes qui sont : les dépenses dans le domaine de la santé en pourcentage du PIB, l'espérance de vie à la naissance, l'accès à l'eau potable, l'accès à l'électricité, la protection de l'environnement et l'inégalité de revenu. Les pays sont rangés sur une échelle de 0 à 100. En 2017, selon ce classement, 11 pays peuvent être qualifiés d’émergents : Maurice, l’Afrique du Sud, Les Seychelles, le Botswana, Le Cap-Vert, Le Rwanda, la Tunisie, Le Maroc, La Namibie et Sao Tomé- et Principe. Bien entendu, d’autres organismes proposent d’autres classements mais celui-ci a comme intérêt d’être un classement pensé par un organisme africain. 

 -Les signes de l’émergence

  • Il faut rappeler quelques éléments sur la notion d’émergence, un terne qui vient du monde financier au début des années 1980 (par l’économiste hollandais Antoine Van Agtmael) pour désigner des pays ayant une croissance forte dans lesquels il serait intéressant d’investir. Ce mot est aujourd’hui utilisé pour désigner des économies et qui s’insèrent de plus en plus dans le processus de mondialisation. Les Etats dit émergents ont en principe des points communs comme une transition démographique achevée, une classe moyenne qui se forme et se développe, une réelle stabilité politique et institutionnelle, une diversification des économies (avec tertiarisation et industrialisation)... Pour être encore plus précis, les économistes estiment que l’émergence est liée à une croissance forte d’au moins 5 % par an, un endettement plutôt faible... L’un des problèmes est que certaines institutions et certains organismes (Banque mondiale, FMI, une banque comme Goldman Sachs, le Boston Consulting Group) ont proposé et propose des listes de pays émergents avec des acronymes montrant la complexité de dire qui est réellement émergent ou non (BRICS, BENIVM,CIVETS...). 
  • Comme l’écrit Dalila Nicet-Chenaf (article Le monde des idées 2014), il faut s’interroger sur les pays émergents : « performance ou développement ? » L’émergence est-elle une étape sur la voie du développement ? Est-ce seulement une construction politique (pour attirer les investisseurs) ? La réalité est complexe car si les pays qualifiés d’émergents ont de bonnes performances économiques, le niveau de développement humain n’est pas nécessairement bon. Les performances économiques comme les taux de croissance ne sont pas suffisants. 
  • On peut aussi considérer l’émergence comme une stratégie avec des politiques de l’émergence. L’émergence est une notion plutôt vague artificielle qui s’applique aussi à l’Afrique. Dans l’Atlas de l’Afrique, un continent émergent ? Alain Dubresson, Olivier Ninot et Géraud Magrin se demandent si les économies africaines sont dans une « permanence des économies primaires ou une émergence ? » Thierry Vircoulon dans un article du Monde de 2018 s’interroge en se demandant si « l’émergence africaine existe vraiment ? ». La revue Afrique expansion se demande quant à elle « qui est réellement en voie d’émergence en Afrique ? » 
  • Pour répondre à la question de l’émergence, nous allons nous appuyer sur certains critères qui déterminent l’émergence : la croissance, l’essor d’un marché de consommation reposant sur une classe moyenne, des IDE signes de l’attractivité,l’accès aux NTIC et l’insertion dans la mondialisation. Au niveau des taux de croissance, en effet, plusieurs Etats africains ont des taux de croissance très élevés (les plus élevés au monde actuellement). Sur la période 2001-2010 sur les 10 pays ayant eu la plus forte croissance 6 étaient africains (Angola, Nigeria, Ethiopie, Tchad, Mozambique, Rwanda). Il y a bien en Afrique un marché de consommation mais la notion de classes moyennes reste vague. Marie de Vergès dans un article de l’Atlas des Afriques parle de « la timide apparition d’une classe moyenne ».
  • La Banque Africaine de Développement dans un rapport de 2011 évaluait à l’époque la classe moyenne africaine à 350 millions de personnes. En fait, tout dépend des critères retenus pour cerner ces classes moyennes : ils peuvent être plus ou moins larges. Ainsi, en 2013 si on prend le critère large d’une classe moyenne gagnant entre 4 et 20$ par jour, on obtenait une classe moyenne de 148 millions d’individus. Si on abaissait le critère de 2 à 20$, on obtenait 376 millions d’individus. Parallèlement, on sait que la part des pauvres est toujours très importante (moins de 1,9 $ par jour. 
  • Nous sommes toujours « à la recherche de la classe moyenne africaine » (Marie de Vergès : article 2018 du Monde). En 2015, si on prend comme référence plus de 10 à 20$ par jour, la classe moyenne de représente que 5 % des Africains sachant que 6 % des Africains ont un revenu supérieur à 20$ par jour. Pour les IDE, on a déjà vu une certaine attractivité du continent mais sans aucune mesure avec l’Asie par exemple. Quant à l’accès aux NTIC, même si on note des progrès, le continent africain est encore en retard. Il en est de même pour l’insertion dans la mondialisation. 

-Mais une réalité encore floue 

  • La réalité de l’émergence de l’Afrique est donc vague. Les pays africains restent le plus souvent rentier avec donc « la permanence des économies primaires. » Il n’y a pas de réelle émergence industrielle : « L’Afrique demeure un nain manufacturier » (Atlas de l’Afrique, un continent émergent,) avec des pays qui n’ont pas vraiment opéré un saut technologique. L’émergence de l’Afrique est plus « un slogan tout autant qu’un objectif. » (Atlas de l’Afrique, un continent émergent. Pour Thierry Vircoulon, l’émergence est « l’autre mot pour dire développement au siècle de la globalisation. » L’émergence africaine est davantage un rattrapage (en 2014, l’Afrique produisait autant d’électricité que la Corée du Sud!) avec des Etats et économies toujours dépendants. 
  • C’est un « continent loin d’être émergent » (revue Afrique expansion) avec, en plus des situations très contrastées entre les pays. 5 pays représentent 75 % de la richesse du continent : Afrique du Sud, Maroc, Algérie, Tunisie et Egypte. Il serait préférable d’utiliser le terme de décollage. Pour certains spécialistes de l’Afrique, le Maroc et l’Afrique du Sud sont les seuls pays à pouvoir être qualifiés d’émergents.
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